• il y a 11 mois
C’est en recomposant l’Histoire à coup de mensonges que la gauche a remporté sa plus décisive victoire intellectuelle, sur laquelle s'est imposée son hégémonie politique et morale. C’est particulièrement vrai de la Seconde guerre mondiale, qu’il s’agisse des fondements progressistes de l’antisémitisme nazi (et du nazisme lui-même, honteusement situé "à droite"), ou de la véritable histoire de l’Occupation et de Vichy, sur laquelle la doxa de gauche est une collection de mensonges - attribuant par exemple à Vichy l’initiative de l’arrestation de juifs ou l’étoile jaune, et autres fables lancées par le prétendu "historien" américain, Robert Paxton. Les historiens officiels, même quand ils savent la vérité, se taisent. Il fallut attendre un professeur des universités aguerri, spécialiste reconnu de l’histoire de la police française, Jean-Marc Berlière, pour prendre au sérieux son métier, plonger des années durant dans les archives de la période et, préférant le service de la vérité à celui de sa carrière, écrire un livre aussi charpenté que stupéfiant - au point que, bien qu’il soit d’une sensibilité de gauche, son livre est boycotté par la critique… et par la plupart des libraires. Il serait pourtant capital qu’un certain nombre de Français lisent le résultat de ses recherches -ou qu’ils écoutent pour commencer cette riche et surprenante conversation.
Transcription
00:00:00 [Musique]
00:00:24 Jean-Marc Berlière, je suis ravi de vous recevoir de nouveau dans l'antre, non pas du conservatisme,
00:00:34 j'aime pas ça, mais de la tradition conservatrice, vous qui fûtes, naguère, ou jadis,
00:00:42 parce que vous êtes né après la guerre, donc on a toute votre vie à voir,
00:00:47 mais vous avez été un peu un art de gauche, non ? C'est pas ce que vous nous racontiez ?
00:00:51 Avant de devenir agrégé d'histoire, grand professeur d'histoire à l'université de Dijon,
00:00:57 auteur de livres importants, notamment sur la police,
00:01:00 et un dernier dont nous allons beaucoup parler, histoire d'une falsification.
00:01:04 Je vous remercie encore d'avoir accordé un entretien fleuve aux nouveaux conservateurs,
00:01:10 parce que vous avez remis sur la question de Vichy, dans le discours officiel, les points sur les i.
00:01:17 Mais si j'ai bien compris, vous n'êtes plus du tout un manard de gauche, non ?
00:01:23 C'est-à-dire que la gauche et ce qu'elle devient, si vous voulez,
00:01:28 cette espèce d'obstination à ne pas voir la réalité de ce qu'elle a été,
00:01:33 de ce qu'elle pourrait être, de ce qu'elle fut, etc.
00:01:35 Et de ce qu'elle a fait.
00:01:37 M'a amené à prendre des distances, il est assez difficile quand même, aujourd'hui,
00:01:44 j'avais commencé très tôt, dès que je me suis intéressé au Parti communiste,
00:01:49 la légende du premier parti de France,
00:01:52 - On va en parler, ça vous a décié ?
00:01:56 - C'est-à-dire, non, en fait, ce qui m'a décidé, j'entre en histoire, comme d'autres religions,
00:02:01 par souci de la vérité. Je suis un obsédé de la vérité,
00:02:07 même si je suis bien conscient qu'on ne l'atteint jamais totalement.
00:02:11 - Avec un V majuscule, non, mais il y a des choses vraies.
00:02:13 - Mais voilà, il y a des faits qui sont incontournables,
00:02:18 et il est important de les connaître pour éviter de dire n'importe quoi.
00:02:22 Donc c'est comme ça, quant à mon anarchisme, si j'ose dire,
00:02:27 mieux le mot "libertaire", c'est cette énorme exigence de liberté d'abord,
00:02:32 bien sûr, de refus de l'autorité, la soumission à l'autorité,
00:02:37 puis l'exercice d'autorité. J'ai toujours essayé d'être, il faudrait demander à mes étudiants,
00:02:42 mais quelqu'un qui n'abusait jamais de son autorité, de son savoir ou autre,
00:02:47 qui était à l'écoute des autres et qui trouvait parfaitement tolérable
00:02:51 que les gens pensent autre chose. Et si vous voulez la découverte,
00:02:56 je suis adolescent, j'ai 14-15 ans, je ne sais plus,
00:02:59 de l'œuvre de Bakounine, qui a un gros avantage, c'est qu'il écrit en français.
00:03:05 - Olivier Bakounine à 14 ans ? - Ah oui, 14-15 ans.
00:03:09 - Bien. - C'est très facile à lire.
00:03:12 Et d'une transparence totale à l'égard de ce qu'il appelle les "marxiens",
00:03:18 et ce qu'on n'appelle pas encore la dictature du prolétariat,
00:03:22 mais dont on sent bien que Marx l'a mis, enfin, il existe en germe, etc.
00:03:29 C'est formidable parce que ça m'a complètement prévenu, si vous voulez,
00:03:34 contre le communisme autoritaire, qui n'était même pas stalinien, pas forcément.
00:03:41 Lénine, l'autoritarisme, le totalitarisme et tout.
00:03:46 Pour moi, l'anarchie, pour tout vous dire, c'est une morale, finalement.
00:03:52 - Et plus personnelle que sociale. - Ah, bien sûr.
00:03:57 Et puis, je suis un peu comme Brassens, vous savez,
00:04:02 dès que plus de 3, on est une bande de cons, c'est comme ça.
00:04:08 Et donc j'étais allé voir, j'avais 18 ans, je sais pas,
00:04:13 Maurice Joyeux, donc la Fédération anarchiste,
00:04:16 et le personnage était tout à fait intéressant, très drôle.
00:04:21 - Grande figure de l'anarchisme. - Et puis en plus, avec son zozotement et tout.
00:04:26 Je suis pas fait pour aller dans les groupes.
00:04:29 - Vous n'êtes pas resté ? - Ah non, je suis allé voir poliment,
00:04:34 leur dire que je partageais un certain nombre de leurs idées, mais c'est tout, bien sûr.
00:04:38 Et je n'ai pas franchement milité, parce que militantisme,
00:04:43 on se retrouve avec des gens dont on n'apprécie pas forcément ni des idées ni rien.
00:04:49 - Vous étiez fait pour être professeur, c'est-à-dire d'abord un homme libre
00:04:52 et attaché à un seul souci, celui de la vérité, ou des choses vraies, à tout le moins,
00:04:57 contre les mensonges, contre les erreurs, ce que vous avez passé votre vie à faire.
00:05:02 Vous vouliez être professeur déjà à 14 ans ? Non ?
00:05:05 Vous aviez choisi l'agrégation, qui est très difficile à faire, l'agrégation de l'histoire,
00:05:09 c'est pas facile. - Ah, c'est difficile, oui.
00:05:11 - On parle des énarques et tout ça, mais c'est 10 fois plus difficile
00:05:14 de réussir l'agrégation de l'histoire, il n'y a pas beaucoup de postes.
00:05:17 - Oui, et puis en plus, les épreuves, le programme, c'était 7 énormes questions, vous savez,
00:05:23 puis alors 3 dissertations à l'écrit, 4 grands oraux, c'est très difficile,
00:05:30 y compris du hors-programme. J'ai eu à disserter sur la guerre navale
00:05:34 entre la France et l'Angleterre, la dépendance des Etats-Unis,
00:05:38 je peux vous dire que je n'avais pas énormément de compétences.
00:05:41 Mais, non, au départ, je veux être journaliste, parce que je trouve
00:05:45 que c'est un métier formidable et que ce sont des gens qui permettent
00:05:50 à leur lecteur, à l'époque, je ne sais pas, de la radio, encore moins la télévision,
00:05:55 mais justement d'aborder à des rives intéressantes, de réfléchir et tout.
00:06:01 Je suis d'un milieu très modeste et quand j'ai passé le bac
00:06:08 et que je me renseigne sur les écoles de journalisme,
00:06:11 elles sont payantes, une est à Paris, l'autre à Lille,
00:06:15 il n'est pas question que... - Si vous étiez à Dijon,
00:06:17 votre famille vous guignonne, il faut le dire.
00:06:20 - Que mes parents, ma mère à 55 ans, aient fait des ménages
00:06:25 pour qu'on puisse vivre un peu et payer mes études.
00:06:28 Donc, je passe les concours, comme jadis, je pense,
00:06:33 j'aurais tenté l'école normale pour devenir instituteur.
00:06:37 L'histoire me fascine, je vais à l'université de Bourgogne
00:06:42 où j'ai la chance d'avoir... - Vous êtes né à Dijon ?
00:06:44 - Je suis né à Dijon. - Et vous vivez toujours à Dijon ?
00:06:46 - Juste à côté, oui, mais j'ai beaucoup voyagé,
00:06:48 l'éducation nationale m'a permis d'aller... - Professeur voyage.
00:06:53 - Je ne suis pas allé à Asbrooke quand même, mais...
00:06:57 "C'est connu les richesses profondes de la France",
00:07:00 comme m'a dit un inspecteur général, "ne vous plaignez pas".
00:07:03 Donc, j'ai eu la chance de tomber sur des enseignants formidables,
00:07:09 dont l'un était un élève direct de Marc Bloch,
00:07:13 "Bloch", comme on dit en français,
00:07:15 et qui avait un charisme extraordinaire, une culture...
00:07:20 On aurait voulu que jamais le cours ne s'arrête,
00:07:24 tellement c'était passionnant, c'était un médiéviste,
00:07:27 un spécialiste de l'Empire,
00:07:29 mais médiéviste au-delà, jusqu'à Charles Quint,
00:07:31 Charlemagne à Charles Quint, je veux dire.
00:07:33 Et finalement, mes études se passent en bien,
00:07:38 la logique c'est de se présenter au concours,
00:07:40 et puis j'ai le CAPES, puis l'agrégation,
00:07:43 et puis voilà, les choses se passent comme ça.
00:07:46 - Mais tu as été gros travailleur, non ?
00:07:49 - Oui, enfin sans effort, pour le dire clairement.
00:07:52 - Par l'air de la connaissance ? - Exactement.
00:07:55 Pour moi, ce n'est pas un travail,
00:07:57 je trouve que c'est un privilège de lire des livres,
00:08:00 de consulter des archives.
00:08:02 Donc, à partir du moment où je me suis lancé dans ma thèse,
00:08:06 je peux vous dire que je n'ai pas vu grandir ma fille,
00:08:09 j'étais sous les "sunlight", les néons des archives,
00:08:13 tous les étés, parce qu'on ne peut pas,
00:08:16 on ne peut pas travailler quand on est professeur de secondaire.
00:08:20 - Tu es passé des milliers d'heures dans les bibliothèques,
00:08:22 dans les archives ?
00:08:23 - Je ne sais pas, je n'ai jamais compté comme ça,
00:08:25 mais certainement énormément,
00:08:27 je passais mon mois de juillet, mon mois d'août,
00:08:29 et puis une petite partie du mois de septembre,
00:08:32 à la Bibliothèque Nationale, qui était encore,
00:08:35 - Rodrigue Chollieu, là, j'étais aux archives nationales,
00:08:38 qui étaient encore dans l'hôtel de Rorand.
00:08:42 Alors, ça sent la poussière, il y a des néons,
00:08:46 le personnel, il y a une blouse grise,
00:08:49 c'est sûr que peut-être des jeunes femmes sur une plage
00:08:53 auraient été plus attrayantes,
00:08:55 mais ça ne m'attirait pas du tout.
00:08:57 Je déteste l'odeur d'ombre solaire.
00:09:00 - Vous préférez la poussière des archives.
00:09:02 - Oui, mais ce qui est, je ne sens pas tellement la poussière.
00:09:05 - Et les livres, c'est ce qui nous vaut le plaisir
00:09:07 de vous avoir rencontré,
00:09:09 parce que vous faites ce que les historiens ne font pas toujours.
00:09:12 Et ça, c'est un des sujets que nous allons aborder.
00:09:15 Vous allez aux archives, et notamment,
00:09:18 j'ai parlé trop vite de ce livre qui m'a permis de vous rencontrer
00:09:22 il n'y a pas très longtemps, il y a un peu plus de six mois,
00:09:25 avec un ravissement et un bouleversement immenses,
00:09:30 dont j'ai rendu témoignage en introduction
00:09:33 de l'entretien que vous avez donné aux nouveaux conservateurs,
00:09:36 "Histoire d'une falsification, Vichy et Lachoie dans l'histoire officielle
00:09:40 et le discours commémoratif",
00:09:42 que vous avez écrit avec deux de vos complices, on peut dire,
00:09:45 Emmanuel de Chambost et René Fievé.
00:09:47 - Je me permets juste de préciser que ces complices,
00:09:50 parce que ça m'a été largement reproché,
00:09:53 ne sont pas des universitaires, ne sont pas des historiens,
00:09:57 parce que ma passion pour l'histoire, j'adore la partager,
00:10:01 je fais du prosélytisme en permanence, avec mes étudiants et tout,
00:10:05 et donc là, ce sont des gens qui sont passionnés par l'histoire,
00:10:10 qui sont jeunes retraités, qui ont donc du temps,
00:10:13 qui se sont plongés dans ces problèmes,
00:10:16 et qui le font avec une rigueur que j'aimerais bien voir partagée
00:10:20 par de jeunes historiens.
00:10:22 - Emmanuel de Chambost, il y a trois parties dans le livre,
00:10:26 il y a d'abord la première, puis chacun réécrit un peu celle de l'autre.
00:10:30 - Oui, on a travaillé, oui.
00:10:32 - Vous posez, vous, dans une première partie,
00:10:35 la question centrale, Vichy et les Juifs, d'une certaine façon,
00:10:41 qu'a-t-on dit, qu'a-t-on trouvé, qu'a-t-on inventé, surtout,
00:10:47 ce que votre travail d'archiviste ou d'archive a permis de détruire,
00:10:51 on va voir la portée de cette destruction immense,
00:10:54 ce livre a une portée immense.
00:10:56 Emmanuel de Chambost étudie la réception, on peut dire,
00:11:01 l'écho qu'ont les ouvrages parmi les universitaires
00:11:06 d'un homme que vous pourfondez, Paxton, Robert Paxton,
00:11:11 qui a écrit, vous êtes très sévère sur Paxton.
00:11:14 - Je suis encore plus sévère pour ses disciples ou ses suivistes,
00:11:19 qui d'ailleurs, maintenant, s'en séparent, parce qu'ils ont bien conscience...
00:11:22 - Pas Bernard-Henri Lévy, qui a beaucoup conclu Paxton.
00:11:25 - Ah, ben non, pour lui, enfin, excusez-moi, parlons franchement,
00:11:29 Bernard-Henri Lévy, je ne lui consacre pas une demi-ligne,
00:11:33 pour moi, ce n'est pas un historien.
00:11:35 Non, je pensais à des gens comme Klarsfeld, ou à Laurent Joly,
00:11:39 ou des gens qui sont dans une doxa...
00:11:43 - Quand on a l'impression que vise en Vichy,
00:11:47 elle vise la France, en réalité, et les Français sous l'occupation.
00:11:50 - Ah, il y a une véritable volonté d'autoflagellation,
00:11:55 de... enfin, le départ de ce livre, il est tout simple, tout bête.
00:12:02 - A qui compte le départ du livre ?
00:12:04 - Je sentais, je pressentais...
00:12:07 Je suis un auditeur de France Culture, de France Inter,
00:12:11 et puis, je lis assez peu de journaux, parce que je n'ai pas le temps,
00:12:15 mais volontiers, et je sentais une espèce de mise en place,
00:12:19 comme ça, on déshabillait les Allemands, si j'ose dire,
00:12:24 pour habiller les Français, les autorités, l'État français, etc.
00:12:27 - On ne décupabilisait pas les Allemands, enfin.
00:12:29 - Ah ben, complètement.
00:12:30 - C'est pas qu'on les déshabille, on n'était pas induits.
00:12:32 - Toutes leurs responsabilités, et quand la goutte d'eau...
00:12:36 Alors, j'ai envoyé deux textes à deux sites, deux blogs,
00:12:40 je ne sais plus comment on les appelle,
00:12:42 l'un qui s'appelle "Fonds Populaires", de Michel Onfray,
00:12:46 et l'autre qui s'appelle "Causeurs", c'est ça, d'Elisabeth Lévy.
00:12:51 Bon, ils étaient très enthousiastes,
00:12:53 ils ont dit "mais on est tombés du camion quand on a lu
00:12:56 ce que vous avez écrit, et qu'on a lu les documents que vous citiez".
00:13:00 Et puis, le discours de Pithiviers,
00:13:03 et là j'entends un président qui se targue quand même
00:13:06 de ses études et de sa proximité pendant un certain temps...
00:13:09 - Alors Pithiviers, c'est Emmanuel Macron,
00:13:11 lors de la commémoration du Veldiv, à Pithiviers en 21, je crois.
00:13:15 - Non, non, non, non, non, non, en 22, en juillet...
00:13:19 - En juillet 1922.
00:13:21 - En 2022, pour les 80 ans de cet événement terrible
00:13:27 qu'on appelle la rafle du Veldiv, qui n'est ni une rafle
00:13:31 et qui n'a pas grand chose à voir avec le Veldiv,
00:13:33 mais ça on y reviendra éventuellement.
00:13:35 - Mais tout est mensonge en ce cas-là.
00:13:37 - J'entends un président de la République chargé,
00:13:41 il l'avait déjà fait dans d'autres domaines,
00:13:44 M. Chirac et M. Hollande avaient ajouté à cet haut,
00:13:49 qu'en réalité, la solution finale de la question juive,
00:13:53 comme aimait l'euphémiser les SS, les nazis,
00:13:57 c'était finalement quelque chose de très français.
00:14:01 Les français avaient finalement imaginé le génocide,
00:14:08 avaient déporté les Allemands, c'est tout juste si on ne nous disait pas...
00:14:11 - Enfin déporté les Allemands.
00:14:12 - Déporté les Juifs, excusez-moi,
00:14:14 - Et inspiré les Allemands.
00:14:16 - Inspiré les Allemands.
00:14:17 - C'est incroyable.
00:14:18 - Je me suis dit, ce n'est pas possible, où va-t-on ?
00:14:21 Moi je suis d'une génération pour tout vous dire,
00:14:24 c'était l'inverse, je grandis dans un monde
00:14:29 où il n'y a pas de français collaborateurs,
00:14:32 je passe devant des écoles où il est écrit "passant, recueille-toi",
00:14:37 ici 59 enfants juifs ont été arrêtés, déportés par la Gestapo,
00:14:43 qui bien sûr n'avait rien à voir dans toute cette affaire.
00:14:46 Les Allemands étaient responsables de tout, ce qui est assez vrai.
00:14:52 Et puis avec le changement, avec notamment notre ami Paxton dont vous parlez,
00:14:59 on assiste à un renversement des choses.
00:15:02 Les Allemands, finalement, non c'est la France qui est coupable,
00:15:07 ce sont les français qui sont coupables, comme le dira Jacques Chirac dans ce fameux discours.
00:15:13 - Vous en avez parlé aussi.
00:15:15 - Et là quelque chose, je me dis c'est pas possible.
00:15:22 Alors j'attends avec beaucoup de confiance de quelques-uns de mes collègues
00:15:26 beaucoup plus prestigieux que le professeur retraité de l'université de Bourgogne que je suis,
00:15:31 qu'ils prennent la plume, qu'ils disent non, il faut quand même arrêter ça.
00:15:36 Et rien, un silence total de la part de gens qui je pense sont très mal à l'aise
00:15:42 parce qu'ils savent très bien que tout ça est faux.
00:15:46 Et ceux qui voient tout l'avantage qu'ils ont à gagner en gratification symbolique, médiatique,
00:15:55 voire pécuniaire, d'abonder dans ce sens.
00:15:59 Et donc de même qu'on a appris, voire Mme Taubira, que la traite des Noirs,
00:16:05 seulement la traite atlantique était un crime contre l'humanité,
00:16:08 pas un mot de la traite arabo-musulmane.
00:16:12 Beaucoup plus importante, beaucoup plus longue.
00:16:14 En peu près un tiers, mais beaucoup plus longue.
00:16:16 Pas un mot de la traite intra-africaine.
00:16:20 C'est insupportable, c'est vérité officielle, cette manière.
00:16:24 C'est mensonge officiel.
00:16:25 Oui, et puis des Français qui se présentent comme la vérité,
00:16:29 et des Français qui gobent tout ça parce qu'ils n'ont pas les moyens.
00:16:33 Et qui se laissent culpabiliser.
