Le sprinteur des cimes Benjamin Védrines et le champion du monde de ski-alpinisme Samuel Equy sont les nouveaux détenteurs du record de la traversée Chamonix-Zermatt. Retour également sur la première ascension hivernale à la journée de la face nord des Grandes Jorasses et sur le défi du slackliner Camille Le Guellaut de relier par les airs les Aiguilles d'Arves.
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00:00:00 [Musique]
00:00:24 Bonjour à tous, vous pouvez respirer à fond.
00:00:26 C'est Grand'Air, le magazine de la montagne et des sports de pleine nature de Télé Grenoble.
00:00:30 Très heureux de vous retrouver pour de nouvelles aventures,
00:00:33 des aventures qu'on va partager aujourd'hui avec un lysérois, un savoyard et un haut alpin.
00:00:38 Comme ça, il n'y aura pas de jaloux dans les massifs des Alpes du Nord.
00:00:41 Le savoyard, c'est Camille Leguélo. Bonjour Camille.
00:00:44 Bien le bonjour Thibault.
00:00:45 Bienvenue, spécialiste de slackline et de highline notamment.
00:00:49 Lysérois, c'est Samuel Lecky. Bonjour Samuel.
00:00:52 Bonjour Thibault.
00:00:53 Président du monde de ski, alpinisme l'an dernier et nouveau détenteur de la traversée Chamonix-Zermatt
00:00:59 réalisé en avril avec un haut alpin.
00:01:01 Comme quoi, l'isère et le haut de salle peuvent bien se marier.
00:01:04 Benjamin Védrine, bonjour.
00:01:05 Bonjour.
00:01:06 Bienvenue également, alpiniste qui vit sa passion à toute vitesse,
00:01:11 qu'on a eu le plaisir d'avoir l'an dernier sur ce plateau pour d'autres actualités.
00:01:16 Vous étiez venu nous parler des ascensions express l'été 2022 sur les 8000 du Pakistan,
00:01:23 un concept du vite fait bien fait que vous avez décliné sur d'autres terrains de jeu,
00:01:29 donc cette traversée Chamonix-Zermatt.
00:01:31 Samuel, c'est un peu le Paris-Roubaix du ski alpinisme, Chamonix-Zermatt.
00:01:36 C'est la classique à faire.
00:01:39 Oui, c'est sûr que c'est le red-ski un peu mythique.
00:01:42 En tant qu'haut alpin isérois, on a le Tour de la Mèche qui est un peu le red-ski sur 3-4 jours un peu mythique.
00:01:50 Mais sur la semaine, c'est Cham-Zermatt, les deux capitales de l'alpinisme des Alpes.
00:01:56 Avec un parcours qui traverse une partie du massif du Mont-Blanc.
00:02:02 On le voit là sur cette petite infographie.
00:02:05 Il y a un parcours officiel d'ailleurs, Benjamin, pour aller de Chamonix à Zermatt
00:02:09 ou on prend un peu l'itinéraire qu'on veut sur cette ligne ?
00:02:12 C'est une bonne question. On se l'est posé justement avec Sam sur l'itinéraire.
00:02:16 Ce n'est pas si évident.
00:02:18 Les premiers record men ont suivi l'itinéraire le plus pratique et le plus direct entre Chamonix et Zermatt,
00:02:25 mais pas forcément le plus rapide.
00:02:28 Il existe effectivement un itinéraire qui utilise le col d'Argentière au début
00:02:32 et qui, dans son versant est, comprend une pente très raide
00:02:35 et qui, pour le coup, est plus rapide mais plus technique.
00:02:38 Nous, on ne savait pas trop comment choisir.
00:02:41 Est-ce qu'on prenait le plus rapide, le plus classique et le plus emprunté par les prédécesseurs ?
00:02:46 On a fait un peu un mixte finalement.
00:02:48 On a décidé de rester dans des zones où les gens peuvent répéter ce qu'on a fait.
00:02:52 Ce n'est pas à plus de 45 degrés.
00:02:54 C'est faisable par plein de personnes avec des niveaux différents.
