Entre les solos en face nord et la voie la plus difficile du monde au Yosemite, plusieurs générations de grimpeurs de haut niveau échangent sur leur pratique avec Catherine Destivelle, Solenne Piret (championne du monde de para-escalade), Soline Kentzel et le belge Sébastien Berthe.
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00:00:00 Générique
00:00:01 ...
00:00:23 -Bonjour à tous.
00:00:25 Bienvenue dans le magazine "Grand air".
00:00:28 Vous pouvez respirer à fond.
00:00:30 On va parler de montagne et d'escalade
00:00:33 au cours de cette émission,
00:00:34 d'escalade de haut niveau avec plusieurs générations
00:00:37 de grimpeurs sur ce plateau.
00:00:39 Catherine Destivelle, bonjour. -Bonjour.
00:00:41 -Bienvenue, figure incontournable de l'escalade
00:00:44 et de l'alpinisme des années 90.
00:00:46 A côté de vous, Solène Piré. Bonjour, Solène.
00:00:49 -Bonjour. -4 fois championne
00:00:50 du monde de para-escalade.
00:00:53 Et puis, de l'autre côté,
00:00:55 on a une cordée qui s'est illustrée il y a quelques mois
00:00:59 sur une des parois les plus dures du monde.
00:01:02 Sébastien Berthe. Bonjour, Sébastien.
00:01:04 -Bonjour. -30 ans, grimpeur belge
00:01:06 qui fait partie de l'élite internationale,
00:01:09 capable d'évoluer dans le 9e degré.
00:01:11 Et puis, Solène Kenzel. Bonjour, Solène.
00:01:14 -Bonjour. -Vous n'êtes pas loin, vous,
00:01:16 du 9e. -Un peu quand même.
00:01:18 -Vous êtes un peu plus jeune que Sébastien,
00:01:20 22 ans. La plus jeune grimpeuse
00:01:22 à avoir atteint en libre ce sommet del Capitano
00:01:25 dont je parlais, un célèbre paroi du Yosemite,
00:01:28 qui est un peu la mecque de l'escalade
00:01:30 de haut niveau aux Etats-Unis.
00:01:32 Vous étiez pas né, tous les trois,
00:01:34 ou en tout cas, à peine, quand Catherine faisait la une
00:01:38 des médias français. Ca ne nous régénit pas,
00:01:40 mais c'est la réalité.
00:01:42 La une, aussi bien en escalade qu'en alpinisme,
00:01:45 d'ailleurs, à cette époque.
00:01:46 Je vais pas vous demander si vous avez un poster
00:01:49 de Catherine Destivelle dans votre chambre d'enfant.
00:01:52 C'était encore un peu jeune. -Moi, pas loin.
00:01:55 -Oui, si. -Elle était célèbre en Belgique.
00:01:57 -Très célèbre. -Catherine Destivelle.
00:02:00 Est-ce qu'en tant que jeune grimpeur,
00:02:02 vous regardez ce qu'ont fait les générations
00:02:05 qui vous ont précédées, Sébastien ?
00:02:07 -Moi, complètement, j'ai été élevé...
00:02:10 Mon père vient du milieu de la montagne,
00:02:12 de l'escalade, depuis qu'il lui-même est très jeune,
00:02:15 et donc, il est de la génération de Catherine.
00:02:18 Il m'a montré, il m'a élevé avec l'histoire de l'escalade.
00:02:22 Il y a une certaine importance à regarder,
00:02:24 à regarder ce qui s'est fait par le passé,
00:02:27 à s'inspirer et à rêver soi-même pour le futur.
00:02:30 Moi, j'ai suivi toute l'histoire. -Solene ?
00:02:32 -Moi, pas du tout. -C'est bien,
00:02:34 on voit deux écoles différentes. -J'ai commencé assez tard
00:02:37 et j'ai une famille pas du tout avec la culture de la montagne.
00:02:41 Du coup, j'ai dû faire ma culture moi-même avec le temps
00:02:44 et un peu plus tard, mais...
00:02:46 -Bon. Solène, vous, entre les deux, peut-être ?
00:02:49 -Entre les deux. -Ah !
00:02:50 Je sais pas pourquoi, je sentais.
00:02:52 -Oui, mon père, il vient de la région
00:02:54 et il a toujours fait beaucoup de montagne,
00:02:57 donc lui, il a carrément baigné dedans.
00:02:59 Et même si on allait à Fontainebleau
00:03:02 avec mes frères et soeurs tous les dimanches en famille,
00:03:05 c'est pas quelque chose qui...
00:03:07 Enfin, qui nous a forcément inculqués, quoi.
00:03:09 C'était un peu en sous-main.
00:03:11 -Bon, alors, pour Solène, notamment,
00:03:13 on va remontrer quelques images de Catherine d'Estivelle,
00:03:17 notamment dans cette fameuse trilogie
00:03:19 qui a eu lieu dans les années 90,
00:03:21 les trois grandes faces nord des Alpes,
00:03:23 l'Aiger, le Cervin et les Grandes Jaurasses.
00:03:26 Je sais pas dans laquelle on est, là, vous vous souvenez ?
00:03:29 -Ca, c'est l'Aiger. -Ca, c'est l'Aiger ?
00:03:31 -Oui. C'est toujours l'Aiger, là.
00:03:33 -En solitaire et en hivernale,
00:03:35 ça avait été des morceaux de bravoure, on va dire.
00:03:38 -Ouais, enfin...
00:03:41 Je me suis rendue... C'est les mots qui sont...
00:03:44 -Ca avait été perçu comme ça, en tout cas.
00:03:46 -Oui, mais ça l'est encore maintenant, d'ailleurs.
00:03:49 C'est un livre remarquable et remarqué.
00:03:51 Voilà. Mais...
00:03:53 Pour moi, c'est loin.
00:03:54 Là, on me parle de ça, tout d'un coup.
00:03:57 Ca me remonte à il y a longtemps.
00:03:59 -Sony n'était pas née, c'est pour ça.
00:04:01 -Et depuis, j'ai fait plein d'autres choses.
00:04:03 Et puis, je sais pas que je fais plus de montagne,
00:04:06 j'en fais moins, mais je suis une éditrice, maintenant.
00:04:09 -Vous avez rajouté...
00:04:11 -Ca fait 10 ans que je fais des livres,
00:04:13 et j'avoue que je suis...
00:04:15 Quand je vois les images, c'est une autre vie.
00:04:17 -En fait, des livres de montagne.
00:04:19 Mais finalement, c'était pas très loin de votre activité,
00:04:23 à l'époque, parce que vous avez connu
00:04:25 l'âge d'or de la montagne en termes médiatiques,
00:04:28 les années 80 et 90.
00:04:29 Une des grands magazines nationaux
00:04:31 se faisait souvent sur des livres de montagne.
00:04:34 On voit quelques photos de vous publiées,
00:04:36 notamment dans "Paris Match".
00:04:38 Vous étiez un peu les jéris du magazine.
00:04:40 -Oui, c'est vrai. Grâce à "Paris Match",
00:04:43 j'ai pu vivre de ma passion.
00:04:44 J'ai eu plus de 15 reportages dans "Paris Match".
00:04:47 A l'époque, c'est vrai que je suivais
00:04:49 beaucoup les alpinistes, les grimpeurs aussi,
00:04:52 et j'en ai bien profité.
00:04:54 Et ça a un peu changé, aujourd'hui,
00:04:57 mais aujourd'hui, il y a une visibilité différente
00:05:00 grâce au fait que l'escalade est aux Jeux olympiques.
00:05:03 L'alpinisme est encore un peu...
00:05:05 C'est encore un peu plus difficile
00:05:07 pour que les médias parlent de la montagne.
00:05:11 C'est pas facile à comprendre.
00:05:13 Aujourd'hui, il y a les Piolet d'or,
00:05:15 c'est aussi compliqué d'expliquer la règle.
00:05:19 C'est-à-dire qu'aujourd'hui,
00:05:21 on ne va pas récompenser une seule ascension.
00:05:24 Il peut y avoir 3, 4, 5 ascensions primées la même année,
00:05:29 et les médias comprennent pas trop.
00:05:31 -Ils veulent un vainqueur. -Oui, et on peut pas comparer
00:05:34 une ascension en Himalaya avec une ascension en Alaska,
00:05:37 et toutes les deux sont engagées.
00:05:39 Voilà, donc c'est compliqué à expliquer cette activité, en fait.
00:05:45 -Voilà.
00:05:46 -J'ai demandé à la nouvelle génération
00:05:48 si elle s'intéressait à ce qui s'était fait avant.
00:05:51 Vous vous intéressez à ce que font ces jeunes grimpeurs ?
00:05:54 -Carrément, parce que là, on vient de sortir...
00:05:57 Je viens de sortir la BD sur l'escalade
00:06:00 avec David Chambre. -On en parlera tout à l'heure.
00:06:02 -Et puis, je publie beaucoup de livres
00:06:07 pour l'entraînement. A l'époque, ça n'existait pas,
00:06:10 ces livres "Comment devenir meilleure en escalade",
00:06:14 c'était le entraînement mental, le physique.
00:06:16 J'ai publié un livre sur "Climbing",
00:06:18 c'est comment on grimpe les fissures.
00:06:20 C'est...
00:06:21 Voilà, c'est nouveau.
00:06:24 Et ça, ça...
00:06:26 J'espère que ça inspire beaucoup les jeunes grimpeurs
00:06:30 et que ça les aide aussi à performer.
00:06:32 Et donc, évidemment, je m'intéresse
00:06:35 aux jeunes qui arrivent.
00:06:39 Alors, parfois, je mélange un peu les noms,
00:06:41 mais il faut être honnête.
00:06:43 Mais voilà, les Jeux olympiques, je les ai suivis
00:06:46 et je suis tout ce qui se passe au quotidien, presque.
00:06:49 -Vous faites toujours de la montagne ?
00:06:52 -Oui, un petit... Comme ça, tranquille.
00:06:55 Quand j'y vais avec ma famille, mes amis,
00:06:59 je grimpe aussi assez souvent.
00:07:01 En ce moment, je me suis basée dans le Sud
00:07:03 et les petites falaises du Sud sont sympas.
00:07:06 Je peux grimper 2-3 heures et rentrer vite,
00:07:08 travailler sur les bouquins.
00:07:10 Parce qu'aujourd'hui, c'est beaucoup axé
00:07:13 sur les publications de livres,
00:07:16 genre une douzaine de livres par an.
00:07:18 Et voilà, il faut... Il y a du boulot, quoi.
00:07:21 Et ça se fait pas tout seul.
00:07:22 Mais ouais, du coup...
00:07:24 Mais je grimpe encore, j'adore ça.
00:07:26 Après, j'ai plus le même niveau, évidemment,
00:07:29 mais bon, on s'en fout.
00:07:30 -Le plaisir est toujours là. -Le plaisir est là.
00:07:33 On fait ça avec des amis.
00:07:34 -On vous voit, là, au sommet du...