00:16:35 Absolument, et qui quand moi j'écris des livres, comme j'en ai écrit un avec Franck Légras,
00:16:41 à propos de Guy Moquet, on avait entendu n'importe quoi déjà.
00:16:46 C'est Nicolas Sarkozy.
00:16:48 Oui, Marie-George Buffet était très bien.
00:16:52 Je me fais insulter par des gens qui ne connaissent rien,
00:16:57 n'ont pas de compétences sur des sujets où j'ai passé 10 ans, 15 ans de réflexion,
00:17:02 et de découverte.
00:17:04 Je sais bien que l'archive ne dit pas tout, et surtout pas la vérité.
00:17:09 Mais quand on en croise des milliers,
00:17:13 et qu'on découvre des documents essentiels dont on ne nous dit pas un mot,
00:17:17 Vichy s'est opposé.
00:17:19 Je déteste cette expression Vichy, parce que c'est une nébuleuse de choses très différentes.
00:17:23 Il y a plusieurs Vichy.
00:17:26 A vous dire, c'est effrayant.
00:17:28 Il y a beaucoup de résistants à Vichy.
00:17:30 Il y a des résistants à Vichy, bien sûr.
00:17:32 On ne sait pas quel Vichy a subventionné les premiers réseaux de résistance.
00:17:37 C'est extraordinaire.
00:17:39 Les premiers résistants, si j'ose dire, qui gagnent l'ombre,
00:17:44 sont pour l'essentiel des gens d'extrême droite, des cagoulards.
00:17:47 Non, non, non, ils ne sont pas d'extrême droite, ils sont monarchistes.
00:17:50 Ça c'est l'anarchie qui parle.
00:17:52 Les monarchistes ne sont pas d'extrême droite, Jean-Marc Berger.
00:17:55 Si vous voulez, passons.
00:17:57 Mais ce sont quand même des cagoulards, des gens comme ça.
00:18:00 Et là maintenant, il y a des bons à gauche apparemment, et puis des mauvais.
00:18:07 Et puis au milieu, tout un tas de gens, soit ça ne les intéresse pas,
00:18:11 soit ils sont quand même très influencés par ce discours, ce flot de propos continuels.
00:18:16 Alors, moi j'entends à cette époque, l'étoile jaune c'est Vichy qui l'a imposé.
00:18:22 Je vois ça dans des livres destinés aux enfants.
00:18:24 Des journaux !
00:18:26 Et puis, la nouvelle, puisqu'il va être panthéonisé,
00:18:30 c'est que Manoukian et donc l'affiche rouge qui est affichée un peu partout en France,
00:18:37 c'est Vichy, alors que ce sont les Allemands.
00:18:40 Il faut rendre aux Allemands ce qui leur appartient.
00:18:43 Par exemple, vous avez dit plusieurs choses sur lesquelles je voudrais que nous revenions.
00:18:46 Guy Moquet a été illustré sous l'inspiration délétère
00:18:52 de quelqu'un qui ne connaît rien à l'histoire, c'est Henri Guénaud,
00:18:56 pour en faire le parangon de la résistance, d'un jeune résistant.
00:19:01 C'est un discours fameux de Sarkozy là-dessus.
00:19:05 Mais Guy Moquet n'était pas du tout résistant, il était communiste.
00:19:09 Guy Moquet, il est le fils de son père, Prospère,
00:19:12 qui a été invalidé, arrêté et qui est déporté en Algérie.
00:19:19 Guy Moquet est arrêté...
00:19:22 - Le père de Guy Moquet a été déporté, pour quelle raison ?
00:19:25 - Il faut dire précisément pourquoi.
00:19:27 - Parce que les communistes avaient... Bien sûr, allons-y.
00:19:31 Parce que les communistes ont suivi les ordres que leur envoyait Moscou.
00:19:38 Alors qu'ils étaient jusqu'alors les champions de l'antifascisme,
00:19:42 brutalement, ils rejettent les deux camps à responsabilité égale.
00:19:48 - C'est-à-dire la France et l'Allemagne ?
00:19:51 - Oui, l'Angleterre d'un côté et l'Allemagne.
00:19:55 Et à partir de ce moment-là, j'étais le premier à en parler.
00:20:00 Ça m'a valu... Vous ne pouvez pas imaginer.
00:20:02 - Et à partir de ce moment-là, ils suivent la collaboration germano-russe.
00:20:07 - C'est très simple, si vous voulez, ce qui se passe.
00:20:12 C'est que lié par l'autorité de Moscou, j'allais dire,
00:20:18 leur obéissance à Moscou, dont on comprend bien les avantages et les intérêts,
00:20:23 que les Allemands, les Français, les Anglais s'étrippent, s'égorgent...
00:20:27 - Et en attendent.
00:20:29 - Et ça ouvrira le champ libre à l'armée rouge.
00:20:32 Ça ne s'est pas passé comme ça, parce que la défaite de la France
00:20:35 a été tellement rapide qu'évidemment, même Staline,
00:20:38 en dépit des compliments qu'a reçus Molotov de la part des nazis,
00:20:44 bon, ça ne s'est pas passé comme il l'espérait.
00:20:47 Mais revenons à cette affaire.
00:20:49 - À Moquet.
00:20:50 - Et puis avant Moquet, donc le père, et ce groupe communiste,
00:20:54 qui est quand même important, parce que grâce au Fonds Populaire,
00:20:57 les communistes antifascistes ont été rejoints,
00:21:02 ou ont rejoint un rassemblement de gens honnêtes,
00:21:06 des gens qui étaient très conscients des problèmes et de la menace nazi.
00:21:11 Et finalement, certains vont aller très loin,
00:21:16 parce que je disais, je ne suis le seul, je ne crois pas,
00:21:19 à l'avoir lu beaucoup, grâce aux archives...
00:21:22 - Toujours les archives.
00:21:24 - Les sabotages dans les usines d'armement,
00:21:27 les sabotages chez Renault, des chars B1, B2...
00:21:32 Tout ça, c'est le défaitisme révolutionnaire,
00:21:36 cher à nos amis communistes.
00:21:39 Et donc, on sabote les forts de guerre.
00:21:42 Combien de soldats français ont été tués en mai-juin 1940,
00:21:45 parce que leur canon de 25 mm anti-char explosait, le tube explosait.
00:21:51 - Sabotés dans les usines d'armement par la TVT.
00:21:53 - Sabotés dans les usines à Bourges, oui, par des communistes.
00:21:56 Les avions, les moteurs d'avions Fahrmann, dont on desserrait, vous savez,
00:22:00 le frein, comme on l'appelle, d'un boulon, d'un réservoir d'essence,
00:22:05 l'essence coulait sur le pot d'échappement brûlant...
00:22:09 - Et elle explose.
00:22:12 - Alors, ça, pas un mot, pas un mot.
00:22:15 Et quand j'ai écrit ça, alors c'est très curieux,
00:22:17 il y a un historien américain qui m'a dit,
00:22:19 mais non, vous exagérez, etc.
00:22:22 - Américain.
00:22:23 - Moi, écoutez, j'ai lu les enquêtes,
00:22:25 qui sont menées notamment par un grand criminaliste de l'époque,
00:22:28 qui s'appelait Edmond Lockhart, et qui montre très bien, par exemple,
00:22:31 que ces fameux tubes, les canons anti-chars de 25 mm,
00:22:35 qui traversaient de part en part les Panzers,
00:22:37 qui étaient de la taule, il faut quand même bien le dire,
00:22:40 étaient sabotés par un mélange d'acide,
00:22:43 et qui était toujours au même endroit dans les tubes.
00:22:47 En fait, il reconstitue, c'est-à-dire que le saboteur,
00:22:50 ou les saboteurs... - Communistes, c'est ça ?
00:22:52 - Communistes, bien sûr, mettent de l'étoupe,
00:22:56 qu'ils trempent dans ce liquide corrosif,
00:22:59 et le font pénétrer dans le canon,
00:23:01 et c'est pour ça qu'au même endroit, les canons explosent.
00:23:05 Bref, on peut multiplier les exemples,
00:23:08 les épiscopes de chars qui étaient sabotés
00:23:11 quand les tankistes français reçoivent des chars,
00:23:15 il n'y a plus d'épiscopes.
00:23:17 Les avions Curtiz dans les tableaux de bord
00:23:19 qu'on avait achetés aux États-Unis ont été martelés, etc.
00:23:23 C'est ce qu'on appelle le défaitisme révolutionnaire.
00:23:27 - Comment a-t-on pu passer sur l'ampleur des dégâts,
00:23:31 des destructions de la CGT et des communistes,
00:23:35 dans les industries d'armement français,
00:23:37 à partir du pacte Staline-Ribbentrop ?
00:23:40 C'est-à-dire quand même de l'été 1939.
00:23:43 - C'est un sujet scandaleux, vous compreniez.
00:23:47 - Il est énorme.
00:23:48 Surtout quand, à partir de la libération,
00:23:53 mais même avant, le Parti communiste se présente
00:23:56 comme le premier parti résistant, le plus important,
00:23:59 le parti aux 125 000 fusillés, non 75 000, non 50 000, non 25 000.
00:24:03 Il y en a eu, ils ne sont pas tous communistes,
00:24:06 un peu plus de 4 000.
00:24:08 C'est hyperbole, cette manière.
00:24:10 - De 125 000 à 4 000, il y a une marge.
00:24:12 - Et puis surtout, ils entrent tardivement.
00:24:16 J'ai découvert, vous savez, l'habitude des archives,
00:24:20 et des archives de police.
00:24:22 Je savais que, bien évidemment, les communistes,
00:24:27 Thorez est à Moscou, Duclos est dans la clandestinité,
00:24:32 Frachon, tout ça, ils sont entre Bruxelles et Paris,
00:24:36 ont essayé de faire reparaître l'humanité.
00:24:40 Cette négociation dont on parlait,
00:24:42 mais qui était un sujet complètement tabou,
00:24:45 en juin 1940, Maurice Tréant, pour le citer,
00:24:51 c'est celui que tout le monde appelle "le gros",
00:24:53 c'est son surnom, son pseudo.
00:24:55 - Un chef communiste ?
00:24:57 - C'est le chef des cadres.
00:24:59 Les cadres, c'est la police du parti.
00:25:02 J'ai rencontré pas mal d'anciennes communistes,
00:25:05 ou encore communistes, qui me disaient,
00:25:07 on l'appelait entre nous la "GPU", on en avait peur.
00:25:10 Tréant envoie sa secrétaire, avec des notes,
00:25:17 elle deviendra sénatrice à la Libération,
00:25:20 elle est secrétaire, donc elle écrit en steno et tout,
00:25:23 les arguments qu'il va falloir défendre
00:25:26 auprès de la Propaganda Staffel,
00:25:28 début juillet 1940, pour faire reparaître l'humanité.
00:25:33 - Protégée par l'Allemagne.
00:25:34 - Comme je sais que Maurice Tréant a été arrêté
00:25:38 par la police française, au mois de juin,
00:25:41 très proche de l'imprimerie qui imprimait l'humanité,
00:25:44 je me suis dit, il va y avoir quelque part
00:25:48 des traces de cette arrestation,
00:25:50 un procès verbal, des interrogatoires et tout.
00:25:53 Je ne trouvais pas grand-chose, ou même rien,
00:25:56 et personne n'avait jamais écrit là-dessus.
00:25:59 Et puis, bingo, l'habitude devient très familier
00:26:03 des pratiques policières.
00:26:05 Je me dis, ça va être aux archives de Paris,
00:26:09 ce qu'on appelle boulevard Cerrerie,
00:26:11 les années 75, entre nous.
00:26:13 - Aussi de la police ?
00:26:14 - Non, non, pas du tout de la police,
00:26:15 non, non, les archives de la ville,
00:26:17 enfin du département, puisque la ville et le département
00:26:19 se confondent, et qui a conservé les archives judiciaires.
00:26:23 Et donc, bingo, je trouve dans les inventaires
00:26:28 les traces de l'arrestation de Maurice Tréant,
00:26:32 que les Allemands feront libérer,
00:26:34 comme des centaines d'autres militants communistes.
00:26:37 Ils arrivent dans les prisons, les Allemands,
00:26:40 ils recherchent les militants communistes,
00:26:41 et ils les libèrent.
00:26:42 Donc, plusieurs centaines.
00:26:44 Et donc, Maurice Tréant, l'archiviste de l'époque,
00:26:49 la directrice des archives, n'est pas très favorable,
00:26:53 je la sens très réticente,
00:26:55 alors qu'elle a proposé cette archive à des collègues.
00:26:59 C'est curieux, mais c'est comme ça,
00:27:01 parce que finalement, il y a des gens
00:27:02 qui ont des entrées, d'autres pas.
00:27:03 Bref.
00:27:04 Et je me trouve devant un petit carnet, vous savez,
00:27:07 qui était en papier tout fin, Bible,
00:27:10 avec la tranche dorée, si vous voyez ce que je veux dire.
00:27:13 C'était des petits agendas, avec les dates.
00:27:16 Et donc, sur ce...
00:27:17 Vous le voyez encore ?
00:27:18 On le voit encore ?
00:27:19 Sur ce carnet, donc, qui est fermé par des scellés,
00:27:22 c'est cousu.
00:27:23 J'ai un mal fou, vous savez,
00:27:25 pour ne pas déchirer les scellés,
00:27:26 ne pas abîmer et tout,
00:27:28 à essayer de lire.
00:27:29 Et c'est écrit en steno.
00:27:31 Parce que sa secrétaire a pris des notes en steno.
00:27:35 Alors, je recopie de façon le plus méticuleuse possible.
00:27:42 Je propose ça à une amie qui a fait de la sténographie.
00:27:45 Qui traduit ?
00:27:46 Et qui me traduit.
00:27:47 Et c'est extraordinaire.
00:27:49 Ce sont les arguments que Tréon demande
00:27:52 aux négociateurs communistes
00:27:56 de présenter aux Allemands.
00:27:58 Et il y a là-dedans des phrases terribles.
00:28:00 Par exemple,
00:28:02 "Si vous êtes ici,
00:28:04 si vous occupez Paris,
00:28:05 et si vous avez gagné la guerre,
00:28:06 c'est un peu grâce à nous."
00:28:08 Communistes ?
00:28:09 Il ne précise pas,
00:28:10 mais tout le monde le comprend.
00:28:12 La vraie collaboration, elle est là.
00:28:14 "Avons eu poteau d'exécution."
00:28:16 Il ne dit pas qu'effectivement,
00:28:18 il y a des communistes
00:28:20 qui ont été condamnés à mort
00:28:22 par des tribunaux militaires
00:28:24 et qui ont été fusillés les derniers
00:28:26 à Souges, à côté de Bordeaux,
00:28:28 alors que les Allemands arrivaient
00:28:31 dans les heures qui suivaient.
00:28:33 Ils sont arrivés trop tard
00:28:35 pour sauver ses alliés.
00:28:37 L'État, qui était un peu déglingué,
00:28:39 quand même avait pourchassé les communistes.
00:28:41 Les députés communistes étaient en prison.
00:28:44 Absolument, avaient été invalidés.
00:28:46 Et le ministre de l'Intérieur
00:28:48 qui a mené le plus gros combat
00:28:50 contre ces communistes
00:28:51 et qui va le payer très cher,
00:28:53 c'est Mandel, Georges Mandel,
00:28:55 qui est complètement...
00:28:58 Il a de quoi nourrir
00:29:00 ses préjugés contre les communistes.
00:29:02 Donc, voilà l'histoire.
00:29:05 Les Allemands n'ont pas donné suite.
00:29:08 Je regrette toujours,
00:29:10 je me dis quand même,
00:29:11 le ricanement de l'histoire,
00:29:12 vous imaginez,
00:29:13 si l'humanité était reparue,
00:29:15 elle aurait été interdite à la libération
00:29:17 en fonction des lois
00:29:19 qui ont été prises à l'époque.
00:29:21 Claude Penthier qui a écrit quelque chose
00:29:23 qui s'appelle "La négociation"
00:29:25 où il reprend tout ça et tout.
00:29:27 Et donc, le jeune Guy Moquet,
00:29:30 - revenons à Guy Moquet -
00:29:32 communiste,
00:29:33 donc membre des jeunesses communistes,
00:29:35 distribue le journal clandestin
00:29:39 comme l'est l'humanité.
00:29:41 Tiens, juste en passant,
00:29:43 le premier numéro d'Humanité clandestine
00:29:46 quand les Allemands viennent de gagner la guerre
00:29:49 et viennent d'envahir la France
00:29:51 et notamment Paris.
00:29:52 Et le titre est prolétaire
00:29:54 de tous les pays, unissez-vous,
00:29:56 en français et en allemand
00:29:58 et appelle les communistes français
00:30:02 à reconnaître sous l'uniforme allemand
00:30:04 les camarades socialistes allemands.
00:30:07 Il y a Jean-Paul Sartre qui a eu la même phrase
00:30:09 à plusieurs reprises.
00:30:11 Vous imaginez ?
00:30:12 Derrière l'uniforme allemand,
00:30:14 il y a quelquefois un ouvrier allemand,
00:30:16 il faut être solidaire de lui.
00:30:18 Jean-Paul Sartre.
00:30:19 Oui, mais non, on n'en finira pas.
00:30:22 L'émission va durer deux semaines.
00:30:24 Prenons le temps.
00:30:26 C'est extrêmement important.
00:30:28 Je reviens à Guy Mauquet.
00:30:30 Il distribue donc,
00:30:32 parce que le Parti communiste
00:30:34 est donc sorti de la clandestinité
00:30:36 en plein jour,
00:30:37 se croyant quelque part protégé
00:30:39 par les Allemands.
00:30:40 C'est d'ailleurs ce que pense
00:30:42 le préfet de police qui s'appelle Langeron,
00:30:44 Roger Langeron.
00:30:45 Et il demande à l'état-major allemand
00:30:47 "Mais est-ce qu'il y a une clause secrète
00:30:50 dans le pacte germano-soviétique
00:30:52 qui protège les communistes français ?"
00:30:55 Parce qu'ils ont fait des meetings
00:30:57 devant leur mairie
00:30:58 pour retrouver leur mairie, etc.
00:31:00 Ils sont sortis en plein jour,
00:31:02 ce qui est d'une imprudence folle, évidemment,
00:31:04 parce que les Allemands disent
00:31:05 "Non, non, il n'y a pas question, il n'y a rien."
00:31:07 Et à ce moment-là,
00:31:08 les autorités de Vichy reprennent
00:31:10 le décret-loi d'Aladier,
00:31:12 c'est-à-dire les communistes sont en la loi,
00:31:14 et ils sont arrêtés massivement
00:31:16 internés, ce qu'ont réussi
00:31:18 qui utilisent les lois de la 3ème République.
00:31:22 Utilisant les lois de la 3ème République,
00:31:23 il faut bien que nos auditeurs comprennent,
00:31:25 Vichy poursuit les communistes
00:31:27 en ce qu'il collabore avec les Allemands.
00:31:29 C'est ça qui est intéressant.
00:31:31 Oui, quelque part, bien sûr.
00:31:33 Ce qui renverse notre conception simple des choses.
00:31:37 Et donc, dans ce numéro de l'avant-garde
00:31:39 que distribue le jeune Moké,
00:31:41 qui est arrêté par des policiers français,
00:31:43 donc, à la gare du Nord,
00:31:45 parce que c'est contre le décret-loi d'Aladier,
00:31:48 on l'utilise tellement d'ailleurs
00:31:50 qu'à la fin, on n'écrit plus le décret-loi,
00:31:52 on a un tampon, DL 23 septembre 1939.
00:31:58 Et donc, il est arrêté,
00:32:00 et dans ce numéro, c'est complètement terrassant.
00:32:04 On vilipendie De Gaulle, le général micro,
00:32:10 Valais de la City,
00:32:12 on vilipendie la judéo-ploutocratie britannique,
00:32:18 parce qu'il est là aussi l'antisémitisme réel,
00:32:21 communiste, etc.
00:32:23 Et donc, quand...
00:32:26 Alors, Guy Moké va passer dans plusieurs centrales,
00:32:29 à Clairvaux, à Poissy, etc.
00:32:31 Et finalement, est interné dans le camp de Châteaubriand,
00:32:35 pas très loin de Nantes,
00:32:37 qui n'est pas un bagne allemand.
00:32:39 Jamais les gens ont été tendus en sabot,
00:32:41 en costume rayé,
00:32:43 et astreints du travail.
00:32:45 Ça n'a rien à voir,
00:32:47 mais on en fait un banne-nazi,
00:32:49 dans l'idéologie et dans les images d'Épinard.