00:02:59 Ça fait quand même 8 300 m, ce qui fait environ 600 m de plus que le parcours le plus rapide.
00:03:06 Plus rapide mais bien plus technique.
00:03:09 Et notamment nous, à vue de nuit, on a préféré faire le tour par Chardonnay-Grand-Luy.
00:03:14 Et au final, en temps, ça se trouve, c'est pareil.
00:03:17 Oui, en fait, s'il te plaît, il y a eu le col Sud des Planards, notamment,
00:03:21 qui autrefois n'était pas utilisé par les premiers.
00:03:24 Par exemple, Stéphane Bross avait utilisé un passage qui est plus au nord.
00:03:28 Et puis après, des gens comme Valentin Favre qui ont fait ça, c'était il y a combien ?
00:03:34 Sur les images qu'on vient de voir, du film de la traversée de Ben Tibbets,
00:03:37 qui était, je crois, en 2021, le premier record féminin.
00:03:40 Voilà, elles ont utilisé ce col Sud des Planards.
00:03:42 Donc ça a déjà modifié, finalement, l'itinéraire par rapport à l'itinéraire originel.
00:03:47 Alors du coup, finalement, il n'y a pas vraiment de parcours qui a été tout le temps le même,
00:03:50 utilisé par...
00:03:51 La parcours référence pour les différents records.
00:03:53 Disons que le cas et des charges, c'est les deux églises et sans moyens motorisés.
00:03:57 Et puis bon, en faisant le plus de ski possible.
00:03:59 A chacun de trouver son itinéraire.
00:04:01 En tout cas, ça fait de nombreuses années qu'il y a des records qui se font sur ce chamanisé armat,
00:04:06 quel que soit l'itinéraire.
00:04:07 Là, j'ai retrouvé des images de 2010 par Laurent Favre,
00:04:10 qui était justement le mari de Valentin Favre, qui a le record féminin.
00:04:14 Et Yann Gachet, c'était des militaires du GMHM à l'époque.
00:04:18 20h28 pour réaliser cette traversée.
00:04:22 C'était déjà un beau temps.
00:04:25 Il y a une quinzaine d'années.
00:04:27 Le record a été monté ensuite, ou descendu, plutôt à 16h35.
00:04:31 C'était Bastien Fleury et Olivier Ménet en 2016.
00:04:35 C'est plutôt un record français.
00:04:36 Même si on va de la France à l'Italie, c'est plutôt les Français qui se sont positionnés sur ce record.
00:04:42 Vous l'avez abaissé en dessous des 15h.
00:04:46 Ce qui peut paraître incroyable, de gagner 5h comme ça en quelques années sur un parcours finalement assez court.
00:04:53 - Moins, attends... Ils avaient mis combien de temps ?
00:04:56 - Ils avaient mis 16h30, mais je parlais de ceux qui avaient fait 20h dans les années 2010.
00:05:00 - C'est vrai. Il y a un alignement de planètes que nous avons recherché et qui n'est pas si évident à trouver.
00:05:07 C'est d'une part une bonne trace présente sur une grande majorité du parcours,
00:05:12 ce qui est nécessaire parce que dès qu'on s'enfonce dans la neige, on va faire une énergie dingue.
00:05:17 Et encore plus dans le sens où nous, on avait choisi de ne pas avoir de personnes devant qui faisaient la trace,
00:05:22 ce qui peut être le cas dans certaines approches de record.
00:05:25 On a choisi d'être sans ravitaillement, sans assistance.
00:05:29 Et ça peut t'amener parfois, sans avoir d'informations prévables comme nous c'était le cas,
00:05:34 à des surprises sur certaines montées où tu dois faire la trace.
00:05:37 Là, tu perds un gros pourcentage de temps. Ça, c'est évident.
00:05:41 Et après, le deal, c'était effectivement de faire mieux en termes de temps,
00:05:46 en passant finalement par un parcours qui est un peu plus long que le record précédent,
00:05:51 celui d'Olivier Ménet et de Bastien Fleury.