00:07:36 -Avec une de mes sœurs.
00:07:38 -Avec une de vos sœurs, là.
00:07:40 Vous aviez emmené...
00:07:41 Il fallait pas en qu'y en ait plus.
00:07:43 Vous avez une famille, mais il fallait pas
00:07:46 emmener toute la famille. -Sur le sommet de ce petit pic.
00:07:49 -Il y a eu une grosse évolution
00:07:51 du matériel technique en alpinisme,
00:07:54 depuis... -Pas tant que ça, en fait.
00:07:57 -Vous aviez déjà les outils. -Ca s'est allégé, on va dire.
00:08:01 Ca s'est allégé, c'est...
00:08:03 En escalade, je crois pas qu'il y ait tant d'évolutions.
00:08:06 Si, les chaussons, peut-être.
00:08:08 Les chaussons ont évolué, mais maintenant,
00:08:10 pendant les compétitions, ils changent leurs chaussons
00:08:13 en fonction de la structure de la voie.
00:08:16 Si ça glisse, ils vont mettre des chaussons très souples.
00:08:19 Nous, ça existait pas. -Il y en avait des paires.
00:08:22 -C'est comme, je sais pas, ceux qui font de l'athlétisme.
00:08:25 Ils ont aussi plusieurs paires de chaussures.
00:08:27 Les grimpeurs, aujourd'hui, de compétition ou de performance,
00:08:31 je pense que, toi, dans le Yosemite, vous deux,
00:08:33 vous aviez des chaussons pour chaque...
00:08:36 -Oui, complètement. -En chance de chaussons
00:08:38 en fonction de la difficulté de la longueur.
00:08:41 -Ou en fonction du style d'escalade, du type de pied.
00:08:44 Ca m'est arrivé de mettre un chausson d'un tel modèle à droite,
00:08:47 d'un tel autre à gauche. Il y a moyen d'aller
00:08:50 dans les détails dans les chaussons.
00:08:52 Je suis un peu fou à ce niveau-là.
00:08:54 -Pareil, Soline, vous avez votre...
00:08:56 -Il y a des chaussons qui sont faits pour les pissures
00:08:59 et il y a des chaussons qui sont faits pour le mur,
00:09:02 plus classique.
00:09:03 -Il y a une chose qui a changé depuis votre époque,
00:09:06 c'est que l'escalade s'est démocratisée.
00:09:08 Il y a des salles d'escalade partout ?
00:09:10 Ca existait pas ? -Non, ça existait pas.
00:09:13 Les premiers murs d'escalade, en fait,
00:09:15 ils ont été inventés en Angleterre,
00:09:17 parce qu'il pleuvait beaucoup.
00:09:19 A l'université de Leeds, ils ont commencé à mettre
00:09:22 des prises en bois dans les couloirs.
00:09:24 Ensuite sont venus les murs, les vrais murs
00:09:26 sur lesquels ils s'entraînaient.
00:09:28 Ils ont même pris d'assaut des églises
00:09:31 qui fonctionnaient plus.
00:09:33 Ils ont créé des murs d'escalade là-dedans.
00:09:35 Et puis nous, en France, on est venus après.
00:09:38 Moi, je me souviens, les premières compétitions
00:09:41 que j'ai faites, elles étaient à l'extérieur.
00:09:43 -Sur des falaises. -Sur des falaises, oui.
00:09:46 C'était un peu hallucinant, parce que ça s'y prête pas.
00:09:49 Donc à Grenoble a eu lieu la première compétition indoor.
00:09:53 -C'était au Palais des Sports. -Sur structure artificielle.
00:09:57 Toutes les couleurs, elles étaient... Je me souviens encore.
00:10:00 Et puis maintenant,
00:10:02 quelle ville n'a pas son mur d'escalade ?
00:10:04 Aujourd'hui, on va dire que l'escalade est en France
00:10:07 le 3e ou 4e sport scolaire.
00:10:10 Donc oui, c'est incroyable.
00:10:12 C'est devenu...
00:10:13 Oui, mais c'est génial, parce qu'en fait,
00:10:16 c'est une façon de pratiquer une activité physique ludique.
00:10:21 Il y a plein de gens qui font ça comme du fitness.
00:10:24 Ils vont grimper, mais c'est pour bouger.
00:10:26 -Pour se garder en forme. -Et c'est agréable, c'est sympa.
00:10:30 Et puis quand on est obligé de se concentrer,
00:10:32 on oublie un peu les problèmes du quotidien.
00:10:36 Et ça fait beaucoup de bien à plein de gens.
00:10:39 Donc c'est une activité très...
00:10:42 Oui, très ludique et bien aussi pour le corps.
00:10:45 -Solène, vous êtes venue à l'escalade
00:10:47 par la salle ou par la falaise ?
00:10:50 -Par l'extérieur, par le bloc. -Le bloc.
00:10:53 -Oui.
00:10:54 Et la salle,
00:10:57 j'y suis allée, j'avais 22 ans pour la première fois.
00:11:01 Du coup, assez tard, oui.
00:11:03 -Vous êtes née sans votre avant-bras droit.
00:11:06 C'est un handicap compliqué pour se tourner vers l'escalade.
00:11:09 Qu'est-ce qui vous a donné envie d'aller vers ce sport ?
00:11:12 -Alors, j'ai baigné dedans.
00:11:14 Mes parents se sont rencontrés à Fontainebleau.
00:11:17 -C'est une bonne raison. -Oui.
00:11:19 Excellente raison.
00:11:21 -C'est le spot des grimpeurs de la région parisienne.
00:11:24 -Pas que de la région parisienne.
00:11:26 -Du monde entier. -Oui, c'est vrai.
00:11:28 -Du monde entier. -Oui.
00:11:31 -On y croise moins de Français que...
00:11:33 que de toutes les nations. -Oui, international.
00:11:36 -C'est assez fou. -Oui.
00:11:37 -Oui, ça parle plus allemand
00:11:40 ou néerlandais que français.
00:11:42 Mais non, c'est mythique, cette forêt.
00:11:44 C'est comme ça que j'ai commencé.
00:11:46 Donc, c'est venu assez naturellement.
00:11:49 Après, j'ai arrêté à 10 ans.
00:11:51 Je me suis pas posé la question.
00:11:53 Quand j'étais jeune, pour moi, l'escalade,
00:11:56 je sais pas, l'activité familiale,
00:11:58 la sortie du dimanche,
00:12:00 et je m'y suis mise sérieusement en 2017.
00:12:04 Donc, après 10 ans d'arrêt,
00:12:07 quand ils ont ouvert Arcos à Nation,
00:12:10 c'était la première salle intra-muros.
00:12:12 Et du coup, tout le monde a commencé à y aller.
00:12:16 C'est comme ça que je m'y suis remise,
00:12:18 parce que les potes allaient grimper là-bas.
00:12:20 Je me suis dit, pourquoi pas moi ?
00:12:22 -Vous vous êtes remise sérieusement,
00:12:24 aussi, dans la compétition,
00:12:26 avec des résultats tout de suite importants.
00:12:30 Vous avez remporté des titres nationaux et internationaux
00:12:34 dès pratiquement vos premières années de compète.
00:12:37 -Oui, c'est ça.
00:12:38 Je pense que le fait que j'en faisais étant petite,
00:12:42 ça a beaucoup aidé.
00:12:43 Et après, je m'y suis mise à 100 %,
00:12:47 et j'avais un modèle devant moi.
00:12:49 On m'a parlé de la championne du monde
00:12:52 en titre Maureen Beck,
00:12:54 qui avait remporté les championnats en 2016.
00:12:57 Je suis allée voir sur les réseaux,
00:12:59 j'ai regardé comment elle faisait,
00:13:01 je lui ai posé des questions.
00:13:02 Tout ça a aidé. Je ne suis pas partie de rien.
00:13:05 Ca aide d'avoir des modèles devant soi.
00:13:07 -Une compétition de para-escalade,
00:13:10 ça se présente de la même façon
00:13:12 qu'une compétition d'escalade classique.
00:13:14 Les murs sont adaptés aux handicaps ?
00:13:16 -C'est plus les voies qui sont adaptées.
00:13:19 Après, c'est les mêmes murs.
00:13:21 On grimpe sur les mêmes murs que les valides.
00:13:24 Pour l'instant, on grimpe en second,
00:13:26 donc en moulinette. Ca va peut-être changer.
00:13:29 Et sinon, oui, on est regroupés
00:13:33 en fonction des handicaps dans différentes catégories.
00:13:36 -Il y a aussi des épreuves de vitesse,
00:13:38 de bloc, de difficulté ?
00:13:40 -Non. Pour l'instant, il n'y a que la difficulté.
00:13:43 Il y aura peut-être le bloc un jour.
00:13:45 -Ce sont les images qu'on voit
00:13:47 de vos différents titres mondiaux.
00:13:49 Vous en avez quatre, déjà,
00:13:51 pour un démarrage en 2017.
00:13:53 -Oui.
00:13:54 -La pratique en salle est assez différente
00:13:59 de ce que vous avez connu en extérieur, Solène ?
00:14:03 -C'est très différent,
00:14:05 et c'est de plus en plus différent, je pense.
00:14:07 Euh...
00:14:08 Et ouais, c'est des mouvements...
00:14:11 Je pense qu'on teste beaucoup de choses physiquement
00:14:15 avec l'escalade en salle.
00:14:18 Après, forcément,
00:14:20 l'un aide l'autre, je pense.
00:14:23 Donc, pour moi, c'est hyper important de faire les deux.
00:14:26 -On parlait de Fontainebleau.
00:14:28 Vous y allez encore régulièrement ?
00:14:30 -Oui, j'y vais encore régulièrement.
00:14:32 -Il y a de quoi faire à Fontainebleau
00:14:34 quand on est amoureux de la grimpe et de l'escalade.
00:14:38 -Oui, on peut y passer une vie.
00:14:40 Complètement.
00:14:41 -Avec Télébug, vous connaissez ce site ?
00:14:43 -Je suis née là aussi.
00:14:45 -Vous êtes aussi de la plaine.
00:14:46 -Oui, et les parents...
00:14:48 Quand j'avais 4-5 ans,
00:14:49 on allait déjà sur les rochers de Fontainebleau.
00:14:52 On ne grimpait pas, on jouait dessus.
00:14:54 On a toujours grimpé.
00:14:56 J'ai toujours grimpé.
00:14:57 Je suis issue de la forêt de Fontainebleau,
00:14:59 c'est un peu mon jardin.
00:15:01 J'ai abandonné la forêt à 20 ans.
00:15:04 Mais j'ai beaucoup, beaucoup, beaucoup grimpé.
00:15:07 J'y retourne assez souvent quand je vais à Paris.
00:15:10 -Solène qui monte des voies en 7e degré
00:15:14 sur ce type de falaises.
00:15:17 -Sur les rochers de Bleau, oui.
00:15:20 J'ai réussi à faire quelques 7b.