00:32:52 C'est pour charger Vichy, d'ailleurs.
00:32:54 Bien sûr, et puis,
00:32:56 il y a des attentats,
00:32:58 parce que le Parti communiste,
00:33:00 à partir de l'invasion de l'URSS,
00:33:02 de Blanc-Barbarossa,
00:33:04 en juin 1941,
00:33:06 entre dans la lutte armée,
00:33:09 parce qu'ils reçoivent des télégrammes
00:33:11 combinatoires de Moscou,
00:33:13 et du clôt qui dirige le Parti communiste clandestin,
00:33:16 n'arrête pas de dire
00:33:18 "on a caillassé les chars allemands",
00:33:20 "les gens ont chanté la Marseillaise",
00:33:22 tout ça, c'est du pipo, bien sûr,
00:33:24 mais ce qui est réel,
00:33:26 c'est qu'un certain nombre d'attentats ont lieu.
00:33:29 Et le premier qui est réussi,
00:33:31 c'est celui qui est mené par celui
00:33:33 qu'on appellera le colonel Fabien,
00:33:35 par la suite, Pierre-Georges,
00:33:37 qui a été tué.
00:33:39 Un employé de banque de Stuttgart,
00:33:41 qui portait...
00:33:43 c'est un marin,
00:33:45 et donc il a un uniforme,
00:33:47 il a cru qu'il a tué un maréchal,
00:33:49 dans le métro,
00:33:51 et à partir de là,
00:33:53 il va y avoir un certain nombre d'attentats.
00:33:55 Et comme ces attentats, pour la plupart, échouent,
00:33:57 on essaye de monter des attentats
00:33:59 qui fonctionnent un peu mieux,
00:34:01 et l'un de ces attentats,
00:34:03 on a décidé d'envoyer ce qu'on a appelé
00:34:05 le "feldkommandant" en province,
00:34:07 c'est-à-dire d'essayer de multiplier
00:34:09 la lutte armée et les attentats en province.
00:34:11 Et deux jeunes communistes,
00:34:13 Gilbert Brusselin
00:34:15 et Spartacus Guisco,
00:34:17 vont tuer
00:34:19 le "feldkommandant"
00:34:21 de Nantes, qui s'appelait Hoth,
00:34:23 qui était comme par hasard extrêmement francophile,
00:34:25 et à partir de ce moment-là,
00:34:27 les Allemands appliquent ce qu'ils appellent
00:34:29 le "Keitel's Befehl",
00:34:31 c'est-à-dire le décret Keitel,
00:34:33 qui est que pour un Allemand tué,
00:34:35 il y aura 50 Français
00:34:37 qui seront fusillés en représailles,
00:34:39 et puis si en plus c'est un officier,
00:34:41 ça sera 100, etc.
00:34:43 Hitler est fou furieux,
00:34:45 et le problème des Allemands,
00:34:47 c'est bien facile de dire
00:34:49 "il faut fusiller 100 personnes",
00:34:51 mais ils ne les ont pas ces 100 personnes.
00:34:53 Alors ils vont aller se servir dans les quelques
00:34:55 prisons,
00:34:57 notamment à Nantes,
00:34:59 et puis au camp de Choiseul,
00:35:01 qui est juste à côté de Nantes,
00:35:03 qui est à Châteaubriand.
00:35:05 Et qui a désigné les otages ?
00:35:07 Et notamment le jeune Guimauquais,
00:35:09 parce qu'il a quand même que 17 ans ce gamin,
00:35:11 il faut s'en souvenir.
00:35:13 Certainement ni Pucheul, ministre de l'Intérieur
00:35:15 de Vichy, ni Vichy,
00:35:17 mais les Allemands,
00:35:19 qui décident eux-mêmes,
00:35:21 on ne va pas leur dicter qui doit être fusillé,
00:35:23 et leur règle c'est de travailler à la proportionnelle.
00:35:25 Ils savent que les auteurs
00:35:27 de l'attentat sont jeunes,
00:35:29 ils savent courir, s'enfuir en espadrille.
00:35:31 Ils savent que
00:35:33 ce sont vraisemblablement des
00:35:35 ligériens, c'est-à-dire des gens de la Loire,
00:35:37 et troisièmement,
00:35:39 vraisemblablement des communistes.
00:35:41 Alors ils vont taper dans les gens
00:35:43 qui sont internés, qui sont originaires
00:35:45 de la Loire, qui sont jeunes
00:35:47 pour certains, et qui sont
00:35:49 communistes. Et c'est comme ça que
00:35:51 Guimauquais se trouve avec
00:35:53 49 autres camarades,
00:35:55 choisis comme otages, et fusillés.
00:35:57 Comment expliquez-vous, Jean-Marie ?
00:35:59 Juste pour terminer,
00:36:01 quand Marie-Georges Buffet dit
00:36:03 "Vous vous rendez compte, ce gamin qui a été
00:36:05 arrêté en octobre 1940,
00:36:07 qui est fusillé
00:36:09 en octobre 1941 par les
00:36:11 Allemands, et on voudrait nous faire croire
00:36:13 que le Parti Communiste n'était pas
00:36:15 résistant, ben non, il était
00:36:17 fusillé comme otage, et pas pour un geste de
00:36:19 résistant. Excusez-moi, je vous ai interrompu.
00:36:21 Et voilà, comment expliquez-vous ?
00:36:23 Mensonge de Marie-Georges Buffet, pour essayer
00:36:25 d'effacer la période
00:36:27 de la vraie collaboration, c'est-à-dire
00:36:29 la collaboration des communistes et des Allemands,
00:36:31 avec des effets, comme vous avez dit,
00:36:33 délétères sur la
00:36:35 guerre de France.
00:36:37 La défaite, absolument.
00:36:39 La défaite française. Et comment expliquez-vous
00:36:41 que Nicolas Sarkozy, inspiré par
00:36:43 le dit Guénaud, qui n'y comprend
00:36:45 rien, illustre ce fameux
00:36:47 Guimauquais comme
00:36:49 le plus jeune, le premier
00:36:51 et le plus jeune des résistants ?
00:36:53 C'était étrange comme choix.
00:36:55 C'est trompé
00:36:57 sur toute la ligne.
00:36:59 Il est comme M. Macron,
00:37:01 comme M. Hollande, qu'il y a
00:37:03 succédé, ils ont une connaissance
00:37:05 extrêmement
00:37:07 limitée, on va dire,
00:37:09 et orientée de l'histoire.
00:37:11 Et donc je pense qu'il a...
00:37:13 En l'occurrence, c'est Henri Guénaud son aspirateur.
00:37:15 Il a fait ça,
00:37:17 sans doute, je pense, pour essayer
00:37:19 de redonner de la fierté aux Français, j'en sais rien.
00:37:21 Souvenez-vous de cette scène
00:37:23 improbable où l'équipe de France
00:37:25 de rugby,
00:37:27 au début du tournoi des Cînes Nations,
00:37:29 on voit les joueurs de rugby et l'un
00:37:31 d'entre eux, c'était Ibanez, qui lit
00:37:33 la lettre de Guimauquais.
00:37:35 Fabrication totale.
00:37:37 Ah mais non, mais en plus, je veux dire,
00:37:39 la lettre, elle est belle.
00:37:41 Moi, on m'a accusé d'avoir fait pipi
00:37:43 sur la tombe d'un enfant.
00:37:45 Mais je peux pas...
00:37:47 Je trouve ça... - C'est pas résistant.
00:37:49 - La seule chose qui m'importe,
00:37:51 c'est d'expliquer la vérité, le contexte.
00:37:53 Et puis, si on veut parler
00:37:55 de jeunes résistants
00:37:57 et fusillés,
00:37:59 il y a un autre des otages fusillés
00:38:01 qui s'appelait Lemuel,
00:38:03 qui était un Breton, un Nantais,
00:38:05 je sais pas, c'est compliqué de savoir
00:38:07 si les Nantais sont Bretons.
00:38:09 Et lui aussi est en prison,
00:38:11 et lui aussi est fusillé,
00:38:13 lui aussi a 17 ans, mais le geste
00:38:15 n'a rien à voir avec distribuer
00:38:17 l'avant-garde.
00:38:19 Il a essayé de mettre
00:38:21 un drapeau tricolore bricolé
00:38:23 sur la cathédrale de Nantes.
00:38:25 Il a été arrêté pour ça, il aurait fait 15 jours de prison,
00:38:27 pas plus. - C'est peut-être...
00:38:29 - Et lui, pas un mot.
00:38:31 - Ah ben parce que c'est un résistant qui résiste au nom de la France.
00:38:33 - Et puis parce qu'il est tout seul.
00:38:35 - Et non pas au nom des communistes.
00:38:37 - Alors, vous comprenez,
00:38:39 vous m'excuserez de dire ça avec passion,
00:38:41 mais ça m'indigne, ce genre de choses.
00:38:43 - C'est merveilleux, le travail d'archive, parce que les historiens ne le font pas.
00:38:45 - C'est ça qui est formidable dans votre travail.
00:38:47 - Et à partir de là,
00:38:49 vous vous trouvez devant des choses
00:38:51 que vous ne pouvez pas ne pas crier
00:38:53 quelque part, en tout cas écrire.
00:38:55 - Oui, en tout cas écrire, j'envoie à tous vos ouvrages,
00:38:57 j'envoie venir les uns après les autres.
00:38:59 Là vous avez dit quelque chose,
00:39:01 ce que vous dites est passionnant, vraiment passionnant.
00:39:03 Notamment ces jeunes
00:39:05 qui sont de vrais résistants.
00:39:07 J'évoquerai une manifestation
00:39:09 à laquelle je participe chaque année.
00:39:11 - C'est le 11 novembre.
00:39:13 - Le 11 novembre 40,
00:39:15 mais là ce n'est pas la gauche, c'est l'Action française.
00:39:17 Les jeunes de la Corpo de droit,
00:39:19 l'Action française, au sens large,
00:39:21 puisque beaucoup ont manifesté.
00:39:23 Alors, il faut le dire, le 11 novembre 40,
00:39:25 un bon millier,
00:39:27 entre 1 000 et 1 500
00:39:29 jeunes
00:39:31 de la Corpo de droit,
00:39:33 tenus par l'Action française,
00:39:35 remontent les Champs-Élysées pour porter
00:39:37 une gerbe
00:39:39 aux soldats inconnus.
00:39:41 - En pleine occupation, ça c'est valeureux.
00:39:43 - En portant, vous le savez sans doute,
00:39:45 ces symboles très intéressants,
00:39:47 deux Gaules.
00:39:49 - Comme quoi l'Action française était déjà
00:39:51 invoquée déjà de Gaules.
00:39:53 - Et quatre roues, le général quatre roues.
00:39:55 - Et quatre roues,
00:39:57 pour le général quatre roues,
00:39:59 je savais les deux Gaules, pour manifester.
00:40:01 - Et donc, pour être
00:40:03 le plus proche
00:40:05 possible de la vérité,
00:40:07 je dois vous dire qu'il y avait parmi
00:40:09 ses manifestants, quelques communistes.
00:40:11 Et notamment, Pierre Dex.
00:40:13 - Ah !
00:40:15 Qui est un dissident plus tard.
00:40:17 - Et qui a été très mal vu par ses camarades
00:40:19 des jeunesses communistes,
00:40:21 parce que ce Gaulisme
00:40:23 patriotique,
00:40:25 ça ne plaisait pas du tout.
00:40:27 - Il y a une anecdote que je me plais à raconter.
00:40:29 Il y avait parmi ces jeunes royalistes,
00:40:31 un futur collaborateur direct du général de Gaules,
00:40:33 qui sera son chef de cabinet,
00:40:35 c'est Pierre Lefranc.
00:40:37 Il se rend compte qu'avec deux ou trois copains
00:40:39 de la Corp. Droit, ils sont allés
00:40:41 acheter
00:40:43 des fleurs.
00:40:45 Pour déposer sur la tombe
00:40:47 du soldat inconnu. Ils ont demandé
00:40:49 à un fleuriste, qui a très vite compris
00:40:51 ce qu'il voulait. Alors, il faut que ce soit aussi
00:40:53 grand que possible, mais on n'a pas beaucoup d'argent.
00:40:55 Ils avaient dû faire une quête.
00:40:57 Et ils reviennent le lendemain
00:40:59 pour prendre cette gerbe, qu'ils pensaient
00:41:01 petite,
00:41:03 relativement à l'argent qu'il lui avait donné.
00:41:05 Le fleuriste a compris
00:41:07 ce pour quoi était la gerbe.
00:41:09 Elle est immense. Ils sont plusieurs à
00:41:11 pouvoir la porter. Acte de résistance
00:41:13 du fleuriste,
00:41:15 discret, comme beaucoup de Français ont résisté
00:41:17 dès qu'ils ont eu l'occasion. - Bien sûr.
00:41:19 - Ou montrer au moins leur refus de l'occupation.
00:41:21 - Et la résistance, elle est...
00:41:23 - C'est une relance. - Elle est à reliser
00:41:25 le silence de la mer. Elle est morale.
00:41:27 C'est pas de prendre un fusil
00:41:29 ou une tondeuse pour aller tondre
00:41:31 des femmes après que les Allemands soient partis.
00:41:33 - Oui, vous avez une dent.
00:41:35 C'est le fait des communistes, ça, souvent.
00:41:37 - Oui, enfin, peu importe.
00:41:39 Mais de gens qui n'avaient
00:41:41 pas rencontré d'Allemands,
00:41:43 qui étaient entrés dans les maquis, souvent,
00:41:45 pour fuir
00:41:47 le STO,
00:41:49 bien sûr.
00:41:51 Vous savez, quand vous avez
00:41:53 un fusil, que vous avez 18 ans...
00:41:55 - Alors, vous nous avez dit une autre chose, encore.
00:41:59 En passant un peu vite.
00:42:01 Je reviens en arrière.
00:42:03 Vous parliez des cris
00:42:05 tranquillement antisémites
00:42:09 sous la plume
00:42:11 de plumitifs
00:42:15 communistes,
00:42:17 rappelant que l'antisémitisme
00:42:19 a longtemps été
00:42:21 le fait de la gauche,
00:42:23 alors qu'on a stigmatisé la droite antisémite,
00:42:25 bourgeoise, etc.
00:42:27 Ça a longtemps été la gauche, ceux d'Istria,
00:42:29 vous êtes à rétablir aussi ces vérités.
00:42:31 Vous n'en finissez pas de rétablir des vérités
00:42:33 contre la DOXA.
00:42:35 À la fin du XIXème,
00:42:37 les propos les plus violemment
00:42:39 antisémites sont le fait d'hommes de gauche.
00:42:41 - Bien sûr, Jules Guedde,
00:42:43 Jaurès lui-même,
00:42:45 jusqu'au procès Zola.
00:42:47 D'abord, ne s'intéresse absolument
00:42:49 pas à Dreyfus, ce capitaine
00:42:51 juif, ennemi de classe, fils d'industriel,
00:42:53 etc. - Il est anti-Dreyfusard,
00:42:55 pour commencer, Jaurès. - Bien sûr.
00:42:57 Ça, on n'en parle jamais. Je me souviens,
00:42:59 j'ai commencé le livre sur Guy Moquet
00:43:01 avec une citation
00:43:03 d'un discours prononcé
00:43:05 par Lionel Jospin, alors
00:43:07 Premier ministre, au Parlement,
00:43:09 qui créditait la gauche de tout
00:43:11 ce qui était moralement
00:43:13 admirable.
00:43:15 La suppression de l'esclavage,
00:43:17 c'est la gauche. La résistance, c'est la gauche,
00:43:19 etc. L'affaire Dreyfus, les défenseurs, c'est la gauche.
00:43:21 Ben non, justement, c'est ça le problème.
00:43:23 Pendant très longtemps,
00:43:25 alors je suis bien d'accord que Drummond
00:43:27 n'était pas de gauche, c'est... Attention !
00:43:29 Mais, qui a une composante
00:43:31 anti-ju... - La suppression de l'esclavage,
00:43:33 c'est Louis X. - Anti-judaïque,
00:43:37 anti-capitaliste,
00:43:39 mais pas seulement de gauche,
00:43:41 de droite,
00:43:43 les faillites
00:43:45 des banques
00:43:47 catholiques liées,
00:43:49 non pas au lobby juif, mais tout simplement
00:43:51 à une incompétence des catholiques
00:43:53 dans le domaine de la finance et du monde.
00:43:55 - Il n'est pas d'argent en principe. - Bien sûr,
00:43:57 il est même condamnable.
00:43:59 Il sera plus difficile, riche, d'entrer dans
00:44:01 le royaume de mon père qu'un chameau de passer
00:44:03 par une aiguille, disait le Christ.
00:44:05 - Vous connaissez votre Bible ?
00:44:07 - Ah ben, mes évangiles, en tout cas.
00:44:09 - Vos évangiles.
00:44:11 - La Bible, j'ai un peu de mal, je me perds un peu.
00:44:13 Et donc,
00:44:15 il faut rappeler cette vérité
00:44:17 et à l'heure actuelle, alors qu'on entend
00:44:19 vraiment n'importe quoi, mais qu'on
00:44:21 remarque une grosse partie de la gauche
00:44:23 - la France assoumise, pour ne pas
00:44:25 la citer - reprend
00:44:27 cet antisémitisme, je trouve
00:44:29 que c'est l'occasion de rappeler qu'effectivement
00:44:31 l'antisémitisme a été
00:44:33 - moi j'ai lu, alors
00:44:35 complètement esbaudi, je dois vous dire
00:44:37 parce que j'étais un grand naïf -
00:44:39 la courtoisie
00:44:42 des échanges entre
00:44:44 Jaurès et Drummond.
00:44:46 C'est hallucinant.
00:44:48 Alors j'ai écrit un livre qui s'appelle
00:44:50 "La police à Paris" en 1900
00:44:52 dans lequel j'ai voulu
00:44:54 retracer cette folie
00:44:56 antisémite qui
00:44:58 effectivement a fini par se fondre
00:45:00 avec la folie antirépublicaine.
00:45:02 Mais quand vous avez des milliers
00:45:04 de gens dans la rue, dans les années
00:45:06 1895 et autres, qui
00:45:08 défilent en criant "Mort aux
00:45:10 Juifs", quand on voit
00:45:12 combien Zola, quel homme courageux,
00:45:14 a été menacé
00:45:16 parce qu'il avait osé écrire ce qu'il a écrit.
00:45:18 Alors c'est vrai qu'ils ont été rejoints
00:45:20 par ces gens-là,
00:45:22 par Jaurès.
00:45:24 L'article de Jaurès "L'épreuve"
00:45:28 est un texte formidable
00:45:30 mais c'est quand même
00:45:32 la gauche qui était porteuse.
00:45:34 Relisez Jules Gued, relisez
00:45:36 Judith Jaurès, mais combien
00:45:38 d'autres. Et puis
00:45:40 comme ex-ancien
00:45:42 anarchiste,
00:45:44 j'ai quand même eu
00:45:46 des fois un peu de sympathie pour Proudhon
00:45:48 qui a écrit des textes
00:45:50 magnifiques sur l'autorité
00:45:52 mais qui était un
00:45:54 antisémitisme effroyable.
00:45:56 Et tous les autres, tous ceux
00:45:58 qu'on appelle les socialistes
00:46:00 utopistes, et ont
00:46:02 tous à une exception près, pratiquement
00:46:04 été antisémites.
00:46:06 Et puis alors, à cet
00:46:08 antisémitisme
00:46:10 anti-judaïque, religieux,
00:46:12 s'est ajoutée la composante,
00:46:14 ça c'est le pire, biologique,
00:46:16 en quoi le juif pouvait
00:46:18 être assimilé à une vermine,
00:46:20 à un parasite, à un cancer.
00:46:22 - C'était des scientifiques en plus.
00:46:24 Pierre-André Taguiaf a
00:46:26 fait de très beaux livres là-dessus
00:46:28 et qui incrimine plus la gauche.
00:46:30 - On ne peut qu'incriminer
00:46:32 - Les scientifiques progressistes d'une époque.
00:46:34 - On ne peut qu'incriminer la gauche.
00:46:36 Il faut être aveugle ou de mauvaise foi.
00:46:38 C'est ce que je pense.
00:46:40 Mais enfin, il y en a beaucoup qui ne savent rien.
00:46:42 - Qui ne veulent rien savoir.
00:46:44 - Mélenchon, je ne sais pas quelle est sa compétence
00:46:46 historienne, mais
00:46:48 il raconte n'importe quoi.