00:05:54 Et du coup, on a réussi à faire ça. Voilà, avec ça, c'était une bonne équipe.
00:05:59 - Il faut aussi être en face tous les deux, au bon moment, en bonne forme.
00:06:04 Lequel a branché l'autre pour tenter ce record, Samuel ?
00:06:08 - Un peu tous les deux. Moi, c'est un rêve que j'ai depuis bien longtemps.
00:06:12 Et Benjamin aussi. Et du coup, un peu tout l'hiver, on s'envoyait des messages quand on avait un peu des dispos, des condis, tout ça.
00:06:20 Et puis là, ça s'est fait un peu au dernier moment. Les semaines d'avant, on a vu que finalement, c'était encore des bonnes conditions.
00:06:26 Et du coup, voilà. Après, c'est sûr que c'est à deux.
00:06:30 Forcément, c'est comme en ski alpine et les courses par équipe, c'est vraiment la cordée.
00:06:34 Du coup, c'est aussi le plus faible à l'instant T à chaque moment qui définit le temps.
00:06:40 Donc non, ça s'est quand même bien passé.
00:06:43 Moi, j'ai eu un bon coup de mou sur le glacier d'Otema, mais j'ai été là pour me motiver toujours à avancer.
00:06:49 Et puis il m'a attendu quand même un petit moment pour qu'on finisse ensemble. Mais c'était bien, bien cool.
00:06:55 Alors vous êtes parti le 10 avril à 0h43.
00:06:59 Précise quand on fait un record, il faut être à la minute près de l'église de Chamonix.
00:07:04 C'est un choix stratégique, Samuel, de partir comme ça en pleine nuit.
00:07:09 Oui, quand on nous l'objectif, c'était 16 heures, un peu moins de 16 heures.
00:07:13 Et forcément, on avait calculé un peu pour.
00:07:16 Il y avait un plafond nuageux qui arrivait en fin de journée.
00:07:19 Donc c'était très bien de partir environ vers minuit.
00:07:23 Et après, donc, il y avait Seb Montaz qui nous a fait des belles images comme ça au lever du jour.
00:07:28 Donc, en fait, on avait le choix entre la Grande Lue ou le col sud des Planards.
00:07:32 Donc c'était soit emporter en gros à 2h du matin, soit emporter à minuit et demi.
00:07:36 Grosso modo, on a fait ce choix là et donc il nous a fait des superbes images au lever du jour au col sud des Planards.
00:07:42 Samuel, tu évoquais le fait qu'il n'y ait pas de ravitaillement, c'est à dire que vous étiez en autonomie complète, même pour l'eau.
00:07:49 Parce que 15 heures d'effort, j'imagine qu'il y a quelques litres quand même à passer.
00:07:53 Déjà, ce qui est rigolo, c'est dans les images, on voit qu'on court dans la rue.
00:07:56 Mais à cette heure là, il faut savoir qu'à minuit 43, il n'y a pas tout le monde qui dort.
00:08:00 Et donc, on était dans une activité nocturne.
00:08:02 J'imagine qu'il y en a qui sortent de bar, ont une soirée.
00:08:05 On se remet dans le contexte.
00:08:06 Ils voient des cols en pipette traversés.
00:08:08 Ils ont un déguisement, ils vont dans une soirée.
00:08:10 Ils ont perdu un pari.
00:08:12 C'était quand même très cocasse, j'avoue.
00:08:14 On ne s'y attendait pas.
00:08:15 Donc, ça nous a fait vivre une certaine expérience.
00:08:18 Et après, concernant l'eau, etc.
00:08:20 Oui, notre but, alors à la base, on ne savait pas forcément.
00:08:22 Mais avec Sam, pareil, on ne savait pas si on allait le repérer d'abord, ce Chamonix-Hermas,
00:08:26 si on le faisait un petit peu sans connaître trop l'itinéraire, comme là, c'était le cas.
00:08:30 C'était un peu le destin qui a choisi ça, nos dispo.
00:08:33 Vous ne l'aviez jamais fait avant, ni l'un ni l'autre.
