Notre invité pour tout comprendre à l'étonnant rapport que les Français entretiennent avec l'alcool : une étude de la Ligue contre le cancer révèle que 70% des Français trouvent "acceptable" de faire goûter de l'alcool aux mineurs pendant les fêtes. Ils sont même 30% à estimer qu'il est possible de servir de l'alcool à des adolescents de moins de 15 ans. Pour y voir plus clair, RTL reçoit l'addictologue Laurent Karila.
Regardez L'invité de RTL Soir du 18 décembre 2023 avec Marion Calais et Julien Sellier.
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00:00 Vous êtes sur RTL.
00:03 Julien Célier, RTL Bonsoir jusqu'à 20h
00:07 Allez, bonne fin de journée RTL Bonsoir, on s'occupe de tout encore jusqu'à 20h et voici maintenant notre invité pour tout comprendre.
00:14 Tout comprendre à l'étonnant rapport que nous entretenons, nous Français, avec l'alcool, puisque d'après une étude de la Ligue contre le cancer, 70% des Français trouvent acceptable de faire goûter de l'alcool aux mineurs pendant les fêtes.
00:27 Le pire, 30% des sondés estiment qu'il est possible de servir de l'alcool à des ados de moins de 15 ans.
00:33 Alors pour tenter d'y voir un petit peu plus clair, nous accueillons la dictologue Laurent Carilla, bonsoir.
00:38 Bonsoir, avec nous également Rachel Sadodine, bonsoir Rachel.
00:41 Bonsoir Cyprien.
00:42 Alors en découvrant ce sondage ce matin Rachel, on vous a demandé, pour RTL, d'aller confronter ces résultats étonnants à la réalité.
00:49 Et ça tombe bien, puisqu'en ce moment on a plein de stagiaires de 3ème, de 14 ans, donc dans les couloirs d'RTL.
00:54 Rachel me confirme qu'ils ont déjà goûté de l'alcool en famille, et même un petit peu avant 14 ans pour Alice.
01:00 Je devais avoir entre 8 et 10 ans avec la famille.
01:04 Du coup c'était quoi comme type d'alcool ? Un petit peu de vin ? Vraiment une goutte ? Tu trempais les lèvres ?
01:08 Non, pour le coup là au début c'était vraiment de l'alcool fort. J'ai vraiment demandé à prendre une gorgée pour voir réellement ce que ça faisait en bouche.
01:14 Ben c'est pas bon.
01:16 Expérience pas franchement concluante pour Alice. L'alcool fort c'était peut-être un petit peu ambitieux pour un début.
01:23 Les parents de Giacomo ont donc adopté une autre stratégie.
01:26 En Bretagne par exemple, ils me faisaient goûter un petit verre de cidre.
01:30 Et tu te rappelles des effets que ça a pu te faire, une petite bolée de cidre ?
01:33 Un petit peu mal à la tête, une petite migraine.
01:36 En vacances, mais aussi pendant les fêtes, pour Michel, Noël c'est l'occasion idéale pour initier ses petits-enfants de 14 et 16 ans.
01:43 J'essaye de les faire goûter un petit peu de champagne parce que c'est bon, mais c'est tout, ça fait partie des traditions je pense, la petite voix.
01:50 Margot a une fille de 15 ans. Cette année, sa fille lui a demandé de goûter de l'alcool.
01:55 J'ai toujours refusé parce que l'alcool c'est pas bon, donc non.
01:58 Pourtant c'est un peu dans la culture française de faire goûter du vin à table aux enfants, aux ados.
02:02 Ah bon ? Je le savais pas, moi je suis d'origine polonaise donc...
02:06 Et pas un petit doigt de vodka ?
02:08 Non, pas du tout, surtout pas ça, non.
02:10 La maman préfère donc rester stricte et elle évite même de consommer trop d'alcool devant sa fille.
02:15 Merci beaucoup Rachel. Je me tourne vers vous Laurent Carilla, vous la dictologue de référence.
02:19 Quand vous entendez ces témoignages, j'imagine que vous n'êtes pas particulièrement surpris.
02:23 Mais qu'est-ce que ça dit de notre pays ? Nous, Français, on a un rapport particulier à l'alcool ?
02:29 Oui, d'abord oui, la France a un rapport particulier à l'alcool avec le vin qui fait partie du patrimoine,
02:35 qui a longtemps été même considéré comme un aliment.
02:38 En France, on aime beaucoup l'alcool et l'alcool est finalement pas considéré comme une drogue, alors que c'est une drogue.
02:44 Mais docteur, est-ce que c'est si dangereux que ça de faire tremper les lèvres dans le champagne à un mineur par exemple ?
02:50 Enfin, je fais l'avocat du diable, mais...
02:52 Oui, oui, je comprends bien. Moi j'ai envie de vous retourner la question, est-ce que vous avez fait goûter à vos enfants mineurs de l'alcool ?
02:58 Ben non. Non mais visiblement, il y a plein de gens qui le font.
03:01 Oui, bien sûr, il y a plein de gens qui le font, mais de toute façon les ados n'attendent pas que leurs parents leur fassent goûter des fonds de verre d'alcool aux fêtes,
03:09 pour expérimenter l'alcool, puisqu'il est expérimenté.
03:11 Mais ce qu'il faut retenir de manière importante, c'est que le cerveau fait sa puberté comme les autres organes,
03:20 et notre cerveau finit sa puberté autour de 20, 23, 25 ans.
03:23 C'est-à-dire que tout ce que vous apportez d'exogène, qui fait très très plaisir à un cerveau, comme de l'alcool par exemple,
03:29 et bien ça peut altérer certaines structures du cerveau, et on ne peut pas prédire quelle personne va être plus touchée ou impactée
03:35 par les risques d'une consommation, même mineure, même minime. Mais il y a quelque chose qu'on sait en addictologie, et en médecine,
03:42 c'est que plus on est exposé tôt à un produit potentiellement addictogène, plus il y a un risque de développer la maladie.