00:46:50 - Alors,
00:46:52 continuons
00:46:54 en séjournant
00:46:56 quelques minutes, vous l'avez venu de l'évoquer,
00:46:58 sur votre cœur de métier,
00:47:00 ce qui a été votre grande affaire,
00:47:02 ce qui vous vaut d'être consulté
00:47:04 en France, en Navarre
00:47:06 et partout ailleurs,
00:47:08 c'est l'histoire de la police.
00:47:10 C'est ce qui vous a conduit d'ailleurs
00:47:12 à ce livre sur l'histoire
00:47:14 de la factification,
00:47:16 à la question de la police ouvichie,
00:47:18 Veldiv, qu'a fait la police
00:47:20 à l'occasion du soi-disant Veldiv,
00:47:22 le soi-disant Traffle,
00:47:24 le soi-disant Veldiv, on va y venir.
00:47:26 Mais d'abord, vous êtes un spécialiste
00:47:28 de la police. Qu'est-ce qui vous a conduit
00:47:30 en tant que professeur, jeune professeur
00:47:32 agrégé d'histoire à Dijon
00:47:34 à vous intéresser à la police ?
00:47:36 Vous êtes devenu célèbre comme ça
00:47:38 parce qu'il y a eu des émissions,
00:47:40 pas mal d'émissions, je ne sais plus si c'était
00:47:42 sur le service public, France 2, je crois,
00:47:44 vous avez fait beaucoup d'émissions
00:47:46 sur l'histoire de la police française.
00:47:48 C'est comme ça que je vous ai connu d'ailleurs,
00:47:50 à la télévision.
00:47:52 Je me suis intéressé, ma thèse est là-dessus,
00:47:54 sur la police de la Troisième République,
00:47:56 parce que ce qui m'intéressait,
00:47:58 c'était de savoir comment une institution
00:48:00 à la réputation noire et au passé
00:48:02 essentiellement bonapartiste, napoléonien,
00:48:04 avait été modifiée
00:48:06 ou avait survécu
00:48:08 ou je ne sais pas,
00:48:10 sous une démocratie parlementaire.
00:48:12 Ce qui m'intéresse sont les ruptures,
00:48:14 si vous voulez.
00:48:16 Et donc comment ces policiers
00:48:18 qui étaient des anciens sergots de l'armée impériale
00:48:20 étaient devenus finalement
00:48:22 des défenseurs de la République.
00:48:24 Exactement comme je me poserais la question
00:48:26 en 1940, comment des policiers
00:48:28 incontestablement républicains,
00:48:30 élèves de l'école républicaine,
00:48:32 ont pu servir...
00:48:34 Au fond plus à gauche qu'à droite d'ailleurs.
00:48:36 Ils étaient beaucoup plus à gauche qu'à droite,
00:48:38 vous avez raison, ils étaient essentiellement
00:48:40 radicaux socialistes.
00:48:42 Voilà c'est ça, raciste.
00:48:44 Et franc-maçon.
00:48:46 Comment ces gens-là ont-ils pu passer
00:48:48 avec armée bagage,
00:48:50 sont-ils passés avec armée bagage
00:48:52 sous Vichy ?
00:48:54 C'est-à-dire un régime qui niait
00:48:56 la République, qui effaçait son nom
00:48:58 des bâtiments publics, etc.,
00:49:00 des fontons et tout.
00:49:02 Ce que j'aime c'est ça, ce sont ces ruptures,
00:49:04 ce sont ces glissements.
00:49:06 Vous expliquez
00:49:08 que le Front populaire était passé par là,
00:49:10 vous expliquez dans un
00:49:12 entretien toujours de vos conservateurs
00:49:14 que la police,
00:49:16 qui sera la police
00:49:18 de Vichy, en tous les cas
00:49:20 en zone libre,
00:49:22 qui sera surtout la police
00:49:24 placée directement
00:49:26 sous les ordres des Allemands,
00:49:28 il faut le dire sans cesse parce qu'il faut qu'on arrive
00:49:30 à la fin du Vendée,
00:49:32 ils obéissent.
00:49:34 Ils avaient des comptes à régler
00:49:36 avec les communistes justement.
00:49:38 On verra plus tard.
00:49:40 Il faut quand même le dire,
00:49:42 la jeunesse,
00:49:44 par exemple,
00:49:46 de quelqu'un comme Doriot,
00:49:48 qui était un leader communiste très important,
00:49:50 d'ailleurs,
00:49:52 qui était le dauphin
00:49:54 choisi en France
00:49:56 par Staline,
00:49:58 ce n'était pas du tout Torres,
00:50:00 il tue des policiers,
00:50:02 les affrontements sont terribles.
00:50:04 Vous lisez les journaux de l'époque,
00:50:06 parce que le Parti communiste a
00:50:08 des dizaines, des centaines de journaux
00:50:10 de publication, on y appelle ouvertement
00:50:12 à crever les flics.
00:50:14 - Dans quelles années ça ?
00:50:16 - Fin des années 1920
00:50:18 jusqu'au Front populaire
00:50:20 pratiquement.
00:50:22 - Donc la police française avait gros sur la patate.
00:50:24 - Souvenez-vous d'Aragon,
00:50:26 c'est ce poème
00:50:28 "Oura, Oura" quand il explique
00:50:30 "Tuez les flics camarades, tuez les flics camarades"
00:50:32 etc.
00:50:34 Comment voulez-vous que les policiers
00:50:36 aient apprécié les communistes ?
00:50:38 J'ajouterais quand même une autre chose,
00:50:40 qui leur tue des collègues,
00:50:42 c'est que
00:50:44 ces policiers,
00:50:46 comme on le disait,
00:50:48 étaient essentiellement des "ratsok",
00:50:50 des radicaux socialistes,
00:50:52 ils ont adhéré
00:50:54 aux idées du Front populaire,
00:50:56 à l'antifascisme.
00:50:58 Imaginez leur réaction
00:51:00 quand d'un seul coup,
00:51:02 les communistes retournent leur veste
00:51:04 à cause du pacte germano-soviétique.
00:51:06 Pour eux, je prends toujours
00:51:08 l'exemple,
00:51:10 on est en train avec
00:51:12 Franck Liègre
00:51:14 de travailler sur le sujet,
00:51:16 il y a un commissaire
00:51:18 de Nantes, qui est franchement
00:51:20 à la SFIO, qu'on voit
00:51:22 défiler dans les grèves, les défilés
00:51:24 antifascistes du Front populaire,
00:51:26 en 1936-37,
00:51:28 avec son écharpe de commissaire.
00:51:30 Imaginez
00:51:32 l'effet que lui a fait
00:51:34 le pacte germano-soviétique.
00:51:36 Si vous me permettez l'expression,
00:51:38 on parle à des gens
00:51:40 qui pourront comprendre,
00:51:42 ils se sont sentis
00:51:44 cocus.
00:51:46 Les communistes, c'était terrible
00:51:48 pour eux,
00:51:50 avaient utilisé
00:51:52 l'antifascisme
00:51:54 pour attirer
00:51:56 à eux un certain nombre de gens,
00:51:58 et brutalement, ils les laissaient tomber.
00:52:00 On en arrive
00:52:02 à cet épisode
00:52:04 sur lequel il faut que nous
00:52:06 nous arrêtions, tout de même,
00:52:08 la fameuse rafle du Vendée,
00:52:10 où la police française a été très accusée.
00:52:12 On a dit des bêtises,
00:52:14 on a dit par exemple qu'elle était
00:52:16 sous l'autorité française,
00:52:18 alors qu'on gomme le rôle
00:52:20 des Allemands.
00:52:22 L'autorité en zone occupée
00:52:24 à Paris, c'était l'Allemagne.
00:52:26 Et c'est l'Allemagne, alors là, il faut que vous
00:52:28 résumiez tout ce que vous écrivez
00:52:30 dans ce livre, on a un peu de temps,
00:52:32 qui
00:52:34 insiste et réinsiste,
00:52:36 malgré le travail des autorités
00:52:38 françaises,
00:52:40 même si elles étaient proches
00:52:42 de l'occupant. Bon, il y a le fameux
00:52:44 cas de
00:52:46 l'ami de François Mitterrand,
00:52:48 Bousquet,
00:52:50 qui est...
00:52:52 Quelle est la fonction de Bousquet ?
00:52:54 Il est secrétaire général à la police,
00:52:56 très tardivement, en avril 1942.
00:52:58 C'est quelqu'un qui vient des
00:53:00 milieux radicaux...
00:53:02 Comment ça se passe entre Bousquet et les autorités allemandes,
00:53:04 pour arriver à la fameuse
00:53:06 rafle, entre guillemets, du Vendée ?
00:53:08 Alors, tout ce que je vais vous dire, bien sûr,
00:53:10 me vaudra le bûcher.
00:53:12 Allons-y. Vous avez déjà
00:53:14 de quoi allumer les...
00:53:16 Me vaudra le bûcher, parce que c'est
00:53:18 inécoutable,
00:53:20 c'est intolérable pour des gens
00:53:22 qui ont vécu dans une doxa
00:53:24 toute simple.
00:53:26 Les flics français, pire que les SS,
00:53:28 etc.
00:53:30 Donc, la France a perdu
00:53:32 la guerre.
00:53:34 Terriblement perdue.
00:53:36 C'est son seul crime. Tellement perdue.
00:53:38 Elle s'est
00:53:40 vue imposer un armistice
00:53:42 terrible, dont l'article
00:53:44 3 accorde
00:53:46 aux Allemands
00:53:48 les droits de la puissance occupante,
00:53:50 qui sont prévus par une convention
00:53:52 internationale d'avant la guerre 14,
00:53:54 qui s'appelle la convention de l'AE.
00:53:56 Ça veut dire concrètement
00:53:58 que dans toute la zone occupée,
00:54:00 60% à peu près
00:54:02 du territoire, pas seulement
00:54:04 nord, bien sûr, mais ça descend
00:54:06 au sud jusqu'à la frontière espagnole,
00:54:08 eh bien, les autorités
00:54:10 allemandes,
00:54:12 les autorités d'occupation
00:54:14 prennent des décisions
00:54:16 qui ont la forme d'ordonnances
00:54:18 et ces ordonnances
00:54:20 ont force de loi.
00:54:22 Ça veut dire qu'un policier,
00:54:24 un recteur, un trésorier
00:54:26 payeur général, etc.,
00:54:28 doivent obéir ou démissionner.
00:54:30 - C'est l'article 3 de la convention d'armistice.
00:54:32 - Voilà. Et parce que
00:54:34 les Allemands, c'est une ordonnance
00:54:36 allemande qui a force de loi.
00:54:38 Le Vichy n'a pas son mot à dire.
00:54:40 Il n'a pas son mot à dire
00:54:42 dans cette zone occupée.
00:54:44 Les Allemands, vous le savez,
00:54:46 pour des raisons dans lesquelles
00:54:48 nous n'entrerons pas, ont décidé
00:54:50 d'oxyre,
00:54:52 de tuer, de faire
00:54:54 disparaître ce qu'ils appellent à tort,
00:54:56 d'ailleurs, c'est pas une race, la race juive.
00:54:58 Ils ont commencé le travail
00:55:00 dès l'invasion
00:55:02 de la Pologne. - C'est un peu socialiste.
00:55:04 Parce que pour moi, le nazisme, c'est plutôt à gauche.
00:55:06 C'est un relier à l'antisémitisme de gauche.
00:55:08 L'antisémitisme allemand, pour moi,
00:55:10 je le relie à l'antisémitisme de gauche.
00:55:12 Mais passons là-dessus. - Je vous laisse vos responsabilités.
00:55:14 Donc,
00:55:16 comme vous le savez,
00:55:18 dès l'occupation de la Pologne,
00:55:20 en septembre 1939,
00:55:22 ils veulent faire de la Pologne un pays
00:55:24 d'esclaves.
00:55:26 Ils vont, on n'en parle jamais,
00:55:28 liquider les professeurs
00:55:30 d'université, l'université Yagelon,
00:55:32 par exemple, à Cracovie,
00:55:34 etc. Et les juifs.
00:55:36 Mais pas seulement les juifs. Contrairement
00:55:38 à ce que disent les juifs,
00:55:40 justement, les patriotes polonais,
00:55:42 les intellectuels, ils veulent
00:55:44 interdire que les Polonais sachent lire
00:55:46 et écrire. Ça doit être un peuple d'esclaves.
00:55:48 Et donc,
00:55:50 à partir de l'attaque
00:55:52 de l'URSS par les troupes allemandes,
00:55:54 c'est-à-dire le 21 juin
00:55:56 1941,
00:55:58 vous le savez, les troupes allemandes vont être suivies,
00:56:00 mais immédiatement,
00:56:02 par des gens
00:56:04 dont la mission est
00:56:06 très claire, c'est de liquider les juifs
00:56:08 sur les arrières du front.
00:56:10 C'est ce qu'on appelle les
00:56:12 "Seinsatzgruppen".
00:56:14 Il y a aussi des gens
00:56:16 qui forment ce qu'on appelle des bataillons
00:56:18 de policiers.
00:56:20 C'est terrible ce qui se passe
00:56:22 parce que ces gens ne sont pas des assassins,
00:56:24 ne sont pas des tueurs, ne sont même pas
00:56:26 des antisémites. Et quand on vous
00:56:28 donne un fusil et qu'on vous
00:56:30 donne l'ordre,
00:56:32 avec la possibilité de ne pas obéir,
00:56:34 c'est-à-dire que
00:56:36 vous êtes bien conscient du problème, du crime,
00:56:38 et que des tas de gens, leur conscience
00:56:40 ne supporterait pas,
00:56:42 on leur donne la possibilité
00:56:44 de ne pas participer au massacre.
00:56:46 Quelques-uns vont le faire,
00:56:48 ils vont garder à 3-4 kilomètres
00:56:50 les zones. Et puis pour les autres,
00:56:52 un médecin leur donne, leur explique,
00:56:54 à la distance de la baïonnette,
00:56:56 30 centimètres, on fait coucher les juifs,
00:56:58 pour sortir des Allemands.
00:57:00 En Pologne ?
00:57:02 Oui, bien sûr. Et vous imaginez quand même
00:57:04 ces types qui reviennent avec les bottes couvertes
00:57:06 de cervelles, d'os, etc.
00:57:08 Bref, c'est pour ça que...
00:57:10 Parce qu'une grande partie des juifs, je vous le dis,
00:57:12 ont été exterminés au fusil,
00:57:14 plus que dans les camps.
00:57:16 Ah, beaucoup plus.
00:57:18 1,5 million, on sait ce qu'on appelle
00:57:20 la Shoah par balles.
00:57:22 Edouard Husson, là-dessus.
00:57:24 Très bien, le livre d'Husson.
00:57:26 Je le cite.
00:57:28 Enchanté.
00:57:30 Le prêtre qui s'appelle
00:57:32 le Père des bois, fait un gros travail,
00:57:34 retrouve les fosses,
00:57:36 parce qu'on a les traces, les balles,
00:57:38 bien sûr, les douilles, etc.
00:57:40 Avec un détecteur de métal.
00:57:42 Bref.
00:57:44 Prenons-en donc à...
00:57:46 Je ne quitte pas mon sujet.
00:57:48 Les nazis décident,
00:57:50 en janvier 1942,
00:57:52 d'étendre ce qu'ils appellent
00:57:54 d'un euphémisme terrible,
00:57:56 la solution finale de la question juive.
00:57:58 Et ils décident de l'étendre
00:58:00 au pays d'Europe de l'Ouest.
00:58:02 Parce que par balles,
00:58:04 ça ne va pas assez vite.
00:58:06 Oui, et puis surtout,
00:58:08 ça démoralise les tueurs.
00:58:10 C'est pour ça qu'on va préférer des chambres à gaz.
00:58:12 Et c'est à ce moment-là, 1942,
00:58:14 que se met en marche la machine...
00:58:16 La solution finale en Europe de l'Ouest.
00:58:18 Elle ne va pas se mettre en...
00:58:20 Tout de suite.
00:58:22 Il va y avoir 4 à 5 mois d'hésitation.
00:58:24 Parce que les Allemands sont bien les nazis.
00:58:26 Himmler,
00:58:28 Heidrich, qui va mourir, bien sûr,
00:58:30 à Prague.
00:58:32 Mais ils savent que ça va être
00:58:34 un problème en Europe occidentale.
00:58:36 Ça va être un problème avec les Français, etc.
00:58:38 Donc ils y vont très doucement.
00:58:40 Et on ne sait pas,
00:58:42 parce qu'il n'y a pas d'enregistrement,
00:58:44 il n'y a pas de texte, il n'y a pas d'archives.
00:58:46 Mais il semble que lors d'une réunion
00:58:48 en mai 1942,
00:58:50 ou plus tardif qu'on ne le dit,
00:58:52 Himmler obtient
00:58:54 d'Hitler
00:58:56 l'autorisation de lancer
00:58:58 la solution finale en Europe de l'Ouest.
00:59:00 Et en France.
00:59:02 Notamment en France.
00:59:04 Pays-Bas, Norvège, Belgique.
00:59:06 Et...
00:59:08 Il faut mettre les choses
00:59:10 en route.
00:59:12 Il y a Heidrich qui vient en France.
00:59:14 Il vient, absolument, et puis après il retourne à Prague.
00:59:16 Il est protecteur de Bohème-Moravie.
00:59:18 Et il meurt de septicémie
00:59:20 après un attentat.
00:59:22 Et donc, le problème,
00:59:24 c'est quand même compliqué.
00:59:26 Comment on va faire, dans un pays
00:59:28 où il y a quand même quelques traditions
00:59:30 humanistes,
00:59:32 démocratiques, etc.
00:59:34 Comment...
00:59:36 Comment va-t-on
00:59:38 imposer cette solution ?
00:59:40 Alors, ceux qui vont être chargés de poser cette solution,
00:59:42 ce sont des...
00:59:44 les pires des pires.
00:59:46 Ce sont les SS,
00:59:48 non pas de la Gestapo, mais de ce qu'on appelle
00:59:50 la Zippo-SD,
00:59:52 Zicherei-Polizei, Zicherei-Dienst,
00:59:54 et du service 4J.
00:59:56 C'est-à-dire en charge de la répression
00:59:58 antisémite.
01:00:00 Leur chef est une espèce de nazi fou
01:00:02 et... mais intelligent, quand même,
01:00:04 et terrible, qui s'appelle Théo Daneker.
01:00:06 Et donc, Daneker
01:00:08 va voir les Français, les autorités françaises,
01:00:10 et leur dit...
01:00:12 L'ordre n'est pas discutable.
01:00:14 Il prévient dès le départ
01:00:16 qu'il va falloir que
01:00:18 les Français livrent des Juifs.
01:00:20 Il précise au début un premier
01:00:22 contingent, 40 000.
01:00:24 Oui, je crois qu'ils ont rêvé de 100 000 à un moment, non ?
01:00:26 Oui, absolument, mais...
01:00:28 De toute façon, il faut supprimer
01:00:30 la juiverie française.
01:00:32 On va commencer par 40 000.
01:00:34 Et dans ces 40 000,
01:00:36 il devra y avoir une proportion non négligeable
01:00:38 de Juifs français.
01:00:40 Des négociations commencent,
01:00:42 qui sont terribles.
01:00:44 Et le problème, ce que j'essaye d'expliquer
01:00:46 dans ce livre, c'est qu'on n'a pas
01:00:48 d'enregistrement, on n'a pas de...
01:00:50 On a des textes... - On a des papiers.
01:00:52 - Oui, qui sont presque tous allemands.
01:00:54 Bon, ça pose
01:00:56 quand même un problème pour un historien.
01:00:58 Et plus quelques échanges,
01:01:00 quelques transcriptions
01:01:02 téléphoniques entre Bousquet et Laval,
01:01:04 Laval étant à Vichy et Bousquet négociant
01:01:06 à Paris. Et en gros, si vous voulez,
01:01:08 ce qu'on sait de mal,
01:01:10 c'est que les autorités françaises
01:01:12 refusent. Refusent.
01:01:14 Mais ils vont subir... - Bousquet refuse.
01:01:16 - Oui, absolument.
01:01:18 Et ils vont subir une telle pré...
01:01:20 - Et Vichy... - Et Laval...
01:01:22 - Et Laval refuse. - Vichy refuse.
01:01:24 - Absolument. - Pas l'livraison de Juifs.
01:01:26 - Absolument. Et donc... - Ça, c'est dans les archives,
01:01:28 quand même. - Absolument.
01:01:30 Ah ben oui, bien sûr, on a les échanges de courrier.
01:01:32 Et on va découvrir que...
01:01:34 Eh bien...
01:01:36 Ils ne peuvent pas
01:01:38 s'opposer jusqu'au bout. Il y a quand même
01:01:40 1,5 million de prisonniers français en Allemagne.