00:15:22 -Waouh ! -Oui, je suis assez fière.
00:15:24 Rires
00:15:26 C'était pas évident.
00:15:27 -C'est super.
00:15:28 -C'est pas votre job, par contre, grimpeuse.
00:15:33 Vous êtes plutôt bien médiatisée.
00:15:35 Vous êtes un peu les géries de la para-escalade en France,
00:15:38 mais vous avez tenu à garder une activité professionnelle à côté.
00:15:42 -Oui. Comme j'ai commencé assez tard,
00:15:45 j'ai un cursus scolaire assez classique,
00:15:47 et donc je suis à côté architecte.
00:15:50 J'ai passé mon diplôme en 2014
00:15:53 et assez rapidement, j'ai monté ma boîte.
00:15:56 Donc ça m'a permis aussi de m'entraîner.
00:15:59 Aujourd'hui, j'en fais de moins en moins
00:16:01 parce que je me consacre à 100 % à mon projet sportif,
00:16:04 mais oui, c'est... Voilà, je suis toujours architecte.
00:16:07 -Catherine Destivelle évoquait l'arrivée de l'escalade
00:16:11 dans le giro olympique.
00:16:12 Elle a un peu changé, notamment pour le grand public,
00:16:15 la notoriété de la discipline.
00:16:17 Est-ce qu'elle sera encore au Paris ?
00:16:19 Elle sera pas aux Jeux olympiques de Paris, cette discipline ?
00:16:23 -Non, ça n'y sera pas, et on attend la réponse
00:16:26 pour savoir si on sera à Los Angeles en 2028.
00:16:30 Donc on croise les doigts très fort, et puis on attend.
00:16:33 -Ca peut être un objectif pour vous, 2028 ?
00:16:35 -Ca peut carrément être un objectif,
00:16:38 même si c'est dans longtemps,
00:16:39 mais ça peut être un chouette objectif de compétition.
00:16:42 -Sébastien, Céline, vous êtes aussi passée
00:16:45 à la casse compétition au début de votre carrière de grimpeur.
00:16:48 Sébastien, vous avez été champion de Belgique à plusieurs reprises.
00:16:52 -Oui, j'ai fait tout un parcours de compétition
00:16:55 en Belgique, en catégorie jeune,
00:16:57 en Coupe d'Europe, en Championnat du monde,
00:16:59 en catégorie jeune.
00:17:00 Puis j'ai arrêté pendant mes études,
00:17:02 j'ai fait un master en éducation physique,
00:17:05 l'équivalent de STAPS, en Belgique.
00:17:07 Et puis j'ai repris dans l'équipe nationale,
00:17:10 j'ai fait deux saisons de Coupe du monde, je pense,
00:17:13 où ça m'a pas aussi bien réussi que ce que je l'aurais voulu,
00:17:16 et j'ai fini par me tourner essentiellement vers le rocher,
00:17:19 ce qui me convenait beaucoup mieux.
00:17:21 Mais ouais.
00:17:22 -Sébastien, pourquoi je sens qu'elle va me dire non ?
00:17:25 -Euh...
00:17:27 Très rapidement.
00:17:28 Mais ouais, c'était pas...
00:17:31 C'était pas brillant.
00:17:32 Du coup, je pense pas que je vais me tourner
00:17:35 vers la compétition à un moment quelconque.
00:17:37 -Vous préférez le rocher, la falaise,
00:17:40 et les difficultés aussi,
00:17:42 parce que vous disiez non pour le neuf,
00:17:44 mais vous êtes quand même dans des registres de grimpe,
00:17:48 8B, 8B+, que vous êtes capables d'enchaîner,
00:17:51 ce qui n'est pas donné à beaucoup de jeunes grimpeuses.
00:17:54 -C'est clair que le rocher,
00:17:55 je trouve que ça permet tellement plus de s'exprimer,
00:17:58 d'exprimer sa créativité, de trouver ses propres mouvements,
00:18:03 que la salle, en tout cas,
00:18:05 moi, j'ai pas l'impression d'avoir un peu ces énigmes-là
00:18:09 quand je grimpe en salle ou en compétition.
00:18:12 Le rocher, on a le temps, on est seuls face à lui.
00:18:15 -Vous vous trouvez dans une voie en Suisse, je crois,
00:18:20 8B+, comme ça, vue de nez.
00:18:21 -Oui, c'est la voie que j'ai enchaînée cet été.
00:18:24 Rires
00:18:26 -Bon, en déver,
00:18:27 en fait, la force physique,
00:18:29 j'ai vu que vous vouliez déviriliser l'escalade.
00:18:32 Ca veut dire quoi ?
00:18:33 -C'est... On est un peu en train de mettre en place
00:18:36 des ateliers où... Enfin, moi, par ma pratique,
00:18:39 je me suis retrouvée à réfléchir un peu à différentes dynamiques.
00:18:43 Si on veut faire de la grande voie ou de l'escalade,
00:18:46 on se retrouve souvent à devoir grimper avec des hommes,
00:18:49 à créer des interactions.
00:18:51 Et je me rends de plus en plus compte
00:18:53 qu'on nous a pas forcément appris,
00:18:55 ne serait-ce qu'à faire des cordées mixtes
00:18:57 ou à se lier d'amitié avec des hommes,
00:19:00 qu'il y a toujours des choses qu'il faut déconstruire.
00:19:03 Et...
00:19:05 Et qui sont aussi le fait de...
00:19:07 Voilà, un peu cette culture de l'escalade,
00:19:10 dans son sens un peu plus global,
00:19:13 où les femmes, enfin, voilà, un peu...
00:19:16 En fait, on se retrouve à être souvent pas nombreuses
00:19:19 et à être entourées d'hommes.
00:19:21 Et voilà, moi, j'aime bien essayer de leur expliquer
00:19:24 ce qu'on peut vivre en étant une femme
00:19:26 et pourquoi, des fois, c'est un peu plus compliqué
00:19:29 pour nous de s'imposer dans certaines situations.
00:19:32 Et... Et voilà.
00:19:33 Et en fait, je fais parler de ça.
00:19:36 Il y a des gens qui viennent me voir,
00:19:38 mais c'est génial, qui me disent "merci",
00:19:40 parce que moi, je me sens pas bien d'aller à la salle
00:19:43 pour certains trucs, et toi,
00:19:46 tu prends le temps un peu d'éduquer
00:19:48 les gens à certaines problématiques,
00:19:50 alors que moi, j'ai pas envie de faire ce travail-là,
00:19:53 notamment des personnes gays ou des personnes
00:19:56 qui ont pas envie de jouer des coudes
00:19:58 avec les hommes à la salle, qui se promènent torse nu,
00:20:01 et... Voilà.
00:20:03 -Il y a toujours eu un culte du corps
00:20:05 dans l'escalade, dans les années 80.
00:20:07 Patrick Edlinger, pour ne citer que lui,
00:20:10 mais faisait, lui aussi, la une des médias
00:20:13 en tenue légère, quand il était sur ses falaises.
00:20:17 -Oui, c'est vrai qu'il y avait eu le culte du corps.
00:20:20 Mais moi, j'ai moins connu cet aspect de les salles.
00:20:23 Ca existait pas, du coup, on grimpait à 2, 3, 4.
00:20:26 Bon, voilà, on était entre nous. -Un petit comité.
00:20:28 -Oui, c'était pas gênant.
00:20:30 Et moi, j'ai eu de la chance de débuter
00:20:33 avec des gens qui m'ont traité comme un grimpeur.
00:20:35 Enfin, j'étais pas femme, j'étais juste...
00:20:38 "Essaye, à ton tour."
00:20:39 Donc, je tirais sur les blocs, je faisais ce que...
00:20:42 Voilà, chacun son tour, on essayait,
00:20:44 on se parait, y avait pas de discussion.
00:20:46 Et dès que je suis partie en falaises ou en montagne,
00:20:49 c'était pareil, c'était un réversible.
00:20:52 "C'était ton tour, bon, OK, c'est mon tour, j'y vais."
00:20:55 Donc, j'ai jamais eu ce problème de...
00:20:57 La place d'une femme dans une cordée
00:20:59 ou au milieu de garçons,
00:21:01 parce qu'ils m'ont pris comme un grimpeur.
00:21:03 -Alors, Soline et Sébastien,
00:21:06 vous avez présenté aux Rencontres Scènes et Montagnes
00:21:09 cette année un film, "Cap", sur El Cap,
00:21:12 qui retrace une aventure de près d'un an
00:21:14 pour grimper les voies les plus difficiles du monde
00:21:18 au Yosemite.
00:21:19 Si ça vous a pris aussi longtemps ce périple,
00:21:21 c'est que vous avez décidé d'y aller
00:21:23 un peu différemment de ce que font les grimpeurs européens
00:21:27 quand ils veulent aller aux Etats-Unis.
00:21:29 On va se poser au bon endroit.
00:21:31 Il y avait une autre démarche derrière ce projet, Sébastien.
00:21:34 -Oui, tout à fait.
00:21:35 En fait, il y a un ou deux ans, ou même un peu plus longtemps,
00:21:39 j'ai décidé d'arrêter de prendre l'avion,
00:21:42 et Soline aussi, je pense, si je m'avance pas trop,
00:21:45 pour des raisons écologiques,
00:21:47 parce qu'on a l'impression
00:21:50 que c'est une question presque de vie ou de mort,
00:21:53 il y a une urgence, en tout cas.
00:21:55 Donc, j'ai décidé d'arrêter de prendre l'avion,
00:21:58 et par contre, j'avais quand même envie de retourner au Yosemite
00:22:02 pour certaines voies qui sont là-bas, qui sont magnifiques.
00:22:05 Du coup, on s'est dit, de manière assez pragmatique,
00:22:08 comment on peut aller au Yosemite sans prendre l'avion ?
00:22:11 Il y a toujours le bateau.
00:22:13 On a mis en place une expédition en voilier
00:22:15 pour traverser l'Atlantique à des retours
00:22:18 avec un groupe de copains et copines.
00:22:20 Et voilà, aller grimper sur El Cap.
00:22:22 -Vous êtes partis d'Espagne à la destination des Caraïbes
00:22:26 sur un voilier de 15 m.
00:22:28 On voit là le circuit.
00:22:29 Il faut traverser l'Océan Atlantique.
00:22:31 Il y en avait dans la bande de copains
00:22:34 qui étaient capables de traverser un océan ?
00:22:36 -Alors, pas beaucoup.
00:22:38 On a eu la chance d'avoir Loïc, ici, qu'on peut voir à l'image,
00:22:43 et Maud, sa copine, qui...
00:22:45 Eux deux étaient marins, et donc...
00:22:48 Elles nous ont emmenés à travers...
00:22:51 Ils nous ont vraiment tout montré, tout appris.
00:22:54 Donc, on a eu la responsabilité de nous faire traverser l'Atlantique,
00:22:59 mais tous les grimpeurs et grimpeuses
00:23:01 n'avaient aucune expérience.