03:49 Donc ça veut dire que faire goûter de l'alcool dès cet âge-là, alors que les enfants sont mineurs, ça peut provoquer l'addiction ?
03:56 Ça peut provoquer des comportements d'allure addictive. J'ai envie d'être très caricatural, c'est comme si,
04:03 quand vous faites goûter un peu d'alcool à un enfant, c'est comme si vous lui faisiez goûter une petite ligne de cocaïne.
04:08 C'est la même chose pour le cerveau, il va recevoir le même message. Donc il n'y a aucun intérêt, il faut retarder le plus possible
04:14 l'âge des premières consommations, surtout il faut faire beaucoup plus de prévention sur la question de l'alcool,
04:19 il faut en parler très très tôt à nos enfants.
04:21 Vous dites "il faut en parler très tôt avec nos enfants", et vous faites cette comparaison effectivement avec la ligne de cocaïne,
04:26 en disant "c'est la même chose pour le cerveau d'un jeune adolescent ou d'un adolescent", mais fatalement,
04:32 parce qu'on a un patrimoine autour du vin, dans ce pays, on a peut-être un petit peu de mal à voir cette réalité en face,
04:40 et à voir ce débat-là en famille ?
04:42 Le vin, ce n'est pas le problème central, en fait. Le problème central, c'est l'alcool.
04:46 L'idée, c'est de parler de l'alcool et de ses risques immédiats, et aussi de ses risques à moyen terme, on va dire.
04:52 Parce que c'est vrai que quand on parle à un ado, si tu bois de l'alcool, tu vas faire une cirrhose, ou bien tu vas avoir un cancer du foie,
04:58 l'ado s'en fout.
04:59 Alors qu'est-ce qu'on dit justement à l'ado qui réclame une coupe de champagne autour de la table à Noël ?
05:04 Tu as tout le temps pour goûter cette coupe de champagne, et puis éclate-toi avec des softs, ou bien avec des mocktails,
05:11 tu as tout le temps pour goûter. De toute façon, on sait très bien que quand tu seras en soirée, tu vas aussi boire un peu d'alcool.
05:16 Et donc c'est là où il faut donner des messages, justement quand ils sont en soirée, quand ils sont seuls, quand ils sont avec leurs potes, etc.
05:22 Sur "Ok, tu vas boire, fais attention à comment tu vas boire, alterne le soft avec un peu d'alcool, ne dépasse pas une certaine limite d'alcool,
05:30 l'ivresse, ça peut être un risque."
05:32 Mais alors justement, vous le dites, les ados n'attendent pas leurs parents pour boire de l'alcool, ils y vont avec leurs amis.
05:39 Moi, ce que les parents m'ont beaucoup dit, ceux que j'ai rencontrés aujourd'hui, c'est que justement,
05:43 ils initiaient les enfants pour leur donner les bons réflexes et qu'ils n'aillent pas trop loin dans la consommation.
05:48 C'est une mauvaise idée du coup ?
05:50 Ça n'a jamais été démontré, cette efficacité n'a jamais été démontrée.
05:55 Il y en a qui disent ça, surtout les fervents défenseurs du vin, je ne diabolise pas le vin,
06:00 les fervents défenseurs du vin disent "on va éduquer leur palais pour qu'ils goûtent à des bons alcools, etc."
06:06 Mais ce n'est pas là la question. La question c'est "la molécule d'éthanol est toxique pour un cerveau qui n'est pas pubère."
06:12 C'est ça le message qu'il faut faire passer. Et plus on est exposé tôt, plus il y a des risques pour la santé.
06:17 Et puberté du cerveau, vous nous le rappelez, c'est quoi ? 23 ans, c'est ça ?
06:20 20-25 ans.
06:22 Et d'ailleurs, en France, on a peut-être un problème avec le dry january, par exemple,
06:26 on n'en fait pas assez la promotion en termes de prévention ?
06:28 J'espère que ce soir, RTL, on va en faire la promotion.
06:31 Alors moi, je préfère le mot "défi de janvier", donc c'est dans 15 jours.
06:34 Un mois sans alcool.
06:37 Et préparez-vous tous à le tester pour vous faire du bien, pour votre peau, pour votre psychique, pour votre mémoire, pour votre foi, etc.
06:44 Ce n'est pas une injonction à arrêter de boire définitivement.
06:47 Et surtout, si vous avez des problèmes d'addiction avec l'alcool, il ne faut surtout pas faire le défi de janvier.
06:51 C'est plutôt pour les gens qui pensent que leur consommation est excessive ou leur pose problème.
06:55 Merci beaucoup Laurent Carilla, vous l'addictologue de référence, pour votre éclairage après cette étude assez étonnante,
07:00 effectivement, sur la consommation d'alcool en famille, on l'a compris, et cette saison, avant les fêtes de Noël,
07:06 merci beaucoup pour votre éclairage.
07:08 Et je rappelle que vous avez un podcast, là aussi, de référence, et qu'il faut écouter "Addiction avec un K".
07:13 Merci beaucoup Laurent Carilla.
07:14 Merci infiniment.
07:15 Merci, à très bientôt.
07:16 Merci Roël Schelsadonine pour votre plongée dans les familles françaises à la lumière de cette étude.
07:21 On marque une toute petite pause, et puis RTL Bonsoir continue.
07:24 Le grand match des infos pour briller, pour dîner dans un instant.
07:28 Et puis Chantal Goya qui va nous rejoindre après 9 heures.
07:30 Match franco-belge ce soir.
07:32 RTL Bonsoir, jusqu'à 20h.
07:35 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]