01:01:42 Il y a quand même des moyens de chantage
01:01:44 que les Allemands utilisent.
01:01:46 Des pressions terribles.
01:01:48 - Et puis, il y a l'occupation militaire, tout simplement.
01:01:50 - Et donc,
01:01:52 Vichy va petit à petit...
01:01:54 Enfin, les autorités de Vichy, je ne sais pas
01:01:56 comment dire... - Non, mais ça, c'est Vichy-Paris.
01:01:58 - Oui, mais enfin, en liaison,
01:02:00 on s'en cesse avec le téléphone.
01:02:02 Avec...
01:02:04 Et le Conseil des ministres,
01:02:06 le conseil de l'alliance évinier à Vichy.
01:02:08 Et vont finalement s'aider.
01:02:10 Avec une ligne de repli.
01:02:12 Comme les Allemands veulent que ce soit
01:02:14 les Français qui opèrent les arrestations.
01:02:16 Parce qu'ils ne parlent pas
01:02:18 français, les troupes allemandes.
01:02:20 Parce que ça va affoler les gens arrêtés.
01:02:22 Et que ça va provoquer des...
01:02:24 des drames et des bouleversements.
01:02:26 Il faut que ce soit les Français,
01:02:28 policiers, pèlerines,
01:02:30 leurs képis et tout, qui opèrent.
01:02:32 Sans affoler les populations.
01:02:34 - Et c'est ce que les policiers ne savent en aucun cas.
01:02:36 Ce qui va arriver aux gens qu'ils arrêtent.
01:02:38 - Bien entendu, puisque la solution finale n'est pas mise en oeuvre encore.
01:02:40 - Oui, puis surtout,
01:02:42 même en 44-45,
01:02:44 il y a plein de gens qui n'y croient pas.
01:02:46 - Certains savent et d'autres ne savent pas.
01:02:48 Mais alors donc, pas d'arrestation de juifs français.
01:02:50 - Voilà.
01:02:52 La ligne de repli, si vous voulez,
01:02:54 des autorités françaises, ça va être...
01:02:56 Bon.
01:02:58 Pétain est très clair. Il dit, c'est aux Allemands
01:03:00 d'opérer.
01:03:02 Les forces de l'ordre françaises ne doivent
01:03:04 pas se mêler de la chose.
01:03:06 - Et pourtant, il y a l'article 3 de la Convention,
01:03:08 qui oblige les fonctionnaires français à venir aux autorités allemandes.
01:03:10 - Vous savez, c'est...
01:03:12 Excusez-moi, mais c'est un deal.
01:03:14 C'est une négociation.
01:03:16 Chacun connaît les faiblesses de l'autre,
01:03:18 ses arguments et tout.
01:03:20 - Mais Pétain résiste.
01:03:22 - Quand il est très clair,
01:03:24 les forces de l'ordre françaises
01:03:26 ne doivent pas procéder à ces arrestations.
01:03:28 Et donc,
01:03:30 Laval le suit complètement.
01:03:32 Mais quand les pressions deviennent,
01:03:34 les négociations durent quand même quelques semaines,
01:03:36 deviennent de plus en plus fortes,
01:03:38 eh bien, il se replie,
01:03:40 si vous voulez, sur une ligne de repli
01:03:42 qui est, OK,
01:03:44 on fera les arrestations,
01:03:46 on opérera les arrestations,
01:03:48 mais il n'y aura pas de juifs français.
01:03:50 - C'est-à-dire, parmi les juifs qui s'étaient réfugiés en France,
01:03:52 pour fuir les nazis, principalement,
01:03:54 ils venaient de Pologne, d'Allemagne...
01:03:56 - Bien sûr, d'Italie, éventuellement.
01:03:58 - Bien sûr, d'Italie, éventuellement.
01:04:00 - Même s'il n'y avait pas... parce qu'ils étaient communistes,
01:04:02 l'Italie, ils l'avaient fui.
01:04:04 Et donc, on arrêtera...
01:04:06 Bon, on livrera essentiellement
01:04:08 des juifs étrangers ou apatrides,
01:04:10 c'est-à-dire privés de leur nationalité
01:04:12 parce que leur pays n'existe plus,
01:04:14 les Tchèques, etc., les Sauvacs,
01:04:16 mais pas de juifs français.
01:04:18 Et donc,
01:04:20 c'est dans ces conditions
01:04:22 qu'ont eu lieu les rafles
01:04:24 de l'été 1942,
01:04:26 le mois de juillet. Alors, prenons
01:04:28 deux exemples pour montrer
01:04:30 que les policiers et même
01:04:32 l'administration française n'a pas été aux ordres
01:04:34 et s'est pas couché devant Vichy.
01:04:36 - Elle était sous la botte, quand même.
01:04:38 - Nancy.
01:04:40 La rafle doit avoir lieu...
01:04:42 Il y a une grosse communauté juive,
01:04:44 près d'un millier de personnes, plus de 900.
01:04:46 La rafle doit y avoir lieu
01:04:48 le 19 juillet.
01:04:50 On est au courant de ce qui s'est passé
01:04:52 à Paris le 16 juillet.
01:04:54 Et donc, les policiers français
01:04:56 du service des affaires juives,
01:04:58 du service des étrangers,
01:05:00 excusez-moi,
01:05:02 vont aller prévenir systématiquement
01:05:04 les juifs qu'ils connaissent bien.
01:05:06 Ce sont des gens qui viennent tous les ans
01:05:08 faire renouveler leur autorisation de séjour.
01:05:10 - Attention !
01:05:12 - Ils sont invités au bar Vitsa, etc.
01:05:14 et ils vont leur dire
01:05:16 "Vous ne dormez pas chez vous cette nuit.
01:05:18 Vous vous cachez chez quelqu'un."
01:05:20 Et...
01:05:22 Je peux vous citer, parce que c'est tout à fait attesté.
01:05:24 Plusieurs de ces policiers
01:05:26 ont pris chez eux des juifs
01:05:28 qui ne savaient pas où aller,
01:05:30 qui n'avaient aucune solution.
01:05:32 - Mais ce sont chez vous, chez nous, les policiers ?
01:05:34 - Ils les prennent chez eux.
01:05:36 Et donc, les Allemands,
01:05:38 entre-temps,
01:05:40 ont appris ce qui s'était passé.
01:05:42 Les textes de la commandanteure
01:05:44 et les échanges sont très clairs.
01:05:46 L'État français,
01:05:48 le maréchal Pétain,
01:05:50 s'est opposé au fait
01:05:52 qu'on déporte et qu'on arrête
01:05:54 les juifs français.
01:05:56 Donc, les juifs qui sont visés
01:05:58 ne sont plus que les juifs étrangers et apatrides.
01:06:00 Et on tombe de 900 à 300.
01:06:02 Et sur ces 300,
01:06:04 à peine une trentaine seront arrêtés.
01:06:06 - Grâce, au fond,
01:06:08 à la résistance ?
01:06:10 - Des policiers, une résistance morale,
01:06:12 je ne sais pas comment dire.
01:06:14 Et...
01:06:16 Malheureusement, ils seront pour beaucoup
01:06:18 arrêtés.
01:06:20 Mais, ce que je veux dire,
01:06:22 c'est qu'ils n'ont pas été à plat ventre.
01:06:24 Les Allemands sont loin d'être des imbéciles.
01:06:26 - C'est tout à la gloire du peuple français
01:06:28 et de sa police.
01:06:30 - Ils ont tout à fait compris ce qui s'était passé.
01:06:32 Et l'un des policiers,
01:06:34 celui qui dirigeait ce service
01:06:36 des étrangers, a même été arrêté.
01:06:38 J'ai trouvé la trace de son passage
01:06:40 à Fred.
01:06:42 Et puis, finalement, c'est Bousquet qui a obtenu sa libération.
01:06:44 Il s'est défendu en disant
01:06:46 que le téléphone fonctionne.
01:06:48 La rafle, elle a eu lieu
01:06:50 trois jours après celle de Paris.
01:06:52 Donc, tout le monde était au courant.
01:06:54 Ce n'est pas les policiers français
01:06:56 qu'on prévenue. Enfin, chacun essaye de se...
01:06:58 - Alors, celle de Paris, Jean-Marc Guerrier...
01:07:00 - A Paris, c'est très clair.
01:07:02 - Que se passe-t-il à Paris ? Parce qu'on l'a comme est mort tout le temps,
01:07:04 cette rafle, sans la connaître.
01:07:06 - Oui, elle est... Alors, d'abord,
01:07:08 on recommence, ce n'est pas une rafle,
01:07:10 il faut le dire à tout le monde.
01:07:12 C'est une arrestation sur fiche.
01:07:14 On n'arrête pas au hasard dans la rue,
01:07:16 en tapant au papier,
01:07:18 comme on dit dans l'argot des flics.
01:07:20 On va
01:07:22 avec des noms
01:07:24 qui sont sur une fiche, avec une adresse,
01:07:26 et on se rend dans ces immeubles.
01:07:28 Vous savez, la rue des immeubles industriels,
01:07:30 etc. Il y avait tout un tas de quartiers
01:07:32 qui étaient, qui comprenaient
01:07:34 une part importante de population juive.
01:07:36 Et donc,
01:07:38 à 6h du matin,
01:07:40 on frappe aux portes.
01:07:42 Les ordres sont terribles.
01:07:44 Du service des étrangers,
01:07:46 dirigé par André Tullard,
01:07:48 c'est "si les gens n'ouvrent pas,
01:07:50 vous cassez les portes", etc.
01:07:52 Il y a des tas de dérapages,
01:07:54 il y a des flics
01:07:56 qui ne trouvent pas les gens.
01:07:58 Bon, ben, ce n'est pas grave.
01:08:00 Alfred n'est pas là, il prend le fils.
01:08:02 Enfin, vous voyez, c'est...
01:08:04 - Il y a aussi des policiers qui, comme à Nancy,
01:08:06 ont pris les devants,
01:08:08 ont prévenu
01:08:10 beaucoup de familles juives.
01:08:12 - Et massivement,
01:08:14 au point que
01:08:16 on arrête beaucoup plus de femmes et d'enfants
01:08:18 que d'hommes. Parce que, jusqu'à présent,
01:08:20 on n'avait arrêté que des hommes.
01:08:22 En aucun cas des femmes et des enfants.
01:08:24 Et on pensait donc...
01:08:26 Et d'ailleurs, des hommes, quand ils ont su
01:08:28 que leur épouse ou leurs enfants
01:08:30 avaient été arrêtés,
01:08:32 sont allés se livrer. Parce que,
01:08:34 comme on ne sait pas ce qu'il y a au bout de cette arrestation,
01:08:36 on veut rester ensemble.
01:08:38 - Il n'y a pas de camp encore.
01:08:40 - On veut rester ensemble.
01:08:42 - Enfin, tout le monde, il y a des camps, mais pas d'extermination.
01:08:44 - Oui, non, mais on ne sait pas.
01:08:46 Le langage codé des Allemands,
01:08:48 c'est "déportés vers l'Est".
01:08:50 Et l'histoire officielle,
01:08:52 c'est qu'ils vont créer
01:08:54 un État juif
01:08:56 dans l'Est de l'Europe.
01:08:58 Sans doute à l'emplacement de la Pologne.
01:09:00 Alors, il y a des gens
01:09:02 qui ont tout de suite eu
01:09:04 des sentiments extrêmement
01:09:06 alarmés.
01:09:08 Il y a des gens qui se sont suicidés.
01:09:10 Mais pour la plupart,
01:09:12 les témoignages qu'on a de gens
01:09:14 qui ont survécu, c'est...
01:09:16 C'était souvent des enfants, d'ailleurs.
01:09:18 Ils sont rassurés
01:09:20 parce que ce sont des flics français.
01:09:22 Parce qu'ils n'ont pas vu d'Allemands.
01:09:24 Ça, c'est dans la tactique des Allemands.
01:09:26 Quand Hollande dit...
01:09:28 Le président Hollande, pardon,
01:09:30 dit dans sa célébration,
01:09:32 après son élection,
01:09:34 il y a eu des vols d'Allemands dans les rues.
01:09:36 C'est d'une naïveté étonnante.
01:09:38 Bien sûr, ça faisait partie du plan.
01:09:40 Pour ne pas foller, imaginez si ça avait été
01:09:42 des Allemands avec leur moto et tout.
01:09:44 On avait peur de la réaction de la population.
01:09:46 Bien sûr.
01:09:48 Et donc, si vous voulez,
01:09:50 le service des étrangers
01:09:52 et des Juifs,
01:09:54 dirigé par Antoine Tullard,
01:09:56 avait préparé la rafle en sortant
01:09:58 du fichier juif qu'on avait créé
01:10:00 à partir du recensement imposé
01:10:02 par les Allemands,
01:10:04 pas par Michi,
01:10:06 au mois d'octobre 1940.
01:10:08 On avait sorti les fiches qui correspondaient
01:10:10 des Juifs apatrides, des Juifs étrangers.
01:10:12 Et là, il n'y avait plus que 23 000 noms.
01:10:16 On était déjà arrivé à ça.
01:10:18 On livre 22 000.
01:10:20 On annonce Tullard
01:10:22 à une réunion technique avec les Allemands.
01:10:24 C'est déjà beaucoup moins que ce qu'avaient exigé les Allemands.
01:10:26 Absolument.
01:10:28 On est à 22 000.
01:10:30 22 000 personnes.
01:10:32 Au bout du compte, au final,
01:10:34 il y a 13 000,
01:10:36 un petit peu plus, de gens.
01:10:38 13 185 arrêtés.
01:10:40 Énorme, bien sûr.
01:10:42 Pas de Juifs français, là.
01:10:44 C'est la population.
01:10:46 Alors, il y a le problème des enfants.
01:10:48 Si les enfants étaient nés en France,
01:10:50 les gens ne comprennent rien.
01:10:52 Donc, ils disent, attention,
01:10:54 ils sont français par le droit du sol.
01:10:56 Non. La loi de 1927 est extrêmement compliquée.
01:10:58 Seront considérés comme français
01:11:00 les enfants effectivement nés en France,
01:11:02 à condition qu'un de leurs deux parents
01:11:04 soient français.
01:11:06 Sinon, ils ne deviendront français
01:11:08 qu'à 21 ans,
01:11:10 c'est l'âge de la majorité,
01:11:12 s'ils le demandent.
01:11:14 Alors, quand on vous jette à la face comme ça,
01:11:16 en disant, oui, mais il y a 8 000 enfants
01:11:18 qui, eux, étaient français,
01:11:20 je ne vais pas me lancer dans des calculs sordides,
01:11:22 mais peut-être 4 000
01:11:24 étaient effectivement français.
01:11:26 Et ce qui s'est passé,
01:11:28 le hasard fait que je viens d'échanger
01:11:30 des courriers avec quelqu'un,
01:11:32 je reçois des courriers tous les jours, des e-mails et tout,
01:11:34 de quelqu'un qui m'explique
01:11:36 que dans sa famille,
01:11:38 le père et la mère
01:11:40 et leurs deux enfants ont été raflés,
01:11:42 ça se passe à Vincennes,
01:11:44 et ils sont mis en attente
01:11:46 dans un pavillon,
01:11:48 et à partir de, je ne sais pas trop,
01:11:50 vers 15 heures,
01:11:52 il y a un gradé qui arrive, je ne sais pas si c'est un commissaire,
01:11:54 c'est un officier de paix et tout,
01:11:56 et qui a ce discours extraordinaire,
01:11:58 en disant,
01:12:00 les enfants entre 14 et 16 ans,
01:12:02 qui sont français,
01:12:04 et qui ont de la famille pouvant les accueillir,
01:12:06 peuvent partir.
01:12:08 Alors, imaginez le drame.
01:12:10 Il y a des mères qui hurlent,
01:12:12 jamais elles se sépareront de leurs enfants,
01:12:14 il y a des enfants qui s'accrochent
01:12:16 aux jupes de leur mère et tout,
01:12:18 et il se trouve, c'est le cas des parents
01:12:20 de Maurice Reiffus,
01:12:22 qui pourtant a écrit pas mal d'erreurs
01:12:24 sur cette affaire,
01:12:26 sa mère prend les quelques billets
01:12:28 de banque qu'elle avait dans son sac à main,
01:12:30 lui donne et lui dit "sauve-toi".
01:12:32 "Sauve-toi".
01:12:34 Il doit la vie à des gens
01:12:36 dont je ne peux même pas vous dire
01:12:38 qui ils sont, c'est-à-dire des gens
01:12:40 qui ont négocié avec les allemands,
01:12:42 que les adolescents de 14 à 16 ans ne seraient pas déportables.
01:12:44 C'est-à-dire qu'en fait,
01:12:46 les français ont résisté dès qu'ils ont pu,
01:12:48 à chaque interstice, chaque fois qu'il y avait une occasion de le faire.
01:12:50 Voilà, on ne sait pas qui a négocié ça,
01:12:52 et ce qui nous a...
01:12:54 qui a sauvé des enfants.
01:12:56 Ce qui a attiré notre attention,
01:12:58 c'est que quand on a les chiffres
01:13:00 heure par heure,
01:13:02 des gens arrêtés,
01:13:04 et donc dans ce 16 juillet,
01:13:06 jusque vers 15h,
01:13:08 on voit les nombres augmenter,
01:13:10 femmes, enfants, hommes, bien sûr,
01:13:12 les hommes étant beaucoup moins nombreux.
01:13:14 Et puis à partir de 16h,
01:13:16 les enfants sont moins nombreux
01:13:18 que ceux qui étaient comptés à 15h.
01:13:20 Ça veut dire qu'il y a à peu près
01:13:22 200 enfants dont les parents ont dit
01:13:24 "sauvez-vous, tous les autres sont restés".
01:13:26 Alors, tout ça pour...
01:13:28 Et avec l'aide des policiers, souvent.
01:13:30 Ah, absolument, qu'on prévenu,
01:13:32 comme vous l'avez dit.
01:13:34 Alors, il y a eu des crapules, il y a eu des ailés,
01:13:36 il y a eu des ignobles salopards,
01:13:38 mais il y a eu aussi des tas de gens
01:13:40 qui ont regardé ailleurs,
01:13:42 qui étaient passés la veille en disant
01:13:44 "vous ne dormez plus ici",
01:13:46 c'est pour ça qu'il y a beaucoup plus de femmes
01:13:48 et d'enfants, parce que les hommes se sont cachés.
01:13:50 Alors, je voudrais juste quand même terminer,
01:13:52 parce que l'affaire est très...
01:13:54 C'est passionnant, et ça renverse
01:13:56 tellement d'idées reçues.
01:13:58 Et très compliqué.
01:14:00 Il semblerait que, par rapport
01:14:02 aux chiffres de 40 000,
01:14:04 et ça le problème, c'est qu'on n'a pas
01:14:06 de matière,
01:14:08 de textes, etc.
01:14:10 Les armements étaient furieux.
01:14:12 Ah ben, furieux, ils ont tout de suite
01:14:14 fait des policiers, alors comme ils sont
01:14:16 dans leur logique, c'est que les policiers
01:14:18 avaient été achetés par les juifs.
01:14:20 L'empathie, l'humanité, l'humanisme, rien.
01:14:22 Ça ne leur venait pas à l'aise, bravo.
01:14:24 Mais très clairement,
01:14:26 très clairement,
01:14:28 ils accusent les policiers.
01:14:30 Mais il y a
01:14:32 quelque chose dont il faut que l'on parle,
01:14:34 parce qu'autrement, on ne serait pas complet.
01:14:36 Et c'est quand même
01:14:38 un événement dramatique, et là,
01:14:40 qui est vraiment à la charge
01:14:42 du gouvernement français,
01:14:44 et de Bousquet notamment, mais il n'y a pas que lui,
01:14:46 c'est qu'apparemment,
01:14:48 pour obtenir
01:14:50 qu'il n'y ait que
01:14:52 22 ou 40 000, enfin, peu importe,
01:14:54 il n'y a eu que 22 000
01:14:56 qui étaient arrêtables. Au départ, on sort
01:14:58 27 000 fiches, c'est tellement de temps
01:15:00 là-dessus. - Et en ce moment, on essaie de faire
01:15:02 baisser le nombre. - Ah ben, bien sûr,
01:15:04 on négocie comme des marchands de tapis,
01:15:06 c'est gênant vu le sujet, mais c'est quand même ça.
01:15:08 - Mais on ne négocie pas, on résiste.
01:15:10 - Et donc,
01:15:12 on résiste. - On peut utiliser
01:15:14 le mot de résister. - Ah ben, absolument,
01:15:16 on ne le fera pas.