00:08:35 On n'était que jusqu'au col du Chardonnay, tous les deux, peut-être.
00:08:37 En gros, c'est ça.
00:08:38 Mais on n'avait jamais mis les pieds au-delà du col du Chardonnay, qui est le premier col.
00:08:42 Donc, c'était totalement l'inconnu.
00:08:44 Et ça a rajouté un petit suspense et beaucoup de piment.
00:08:47 Parce que dans ces moments-là, il faut être très rapide dans les nœuds décisionnels,
00:08:50 savoir si c'est à droite, à gauche.
00:08:52 Il y a plein de petits passages comme ça, quand tu ne connais pas.
00:08:56 Il faut quand même une certaine...
00:08:58 Regarder la carte, il faut un feeling.
00:09:01 On a décidé de faire comme ça avec Sam.
00:09:03 Et ça nous a fait vivre un sacré moment.
00:09:05 Et pour l'eau, on faisait le plein dans les torrents.
00:09:07 On ne faisait que ça.
00:09:09 Et pour la petite histoire, Seb Montaz nous avait déposé deux bouteilles d'eau devant son van,
00:09:15 devant lequel on est passé.
00:09:16 Et on s'est dit, là, il nous fait un petit test.
00:09:19 Est-ce qu'on va les prendre ou pas ?
00:09:21 Et du coup, on a dit non, Seb, on ne les prend pas.
00:09:24 On est remonté un peu plus haut, un peu en ruisseau là-dessus.
00:09:27 100% éthique de ce côté-là.
00:09:29 Dans l'idée de faire à vue, c'était aussi un peu se dire,
00:09:33 puisqu'on est à vue, tant qu'à faire, on y va en autonomie totale.
00:09:37 Et c'était même juste qu'on est parti de Chamonix avec un litre cinq d'eau chacun.
00:09:40 Et on s'est dit, est-ce qu'on attend Argentière, trouver une fontaine ?
00:09:43 On a dit, on ne sait pas où il y en a une, on n'a pas repéré.
00:09:46 Bon, tant pis, on part avec un litre cinq, même sur la route.
00:09:48 Et voilà.
00:09:49 - Ce n'est pas la manière la plus rapide de faire Chamonix-Hermat, du coup.
00:09:52 Tu peux être plus léger, mais c'est une manière éthique qui apporte son kilo d'émotion.
00:09:58 - Quand on va aussi vite, on vous a vu face au Cervent,
00:10:00 on a le temps d'apprécier le paysage,
00:10:02 Samuel, ou on est vraiment en focus sur la performance ?
00:10:05 - Oui, quand même, sur 16 heures de trajet, on a le temps d'apprécier.
00:10:10 Puis dans un effort comme ça, et puis dans, on va dire, l'aventure comme ça,
00:10:16 le paysage, il a une saveur particulière.
00:10:19 Alors oui, on l'apprécie moins longtemps, mais différemment.
00:10:22 Et ça, c'est faux de dire qu'on n'a pas le temps d'apprécier le paysage, bien au contraire.
00:10:27 - On l'a vu sur les images de 2010, de Fabre gâchée.
00:10:30 Il y avait quelques supporters à leur arrivée.
00:10:32 Vous, vous êtes arrivé à Zermatt dans l'anonymat le plus complet,
00:10:37 toujours en courant au milieu du village, mais il n'y avait pas de comité d'accueil.
00:10:42 - Non, il y avait beaucoup de touristes divers et variés de plein de pays différents.
00:10:45 Ce n'était pas le même peuple que dans les rues de Chamonix à minuit 40,
00:10:50 mais c'était un peu pareil. Les gens étaient surpris de nous voir.
00:10:53 - On n'était pas à notre place quand même.
00:10:57 - Et au final, bon, écoute, de toute manière, c'est une aventure qu'on vit tous les deux.
00:11:01 De le partager avec d'autres personnes, c'est peut-être encore mieux.
00:11:03 Mais ce qui est le plus important, c'est ce qu'on a vécu avec Sam.
00:11:07 C'est vrai qu'au début, moi, par exemple, je pensais le faire seul parce que ce n'est pas évident de faire ça.