00:23:03 -C'est peut-être plus facile de trouver la bonne voie en mer
00:23:07 qu'en montagne.
00:23:08 Il y a moins de pièges objectifs,
00:23:10 mais vous aviez une technique assez particulière
00:23:13 pour choisir votre itinéraire.
00:23:15 -On va essayer de prendre une décision
00:23:17 pour la route par laquelle aller au Yosemite.
00:23:21 Allez, Momo !
00:23:22 -La tête de Philippe ?
00:23:25 -Alors, Panama ou Mexique ?
00:23:26 -C'est les cinq ans !
00:23:28 -Youhou !
00:23:29 -C'est les cinq ans !
00:23:30 -On va au Mexique, alors. -Je suis sur le Mexique.
00:23:33 -C'est ça qu'on voulait.
00:23:35 -Bon, ça se passe comme ça aussi,
00:23:37 dans les grandes voies.
00:23:39 On tire au sort pour savoir si on part à droite ou à gauche.
00:23:42 -T'évites de te prendre la tête.
00:23:44 -C'est sûr que là, on réfléchit plus trop,
00:23:47 on laisse le hasard décider.
00:23:49 Vous y avez passé combien de jours, Soline, sur ce bateau ?
00:23:53 -On a passé...
00:23:55 Ouh là là !
00:23:56 Deux mois et demi à l'aller,
00:23:58 avec à peu près 45 jours de navigation, je pense.
00:24:01 Et au retour, une quarantaine de jours de navigation aussi.
00:24:05 Donc quand même un bon bout de temps.
00:24:09 -On sent dans cette petite séquence
00:24:11 qu'il y avait une bonne ambiance dans tous les membres d'équipage.
00:24:15 -Ah ouais, là, c'est sûr que ça crée une proximité.
00:24:18 Et puis sur un bateau, au bout d'un moment,
00:24:21 tu te rends compte que quand tu lis un truc
00:24:23 ou que tu cuisines, ça te rend légèrement nauséeux.
00:24:27 C'est quand même plus simple d'aller juste te poser
00:24:30 avec tes amis et puis de discuter
00:24:33 de sujets souvent assez intéressants.
00:24:37 Et ouais, on apprend à se connaître d'une autre façon.
00:24:41 -Vous étiez combien, Sébastien ?
00:24:43 Chien compris sur ce bateau de 15 mètres ?
00:24:47 -Chien compris, on était neuf.
00:24:49 A savoir qu'il y avait seulement sept couchettes.
00:24:52 -Ah !
00:24:53 -Mais il y a toujours quelqu'un à la barre.
00:24:56 De base, l'idée, c'était de tourner un peu les couchettes.
00:24:59 Finalement, il y en a un qui est dormi dans le salon,
00:25:03 sur une banquette.
00:25:06 Et puis on en a retrouvé plusieurs fois par terre
00:25:08 parce que la cabine avant surchauffait
00:25:10 et que c'était irrespirable.
00:25:12 Voilà, ça a été un peu épique et intéressant,
00:25:15 ces cinq mois en tout à passer dans ce bateau.
00:25:18 -Chez Catherine, il y a le mal de mer en bateau.
00:25:22 Il y a le mal des montagnes aussi, parfois, en altitude.
00:25:25 Est-ce que, dans l'équipe, vous avez géré ça comme il fallait ?
00:25:29 -On était deux à avoir un léger mal de mer.
00:25:33 Moi et Clovis, c'est l'autre qui a dormi...
00:25:36 -C'est quoi, ce que vous appelez "léger" ?
00:25:39 -C'est-à-dire que... Voilà.
00:25:41 La première semaine, il s'est passé ça.
00:25:43 Quelques vomis par-dessus bord
00:25:46 et puis, petit à petit, tu t'amarines
00:25:48 et au bout de quelques jours, ça va mieux.
00:25:51 N'empêche qu'à chaque fois que tu changes de manière de naviguer,
00:25:54 que tu te retrouves face au vent, que le bateau se met à agiter,
00:25:57 c'est reparti pour trois jours.
00:25:59 Il faut se réamariner à cette manière-là de naviguer
00:26:02 et ainsi de suite jusqu'à...
00:26:04 Puis ça change. Il faut à chaque fois se réhabituer.
00:26:07 -Quand on est des grimpeurs de haut niveau,
00:26:09 c'est pas Solène qui va me contredire,
00:26:12 il faut s'entraîner tous les jours pour rester au niveau,
00:26:15 vous partiez pour affronter la voie la plus difficile du monde.
00:26:18 Le bateau, c'est pas l'endroit idéal pour garder la forme.
00:26:22 Comment vous avez fonctionné, Solène ?
00:26:24 -On l'a aménagé de différentes façons
00:26:27 et on avait construit des petits agrés pour se suspendre
00:26:30 et même un petit pan d'entraînement dans une cabine.
00:26:33 Et du coup, on en faisait dès qu'on pouvait.
00:26:36 Quand on avait la motivation,
00:26:39 que les conditions le permettaient,
00:26:41 un peu le matin, un peu le soir,
00:26:43 et ça a marché, ça nous a gardé
00:26:46 une base physique, on va dire.
00:26:49 -C'est la première salle d'escalade flottante,
00:26:51 ce que vous avez imaginé sur ce bateau.
00:26:54 -Oui, complètement.
00:26:55 -Je crois que jamais personne n'avait mis un pan comme ça
00:26:58 sur un bateau, ou sur un petit bateau à voile.
00:27:01 C'était un peu inédit, le côté inédit de notre expérience.
00:27:04 -Il faut peut-être gérer le roulis aussi.
00:27:07 La précision de poser les prises, les pieds,
00:27:09 le fait que ça tangle, ça peut jouer.
00:27:11 -Il y a des jours où quand tu gîtais d'un côté,
00:27:14 ça allait très bien, d'autres, moins bien.
00:27:16 On n'avait pas besoin de changer de bloc,
00:27:19 on avait le même sur le pan en cabine,
00:27:21 et parfois, c'était extrême et facile.
00:27:23 Ça ajoutait du piment.
00:27:25 -Il y a eu d'autres péripéties dans votre voyage
00:27:28 avant d'arriver finalement, au bout de quelques mois,
00:27:31 au pied de ce mythe de la grimpe américaine,
00:27:33 le Capitan aux Yosemites.
00:27:35 C'est un endroit où vous avez déjà grimpé ?
00:27:38 -Oui, j'y suis allée 2-3 fois,
00:27:40 mais j'ai eu mauvais temps.
00:27:41 J'ai plutôt grimpé dans le désert américain,
00:27:44 le Yosemite, mais j'ai pas eu de chance.
00:27:46 J'ai pas persisté non plus.
00:27:48 J'y allais en fin d'automne souvent,
00:27:51 et il commençait à faire moins brond,
00:27:54 humide et froid.
00:27:56 -C'est cette paroi assez incroyable,
00:28:00 géologiquement parlant,
00:28:02 qui se dresse comme ça dans une grande forêt américaine
00:28:06 et qui, évidemment, attire tous les grimpeurs.
00:28:10 Vous aviez un objectif particulier,
00:28:12 Seb, sur cette falaise.
00:28:14 -Tout à fait. Je voulais essayer de répéter le downwall,
00:28:17 qui est la face la plus raide et la plus lisse de l'Hell-Capitan.
00:28:21 C'est une grande voie d'une trentaine de longueurs,
00:28:24 avec deux longueurs dans le 9
00:28:27 et pas loin de 16 longueurs cotées au-dessus du 8,
00:28:31 qui sont quand même toutes très dures.
00:28:34 Euh...
00:28:35 Mon objectif, c'était de le répéter,
00:28:38 comme les trois longueurs qu'avaient eues
00:28:40 Tommy Caldwell et Kevin Jorgson,
00:28:42 qui sont les premiers à l'avoir enchaînée,
00:28:44 et seulement Adam Andra qui l'a répété un peu plus tard.
00:28:47 -C'est une voie qui ne s'improvise pas,
00:28:50 évidemment, qui demande une certaine préparation,
00:28:54 puisqu'on part pour plusieurs jours,
00:28:56 on ne sait pas combien, quand on s'attaque à une voie comme celle-là.
00:29:00 Il faut prévoir de passer un certain temps
00:29:03 dans la falaise.
00:29:05 La vie en portaledge, c'est l'obligation,
00:29:08 quand on est grimpeur de grande voie,
00:29:11 de pouvoir s'adapter à ce type de confort ?
00:29:14 -Oui, tout à fait.
00:29:15 C'est même un côté qu'on finit par fort apprécier,
00:29:18 plus que juste s'adapter.
00:29:20 C'est unique de se retrouver là.
00:29:23 En l'occurrence, j'ai passé 23 jours
00:29:26 sur ce camp portaledge pour essayer d'enchaîner le downwall.
00:29:29 Et c'est un souvenir unique
00:29:32 de vivre là, sur ces 2 m2 de tentes suspendues,
00:29:36 au-dessus de la vallée du Yosemite.
00:29:38 -23 jours sans redescendre. -23 jours sans redescendre.
00:29:41 -Catherine, vous passez aussi du temps
00:29:44 dans ce type d'équipement ?
00:29:46 -Oui, j'ai passé du moment en portaledge.
00:29:48 J'ai un cheveu, j'aime bien. -Vous aimez bien aussi ?
00:29:51 -Oui, c'est sympa. -C'est pas désagréable.
00:29:53 -C'est un beau voyage.
00:29:55 -Quand on voit les images et qu'on imagine passer 23 jours là,
00:29:58 on n'a pas l'impression qu'on peut y prendre du plaisir.
00:30:02 Vous y arrivez, Solène ? -Non, jamais.
00:30:04 Mais bientôt, un jour. -Je vous le souhaite.
00:30:07 Ceux qui ont testé, ça leur plait.
00:30:09 Comment on passe le temps, Solène, quand on est coincée
00:30:12 sur un petit bout de tissu de quelques m2 ?
00:30:15 -On mange.
00:30:16 Rires
00:30:18 Voilà.
00:30:19 Et on discute.
00:30:21 -D'accord.
00:30:22 -On essaie de ne pas tout cramer en cuisinant.
00:30:25 -Oui, parce qu'il faut organiser une petite vie.
00:30:28 J'ai vu qu'il y avait des instruments de musique
00:30:31 qui étaient montés pour passer le temps.
00:30:34 Sur un porte-toilette, les toilettes,
00:30:36 ça se passe comment ?
00:30:37 -Dans un sachet.
00:30:39 Rires
00:30:40 Non, non, bah ouais, dans un petit sachet en plastique,
00:30:43 à la limite avec un peu de...
00:30:45 -C'est pas ce qu'on voit sur ces images.
00:30:47 -Ah ouais.
00:30:48 -C'est rien.
00:30:50 -Ca, c'est rien, ça.
00:30:51 Rires
00:30:52 -Elles sont dans le film.
00:30:54 Je me suis permis de les reprendre.
00:30:56 -Tu lui fous la honte en plein milieu du plateau.