01:15:18 Et donc, apparemment,
01:15:20 pour obtenir
01:15:22 que les Allemands
01:15:24 n'aient pas leur nombre de 40 000,
01:15:26 on leur promet de leur livrer
01:15:28 les Juifs étrangers
01:15:30 et apatrides qui sont internés
01:15:32 en zone non occupée.
01:15:34 Et ça, c'est terrible. - Mais on ne le fait
01:15:36 que très peu. - Ah si,
01:15:38 c'est plus de 10 000. - Oui, ben,
01:15:40 10 000 par rapport à la population.
01:15:42 Il y a des 500 000 Juifs en France. - 300 000,
01:15:44 à peu près, 310 000,
01:15:46 310, 320,
01:15:48 bref. Mais on ne le sait pas
01:15:50 puisqu'il n'y a pas de statistiques religieuses.
01:15:52 - Oui, il y a beaucoup qui sont arrivés en catastrophe
01:15:54 dans les années 30. - Et puis, dans un pays républicain,
01:15:56 il n'y a pas de statistiques. Aujourd'hui, on ne sait pas
01:15:58 combien il y a de Mahometans,
01:16:00 combien il y a de, comme on disait,
01:16:02 j'adore ce terme, combien il y a de
01:16:04 bouddhistes.
01:16:06 Non, mais c'est vrai, on n'a pas de statistiques religieuses.
01:16:08 - Oui, je comprends. Donc, le chiffre,
01:16:10 j'ai entendu parler de 500 000.
01:16:12 Il y a plus de 300 000, en tous les cas.
01:16:14 - On s'accorde, même avec Clersuel,
01:16:16 on n'a pas tellement d'admiration
01:16:18 l'un pour l'autre, mais
01:16:20 nous, 320, 330 000.
01:16:22 On a des moyens de savoir, si vous voulez,
01:16:24 d'abord parce que les Juifs
01:16:26 qui sont allés s'inscrire,
01:16:28 bon, ils étaient obligés. Ils ne sont pas tous
01:16:30 allés, mais la plupart, au moins
01:16:32 90 %, ils sont allés.
01:16:34 Ils n'avaient rien à craindre, ils ne pouvaient pas savoir.
01:16:36 Et puis, ils vivent dans un pays qui les a accueillis,
01:16:38 qui les admire, la République et tout.
01:16:40 - Ils ne pensaient pas que la France allait être battue.
01:16:42 - C'est ça le crime de la France.
01:16:44 - Là, elle est déjà battue, puisque c'est en octobre.
01:16:46 - Le vrai crime de la France, c'est de ne pas avoir préparé cette guerre,
01:16:48 surtout depuis 1936.
01:16:50 Les francs populaires,
01:16:52 en fait, ne font pas forcément.
01:16:54 - Oui, on ne va pas
01:16:56 se tirer dans ce domaine,
01:16:58 mais tout montre
01:17:00 que l'impréparation
01:17:02 de la France,
01:17:04 elle n'est pas liée au fonds populaires.
01:17:06 Elle est liée, malheureusement,
01:17:08 à l'état-major, à Pétain, notamment.
01:17:10 Les thèses d'histoire
01:17:12 économique, ce n'est pas ma spécialité,
01:17:14 mais sont extrêmement claires.
01:17:16 - C'est là où Pétain est coupable, c'est comme l'île de la guerre, en fait.
01:17:18 Dans les années 1933-1934.
01:17:20 - Absolument.
01:17:22 - Et combien d'autres ?
01:17:24 - On va livrer aux Allemands, juste quand même,
01:17:26 pour terminer, c'est terrible,
01:17:28 on va livrer aux Allemands, donc un peu plus de
01:17:30 10 000 Juifs,
01:17:32 la plupart étrangers,
01:17:34 apatrides, etc.,
01:17:36 qu'on va livrer au nord de la
01:17:38 ligne de démarcation, qu'on va livrer
01:17:40 aux Allemands, après les avoir internés dans des
01:17:42 camps de zone sud. - Pour pouvoir protéger les Juifs français.
01:17:44 C'est le but.
01:17:46 - Oui. - Alors quel est le chiffre ?
01:17:48 Parce que j'ai entendu dire plusieurs choses,
01:17:50 Eric Zemmour s'en est... Vous parlez, en tous les cas,
01:17:52 René Fievre parle
01:17:54 du cas Zemmour,
01:17:56 qui a dit que 95% des Juifs
01:17:58 français ont été sauvés.
01:18:00 C'est peut-être pas 95%, mais c'est aux alentours de 90.
01:18:02 - Concrètement, alors...
01:18:04 - Ce qui est rare dans un pays occupé.
01:18:06 On a réussi à les sauver.
01:18:08 - Là, on peut être extrêmement précis, parce que
01:18:10 il y a un historien que j'admire beaucoup,
01:18:12 dont tous les
01:18:14 héritiers, quelque part,
01:18:16 ni l'héritage ne le cite jamais,
01:18:18 c'est Léon Poliakoff.
01:18:20 Et puis un Américain qui s'appelle Raoul Hilbert,
01:18:22 c'est le personnage qu'on voit dans le film "Shoah"
01:18:24 de Lanzmann,
01:18:26 qui ont parfaitement
01:18:28 démonté cette chose, alors qu'on peut
01:18:30 condamner moralement.
01:18:32 C'est-à-dire que pour sauver leurs nationaux,
01:18:34 les Français
01:18:36 ont livré les étrangers.
01:18:38 Et donc, si vous voulez...
01:18:40 Alors, c'est une faute morale,
01:18:42 je suis tout à fait d'accord.
01:18:44 - Oui, mais c'était ça ou quoi ?
01:18:46 - Alors, l'idée
01:18:48 de mes contradicteurs, c'est de dire
01:18:50 "Mais il ne serait rien passé,
01:18:52 parce que les Allemands n'auraient rien fait,
01:18:54 la France n'est pas la Pologne et tout."
01:18:56 - Et en Hollande ?
01:18:58 - On ne sait pas...
01:19:00 - Et en Belgique, le chiffre des
01:19:02 juifs, des nationaux
01:19:04 déportés est bien
01:19:06 supérieur ailleurs qu'en France.
01:19:08 - Bien sûr, mais ce que je veux dire, c'est que
01:19:10 je ne fais pas du chrony. Je ne peux pas
01:19:12 parler de ce qui se serait
01:19:14 passé si... - On peut comparer avec d'autres
01:19:16 pays occupés où les juifs ont été
01:19:18 raflés, y compris les nationaux.
01:19:20 - Je reprends mon... - Raflés, arrêtés, déportés.
01:19:22 - Mon...
01:19:24 Les chiffres-là sont...
01:19:26 ne sont pas contestables.
01:19:28 75%
01:19:30 de la communauté juive
01:19:32 n'a pas été déportée. 75%
01:19:34 de l'ensemble de la communauté juive.
01:19:36 - Français et étrangers à patrie.
01:19:38 Tout compris.
01:19:40 - 75%. Ce qui
01:19:42 fait, donc, qu'il y a eu un peu plus
01:19:44 de 76.000 juifs déportés
01:19:46 parce que juifs. On est bien d'accord.
01:19:48 Il y a eu des déportés politiques, des déportés
01:19:50 résistants qui étaient juifs. Mais ce n'est pas pour ça
01:19:52 qu'ils sont déportés. Ils sont déportés comme résistants
01:19:54 ou comme...
01:19:56 criminels.
01:19:58 - Beaucoup de résistants ont été déportés sans être juifs.
01:20:00 - Les nazis,
01:20:02 oui, enfin, eux...
01:20:04 - Alors, les chiffres. 75%.
01:20:06 - 75% du total
01:20:08 de la communauté des juifs qui vivaient
01:20:10 en France. 76.000
01:20:12 ont été déportés. Donc, à peu près
01:20:14 le quart.
01:20:16 Sur lesquels ne sont rentrés qu'un peu plus de
01:20:18 3.500 ou quelque chose comme ça.
01:20:20 Donc, beaucoup, d'ailleurs, sont morts très vite
01:20:22 parce qu'ils étaient dans des étatelles, etc.
01:20:24 Alors, si maintenant on entre dans les détails
01:20:26 de ce qu'a fait Paul Yacov
01:20:28 depuis les années... début des
01:20:30 années 50,
01:20:32 on découvre que
01:20:34 ces 75%
01:20:36 recouvrent
01:20:38 des réalités bien différentes.
01:20:40 Pour les juifs français,
01:20:42 on est bien d'accord,
01:20:44 c'est 92%
01:20:46 des juifs qui n'ont pas été
01:20:48 déportés. 92%.
01:20:50 - C'est un peu trop réussi, il s'est quitté avec Zemmour et tout le monde lui est tombé dessus.
01:20:52 - Ça, c'est un gros
01:20:54 problème que Zemmour soit entré
01:20:56 dans cette... - Mais il avait raison.
01:20:58 - Oui, non, mais je ne sais pas.
01:21:00 Maintenant, moi, je ne peux rien dire
01:21:02 sans qu'on me dise "Ah, vous pensez comme Zemmour".
01:21:04 Moi, je ne sais pas ce que pense Zemmour, je ne l'ai pas lu
01:21:06 et puis ce n'est pas un historien. - Mais quand il dit
01:21:08 94% des juifs français ont été sauvés, c'est pas loin.
01:21:10 Vous l'avez 92. - Ah oui, absolument.
01:21:12 Et à peu près 52%
01:21:14 des juifs étrangers.
01:21:16 La moyenne, il y avait moins de juifs étrangers
01:21:18 que de juifs français, c'est
01:21:20 75%.
01:21:22 75%.
01:21:24 Et donc, si on compare aux pays
01:21:26 comparables, c'est-à-dire
01:21:28 la Belgique, c'est-à-dire
01:21:30 les Pays-Bas, c'est-à-dire
01:21:32 la Norvège, et bien
01:21:34 Belgique et Norvège, c'est
01:21:36 50% de la population qui a été
01:21:38 déportée, 25% en France,
01:21:40 et si on considère les Pays-Bas,
01:21:42 c'est 75%
01:21:44 des juifs qui ont été déportés.
01:21:46 Alors il y a des gens comme
01:21:48 Semlin et tout qui ont expliqué,
01:21:50 qui ont écrit des livres là-dessus pour
01:21:52 célébrer, et ils ont
01:21:54 raison, l'héroïsme des français,
01:21:56 leur solidarité, les gens qui ont caché
01:21:58 des juifs, qui sont parfois
01:22:00 justes maintenant, mais ils sont tous morts
01:22:02 pratiquement. - Beaucoup de français ont porté secours
01:22:04 aux juifs. - Bien sûr, et puis,
01:22:06 on met en avant l'existence
01:22:08 de zones montagneuses
01:22:10 qui effectivement étaient
01:22:12 difficiles quand même, c'était
01:22:14 plus facile de cacher des enfants
01:22:16 dans une ferme
01:22:18 dans le Cantal, etc. - La Côte d'Azur.
01:22:20 - Et puis mettent en avant
01:22:22 aussi l'existence
01:22:24 de pays
01:22:26 où des juifs ont réussi
01:22:28 à se réfugier, c'est l'Espagne,
01:22:30 ils ne sont pas forcément bien accueillis,
01:22:32 c'est difficile de traverser les Pyrénées, mais enfin
01:22:34 la Suisse, dont on sait qu'elle a
01:22:36 envoyé un nombre quand même assez important
01:22:38 de juifs qui allaient
01:22:40 se réfugier, et puis
01:22:42 l'Italie. Alors,
01:22:44 tout ça est tout à fait valable, est parfaitement
01:22:46 recevable. J'ai juste remarqué
01:22:48 jadis, quand on se causait encore à Sémelin,
01:22:50 que la montagne,
01:22:52 le relief, la Norvège est pas
01:22:54 mal située dans ce domaine,
01:22:56 et qu'il est difficile de dire que
01:22:58 les français ont été plus
01:23:00 héroïques que les
01:23:02 Hollandais, enfin les gens des Pays-Bas.
01:23:04 - Pourtant ils l'ont été.
01:23:06 - On sait pas, on sait pas.
01:23:08 - 75% et 25%
01:23:10 en France, il y a passé
01:23:12 une résistance française.
01:23:14 - Oui, mais, alors,
01:23:16 c'est là que je choque tout le monde.
01:23:18 Si 75%
01:23:20 des juifs, etc.,
01:23:22 c'est par l'existence de Michy,
01:23:24 d'un gouvernement légal, qui quoi
01:23:26 qu'on en dise... - C'est à protéger.
01:23:28 - Lisez ce livre
01:23:30 essentiel. - Finissez votre phrase.
01:23:32 - Lisez ce livre essentiel
01:23:34 de Timothy Snyder,
01:23:36 qui est un historien américain
01:23:38 qui a écrit un livre, deux,
01:23:40 enfin plusieurs, un qui est terrible,
01:23:42 qui s'appelle "Terre Noire", et l'autre s'appelle
01:23:44 "Terre de Sang". Il s'intéresse
01:23:46 au sort des juifs dans
01:23:48 l'Ukraine actuelle, la Pologne actuelle, etc.
01:23:50 Et il montre que ces
01:23:52 juifs ont été
01:23:54 exterminés, hein, à 98
01:23:56 ou 99%, parce
01:23:58 qu'il n'y avait plus d'État,
01:24:00 ni d'administration pour les protéger.
01:24:02 Il ne s'occupe pas de la France
01:24:04 parce qu'il la connaît mal, mais il a quand même
01:24:06 cette phrase en disant que les
01:24:08 pays où est resté en place un
01:24:10 gouvernement et une administration,
01:24:12 c'est ça aussi la différence avec les
01:24:14 Hollandais et les Belges.
01:24:16 Ce sont les pays où...
01:24:18 Et puis maintenant, regardons du point de vue allemand.
01:24:20 - Les pays où les Allemands n'ont pas pu faire
01:24:22 ce qu'ils voulaient, parce qu'il y avait une résistance
01:24:24 qui s'appelait l'État français.
01:24:26 - Il y avait un État.
01:24:28 - Il faut le dire.
01:24:30 - C'est ce que j'ai écrit,
01:24:32 mais je ne le dis pas, je l'écris.
01:24:34 Et donc, ce qui se
01:24:36 passe, si vous voulez,
01:24:38 c'est que...
01:24:40 c'est un argument qui n'est pas recevable
01:24:42 par des gens qui sont complètement
01:24:44 dans la doxa.
01:24:46 L'antisémitisme français,
01:24:48 c'est le pire. On oublie que c'est celui
01:24:50 de gauche et pas celui de droite.
01:24:52 Enfin, vous voyez, il y a un reversement de tout.
01:24:54 - Alors, je remarque,
01:24:56 il nous reste un quart d'heure ou vingt minutes. On a encore
01:24:58 plusieurs sujets à aborder, j'ai au moins trois questions.
01:25:00 - Ben, si vous n'êtes pas fatigué,
01:25:02 nous allons en couper.
01:25:04 - Non, non, non. Poursuivons.
01:25:06 Il y a d'autres faits
01:25:08 qu'ont trouvé cette fameuse
01:25:10 affaire de l'étoile jaune.
01:25:12 Vous prouvez,
01:25:14 par des lettres de Darland
01:25:16 et de Laval aussi...
01:25:18 - Des échanges avec
01:25:20 les autorités françaises et des Allemands.
01:25:22 - Les autorités françaises ont refusé.
01:25:24 - Absolument.
01:25:26 - Alors qu'on dit
01:25:28 Vichy a imposé.
01:25:30 - Vichy s'est toujours opposé à l'étoile jaune.
01:25:32 C'est très clair.
01:25:34 Rappelons la genèse
01:25:36 de l'étoile jaune.
01:25:38 D'abord, les Juifs étaient
01:25:40 discriminés en Allemagne.
01:25:42 On leur imposait justement le port d'Anacine, etc.
01:25:44 Et donc, quand les premiers
01:25:46 attentats contre des troupes allemandes ont lieu,
01:25:48 je ne veux pas
01:25:50 ridiculiser des gens qui ont laissé
01:25:52 leur vie à ces jeunes résistants.
01:25:54 Mais il faut quand même bien dire
01:25:56 que parfois, c'est les pieds nickelés
01:25:58 les malheureux.
01:26:00 Quand vous lisez les rapports de France d'abord
01:26:02 de Charles Tillon qui vous dit
01:26:04 "Un détachement allemand a été grenadé
01:26:06 sur les Champs-Elysées, 30 morts, etc."
01:26:08 Tout ça, c'est du pipeau.
01:26:10 Bien sûr, quand on va regarder les constatations
01:26:12 de la police municipale,
01:26:14 on a du verre brisé et tout.
01:26:16 Alors l'étoile jaune,
01:26:18 les Allemands et très précisément
01:26:20 le MBF, c'est-à-dire le
01:26:22 militaire Befehl-Saber-In-Frankreich
01:26:24 qui s'appelle Otto von Stülpnagel,
01:26:26 découvre sans problème
01:26:28 que la plupart des auteurs d'attentats
01:26:30 sont des jeunes juifs communistes.
01:26:32 Et comme le problème d'un juif,
01:26:34 ce n'est pas une race, on ne peut pas les reconnaître,
01:26:36 il demande depuis le
01:26:38 mois de décembre 1941
01:26:40 qu'on impose
01:26:42 un signe de reconnaissance
01:26:44 aux juifs,
01:26:46 comme en Allemagne,
01:26:48 pour les reconnaître. Et donc,
01:26:50 pendant 3, 4,
01:26:52 5 mois, les Français sont debout
01:26:54 sur les freins, ils refusent.
01:26:56 La lettre de Darlan que je signais
01:26:58 tout à fait, et c'est intéressant
01:27:00 parce qu'il faut utiliser des arguments
01:27:02 que les Allemands peuvent comprendre.
01:27:04 Alors en gros, on leur dit, ça serait
01:27:06 discriminer les juifs, ça serait attirer
01:27:08 à l'égard des juifs la sympathie
01:27:10 du reste des Français.
01:27:12 Tout ça, c'est faux cul,
01:27:14 parce qu'il faut bien trouver des arguments.
01:27:16 Et donc,
01:27:18 Darlan est remplacé, comme vous le savez,
01:27:20 en avril 1942 par Laval,
01:27:22 et Laval refuse
01:27:24 la même chose. La conséquence,
01:27:26 c'est que les Allemands n'obtenant pas
01:27:28 une loi française vont être obligés
01:27:30 de prendre une ordonnance. C'est la
01:27:32 8ème, elle date de la fin du mois
01:27:34 de mai 1942, elle impose
01:27:36 à tous les juifs à partir du début
01:27:38 de juin, le port d'une étoile,
01:27:40 la taille de la paume d'une main,
01:27:42 l'âge de 6 ans, etc.
01:27:44 Uniquement en zone occupée. Ah bien sûr !
01:27:46 Et quand les Allemands
01:27:48 envahiront la zone libre,
01:27:50 qu'on appelle plus libre,
01:27:52 mais zone sud,
01:27:54 à partir du 11 novembre 1942,
01:27:56 jamais le gouvernement de Vichy
01:27:58 n'imposera l'étoile juive.
01:28:00 Mais là, on vit dans des légendes,
01:28:02 etc. Un jour,
01:28:04 je me trouve avec une dame
01:28:06 qui témoigne, elle est à Toulouse,
01:28:08 elle dit qu'elle a porté l'étoile.
01:28:10 Toulouse est en zone libre,
01:28:12 et puis en zone sud, il n'y a pas d'étoile.
01:28:14 Pourquoi la presse continue à dire
01:28:16 que Vichy, c'est-à-dire la France,
01:28:18 a imposé l'étoile jaune ?
01:28:20 J'ai vu quelque part, là, sur vos rayonnages,
01:28:22 qu'il y avait un numéro de L'Express.
01:28:24 L'Express produit
01:28:26 une interview
01:28:28 de ce jeune historien,
01:28:30 grand spécialiste, etc.,
01:28:32 qui s'appelle Laurent Jolie,
01:28:34 et il y a sa photo, et le titre au-dessus de sa photo,
01:28:36 c'est "Comment Vichy a imposé l'étoile jaune ?"
01:28:38 Un mensonge pur !
01:28:42 Alors, autre fait
01:28:44 intéressant,
01:28:46 on a attribué à la...
01:28:48 - Ils sont tous intéressants.
01:28:50 - J'ai dit "encore un autre",
01:28:52 on pourrait refaire tout votre livre,
01:28:54 mais j'ai encore deux autres questions après celle-ci.
01:28:56 Donc ça fait trois.
