L'écrivain, Nathan Devers, s'est exprimé sur la hausse des actes violents envers les élus, sur le plateau de Face à l'Info, en déclarant : «Aujourd'hui, nous vivons une crise de la démocratie représentative».
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00:00 Alors d'abord, la première hypothèse, ce serait de dire que c'est une sorte de crise de confiance.
00:04 Il me semble que cette analyse-là, elle est fausse pour deux raisons.
00:07 D'abord, parce qu'on voit que ceux qui sont en première ligne,
00:10 qui subissent en première ligne cette augmentation de la violence contre les élus, ce sont les maires.
00:14 Or, les maires sont les élus préférés des Français,
00:17 leur taux de popularité, je crois, est supérieur à 50%,
00:20 enfin en moyenne, ça dépend de chaque maire,
00:22 mais donc, si vous voulez, il n'y a pas un problème de popularité.
00:24 Et dans le cas que je viens de vous citer, ce maire n'était pas connu personnellement par ses agresseurs,
00:27 donc il le visait juste en tant que maire, comme une sorte d'entité générique.
00:30 Deuxième nuance que je mettrais, c'est qu'on n'est pas dans la première période
00:35 qui connaît une augmentation de la violence contre les dirigeants politiques.
00:39 Le grand siècle de cette violence-là, c'était le XIXe siècle.
00:42 Le XIXe siècle qui est inauguré le 24 décembre 1800
00:45 par une tentative d'attentat contre Napoléon, donc il y a deux jours,
00:48 et puis qui a connu notamment sur toute la deuxième partie du XIXe siècle,
00:51 vraiment, c'est l'apparition des attentats modernes.
00:54 Parmi ces attentats modernes, il y en a un qui est particulièrement intéressant,
00:57 c'est en 1858, l'attentat fait par Félicio Orsini qui vise Napoléon III.
01:02 Pourquoi il est intéressant ? Parce que la revendication de Félicio Orsini,
01:05 c'était de dire que Napoléon III devait soutenir la cause de l'Italie indépendante,
01:10 notamment contre l'Autriche.
01:11 Et Napoléon III, paradoxalement, a accédé à la revendication de cet individu
01:16 qui a quand même été condamné à mort,
01:17 mais à la fin la France s'est engagée militairement dès 1859,
01:20 et c'est cet attentat qui a déclenché ça.
01:22 Mais bon, ça c'était le grand siècle.
01:23 Mais il me semble que quand même aujourd'hui,
01:25 on est confronté à trois singularités dans la violence contre les élus.
01:29 La première, c'est que si vous voulez, avant le passage à l'acte physique,
01:33 il faut remarquer qu'aujourd'hui, c'est un constat qui est d'une banalité de le dire,
01:37 mais que les élus sont constamment agressés, harcelés sur les réseaux sociaux.
01:41 Et que ça, c'est un fait absolument majeur pour comprendre la crise de la vocation de la politique,
01:47 cette dévaluation qui fait qu'aujourd'hui, concrètement,
01:49 si vous voulez vous engager en politique,
01:50 vous devez savoir que vous allez passer votre journée à recevoir des insultes,
01:53 des insultes sur vos proches, etc.
01:55 Les exemples sont légions, je ne m'attarde pas.
01:57 Deuxième cas de figure, c'est que nous vivons aujourd'hui,
01:59 tous les constitutionnalistes le disent,
02:00 une crise de la démocratie représentative.
02:02 Donc cette démocratie, c'est un modèle où l'élu,
02:05 il a toute liberté de faire, d'agir,
02:07 puisqu'il représente ses électeurs,
02:08 et à partir de là, il a le droit de trahir ses promesses,
02:11 de ne pas respecter le programme pour lequel il a été élu, etc.
02:15 Et qu'on voit, en dehors des violences,
02:16 mais on voit de plus en plus des discours émergés,
02:19 qui sont parfois taxés d'ailleurs de populistes,
02:21 qui critiquent le principe de cette démocratie représentative,
02:25 et donc qui demandent qu'il n'y ait plus cette distinction
02:28 entre des citoyens qui seraient actifs, les élus,
02:30 et des citoyens qui seraient passifs.
02:31 Et la troisième cause peut-être,
02:33 c'est qu'il y a peut-être aussi des politiques, parfois,
02:35 qui participent de ce climat,
02:37 quelle que soit leur appartenance d'ailleurs idéologique.
02:40 Alors ça peut se manifester de mille et une manières,
02:42 ça peut se manifester, j'y reviens dans un instant,
02:44 mais par le fait d'isoler des séquences sur les réseaux sociaux.
02:47 Vous savez, quand on a un débat où j'isole les séquences,
02:49 où uniquement moi je parle,
02:51 et tout ce que peut dire mon interlocuteur,
02:53 je vais le couper en gardant juste des têtes un peu ridicules
02:55 pour qu'il se fasse bien lyncher par mes followers.
02:59 Ça peut se traduire par le fait de désigner
03:00 des ennemis publics dans des clips de campagne.
03:02 Ça peut se traduire par le fait de faire des tweets
03:05 où on fait des moqueries, parfois connotations racistes,
03:08 sur le nom de famille de telle ou telle personne politique également.
03:12 [Musique]
03:16 [SILENCE]