00:30:59 -On est centaines de gens, merci.
00:31:01 -Ca veut dire que les toilettes sont sur le palier.
00:31:03 C'est comme ça que j'ai compris le message.
00:31:06 -Il faut économiser ses forces.
00:31:08 -Ca, effectivement, c'est une bonne réponse,
00:31:11 parce que chaque longueur dans une voie comme celle-là,
00:31:14 c'est un défi en soi.
00:31:15 Sébastien a énuméré les quotations entre l'huit et le neuf.
00:31:19 Une longueur, à ce niveau-là, c'est compliqué,
00:31:21 mais quand on doit en enchaîner une trentaine,
00:31:24 il faut économiser, comme le dit Soline,
00:31:26 ses forces par tous les moyens.
00:31:28 -C'est une réponse.
00:31:30 Je dirais que c'est un véritable siège qu'on met dans la voie,
00:31:33 avec toute une notion de gestion, de stratégie,
00:31:37 de savoir quels jours tu te reposes.
00:31:39 De nouveau, on a parlé des chaussons,
00:31:41 quelles chaussons utiliser,
00:31:43 quelle quantité d'eau et de nourriture
00:31:45 on va devoir hisser avec nous.
00:31:47 Quand tu restes 23 jours, il faut hisser.
00:31:49 J'avais un sac qui faisait presque 150-200 kg, pas loin,
00:31:53 rempli d'eau et de bouffe.
00:31:56 Tout ça, il faut l'économiser, savoir ce que tu as le droit
00:31:59 de boire et de manger.
00:32:01 -On vous voit en train de grimper.
00:32:04 On sent sur ces prises qu'il faut une force athlétique
00:32:07 et une forme physique vraiment de pointe
00:32:09 pour tenir et enchaîner ces voies.
00:32:12 -Oui, ça reste de l'escalade...
00:32:16 C'est de l'escalade de Big Wall, un peu plus alpine, on dirait,
00:32:20 mais ça reste quand même de l'escalade sportive
00:32:22 où, en fait, je passe mon temps sur des pans en dévers,
00:32:26 comme les compétiteurs et compétitrices,
00:32:29 à faire du vrai sportif, à faire de la muscu,
00:32:31 à m'entraîner en doigt.
00:32:33 -Est-ce qu'on réfléchit aussi au choix du collant ?
00:32:38 J'ai vu que c'était Léopard, peut-être Félin,
00:32:41 sur ces petites prises.
00:32:42 -Celui-là rend plus souple.
00:32:44 -C'est vrai ? Tous les détails comptent.
00:32:48 23 jours, vous l'avez dit, dans cette voie,
00:32:51 dont 16 sur une seule longueur, la 14.
00:32:55 Je ne me trompe pas.
00:32:56 Qu'est-ce qu'elle a de particulier, la 14 ?
00:32:58 Leur droit était super, vous vous êtes dit "je vais y passer 2 semaines".
00:33:02 -Alors, j'aurais aimé que ce soit ça.
00:33:04 Malheureusement, non, c'est parce que c'est la longueur la plus dure de la voie.
00:33:09 C'est une longueur d'une quinzaine de mètres.
00:33:11 -C'est celle qu'on voit là. -Oui, c'est ça,
00:33:13 qui est côté Neuva, et qui est extrêmement exigeante
00:33:16 parce qu'elle est très bloc, très courte.
00:33:18 Vraiment, c'est des tout petits pieds qu'il faut charger,
00:33:21 mettre vraiment beaucoup de poids,
00:33:24 tu peux partir à n'importe quel moment.
00:33:26 Mon objectif, c'était de l'enchaîner au complet.
00:33:29 Donc j'essaye, j'essayais tous les deux jours.
00:33:33 -Et plusieurs fois par jour, j'imagine.
00:33:35 -Plusieurs fois par jour.
00:33:37 Souvent, j'avais un créneau de quelques heures d'ombre.
00:33:40 En plein soleil, c'est impossible d'essayer,
00:33:42 la gomme des chaussons est trop moue, ta peau trop transpirante.
00:33:46 J'essayais pendant ces quelques heures par jour,
00:33:48 quelques essais,
00:33:51 et le lendemain, je me reposais pour soigner la peau,
00:33:54 qui avait souvent des coupures,
00:33:56 et puis je réessayais le lendemain.
00:33:59 -14 jours sur une voie de 15 m, ça vous est déjà arrivé ?
00:34:02 De buter comme ça et de vous dire
00:34:04 "je partirai pas tant que j'y arrive pas" ?
00:34:06 -Non, non, non, 14 jours sur une voie, non, non,
00:34:09 j'ai pas fait ça. Après, il y a des grimpes...
00:34:11 C'est en paroi, donc c'est compliqué,
00:34:13 mais il y a des grimpeurs qui passent un an sur une voie.
00:34:16 Travailler des voies très dures, ça existe.
00:34:20 Mais là, l'originalité, c'est que c'est...
00:34:22 Bon, on est pendu...
00:34:24 On est pendu en pleine paroi et qu'au bout d'un moment,
00:34:28 on peut pas revenir, quoi.
00:34:30 Il y a plus rien à manger, il y a plus rien à...
00:34:33 Il y a plus rien à boire, on est obligé de redescendre.
00:34:36 Alors que, voilà, quand on travaille une voie en neuf
00:34:39 sur une falaise classique où on démarre du sol,
00:34:44 il y en a qui peuvent passer très, très longtemps.
00:34:47 -Oui ? -Tu confirmes ?
00:34:49 -Moi, perso, non, mais oui, en effet.
00:34:51 -Voilà.
00:34:52 Alors là, il y avait une logistique, une équipe,
00:34:55 dont Soline fait partie,
00:34:58 pour alimenter
00:35:00 Seb et gérer, en fait,
00:35:03 le quotidien d'une vie en paroi et en porte à l'Edge.
00:35:07 C'est un travail un peu de l'ombre, un peu ingrat.
00:35:10 -On s'est relayées là-haut, parce qu'il faut quelqu'un
00:35:14 de l'autre côté de la corde pour assurer.
00:35:16 -On a vu qu'il tombait de temps en temps, notre champion.
00:35:19 -Oui.
00:35:21 -Alors...
00:35:22 -Et c'est sûr que toute l'équipe a vibré au rythme
00:35:25 de Sébastien là-haut, les jours où il grimpait,
00:35:28 et qu'on n'était pas la personne qui était montée avec lui,
00:35:32 enfin, qui était en haut pour l'assurer.
00:35:34 On se mettait en bas dans le médeau, avec quelques bières,
00:35:37 on regardait aux jumelles, on criait quand il grimpait, etc.
00:35:41 Ouais, on était à fond.
00:35:43 -Oui.
00:35:44 -C'est ça qui est particulier avec cette paroi,
00:35:47 c'est qu'elle est énorme et elle est raide et tout,
00:35:51 mais on peut aussi la voir facilement depuis un parking,
00:35:55 et puis donc c'est assez facile d'observer ce qui se passe là-haut.
00:35:58 -Là, je crois que c'est votre dernière tentative, Sébastien,
00:36:01 sur ces images. -Ouais.
00:36:03 Et du coup, c'est ça, c'est le dernier pas de bloc,
00:36:07 et là, la caméramane, Julia Cassou,
00:36:10 elle est au relais de la voie,
00:36:13 donc je me suis lancé vers la dernière prise,
00:36:16 qui est une bonne prise,
00:36:18 et je l'ai pas réussi à tenir
00:36:19 parce que mon pied gauche a "zippé", comme on dit.
00:36:23 -Ce qu'il faut se rendre compte, c'est le mental.
00:36:25 C'est tellement déprimant.
00:36:28 Il a dû passer tous les jours à essayer ça
00:36:31 et échouer chaque fois.
00:36:32 -On a senti une légère déception. -Une frustration intense.
00:36:36 -Oui. -Oui.
00:36:38 Après, c'est une leçon de vie, mais...
00:36:41 Bravo.
00:36:43 -Ouais, ouais.
00:36:44 -On est obligés de le digérer.
00:36:46 -Je l'ai digéré, tout à fait,
00:36:47 mais sur le moment, j'avais l'impression
00:36:50 que c'était mon unique chance, vu que j'étais venu en voilier.
00:36:54 Ca faisait... -Ca rajoutait encore du...
00:36:57 -Ca rajoutait un coup de pression.
00:37:00 Si j'avais pu me dire que je reprends un avion
00:37:02 et que je reviens dans 3 mois, pourquoi pas ?
00:37:05 Là, c'était pas le cas.
00:37:06 -Si la dernière prise tient, c'est bon ?
00:37:09 La voie est sortie ?
00:37:11 -Je veux pas retourner le couteau dans la plaie.
00:37:14 -Il y a des longueurs encore, en plus,
00:37:16 mais ça aurait pu être joué, ouais.
00:37:19 -Les déceptions ont été partagées par toute l'équipe.
00:37:22 Soline ?
00:37:24 -Oui, c'est sûr, mais il y a quand même eu un soulagement
00:37:27 au moment où il a accepté... Enfin, où il est redescendu.
00:37:30 Parce que...
00:37:32 -23 jours.
00:37:33 -Parce que quand même, au bout d'un moment,
00:37:35 j'ai l'impression qu'il allait... Il perd de la boule, quoi.
00:37:39 Rires
00:37:41 -C'était... Voilà, la vie continue,
00:37:43 et puis... Et puis, il faut...
00:37:45 Il faut tourner la page. -Ouais, c'est clair.
00:37:47 -Pas ça, autre chose. -Ca reste de l'escalade.
00:37:50 -C'est un loisir, on est là pour s'amuser, mais bon.
00:37:53 -T'as pas mis ta vie en danger, quoi.
00:37:55 -Non, non.
00:37:56 -Peut-être son mental, son équilibre mental.
00:37:59 -Mon équilibre psychologique. -On sent, dans l'ultime chute,
00:38:02 je sais pas si vous tentez pas le coup,
00:38:05 mais on sent le cri, il vient vraiment de...
00:38:08 -Là, sur cette chute-là, en l'occurrence,
00:38:11 je savais que c'était la chance,
00:38:13 c'est la seule fois où j'avais passé le move d'avant.
00:38:16 Je savais que j'avais plus trop de nourriture,
00:38:18 plus trop d'eau, plus de paire de chaussons assez bonnes
00:38:21 pour pouvoir refaire le truc.
00:38:23 Parfois, en escalade, il faut saisir l'opportunité que t'as,
00:38:27 et c'est un peu binaire, soit tu réussis, soit tu rates.
00:38:30 T'as beau être très proche, ça reste raté.
00:38:32 Et donc, ouais, là, il y a de la frustration.
00:38:35 Mais... Mais bon.
00:38:37 Assez vite, derrière, je vais pas continuer de crier comme ça.
00:38:41 -Ha !
00:38:42 Bon, il a retrouvé le sourire.