00:11:12 Par exemple, avec Sam, qui a un emploi du temps en termes de compétition,
00:11:15 qui est quand même complet, trouver le bon jour.
00:11:19 Et puis, du coup, d'arriver tous les deux à l'église comme ça, simplement, finalement, c'est l'essentiel.
00:11:24 Tu vois, c'est beau, quoi.
00:11:26 - C'est la montre qui fait foi ? Il n'y a pas d'huissier dans ces types de records ?
00:11:30 - Non, c'est ça. C'est à la bonne foi de chacun.
00:11:32 Après, bon, maintenant, on a les montres GPS avec les applications un peu comme Strava, tout ça,
00:11:37 où ça fait un peu quelque chose d'officiel.
00:11:40 Mais oui, ça suffit bien.
00:11:43 - Vous l'avez déjà fait, Camille ? La traversée par ce rythme-là ?
00:11:47 - Non, non. Mais par contre, ce que je me demandais, c'est si l'intérêt était surtout de l'avoir fait à vue
00:11:53 ou si, par exemple, vous auriez aussi envie de le refaire, par exemple, une fois que vous l'avez fait comme ça,
00:11:58 de retenter une nouvelle trace ?
00:12:01 - Je pense que dans cet ordre-là, c'est trop bien.
00:12:03 Et forcément, la première chose qu'il m'a dit en arrivant, c'est
00:12:06 « Tu crois qu'il y a moyen de mettre moins de 13 heures ? »
00:12:09 Donc non, mais si, c'est trop bien, parce que là, on a fait cette aventure à vue en battant le record.
00:12:14 Et forcément, je pense que... - Ça a des belles perspectives.
00:12:17 - Voilà. De se dire maintenant, on peut le préparer mieux, optimiser chaque chose
00:12:21 et peut-être essayer d'aller grappiller encore du temps. Et ça peut être intéressant, carrément.
00:12:26 - C'est 100 km et 8000 m à peu près de dénivelé. En 15 heures, c'est déjà pas mal.
00:12:30 13 heures, ça fait aussi un bon rythme.
00:12:33 Parler de la cordée, on irait forcément plus vite en solo, Benjamin ou Samuel,
00:12:38 en fonction de celui qui a la plus grande forme le jour J, pour battre un record comme ça ?
00:12:42 - C'est dur à dire, parce que là, tous les deux, finalement, c'est vrai que ça fait une émulation.
00:12:46 Il y a toujours un coup de mou, généralement, dans ces grandes traversées.
00:12:50 C'est quand même long, 14 heures, c'est...
00:12:53 - 54. - Pour être précis, tu as bien raison.
00:12:57 Il y a toujours un moment donné où tu flanches et du coup, quand tu es avec un partenaire,
00:13:01 ça peut t'aider à garder le moral et à maintenir le rythme, je pense.
00:13:05 - Si, globalement, ça s'est quand même vraiment bien passé.
00:13:08 Il y a juste Otema où, oui, tu aurais pu grappiller 5 minutes à cet endroit-là.
00:13:12 Mais bon, ça permet aussi de ralentir le rythme de celui qui est bien.
00:13:15 Et en fait, il continue à être bien, que lui, il optimise l'itinéraire.
00:13:19 Finalement, d'être à deux, c'est vraiment une force quand c'est homogène comme ça.
00:13:22 - Mais c'est un risque aussi qu'il y ait un problème de matériel, une casse, un problème physique, etc.
00:13:27 Et que les deux doivent se séparer.
00:13:29 Du coup, ça met un petit stress en plus.
00:13:31 Enfin, moi, je l'ai ressenti, en tout cas.
00:13:33 Tu avais un petit problème sur ta fixation arrière, par exemple, qui se bloquait à la montée.
00:13:37 Tu vois, il se bloquait en mode descente.
00:13:39 Et après, tu as réussi à le traficoter et tout.
00:13:41 Mais pareil, ça, ça t'arrive au début, tu te dis genre, oh là là.
00:13:44 Là, on démarre pas bien, tu vois.