01:28:58 Autre fait marquant,
01:29:00 qui m'a étonné,
01:29:02 c'est l'assassinat que l'on attribue
01:29:04 à la milice de l'ancien ministre de l'Intérieur
01:29:06 et chef de cabinet de Foch,
01:29:08 - De Clemenceau.
01:29:10 - De Clemenceau, pardon, excusez-moi.
01:29:12 - Georges Mandel.
01:29:14 - Georges Mandel.
01:29:16 J'ai vu des images,
01:29:18 des faux films,
01:29:20 où on voit Mandel poursuivi par la police.
01:29:22 - Par des miliciens qui le tuent à la mitraillette.
01:29:24 - C'est-à-dire par les Français.
01:29:26 Et c'est faux.
01:29:28 - Alors on a écrit, là encore,
01:29:30 un livre qui ne nous a pas fait que des amis,
01:29:32 mais c'est ça,
01:29:34 l'histoire, c'est démythifié et tout.
01:29:36 - On va redresser tout ce mensonge.
01:29:38 - Mandel, l'ordre est venu
01:29:40 de très haut à Berla.
01:29:42 On est sûr,
01:29:44 au moins de Kaltenbrunner,
01:29:46 mais on pense que même Hitler,
01:29:48 il n'écrit jamais rien, il n'y a jamais de trace,
01:29:50 a donné son aval.
01:29:52 - C'était le chef de cabinet de Clemenceau.
01:29:54 Donc pour Hitler, c'était un vieil ennemi.
01:29:56 - Il le déteste, c'est lui
01:29:58 qui a mené aussi l'occupation française
01:30:00 dans la Rhénanie, etc.
01:30:02 Hein, Mandel ?
01:30:04 C'est une des têtes de Turc.
01:30:06 - C'est trop gentil ce que je dis,
01:30:08 mais c'est une haine que lui voue Hitler.
01:30:11 Donc vous le savez, il a été arrêté
01:30:13 par le gouvernement de Vichy,
01:30:15 ce n'est pas la gloire du gouvernement de Vichy,
01:30:17 il a été mis en forteresse.
01:30:19 - En 44.
01:30:21 - Dès 40, il était enfermé.
01:30:23 - Ah oui, au début.
01:30:25 - Et en 43 ou quelque chose comme ça,
01:30:27 je ne me souviens plus, excusez-moi,
01:30:29 j'aurais dû préparer des fiches,
01:30:31 les Allemands viennent le chercher
01:30:33 au fort du Portalet, je ne sais plus où,
01:30:35 dans les Pyrénées,
01:30:37 et l'emmènent, comme Léon Blum
01:30:39 et quelques autres, ils sont à Brunwald,
01:30:41 ils ne sont pas en pyjama rayé,
01:30:44 tondu, en sabots et tout,
01:30:46 ils sont dans une maison
01:30:48 qui est dans l'enceinte du camp,
01:30:50 mais un petit peu séparée du camp.
01:30:52 Et les Français voient arriver
01:30:57 en juin 1944, Mandel,
01:31:01 il est d'abord hébergé dans cette maison
01:31:04 cette magnifique maison,
01:31:06 vous savez, avenue Fauche,
01:31:08 dans ces allées où il y a des grilles,
01:31:11 et puis qu'on entre,
01:31:13 et puis alors là c'est somptueux et tout,
01:31:15 bref.
01:31:17 Et il est ensuite envoyé à la santé,
01:31:20 où il refuse d'ailleurs d'être signalisé,
01:31:23 comme on dit,
01:31:25 parce qu'il veut savoir pourquoi on l'arrête,
01:31:27 et là, des gens de la milice,
01:31:31 du deuxième service de la milice,
01:31:34 lui annoncent qu'ils vont le conduire à Vichy,
01:31:38 où il sera jugé,
01:31:40 les Allemands espèrent qu'il va être jugé,
01:31:43 condamné et fusillé,
01:31:45 ça sera un exemple,
01:31:46 puis qu'après ça sera Léon Blum, etc.
01:31:48 Alors, nos miliciens
01:31:51 prennent la route de Vichy,
01:31:53 avec Mandel,
01:31:54 absolument, deux voitures,
01:31:56 et passent le carrefour de l'Obelisk,
01:32:00 le conducteur,
01:32:02 qui se fait appeler Mansuit,
01:32:04 mais dont le vrai nom est Solnène,
01:32:06 et qui est un membre de Frechdat,
01:32:10 du deuxième service de la milice,
01:32:12 mais qui est un authentique membre du USD,
01:32:15 - Service allemand, donc ?
01:32:17 - Il est aux ordres des Allemands,
01:32:19 mais ça on ne le sait pas.
01:32:20 - Le vrai collabo ?
01:32:21 - Tue Mandel.
01:32:23 Il le tue,
01:32:25 techniquement c'est intéressant,
01:32:27 pas de mitraillette ni rien,
01:32:29 au revolver, c'est un tireur d'élite,
01:32:31 première balle dans la joue et la tête de Mandel,
01:32:35 et puis après il avance vers lui,
01:32:37 et au fur et à mesure qu'il avance, il tire.
01:32:39 Ce qui fait que les...
01:32:41 J'ai fait tout retravailler par un balisticien
01:32:43 et par un médecin légal,
01:32:47 ce qui explique que les trajectoires des balles
01:32:49 sont sous des angles différents,
01:32:51 parce qu'ils s'approchent.
01:32:52 Il tire quelques balles dans la voiture,
01:32:54 et les autres ne sont pas du tout au courant,
01:32:57 les autres miliciens avec lui,
01:32:58 ils sont complètement affolés,
01:33:00 et c'est là que Mansu a cette phrase terrible,
01:33:03 il dit "de toute façon des deux côtés,
01:33:05 ils sont d'accord".
01:33:07 Alors, c'est quoi les deux côtés ?
01:33:09 C'est les Allemands ?
01:33:10 - Et alors, apprenant ça, Darnan...
01:33:14 - Il rapporte le corps à Versailles,
01:33:18 parce que l'intendant de police de Versailles,
01:33:23 qui s'appelle Anquetin, est un milicien,
01:33:26 et aussitôt qu'il apprend la nouvelle,
01:33:30 effectivement, Darnan,
01:33:32 on a plusieurs témoignages,
01:33:34 dit "les cons".
01:33:36 - Darnan, chef de la milice ?
01:33:38 - Oui, secrétaire général au maintien de l'ordre,
01:33:41 parce qu'il a tout de suite compris
01:33:43 que ce crime, on va l'imputer à la milice,
01:33:47 vous savez, il y a un film d'Hitchcock
01:33:49 formidable qui s'appelle "Faux coupable",
01:33:51 tout désigne l'assassin,
01:33:53 militia, etc.
01:33:55 - Et ce n'est pas une décision de la milice,
01:33:57 mais vous dites au fond d'un hitler en personne.
01:34:00 - Sans doute, en tout cas, au moins de Carlton Brunel.
01:34:02 - Alors, dernier chapitre de notre conversation,
01:34:04 si vous avez encore un petit quart d'heure,
01:34:06 Jean-Marc Berlière...
01:34:07 - Et de la salive !
01:34:08 - Et de la salive, reprenez un verre d'eau,
01:34:11 ou un petit peu de vin rouge,
01:34:13 on a des verres, vous savez,
01:34:15 on a même du vin sur cette table.
01:34:17 La fabrication.
01:34:21 Là, vous rétablissez quelques vérités.
01:34:23 Il se passe quelque chose dans les années 1970,
01:34:27 et d'abord, la publication d'un livre
01:34:31 d'un historien américain, Robert Paxton,
01:34:35 qui s'appelle "La France de Vichy",
01:34:37 et qui est accusatoire pour la France,
01:34:39 dont on vient de dire qu'au fond, les Français,
01:34:41 comme même les autorités françaises,
01:34:43 ont résisté pied à pied avec les moyens du bord,
01:34:46 c'est-à-dire les moyens d'un pays
01:34:48 qui n'était plus... qui était occupé.
01:34:50 - Qui n'était plus en état de résister,
01:34:52 qui a fait ce qu'il a pu.
01:34:54 - Et ça, les Hordes Vichy devaient penser
01:34:56 qu'on pouvait diriger un pays sans avoir de souveraineté.
01:34:58 Mais c'est ce que font tous les gouvernants d'aujourd'hui.
01:35:01 Bon.
01:35:02 Vous écrivez...
01:35:04 "Pour critiquable qu'il soit,
01:35:06 la France de Vichy a joué un rôle historique indéniable."
01:35:10 La France de Vichy, c'est l'ouvrage de Paxton, 1972.
01:35:13 "La synthèse de Paxton est confuse,
01:35:15 les époques sans cesse mélangées,
01:35:17 mais on peut dire que son livre s'adressait
01:35:19 à un public anglo-saxon,
01:35:21 et les générations suivantes ont construit sur lui
01:35:23 un Vichy hors-sol,
01:35:25 devenu une sorte de mal absolu,
01:35:27 construit de toutes pièces.
01:35:29 Son travail, souvent brouillon et partial,
01:35:31 a été utilisé, puis éclipsé
01:35:33 par les Karlsfeld et bien d'autres."
01:35:35 Vous ne citez pas Bernard-Henri Lévy,
01:35:37 et c'est moi qui en parle,
01:35:39 car Bernard-Henri Lévy cite Paxton
01:35:41 dans son grand ouvrage
01:35:43 "L'idéologie française",
01:35:45 publié en 1981, en mars 1981,
01:35:47 où Lévy s'appuie sur Paxton,
01:35:49 qui insinue que c'est la France
01:35:51 qui a poussé Vichy,
01:35:53 d'ailleurs il le dira clairement
01:35:55 un peu plus tard,
01:35:57 que c'est la France,
01:35:59 ou Vichy, qui l'assimile à la France,
01:36:01 à pousser les Allemands
01:36:03 à recourir à la solution finale,
01:36:05 c'est-à-dire que le véritable criminel, c'est nous,
01:36:07 et pas l'Allemagne.
01:36:09 Bernard-Henri Lévy s'appuie sur ce livre
01:36:11 pour en déduire
01:36:13 "L'idéologie française",
01:36:15 que l'idéologie française
01:36:17 est pire que le nazisme allemand.
01:36:19 C'est un livre publié aux éditions
01:36:21 "Grasset",
01:36:23 je vais livrer ce nom à l'Ignominie nationale,
01:36:25 "Grasset",
01:36:27 ce n'est pas parce qu'ils m'ont refusé
01:36:29 un livre, ce n'est pas du tout la question,
01:36:31 c'est qu'ils ont publié des livres
01:36:33 mensongers et délibérément injurieux
01:36:35 pour la France.
01:36:37 Ensuite, qu'arrive-t-il ?
01:36:39 Une fabrication, une falsification,
01:36:41 c'est le titre de votre livre.
01:36:43 Comment ça se passe ?
01:36:45 Comment les historiens arrivent à dire le contraire de la vérité ?
01:36:47 Sur l'Etoile jaune, par exemple,
01:36:49 comment ça se passe ? Vous êtes universitaire.
01:36:51 Pourquoi les universitaires ne l'établissent pas ?
01:36:55 Ce sont des choses qui me dépassent.
01:36:57 J'ai des collègues,
01:36:59 heureusement, tout à fait honnêtes
01:37:01 et intéressants.
01:37:03 Je prends l'exemple
01:37:05 de Jean-Pierre Azéma.
01:37:07 Jean-Pierre Azéma,
01:37:09 il écrit que
01:37:11 c'était un bien
01:37:13 que d'un seul coup, on remette Vichy
01:37:15 en lumière parce que Vichy
01:37:17 n'existait plus dans l'historiographie
01:37:19 de même que dans les plaques
01:37:21 qui jalonnent le territoire
01:37:23 de la mémoire, je vous disais, ici des enfants
01:37:25 et les communistes,
01:37:27 pareil.
01:37:29 Les communistes pour se sauver,
01:37:31 effacer leur collaboration initiale,
01:37:33 et De Gaulle
01:37:35 pour que les Français
01:37:37 soient fiers, malgré leur défaite,
01:37:39 de rester Français.
01:37:41 D'ailleurs, ils peuvent l'être, à mon avis.
01:37:43 Les Français sont bien comportés sous Vichy,
01:37:45 pour moi. L'immense majorité des Français
01:37:47 s'est très bien comportée.
01:37:49 Pourquoi ?
01:37:51 Parce que toutes les oligarchies,
01:37:53 toutes les élites, tous les journalistes,
01:37:55 vous avez cité L'Express, pourquoi tout le monde reprend
01:37:57 la thèse anti-française alors qu'elle est fausse ?
01:37:59 En général, un pays
01:38:01 fait tout pour modifier
01:38:03 l'histoire dans le sens
01:38:05 où ce pays est magnifié,
01:38:07 où ce pays est
01:38:09 illustré pour son courage,
01:38:11 son indépendance, ses vertus.
01:38:13 Là, la France entière, la France officielle,
01:38:15 ses vertus
01:38:17 ont diminué la France,
01:38:19 et ont insulté les Français.
01:38:21 Comment expliquez-vous ça ?
01:38:23 Écoutez, pour être tout à fait franc
01:38:25 avec vous,
01:38:27 Bernard-Henri Lévy,
01:38:31 pour moi, c'est comme,
01:38:33 ils ne tiennent pas du tout le même raisonnement,
01:38:35 mais c'est comme Zemmour.
01:38:37 Ce sont des gens qui ne sont pas historiens,
01:38:39 qui arrivent dans un champ
01:38:41 où ils sont contestés, bien sûr,
01:38:43 contestables, vous l'avez expliqué
01:38:45 pour Bernard-Henri Lévy,
01:38:47 et ils utilisent
01:38:49 des arguments
01:38:51 dont les finalités
01:38:53 quelque part m'échappent.
01:38:55 Est-ce que Bernard-Henri Lévy
01:38:57 veut
01:38:59 traduire
01:39:01 son horreur
01:39:03 de la France antisémite ?
01:39:05 Est-ce qu'il fait ça ?
01:39:07 Alors, moi,
01:39:09 je ne suis pas psychanalyste.
01:39:11 Je pense que ça relève de la psychanalyse.
01:39:13 Ce sont des gens qui,
01:39:15 quand Paxton écrit son livre,
01:39:17 il faut quand même bien imaginer
01:39:19 qu'on vit dans une histoire
01:39:21 qui est aussi falsifiée,
01:39:23 mais dans l'autre sens.
01:39:25 Ben si, il n'y a plus de Français collaborateurs,
01:39:27 il n'y a plus de...
01:39:29 Je te le disais tout à l'heure quand même,
01:39:31 dans la thèse
01:39:33 gaulliste de la France résistante,
01:39:35 même si elle n'a pas été résistante
01:39:37 dans les faits, et si tout le monde n'a pas pris un fusil,
01:39:39 les Français,
01:39:41 chaque fois qu'ils ont pu,
01:39:43 ont pris la défense d'abord des Juifs,
01:39:45 qui les a protégés,
01:39:47 et pris
01:39:49 tout ce qu'ils ont pu prendre
01:39:51 comme une action
01:39:53 quelquefois discrète,
01:39:55 pour passer des armes
01:39:57 dans une brouette pleine de linge sale,
01:39:59 comme j'ai fait à ma famille,
01:40:01 pour passer d'une zone à l'autre à Libourne,
01:40:03 en Gironde,
01:40:05 les Français ont fait beaucoup de choses.
01:40:07 Il y a un livre qui s'appelle "La Nébuleuse du Névouement",
01:40:09 la thèse de la résistance active
01:40:11 de tous les Français est fausse,
01:40:13 mais il y a une résistance passive,
01:40:15 et chaque fois qu'on en avait l'occasion,
01:40:17 on résistait,
01:40:19 on protégeait les résistants.
01:40:21 Bien sûr, mais je ne sais pas ce qui a motivé
01:40:23 Paxton,
01:40:25 d'abord, on n'était pas ni un spécialiste
01:40:27 de la France, ni de Vichy, ni rien,
01:40:29 il a écrit
01:40:31 sur l'armée française,
01:40:33 c'est intéressant d'ailleurs,
01:40:35 parce que cette armée française qui est réduite
01:40:37 à une armée d'armistice,
01:40:39 puis supprimée en 1942,
01:40:41 et tout. Après son projet,
01:40:43 d'après ce que j'en sais,
01:40:45 était d'écrire un livre
01:40:47 qui avait comme sujet
01:40:49 les Etats-Unis et la guerre du Vietnam.
01:40:51 Je ne sais pas pour quelles raisons
01:40:53 il a modifié les choses,
01:40:55 - Je devais le savoir !
01:40:57 - Mais après, ce qui est intéressant,
01:40:59 c'est qu'il a travaillé sur uniquement
01:41:01 les archives américaines.
01:41:03 Donc, il avait récupéré
01:41:05 beaucoup d'archives allemandes, etc.
01:41:07 - Les archives allemandes ?
01:41:09 - Les archives américaines et des archives allemandes.
01:41:11 - Comme vous écrivez dans "Le Nouveau Conservateur",
01:41:13 son travail brouillon et partial a été utilisé,
01:41:15 puis éclipsé par les Klarsfeld
01:41:17 et bien d'autres.
01:41:19 Alors,
01:41:21 là c'est presque ma dernière question,
01:41:23 c'est la dernière rubrique.
01:41:25 Parce qu'il n'y a pas
01:41:27 que les historiens qui se sont
01:41:29 pliés à la nouvelle doxa
01:41:31 anti-française.
01:41:33 Il y a eu, à partir des années 80,
01:41:35 un discours officiel
01:41:37 des commémorations,
01:41:39 notamment la commémoration
01:41:41 automatique
01:41:43 de la prétendue "Ralph"
01:41:45 enfin, l'arrestation en masse
01:41:47 de 16 juillet 1941.
01:41:49 Est-ce que
01:41:51 - 1942
01:41:53 - Est-ce que
01:41:55 l'historien que vous êtes
01:41:57 comprend,
01:41:59 par exemple,
01:42:01 que,
01:42:03 là c'est René Fievé qui enquête
01:42:05 sur les étapes, c'est le troisième auteur
01:42:07 de ce livre, comprend que
01:42:09 peu à peu, le premier à lâcher, c'est Mitterrand,
01:42:11 qui commence par
01:42:13 inaugurer une plaque.
01:42:15 Et ensuite,
01:42:17 il y a le grand discours de Chirac,
01:42:19 à peine élu,
01:42:21 en 1995, 16 juillet
01:42:23 1995, il dit,
01:42:25 Jacques Chirac, ce jour-là,
01:42:27 "La France a commis l'irréparable".
01:42:29 - Ce qui est un gros problème, parce que
01:42:31 évidemment, la France c'est qui ?
01:42:33 Il ne parle ni de la résistance,
01:42:35 ni des français à Alger,
01:42:37 ni à Londres, ni rien.
01:42:39 Alors, est-ce que c'est vrai ?
01:42:41 J'en sais rien, c'est comme les légendes.
01:42:43 On dit que
01:42:45 c'est la femme qui
01:42:47 corrigeait et rédigeait une partie
01:42:49 de ses discours. - Cristine Albanel.
01:42:51 - Voilà, Cristine Albanel, qui pour
01:42:53 éviter une répétition,
01:42:55 a dit "La France", que Chirac aurait dit
01:42:57 "La France, vous êtes sûrs ?"
01:42:59 Et puis, c'est passé comme ça. - Alors, il y a un passage
01:43:01 de René Fievé, les bras vous en tombent.
01:43:03 Cristine Albanel.
01:43:05 Alors, il faut dire, on est le 15 juillet,
01:43:07 c'est-à-dire le lendemain du 14,
01:43:09 tout le monde est parti en vacances.
01:43:11 Et je vois très bien comment ça se passe dans le cabinet ministériel.
01:43:13 Le président de la République
01:43:15 reste pour prononcer ce discours.
01:43:17 Il partira en vacances
01:43:19 le lendemain, d'ailleurs.
01:43:21 Cristine Albanel
01:43:23 lui présente un discours le
01:43:25 15 juillet, pour le lendemain,
01:43:27 où elle a rayé
01:43:29 au dernier moment
01:43:31 le mot "gouvernement de Vichy"
01:43:33 pour mettre "France"
01:43:35 parce qu'elle avait écrit - Éviter une répétition.
01:43:37 - Trois lignes plus haut,
01:43:39 "le gouvernement de Vichy". Elle n'a pas voulu,
01:43:41 vous voyez ce que c'est qu'une nation littéraire,
01:43:43 elle a voulu faire une répétition
01:43:45 et elle a mis "la France". Et Albanel témoigne
01:43:47 qu'elle n'avait pas compris
01:43:49 la portée de ce que devenait du coup
01:43:51 la phrase "la France a commis ce jour-là
01:43:53 l'irréparable". - Oui, parce qu'elle mettait dans le même sac
01:43:55 tout le monde. - Et que Chirac
01:43:57 a tiqué en relisant et qu'il
01:43:59 aurait dit qu'il y a quand même "la France".