00:38:44 Et puis, vous avez même été bon joueur,
00:38:46 puisque vous avez ensuite inversé les rôles avec Soline.
00:38:50 Elle vous avait assisté pendant plus de trois semaines.
00:38:53 Donc, à votre tour, vous vous êtes mis en équipier de luxe
00:38:56 pour que Soline puisse aussi tenter une voie
00:38:58 dans ce fameux El Capitan du Yosemite,
00:39:02 et une voie peut-être pas aussi dure
00:39:04 que celle que Sébastien avait affrontée,
00:39:06 mais qui est quand même une voie de très haut niveau.
00:39:09 -Euh... Oui, c'est une voie dans un style particulier,
00:39:13 où on grimpe quand même pas mal sur des coinceurs,
00:39:16 avec pas mal de longueur dans le 7
00:39:18 et une longueur dans le 8.
00:39:21 Et c'est clair que moi, à la différence de Séb,
00:39:24 j'ai eu un peu ce bon... Enfin, pas ce bon karma,
00:39:27 mais où j'ai réussi à... Ouais, juste à concrétiser un peu plus.
00:39:31 Et... Et voilà.
00:39:34 -Pourtant, les conditions météorologiques
00:39:36 n'étaient pas forcément les plus favorables sur cette voie.
00:39:39 On vous voit au milieu du vent, des intempéries,
00:39:42 je crois qu'il y a même eu de la neige.
00:39:45 -Le deuxième jour, on comprenait pas,
00:39:47 on voyait les gens descendre, on était là,
00:39:49 "Qu'est-ce qui se passe ?" "Il y a la tempête."
00:39:52 "Oui, il y a une tempête, ça va."
00:39:54 Et en fait, on s'est retrouvés bien tout seuls sur le mur
00:39:57 pendant 24 heures à faire le moins de mouvements possibles
00:40:01 pour essayer de rester au chaud,
00:40:03 de pas commencer à mouiller, s'enduver, ces trucs.
00:40:06 On a vraiment eu peur qu'on se mette à prendre l'eau
00:40:10 et à finir en hypothermie.
00:40:12 Enfin, on a eu peur.
00:40:14 Moi, j'ai pas eu très, très peur.
00:40:16 Euh... -Pardon, pardon.
00:40:18 -Non, non. -Ce qu'il faut savoir,
00:40:20 c'est qu'on était en plein mois de mars-avril, avril, je pense,
00:40:24 donc déjà au printemps, et on venait de passer l'hiver rouilleuse,
00:40:28 on avait eu des problèmes de trop froid,
00:40:30 mais c'était pas exagéré.
00:40:32 On était montés avec des sacs de couchage presque d'été.
00:40:35 Et puis, la veille, au soir, dans ce portaledge,
00:40:38 on regarde la météo, parce qu'on avait vu ces gens descendre.
00:40:41 On s'inquiétait pas encore trop.
00:40:43 Et je vois quand même -15 sur El Capitan.
00:40:46 C'est quand même louche, ça.
00:40:48 Il doit y avoir une erreur. -Une erreur.
00:40:50 -Et le matin, on s'est vraiment levés avec les sacs de couchage
00:40:54 tout durs, gelés.
00:40:55 Et donc, dont un qui était vraiment mouillé,
00:40:58 avec de la neige partout.
00:40:59 Et c'est sûr que...
00:41:01 Moi, vraiment, je me suis dit, là, c'est compliqué de descendre,
00:41:05 parce qu'il neigeait, on allait vraiment mouillé,
00:41:07 on avait pas de gants, vraiment,
00:41:09 on était pas équipés comme en alpinisme, quoi.
00:41:12 On était vraiment avec juste des chaussons, des collants troués.
00:41:15 Et puis, pendant cette ascension, il s'est passé plein...
00:41:19 Enfin, y a mon matelas qui s'est envolé,
00:41:21 donc on a dû se réadapter.
00:41:22 Y avait ces sacs de couchage mouillés.
00:41:24 Donc, vraiment, y a un moment où je me suis dit, waouh, là...
00:41:28 -C'est pas loin. -Ca peut être...
00:41:30 Ca peut nous jouer des tours, ouais.
00:41:32 -C'est vrai que quand on part comme ça
00:41:35 sur un bigole pour plusieurs jours,
00:41:37 on se rend pas compte qu'il y a des petits détails
00:41:40 qui peuvent te stopper net dans ta progression, quoi.
00:41:43 Si tu fais tomber un truc, par exemple,
00:41:45 que t'as absolument besoin,
00:41:46 bah, voilà, c'est fini, faut redescendre, quoi.
00:41:49 -Alors, malgré tous ces aléas,
00:41:51 Solene est allée au bout de cette ascension.
00:41:54 Alors, grimper dans des parois comme ça,
00:41:56 de plus de 1 000 m, évidemment, y a de l'ambiance,
00:41:59 y a du gaz, comme on dit, ça peut jouer aussi
00:42:02 sur la performance, le vide qui est sous vos pieds.
00:42:05 Ca a un impact pour vous ?
00:42:07 -Je dirais que...
00:42:10 Moi, j'y suis pas hyper sensible,
00:42:13 mais qu'au bout d'un moment où ça fait plusieurs jours
00:42:16 que t'es, voilà, attachée à des relais,
00:42:20 au bout d'un moment, tu fatigues un peu mentalement,
00:42:23 de se dire, ouais, là, si je fais mal ma manip,
00:42:25 je tombe par terre, c'est fini, quoi.
00:42:27 Mais... -Il faut toujours être concentrée.
00:42:30 -Ouais. Moi, j'étais quand même dans un état d'esprit
00:42:34 où j'allais au bout, quoi.
00:42:36 Y a pas eu de moments de doute,
00:42:38 y a pas eu de moments où je me suis dit,
00:42:41 "Ah, là, ça va pas le faire."
00:42:43 J'ai réussi à... Quand ça marchait pas,
00:42:45 parce qu'il y a des moments où ça marchait pas,
00:42:48 y avait des séquences que j'ai eu du mal à trouver,
00:42:52 où ça a mis plusieurs heures, voire même plusieurs jours,
00:42:55 où j'ai réussi à rester assez calme, à, voilà,
00:42:58 "Allez, on va trouver, on n'est pas pressés."
00:43:01 On avait pris pas mal de... -T'es restée combien de temps ?
00:43:04 -Je suis restée neuf jours.
00:43:06 Et on avait prévu une dizaine de jours,
00:43:08 donc voilà, on avait pris quand même large.
00:43:11 -A savoir que sur ces neuf jours,
00:43:13 on est restés trois jours enfermés dans le portaledge
00:43:16 à cause de tempête. On pouvait pas grimper.
00:43:19 -Comme on mange, si j'ai bien compris,
00:43:21 pour passer le temps dans le portaledge,
00:43:23 on peut pas grimper. -Le réserve !
00:43:25 -C'est clair. -Je voyais les images.
00:43:28 Lequel a piqué le colon léopard de l'autre ?
00:43:30 -C'est mon colon léopard. -Ah, d'accord.
00:43:33 Ils... -C'est même pas une question.
00:43:36 -Bon. Alors, on a vu la dernière longueur clé
00:43:40 de Sébastien, qui, malheureusement, s'est mal terminée.
00:43:43 On va regarder la dernière longueur clé de Soline.
00:43:46 Là, le soleil était revenu.
00:43:48 C'est là où ça se joue pour vous, Soline ?
00:43:52 -Pas vraiment. En fait, ça se joue...
00:43:54 Il y a des longueurs dures plus bas.
00:43:56 Quand je suis arrivée à cette longueur,
00:43:58 je l'avais déjà repérée en allant là par une autre voie
00:44:02 quelques semaines avant. Je savais que j'allais y arriver.
00:44:05 -Celle-là vous faisait moins peur ? -Il y avait plus qu'à le faire.
00:44:09 J'aurais pu rester un jour de plus, mais...
00:44:11 -On avait quand même plus beaucoup de bouffe.
00:44:14 Je me rappelle... Si je peux te contredire,
00:44:16 il y avait quand même une certaine tension.
00:44:19 -En effet, je pense que c'est ça qui a permis
00:44:21 qu'elle ait pu réussir la totalité de la voie.
00:44:24 Elle a toujours été ultra focus, ultra concentrée.
00:44:27 Elle a rarement douté, malgré les coups de tempête
00:44:30 où j'avais des doutes et j'essayais de ne pas les montrer.
00:44:33 Elle a toujours été à fond dans l'objectif et n'a pas hésité.
00:44:37 C'est ça qui a fait que ça a marché.
00:44:39 Mais encore, à cette dernière journée,
00:44:41 il y avait encore de l'enjeu.
00:44:43 -Et t'as envie d'en finir.
00:44:45 -Ca reste une longueur en 7C+ 8A
00:44:48 à 900 m de haut,
00:44:50 sur des vieux pitons.
00:44:52 Enfin, voilà, ça reste quelque chose, là-haut.
00:44:55 C'est pas fini.
00:44:56 -En tout cas, bravo d'avoir réussi à boucler.
00:45:00 J'ai vu que vous étiez la plus jeune à réaliser...
00:45:03 -Je suis quasiment la plus jeune.
00:45:05 En fait, il y a une autre femme, Bess Roden,
00:45:08 qui a grimpé le Capitane en libre à 21 ans,
00:45:11 mais c'était pas, en gros, sur la face
00:45:13 qui a le plus d'ampleur.
00:45:16 Je considère pas être la première.
00:45:18 Il faut rendre à César...
00:45:19 -T'as fait la plus dure.
00:45:21 -Oui, c'est plus dur, mais bon,
00:45:23 elle avait fait cette itinéraire-là.
00:45:26 -Je m'arrangerais de la vie de Catherine.
00:45:29 C'est la voix la plus dure qui compte.
00:45:31 Si c'est la plus jeune sur la voix la plus dure,
00:45:34 on dessernera le trophée à Solide.
00:45:37 -Au vu comme ça.
00:45:38 -Si en France, tout le monde est d'accord.
00:45:40 -Besaud a été américaine.
00:45:42 -Télé Grenoble est moins regardé aux Etats-Unis,
00:45:45 mais ça peut se passer, normalement.
00:45:47 On regardait ça entre nous.
00:45:49 En tout cas, on l'a vu,
00:45:51 même si c'est une performance individuelle,
00:45:53 c'est un travail d'équipe, notamment l'escalade en grande voie.
00:45:57 On passe plus de temps à assurer ou à gérer la logistique
00:46:00 qui a grimpé, sauf quand on grimpe en solo,
00:46:04 là où on n'a pas à s'embêter de tout ça,
00:46:07 des manifs de cordes ou des équipiers.
00:46:10 C'est une pratique qui a été popularisée.
00:46:12 -On a parlé de l'ingé dans les années 80.
00:46:14 Vous l'avez pratiqué, Catherine, le solo intégral ?
00:46:17 -Oui, pas mal.
00:46:18 -Oui ? C'est une approche particulière ?
00:46:21 -C'est différent. Moi, j'en ai fait pas mal,
00:46:23 mais avec...
00:46:25 Je compare avec Alex Honnold, par exemple, aujourd'hui.
00:46:28 J'ai l'impression qu'il a moins de marge que j'en avais.
00:46:31 Du coup... Ou même Alain Robert,
00:46:34 qui est connu pour les buildings,
00:46:36 il a fait des solos super impressionnants
00:46:38 dans le Verdon et à Bioux.
00:46:41 Voilà. La marge, je trouve qu'elle n'est pas là.
00:46:45 Ce que j'ai fait,
00:46:46 j'ai fait pas mal de solos, mais avec pas mal de marge.
00:46:50 Mais du coup, j'avais...
00:46:52 Voilà, j'étais préparée, j'avais de la...
00:46:55 Une bonne marge pour être sûre que j'allais pas me faire mal.
00:47:00 Voilà. Et ça demande un peu de travail.
00:47:02 -Et un peu de travail psychologique.
00:47:04 C'est une discipline que vous pratiquez ?
00:47:07 -Non, pas vraiment. -Sébastien ?
00:47:09 -Non. -Non.
00:47:10 -Non ? -Vraiment, très brièvement,
00:47:12 mais non.
00:47:13 -Alors, il y a d'autres manières de grimper en solo,
00:47:16 et c'est là où je voulais en venir.
00:47:18 Vous avez testé le rope solo.
00:47:20 Alors, est-ce que vous pouvez nous expliquer
00:47:23 en deux mots en quoi ça consiste ?
00:47:25 -Oui. C'est grimper en tête avec une corde,
00:47:29 et donc, en fait, tu t'assures toi-même
00:47:32 tout en grimpant, quoi.
00:47:33 -C'est ce qu'on voit sur ces images.
00:47:36 Il y a personne de l'autre côté de la corde.
00:47:38 -Oui. -C'est vous-même
00:47:40 qui vous auto-assurez, on va dire, sur la voie d'escalade.
00:47:43 -J'ai un système d'assurage sur mon baudrier,
00:47:45 et puis je grimpe, je me donne du mou.
00:47:48 Il y a différentes techniques qui permettent de faire ça.
00:47:51 J'avais plus ou moins essayé ma propre technique,
00:47:54 et ça marche pas mal.
00:47:55 Après, ici, c'était juste une sorte de petit défi
00:47:58 que je m'étais fixé.
00:47:59 C'est pas quelque chose que je pratique au jour le jour.
00:48:02 Pour le moment, j'aime encore bien...
00:48:04 Mes assureurs et assureuses me supportent encore.
00:48:07 -Avec les poignées auto-bloquantes ?
00:48:09 -Oui. -C'est quoi ?
00:48:11 -Le truc, c'est que quand tu grimpes en auto-assuré,
00:48:14 en saulant en tête, il faut fixer ta corde en bas,
00:48:16 tu fais la longueur jusqu'en haut,
00:48:18 et là, tu refixes en haut, il faut redescendre
00:48:21 pour pouvoir enlever le nœud que t'as fait en bas,
00:48:24 et puis remonter, et puis c'est toutes ces cordes.
00:48:27 -Il faut aimer les manips de corde.
00:48:29 -Il faut rester concentré tout le long
00:48:31 et aimer les manips de corde.
00:48:33 -C'est une technique que vous adoptiez à l'époque ?
00:48:36 -Oui, mais même dans mes années à moi,
00:48:38 on avait des systèmes qui étaient moins sûrs que celui-là,
00:48:41 mais oui, on était obligés qu'on fixe la corde en bas,
00:48:45 et une fois qu'on est arrivé en haut de la longueur,
00:48:48 on équipe le relais, on descend, on déséquipe,
00:48:50 on récupère le tout, et puis on remonte et on continue.
00:48:54 -C'est un des images des druches.
00:48:56 -Les druches, j'utilisais pareil un système
00:48:58 mais qui était pas au point du tout.
00:49:00 Ca fait que si on tombait, on tombait à toute la corde.
00:49:04 Ca défilait, il fallait tomber dans l'axe,
00:49:07 pas se retourner, c'était horrible.
00:49:09 -Il fallait pas tomber. -Non, il fallait mieux pas tomber.
00:49:12 Là, je suis auto-assurée, pareil.
00:49:14 Donc, tous les 30 ou 40 m, je faisais un relais,
00:49:17 je descendais pour récupérer mon matériel.
00:49:19 J'avais peu de pitons, mais comme c'est que de l'artif,
00:49:22 c'est une fissure, on n'ignore même pas les doigts.
00:49:25 Du coup, qui faisait...
00:49:27 presque 200 m, 250 m,
00:49:31 c'était de l'artif assez difficile, à un moment donné.
00:49:34 Donc là, bon, assez flippant.
00:49:36 Rires
00:49:38 -Vous l'avez testé jusqu'à chuter, pour voir s'il était efficace ?
00:49:42 -Je suis tombé pas mal de fois sur ce système.
00:49:44 J'ai testé des chutes. -Donc, ça tient.
00:49:47 -Oui. Tu te fais juste pas dynamiser.
00:49:49 Y a pas de dynamisme dans l'assurage.
00:49:51 -C'est la corde qui est dynamique. -C'est ça.
00:49:53 Les cordes sont assez dynamiques, donc j'ai pu prendre des chutes
00:49:57 de 8 m avec ce système-là, sans problème.
00:49:59 -On vous voit sur ces images à l'occasion de cette tentative.
00:50:03 C'est dans le massif du Mont-Blanc,
00:50:05 mais côté Suisse, je crois, cette voie avec une fissure,
00:50:08 on est presque à la limite de la Speleo, à part moment.
00:50:11 -Oui, tout à fait. C'est une voie assez connue
00:50:14 sur le petit clocher du Port-Alaix. -Oui, j'allais le dire.
00:50:17 -C'est état de choc.
00:50:19 C'est une fissure un peu large que tu remontes
00:50:21 sur les 200 m du clocher.
00:50:23 Très, très sympathique.
00:50:25 -Alors, c'est face nord. -C'est ça, c'est face nord.
00:50:28 C'est pas une voie extrêmement dure, ça va jusqu'au 6C,
00:50:31 mais c'est quand même une escalade particulière, 6C-7A,
00:50:34 en off-wheat ou en cheminée,
00:50:36 donc tu viens de te ramper dans des fissures.
00:50:38 Et donc, voilà, les grimpeurs-grimpeuses
00:50:41 qui viennent de la salle, ils risquent d'être surpris.
00:50:44 -On n'a pas encore ça en salle.
00:50:46 Vous étiez avec le casque au début, vous l'avez plus à la fin ?
00:50:49 -C'est ça. Quand tu grimpes, tu dois te fouer dans la fissure,
00:50:53 il faut enlever le casque, le mettre sur le côté.
00:50:56 -Après, t'as les coissements de casque qui peuvent aider.
00:50:59 -Ca m'est arrivé de faire tomber mon casque dans ce genre de situation,
00:51:03 parce que je me retrouvais coincé,
00:51:05 et puis t'essayais de le fourrer dans la fissure,
00:51:08 et puis tu l'oublies parce que t'es stressé,
00:51:10 et puis boum, il s'en va. Ca m'est arrivé deux fois.
00:51:13 -C'est ballot.
00:51:14 En tout cas, des belles images.
00:51:16 On les doit en partie à Soline,
00:51:18 qui travaille aussi à la logistique pour assurer le caméraman.
00:51:22 -Non, nous, on était allées par un autre itinéraire la veille,
00:51:26 du coup, plutôt un de mes objectifs sportifs,
00:51:29 et on a fixé des cordes
00:51:30 pour que le caméraman puisse être autonome sur la paroi.
00:51:34 -C'est pour ça que sans vous, il n'aurait pas pu faire
00:51:37 les belles images. -Exactement.
00:51:39 -Elle est modeste.
00:51:40 "Non, non, j'ai juste fait ça."
00:51:42 -Mouais, mouais.
00:51:43 -En tout cas, moi, ce que j'ai remarqué,
00:51:46 c'est que quand c'est aux Yosemites,
00:51:48 Seb, il est en tenue léopard
00:51:50 et qu'il adapte son code vestimentaire.
00:51:53 Là, on était en Suisse, donc c'est plutôt peau de bête,
00:51:56 la Suisse, et donc voilà.
00:51:58 -Oui, j'ai été trop gêné pour amener mes codes vestimentaires
00:52:01 ici, sur le plateau de Ténébrés.
00:52:03 -Ah, mais j'aurais pu.
00:52:05 La moumoute comme ça, elle est idéale.
00:52:07 Bon.
00:52:08 Ca fait partie aussi de votre style,
00:52:11 d'avoir un code vestimentaire qui sort un peu des classiques.
00:52:15 -Oui, tout à fait.
00:52:16 Il y a un peu une idée de ne pas trop se prendre en sérieux
00:52:19 ou en tout cas de...
00:52:21 Ca permet de garder une certaine légèreté,
00:52:23 je pense, dans certains projets.
00:52:25 -Solène, si jamais vous avez la chance
00:52:27 d'aller faire les Jeux olympiques en 2028,
00:52:30 essayez pas trop les codes vestimentaires décalés.
00:52:33 Je crois que le CIO, ils sont pas trop dans le même esprit.
00:52:36 Donc il faudra mieux rester.
00:52:38 On a vu des sportifs dans d'autres disciplines
00:52:41 se faire disqualifier, perdre des médailles olympiques
00:52:44 pour avoir enlevé leur maillot de joie à l'arrivée d'une course.
00:52:48 Je vous conseille pas la petite douleur.
00:52:50 -Je veux m'occuper du costume de l'équipe de France.
00:52:53 -C'est une cérémonie d'ouverture.
00:52:55 Là, on est un peu plus ouverts.
00:52:57 -On va donner contact à la filiée.
00:52:59 -Si je cherche un designer pour les tenues de l'équipe de France,
00:53:03 il faudra faire appel à Seb.
00:53:05 En tout cas, c'était un petit clin d'oeil
00:53:07 sur cette façon de grimper un peu particulière
00:53:10 qui peut être fastidieuse et qui s'adresse à des gens
00:53:13 qui maîtrisent déjà bien la technique.
00:53:15 On va finir ce grand air en feuilletant quelques livres,
00:53:18 comme on fait à chaque fois dans cette émission.
00:53:22 Musique rock
00:53:25 ...
00:53:27 -Comme j'ai une éditrice en plateau,
00:53:29 depuis qu'elle n'est plus à la une des médias français,
00:53:33 elle s'est reconvertie, Catherine Destivelle,
00:53:35 dans la publication de livres,
00:53:37 et notamment celui-là, c'est une première pour vous
00:53:40 aux éditions du Mont-Blanc d'éditer une bande dessinée.
00:53:44 On en a parlé tout à l'heure.
00:53:46 Il était une fois l'escalade.
00:53:48 On comprend que derrière ce titre, c'est un grand historique
00:53:51 de la discipline que vous proposez en bande dessinée.