01:44:01 Et il est passé dessus, avec une désinvolture,
01:44:03 une frivolité
01:44:05 qui est celle de toute notre classe politique, d'ailleurs.
01:44:07 - Oui, et puis de... - Parce qu'il révoquait
01:44:09 et la France, et l'histoire de France,
01:44:11 c'est un légalisme. Parce que si "la France a commis
01:44:13 l'irréparable", ça veut dire que De Gaulle n'existait pas.
01:44:15 - Ah bien sûr, la résistance. - C'était un félon.
01:44:17 - René Fiévet
01:44:19 développe merveilleusement cette affaire
01:44:21 en expliquant
01:44:23 les conséquences,
01:44:25 les incohérences,
01:44:27 avec le Conseil d'État, etc.
01:44:29 Vous avez raison.
01:44:31 Mais pour revenir à Paxton,
01:44:33 bon,
01:44:35 il faut, je pense, revenir dans le contexte.
01:44:37 On est à la fin
01:44:39 des années 60.
01:44:41 Paxton commence à travailler
01:44:43 en 1966-1967.
01:44:45 C'est la guerre du Vietnam. Ce sont les critiques
01:44:47 terribles de De Gaulle
01:44:49 à l'égard des Américains et tout.
01:44:51 Et j'ai toujours eu
01:44:53 l'impression que ce livre
01:44:55 qui présente une France à genoux,
01:44:57 une France qui demande toujours plus
01:44:59 de collaboration,
01:45:01 qui incite les Allemands à faire toujours
01:45:03 le pire,
01:45:05 c'est une espèce de catharsis.
01:45:07 J'en sais rien. Il règle des comptes
01:45:09 quelque part. - Mais attendez.
01:45:11 - Et pourquoi des Français vont suivre
01:45:13 ça ? Alors là... - Et pourquoi
01:45:15 lancent-on cette machine ?
01:45:17 Vous êtes historien, agrégé d'histoire,
01:45:19 professeur des universités.
01:45:21 Et mérite maintenant.
01:45:23 Mais vous continuez à écrire,
01:45:25 vous continuez à faire... Parlons de l'expression
01:45:27 "le rat bibliothèque". Vous continuez
01:45:29 à chercher des archives.
01:45:31 Vous n'arrêtez pas.
01:45:33 On montrera à l'écran une succession de
01:45:35 vos ouvrages, qu'on trouve
01:45:37 d'ailleurs dans "Le Nouveau Conservateur",
01:45:39 toujours lui.
01:45:41 Mais,
01:45:43 au fond, est-ce que
01:45:45 les historiens ne sont pas
01:45:47 conscients que pour détruire un pays,
01:45:49 il faut détruire sa mémoire,
01:45:51 ou l'insulter ?
01:45:53 - C'est ce qui me pose
01:45:55 un problème... - Pas que toi, mais pas Birman.
01:45:57 - Un problème moral,
01:45:59 bien sûr. Comment
01:46:01 des collègues,
01:46:03 certains,
01:46:05 lesquels, du moins,
01:46:07 j'ai de la considération.
01:46:09 Alors, ils ont écrit
01:46:11 des choses très critiques
01:46:13 sur Paxton. Il y a Alain Gérard-Slamat,
01:46:15 et puis j'en ai trouvé... - Il n'y en a pas beaucoup,
01:46:17 on cite une... - Non, mais j'en ai quand même trouvé d'autres.
01:46:19 C'est parce que
01:46:21 j'ai fini par... - Fabrelus...
01:46:23 - J'ai fini par retrouver
01:46:25 le texte complet d'Alain Gérard-Slamat.
01:46:27 Et puis il y a quelqu'un d'autre.
01:46:29 Et...
01:46:31 Donc, ils sont bien conscients.
01:46:33 Alors, Paxton, comme je dis, c'est un
01:46:35 vichy hors-sol. C'est quand même...
01:46:37 Il mélange les époques.
01:46:39 Il fait des confusions
01:46:41 terribles. - Une fabrication.
01:46:43 - Oui, mais...
01:46:45 - Vous ne répondez pas à ma question,
01:46:47 cher professeur. - Non, mais des...
01:46:49 je veux dire, des obsédés
01:46:51 qui écrivent des textes
01:46:53 dans un but politique
01:46:55 ou etc. J'en ai connu
01:46:57 des centaines, des milliers.
01:46:59 Je ne sais pas qui, personnellement.
01:47:01 Mais ce qui ne m'est pas toujours
01:47:03 c'est l'absence, c'est ce que vous
01:47:05 soulignez, de réaction
01:47:07 des historiens.
01:47:09 Et des historiens, quand même,
01:47:11 qui sont bien placés pour savoir...
01:47:13 - Et les rétrospects politiques. - Vous savez,
01:47:15 quand je vois... Un jour, je suis invité
01:47:17 en Israël pour faire
01:47:19 dans un colloque qui est très intéressant
01:47:21 sur la France du Vichy, etc.
01:47:23 Et je me moque de Paxton en disant
01:47:25 "Saint Paxton est arrivé"
01:47:27 d'un seul coup. Voilà.
01:47:29 Et j'avais l'impression, mais vous savez,
01:47:31 c'est ce qu'on est en train de vivre à l'heure actuelle,
01:47:33 moi, on n'en sait plus.
01:47:35 On affirme. Et les journalistes
01:47:37 vont sans cesse se référer à
01:47:39 Paxton qu'ils n'ont généralement pas lu.
01:47:41 Et vous savez,
01:47:43 c'est le jeu du téléphone, les enfants.
01:47:45 - En enflant. - Chacun dit quelque chose.
01:47:47 - En enflant, en rajoutant.
01:47:49 - Oui, mais alors il y a quand même des officiels, parce qu'on en arrive
01:47:51 à ce dont on nous...
01:47:53 Au point où nous en étions
01:47:55 en partie, c'est le discours de Pithiviers
01:47:57 et d'Emmanuel Macron, le 16
01:47:59 juillet 2022.
01:48:01 Où il finit
01:48:03 par stigmatiser, bien sûr,
01:48:05 l'arrestation
01:48:07 massive de Juifs,
01:48:09 sous-entendant tout le temps que
01:48:11 les Français sont responsables, sans
01:48:13 mentionner une fois l'Allemagne.
01:48:15 - Bien sûr, je vous dis, c'est ça qui m'a scandalisé.
01:48:17 - L'Allemagne sort blanchie par la France.
01:48:19 - C'est pour ça que j'ai écrit
01:48:21 ce livre, et que j'ai mis
01:48:23 avec deux amis, sur le coup,
01:48:25 qui étaient plus compétents que moi dans tel domaine ou dans tel autre.
01:48:27 Il y a quelque chose que je ne
01:48:29 comprends pas, mais j'ai cité tout à l'heure...
01:48:31 - Moi je le dis, pour détruire un pays, il faut détruire sa mémoire.
01:48:33 Je vous le dis, c'est ça l'explication.
01:48:35 - Mais quel est l'intérêt d'un président
01:48:37 de la République qui n'arrête pas de dire...
01:48:39 - Vous pensez que le président de la République ne veut pas détruire le pays ?
01:48:41 - Je ne sais rien, moi je ne suis...
01:48:43 - Moi je vous le dis. - Je ne suis pas un psychanalyste, je vous disais.
01:48:45 - Il faut détruire sa mémoire.
01:48:47 - Mais quand ils vont en Algérie et qu'ils parlent
01:48:49 du crime contre
01:48:51 l'humanité qu'est la colonisation,
01:48:53 je ne suis pas du tout pour
01:48:55 la colonisation, mais c'est comme tout le reste,
01:48:57 ça n'est jamais ni noir ni blanc,
01:48:59 il y a du gris, du gris, du gris.
01:49:01 - Vous ne savez pas, monsieur le professeur,
01:49:03 à l'archive "Enseignement de gauche",
01:49:05 - Non, je ne sais plus rien.
01:49:07 - On avait dit quelque chose de gentil,
01:49:09 bien que de gauche vous trouviez que le travail
01:49:11 intellectuel sérieux est plutôt fait par la droite,
01:49:13 aujourd'hui, ça m'a fait plaisir.
01:49:15 - Et c'est vrai. - Notamment quelques organes de presse
01:49:17 dans le Nord, mais il y en a d'autres.
01:49:19 Vous savez bien que pour détruire
01:49:21 un pays, je répèterai tout,
01:49:23 pour diminuer
01:49:25 la liberté nationale, - Je ne comprends pas les motivations
01:49:27 des gens qui veulent détruire.
01:49:29 - Mais pour intégrer la France dans l'ensemble
01:49:31 euro-atlantique, tout simplement.
01:49:33 Il faut détruire la France pour qu'elle se
01:49:35 fonde dans un ensemble européen et atlantique
01:49:37 à direction washingtonienne,
01:49:39 otanienne, vous n'avez pas compris ? - Non.
01:49:41 - Eh bien moi je vous le dis.
01:49:43 - Je vous laisse
01:49:45 la responsabilité de cette hypothèse
01:49:47 qui est une hypothèse.
01:49:49 - Ah ah, de travail.
01:49:51 Ce livre a eu de grandes difficultés
01:49:53 pour conclure, je le montre de nouveau à l'écran.
01:49:55 Il est magnifique. Il est dû
01:49:57 à trois personnages d'un courage fou,
01:49:59 notamment vous-même, je vous redis
01:50:01 le nom des autres, Marc Fievé
01:50:03 et René Fievé et
01:50:05 Emmanuel Dechambault.
01:50:07 Grande difficulté à le faire paraître.
01:50:09 - Pas vraiment.
01:50:11 Les éditeurs,
01:50:13 dont l'un que vous avez cité
01:50:15 tout à l'heure, tout ça,
01:50:17 ils sont complètement compromis
01:50:19 dans cette doxa,
01:50:21 donc il n'est pas possible
01:50:23 qu'ils accueillent quelqu'un
01:50:25 qui dit que les auteurs
01:50:27 qu'ils publient mentent.
01:50:29 Donc moi,
01:50:31 j'ai pas cherché longtemps,
01:50:33 j'ai eu la chance d'être relativement
01:50:35 reconnu par un certain
01:50:37 nombre de gens,
01:50:39 dont j'ignore le reste
01:50:41 des publications.
01:50:43 - Moi, vous savez,
01:50:45 Jules Renard, mon ami Borgnes,
01:50:47 je le regarde de côté, ça ne m'intéresse pas
01:50:49 de savoir si l'Artilleur a publié
01:50:51 telle chose, des climatosceptiques
01:50:53 et tout. - Les éditions de l'Artilleur
01:50:55 ont recueilli votre livre. - Mais c'est quelqu'un
01:50:57 de courageux, Damien Sirex,
01:50:59 qui a publié ce livre. - Il fait un entretien
01:51:01 aussi au Nouveau Conservateur, je vous retiens.
01:51:03 - Eh bien c'est parfait. - Il publie des choses
01:51:05 très intéressantes, notamment sur la Covid. Il a publié
01:51:07 des livres dont personne ne voulait,
01:51:09 montrant statistiquement,
01:51:11 je cherche un numéro du journal,
01:51:13 les mensonges autour de la Covid.
01:51:15 Il y a encore de braves hommes comme ce Damien Sirex,
01:51:17 directeur des éditions de l'Artilleur.
01:51:19 Il y a encore possibilité
01:51:21 de restaurer la vérité. - Mais il y a des gens
01:51:23 courageux, et puis
01:51:25 moi, très concrètement,
01:51:27 pourquoi je vais chez l'Artilleur ?
01:51:29 Parce que c'est l'éditeur
01:51:31 qui a le courage, alors que
01:51:33 des dizaines d'autres ont refusé,
01:51:35 et l'un a les droits depuis
01:51:37 20 ans et ne le publie pas,
01:51:39 le livre de
01:51:41 Moa sur la guerre d'Espagne.
01:51:43 Voilà un type qui est de
01:51:45 l'extrême gauche, extrême,
01:51:47 il a dû flirter avec le terrorisme
01:51:49 espagnol, républicain,
01:51:51 anarchiste, etc. - Et qui rétablit la vérité
01:51:53 sur le coup d'État. - Et puis qui en 20 ans,
01:51:55 en 20 ans, fouille
01:51:57 les archives et découvre une vérité
01:51:59 qui n'est pas du tout celle dont il était convaincu.
01:52:01 - C'est-à-dire que la gauche
01:52:03 en Espagne... - A des responsabilités
01:52:05 énormes. - A d'énormes responsabilités
01:52:07 dans les années 30 et le
01:52:09 collapse espagnol. - Et quand je vois
01:52:11 et ils ne réhabilitent pas pour autant
01:52:13 Franco, c'est ça qu'est le problème.
01:52:15 Vous êtes tout de suite... Alors moi, il y a des gens
01:52:17 qui écrivent sur moi des choses insensées,
01:52:19 et par exemple,
01:52:21 on ne parle de moi, et beaucoup, c'est vrai,
01:52:23 que dans des revues de droite, d'extrême droite,
01:52:25 etc.
01:52:27 Je ne parle même pas du nouveau
01:52:29 conservateur, mais... - C'est une revue conservatrice.
01:52:31 Elle n'est pas de gauche,
01:52:33 mais elle n'est pas d'extrême droite. - Moi, comme
01:52:35 je vous explique, je suis tout à fait prêt à expliquer
01:52:37 mes idées dans le monde,
01:52:39 dans le nouvel observateur,
01:52:41 enfin, chez tous ces prescripteurs
01:52:43 - Mais ils n'ouvrent pas leur colonne. - Exactement.
01:52:45 - Vous avez des difficultés à
01:52:47 obtenir de la presse pour ce livre aussi.
01:52:49 - Oui, on a une presse
01:52:51 très laudative,
01:52:53 mais uniquement dans des
01:52:55 journaux ou des publications
01:52:57 connotées à droite. Tant pis,
01:52:59 il y a des tas de gens intelligents, et puis finalement,
01:53:01 quand je me retrouve dans des revues que je ne connaissais
01:53:03 même pas,
01:53:05 et qui m'interviewent,
01:53:07 et que je me retrouve finalement
01:53:09 avec des gens comme
01:53:11 Sevilla,
01:53:13 Georges Bensoussan, etc., je me dis
01:53:15 finalement, Taguiai,
01:53:17 Ferraude, je me dis finalement, je suis plutôt
01:53:19 Kepel,
01:53:21 en bonne compagnie.
01:53:23 - Vous me faites plaisir. Heureusement que
01:53:25 vous aimez le jazz.
01:53:27 Ça détend un peu.
01:53:29 Je crois que vous êtes un grand amateur de jazz.
01:53:31 - Je suis plus qu'un amateur.
01:53:33 Je suis un
01:53:35 enragé de jazz.
01:53:37 - Vous jouez en fait ?
01:53:39 - Non, je jouais tellement mal que
01:53:41 j'ai préféré écouter
01:53:43 ceux qui jouent bien au plat. Trop !
01:53:45 Et comme il faut quand même
01:53:47 3-4 heures de pratique par jour, par instrument,
01:53:49 donc ma vie n'y aurait pas suffi.
01:53:51 - À Dijon,
01:53:53 vous allez écouter des concerts de jazz ?
01:53:55 - J'en ai organisé dès la fin des années 60.
01:53:57 Je n'étais même pas majeur.
01:53:59 Et puis ensuite, les hasards,
01:54:01 merveilleuses agences de tourisme,
01:54:03 le ministère de l'éducation nationale
01:54:05 m'ont envoyé dans des lieux improbables.
01:54:07 Il n'y avait pas du tout de jazz.
01:54:09 Je me suis dit, comme d'habitude,
01:54:11 c'est comme pour la police, soit on se gosse
01:54:13 et on ne fait rien, soit on y va.
01:54:15 Et donc je me suis retrouvé
01:54:17 dans une ville qui a sans doute du charme,
01:54:19 mais enfin bref,
01:54:21 qui s'appelle Montargis.
01:54:23 - Ça va.
01:54:25 - Oui, mais enfin vous avez vu les émeutes
01:54:27 qu'il y a eu d'une violence inouïe.
01:54:29 Et donc, ça fait 43 ans
01:54:31 que j'organise des concerts,
01:54:33 c'est-à-dire qu'on devient une sorte d'institution.
01:54:35 Les musiciens américains m'écrivent,
01:54:37 etc.
01:54:39 Mais qu'on soit bien clair, j'aime le jazz,
01:54:41 vous savez, qui swingue.
01:54:43 Le jazz qui donne envie, oh, je ne sais rien.
01:54:45 - Pas le free jazz ?
01:54:47 - Ah ben, oh...
01:54:49 - Alors, vos trois préférés.
01:54:51 Allons-y.
01:54:53 - Je vais faire d'une banalité
01:54:55 épouvantable.
01:54:57 Ça sera Louis Samstrong,
01:54:59 ça sera Duke Ellington,
01:55:01 et puis ça sera Count Basie.
01:55:03 J'ajouterais bien Ray Charles parce que
01:55:05 c'est par lui que je suis entré.
01:55:07 C'est mon premier disque que j'ai acheté.
01:55:09 - Chet Baker ?
01:55:11 - Ah ben, vous m'en demandez trois,
01:55:13 donc je m'arrête là.
01:55:15 - Niles Davis ?
01:55:17 - Je m'arrête là.
01:55:19 - Très bien, mais il faut que nous nous arrêtions là,
01:55:21 cher Jean-Marc Verrières,
01:55:23 j'ai utilisé le mot terrible
01:55:25 de "rat bibliothèque",
01:55:27 mais c'est grâce à la patience que vous avez eue,
01:55:29 jour après jour, de consulter les archives,
01:55:31 d'écouter votre conscience,
01:55:33 de préférer la vérité à votre carrière,
01:55:35 le service de la vérité
01:55:37 plutôt que le service de la carrière,
01:55:39 que la France peut encore
01:55:41 compter sur des
01:55:43 âmes fortes,
01:55:45 les âmes fortes de la République.
01:55:47 - J'ai été très étonné par les
01:55:49 mails ou les mots de gens
01:55:51 que je ne connais même pas,
01:55:53 qui me disaient, dont l'un me disait,
01:55:55 c'est quelqu'un qui était
01:55:57 quasiment en train de mourir,
01:55:59 qui m'a dit "c'est comme un ballon d'oxygène
01:56:01 que vous m'avez donné avec votre livre".
01:56:03 - Ce livre fait du bien.
01:56:05 - Je ne le savais pas,
01:56:07 mais moi ça m'a fait du bien
01:56:09 de l'écrire, vous savez, c'est cathartique,
01:56:11 je ne peux pas laisser passer ça,
01:56:13 et mon grand regret,
01:56:15 c'est le silence de mes collègues.
01:56:17 - Mais il faut lire ce livre,
01:56:19 la presse en parle,
01:56:21 que nous sachions
01:56:23 que nous avons des raisons plutôt
01:56:25 d'être fiers que de nous frapper
01:56:27 la goulpe en permanence.
01:56:29 - Et puis que les choses ne sont jamais
01:56:31 simples, ni manichéennes.
01:56:33 - C'est insupportable.
01:56:35 - Et glorifier
01:56:37 ce que nous sommes, et d'abord des Français
01:56:39 comme vous, qui encore une fois
01:56:41 préfèrent le service de la vérité et le travail
01:56:43 assidu, car je crois que vous travaillez un temps fou,
01:56:45 vous continuez à travailler des heures.
01:56:47 - Je peux, alors ça me permet de travailler un temps.
01:56:49 - Pour aller chercher la vérité.
01:56:51 Vous êtes une des gloires du pays,
01:56:53 et merci pour ce livre,
01:56:55 qui fait tant de bien, comme l'a dit
01:56:57 ce correspondant,
01:56:59 parce que nous sommes déculpabilisés.
01:57:01 Lisez ce livre,
01:57:03 histoire d'une falsification,
01:57:05 chez l'artilleur de Jean-Marc Berlière,
01:57:07 Emmanuel Duchambost et René Fievé,
01:57:09 parce que, chers auditeurs,
01:57:11 il vous fera du bien.
01:57:13 Merci d'être ce que vous êtes.
01:57:15 - Et de vous renforcer par la sécurité sociale.
01:57:17 - Il fait du bien quand même.
01:57:19 - Merci à vous de votre invitation.
01:57:21 - A bientôt.
01:57:23 - Au revoir.
01:57:25 [Musique]

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