00:53:54 -Exactement. Depuis le début des années 1900 jusqu'à aujourd'hui.
00:53:59 Donc, même avant, on pourrait dire, les premiers...
00:54:02 -Il y a même les hommes préhistoriques
00:54:04 dans le début de la BD. -Ils grimpaient déjà
00:54:07 pour se protéger des ennemis ou des animaux, etc.
00:54:10 Du coup, non, c'est tout l'homme avec l'escalade
00:54:13 jusqu'au Jeux olympiques.
00:54:16 Donc, on a essayé de retracer un peu toute cette histoire.
00:54:19 Il y a David Champ qui est coauteur avec moi.
00:54:21 Et puis, je suis en coédition avec les éditions des Arènes,
00:54:25 parce que c'est un métier différent, de faire de la BD.
00:54:28 -Bande dessinée. -Oui, c'est plus compliqué.
00:54:30 Laurent Bidot, c'est lui qui a fait les dessins.
00:54:33 C'est toute une technique, en fait. C'est pas si simple.
00:54:37 -Tu fais une grosse BD, parce que l'histoire de l'escalade,
00:54:40 il y a beaucoup de choses à raconter.
00:54:42 -Oui, le livre fait 200...
00:54:44 Combien il fait ? 186 pages.
00:54:46 -On va être précis. On va être précis.
00:54:49 -J'ai un peu oublié. -194.
00:54:51 -Oui, 194 pages.
00:54:52 -C'est vrai que ça a pris quelques semaines.
00:54:55 -Dans un portaledge, ça peut occuper une après-midi.
00:54:58 -Oui, oui. Donc, il est sorti le 12 octobre dernier.
00:55:02 Et ça a l'air de bien plaire. Donc, on est contents.
00:55:05 Euh... Voilà.
00:55:07 Et puis, je trouve... Ouais, c'est un cadeau sympa.
00:55:10 Je trouve que tous ces gens qui découvrent l'escalade
00:55:13 sont très intéressants, qui sachent d'où vient cette activité.
00:55:16 Et donc, pour tous ceux qui font le...
00:55:18 Qui découvrent l'escalade en salle,
00:55:20 que ce soit à Paris ou dans les grandes villes de France,
00:55:24 voilà, ils sauront...
00:55:26 Voilà. Qui a un peu inventé le sport
00:55:29 et pourquoi les choses ont été inventées,
00:55:31 qui les a inventées, la corde, le mousqueton, tout ça.
00:55:35 -Et puis, ils apprendront, s'ils ne le savaient pas,
00:55:38 que l'escalade de loisirs et même l'alpinisme
00:55:41 n'a pas né à Chamonix ou en Belgique,
00:55:43 mais est née chez nous, ici, en Isère, au Montaiguis.
00:55:46 -Oui. La 1re ascension de...
00:55:48 La 1re fois qu'une sommeille grimpait
00:55:50 pour l'acte sportif, c'était au Montaiguis.
00:55:53 -Donc, je crois que c'était en 1492, si ma mémoire est bonne.
00:55:56 -Oui, exact. -Il y a plus de 500 ans.
00:55:59 Donc, voilà. Le territoire iséraux et grenoble
00:56:01 est bien la capitale mondiale de l'alpinisme et de l'escalade,
00:56:04 n'en déplaise aux Américains, aux Chamoniards ou aux autres.
00:56:08 -C'est les Français qui ont inventé le chausson d'escalade.
00:56:11 -Les Belges, les frites, malgré le...
00:56:13 Rires
00:56:14 French fries.
00:56:15 -C'est vrai.
00:56:16 -Je tiens à le préciser.
00:56:18 -C'est vrai. On va pas ouvrir le débat là-dessus,
00:56:21 parce que j'ai pas assez d'arguments.
00:56:23 J'ai d'autres bouquins récents,
00:56:25 des éditions du Mont-Blanc, c'est le nom de vos éditions,
00:56:29 notamment cette série.
00:56:30 Alors, j'ai pris les trompes 3 et 4 de la série.
00:56:33 Ça s'appelle "Laola".
00:56:35 C'est des livres plutôt destinés aux jeunes publics.
00:56:38 -Oui. C'est la petite encyclopédie de la montagne.
00:56:41 -Oui, qui explique...
00:56:42 Il y a les mammifères de la montagne,
00:56:44 les oiseaux de la montagne,
00:56:46 il y a pisté les animaux, les traces, les alpages.
00:56:49 -C'est ce qu'on voit.
00:56:50 -Il y a eu l'eau, tous les animaux qui se trouvent dans l'eau
00:56:53 et comment ils font quand ils sont sous la glace, etc.
00:56:57 Et voilà. Donc, c'est Hervé Frumi, qui est de Grenoble.
00:57:00 -Oui, un illustrateur.
00:57:01 -Qui fait ses petits livres, dessin et le texte.
00:57:05 -Oui.
00:57:06 Il y a toute une collection.
00:57:08 J'imagine qu'il y aura peut-être d'autres tomes à venir.
00:57:11 -Oui, d'autres tomes.
00:57:12 Hervé a attrapé le Covid grave,
00:57:14 et on a retard sur le dernier, mais il sortira en janvier.
00:57:17 C'est sur la neige et la glace.
00:57:19 -Très bien. C'est une bonne idée.
00:57:21 Vous parliez des topos, des livres d'escalade
00:57:24 qui n'existaient pas à votre époque.
00:57:26 -Je ne fais pas de topos, je fais des livres,
00:57:29 des manuels qui permettent de s'entraîner.
00:57:31 Voilà, c'est le dernier. -Voilà, c'est pour ça que je l'ai.
00:57:35 -C'est le dernier. Et justement, il y a une photo de...
00:57:38 -De Solène. -Solène.
00:57:39 -Et le legging, pas mal, hein ?
00:57:42 -Ah oui, ils ont piqué le legging.
00:57:44 -Ils m'ont piqué mon legging sans me demander.
00:57:47 -On a trouvé que c'était moderne.
00:57:49 -Il y a des droits d'auteur à réclamer.
00:57:51 En tout cas, ça s'appelle "Escalade débutée
00:57:54 et progressée en toute sécurité".
00:57:56 On le voit sur ces images.
00:57:58 C'est plutôt pour un public débutant.
00:58:00 -Complètement. Débutant qui a envie de débuter sans se faire peur,
00:58:04 savoir faire son nœud, savoir pourquoi on choisit
00:58:06 telle ou telle chausson,
00:58:08 comment les principes de base de certains mouvements,
00:58:11 etc., etc., où on peut grimper,
00:58:14 les clubs, voilà,
00:58:15 sans se renseigner, la personne qui veut débuter l'escalade.
00:58:19 -C'est David Chambre, également.
00:58:21 -On parle même des Jeux olympiques à la fin,
00:58:24 si on veut faire de la compétition, et du paralympique aussi.
00:58:28 Et voilà. Donc, temps photo.
00:58:29 -Allez-y. La photo de...
00:58:31 -De la fin.
00:58:33 Au moment où on parle des compétitions,
00:58:35 où on dit que l'escalade s'adresse à tout le monde,
00:58:38 on dit que c'est la photo de...
00:58:40 Je sais pas si on la voit bien, mais elle est là.
00:58:43 Soleil dans les livres.
00:58:44 Et puis, une fois qu'on a lu celui-là,
00:58:47 qu'on a assimilé toutes les bases...
00:58:49 -Il y a la Bible de l'escalade, après, j'ai "Climbing",
00:58:52 j'ai "Mastermind", j'ai "La voie des guérilles du rocher",
00:58:56 c'est l'entraînement mental,
00:58:57 enfin, c'est tout un panel de livres
00:59:00 pour s'améliorer et progresser.
00:59:02 -Il y en a un pour les grimpeurs.
00:59:04 -Bismicking aussi.
00:59:05 -Ceux qui veulent travailler les doigts
00:59:07 et ne lâchent pas cette prise la prochaine fois.
00:59:10 -C'est la planche qu'ils avaient sur le bateau.
00:59:13 -Il l'avait lu.
00:59:14 -Il est peut-être sorti plus tard, mais je l'ai lu.
00:59:17 Ca aide, bien sûr.
00:59:18 -Toi, t'as plus grand-chose à apprendre, j'imagine.
00:59:21 -Il y a des petits trucs, quand même.
00:59:24 Dans celui-là, il y a plein de super astuces
00:59:26 et de super bonnes choses.
00:59:28 -Pour un petit aperçu, on termine avec un dernier livre.
00:59:31 On a parlé des "Piolets d'or",
00:59:33 et il vient de sortir aussi celui-là,
00:59:35 consacré à Valéry Babanov.
00:59:37 C'est un alpiniste russe.
00:59:39 -Un alpiniste russe qui est arrivé dans les années 90 en France
00:59:42 et qui a eu reçu deux "Piolets d'or".
00:59:45 "Piolets d'or", c'est l'une des meilleures performances de l'année.
00:59:49 C'est Denis Ducrot,
00:59:52 un très bon ami de Valéry Babanov,
00:59:54 qui a écrit ce livre sur Valéry.
00:59:56 Valéry, maintenant, habite à Chamonix.
00:59:59 Il raconte l'itinéraire de ce Russe
01:00:03 qui est arrivé sans un sou à Chamonix
01:00:06 et qui a essayé de vivre de sa passion l'alpinisme
01:00:09 en disant qu'en Russie, le saut d'eau était interdit.
01:00:14 -C'était l'URSS à l'époque.
01:00:16 -Il est venu pratiquer ça en France, l'ascension solitaire.
01:00:20 Il a commencé par ouvrir une nouvelle voie dans les Drues,
01:00:23 à l'époque où le truc était tombé.
01:00:25 On se dit qu'ils font de la roulette russe,
01:00:28 parce que c'était encore très délité.
01:00:30 Ensuite, il est parti beaucoup en expédition.
01:00:33 Il raconte ses ascensions.
01:00:36 -Merci, Babanov.
01:00:37 Pour ceux qui aiment l'histoire des grands alpinistes,
01:00:40 il y en a d'autres, évidemment,
01:00:42 des livres qui traitent de ce sujet dans votre collection.
01:00:45 Bonne continuation à tous les quatre.
01:00:47 Solène, 2028, on y sera,
01:00:49 pour les Jeux olympiques aux Etats-Unis.
01:00:52 Si vous voulez y aller en voilier et pas prendre l'avion,
01:00:55 vous remettrez en connexion avec l'équipe de Sébastien
01:00:59 et Solène.
01:01:00 On salue Julia Cassou, qui servait de la logistique
01:01:04 et qui a suivi avec nous cette émission
01:01:06 qui était sur le studio de Télégramme.
01:01:09 C'est fini pour ce Grand R.
01:01:11 On se retrouve très bientôt pour d'autres aventures en montagne.
01:01:14 Vous avez toutes nos émissions en ligne sur le site telegramme.net.
01:01:19 (Générique)
01:01:22 ---