00:13:47 Encore, si c'est dans la première heure, vous pouvez retourner et puis aller boire un coup dans la nuit de Chamonix.
00:13:51 Mais oui, il n'y a pas d'assistance non plus pour le matériel.
00:13:55 Il faut être autonome.
00:13:56 - Non, c'est comme si on était dans un autre massif éloigné qu'on ne connaissait pas.
00:13:59 Et qu'on partait d'un point A à un point B.
00:14:01 Et c'était le but. C'était aussi de ressentir ça, une certaine autonomie.
00:14:04 Et à l'avenir, du coup, on sait qu'on est capable de faire ça en autonomie.
00:14:08 Et finalement, en tant que montagnard, c'est important, cette autonomie.
00:14:11 Il n'y a pas tous les jours toute une équipe qui va venir te voir à chaque vallée avec un plein d'eau et un plein de nourriture.
00:14:16 - Bon, tant pis pour les gardiens de refuge qui sont autour de ce parcours.
00:14:19 Qui vivent normalement ce qu'ils ont traversé en quelques jours.
00:14:23 - Ils s'excusent, mais on passera avec des clients bien volontiers.
00:14:29 On leur dira bonjour à tout le monde.
00:14:31 - Bon, 100 kilomètres, une quinzaine d'heures d'effort,
00:14:34 ce n'est pas le format de compétition habituel que vous avez l'habitude de faire, Samuel, sur le circuit de la Coupe du Monde.
00:14:40 On est sur des formats plus courts, normalement.
00:14:42 - Pas du tout, c'est ça.
00:14:43 Un Coupe du Monde, c'est plus une heure, une heure et demie d'effort.
00:14:46 Là, c'est complètement différent.
00:14:48 Mais voilà, c'est des aventures, moi, qui me tiennent vraiment à cœur.
00:14:51 Et c'est aussi, surtout même pour ça, que je fais du ski alpinisme.
00:14:55 - Alors, vous le faites aussi pour monter sur des podiums.
00:14:58 Vous avez été champion du monde l'an dernier, en 2022, en Italie, d'ailleurs, dans la vallée du Ritor, avec Matteo Giacomo.
00:15:07 Parce que là aussi, ça se court en équipe.
00:15:09 Alors, beaucoup de coureurs, mais vous êtes deux par deux sur une compétition comme celle-là.
00:15:14 - Oui, voilà.
00:15:15 Champion du monde longue distance l'an dernier, c'était le Tour du Ritor.
00:15:18 C'est une épreuve sur trois jours où on fait entre 2 500 et 3 000 mètres par jour.
00:15:22 Donc, c'est des étapes de deux heures et demie, trois heures d'effort, donc en cordée de deux.
00:15:30 Et voilà, l'an dernier avec Matteo, c'était un super souvenir, une super course où on avait gagné et remporté ce magnifique titre.
00:15:37 - On vous voit surtout monter. C'est la plupart du temps d'une course.
00:15:41 Mais une compétition comme ça, ça se gagne plutôt en montée ou en descente ?
00:15:46 - C'est vraiment ce qui est beau dans ces courses de montagne par équipe, c'est qu'il faut être complet partout.
00:15:52 Alors, je n'irais pas dire qu'on peut gagner en descente, mais on peut tout perdre en descente, c'est sûr.
00:15:57 Surtout sur des courses de trois jours comme ça où on a du matériel léger et il faut essayer de ne pas le casser, c'est sûr.
00:16:04 Et ce qui est beau, c'est que c'est vraiment complet. Il y a la montée, que ce soit à ski ou à pied, la descente, les transitions, il faut optimiser le temps partout.
00:16:14 - On peut se dire que l'arrivée du championnat du monde de ski alpiniste, ça va se faire soit en glissant, soit éventuellement en pot de phoque.
00:16:20 Ce n'est pas le cas. Vous êtes arrivé en courant.
00:16:24 - Oui, l'an dernier, les conditions de neige étaient ce qu'elles étaient.
00:16:29 C'est ce qui faisait aussi le charme de la course, les descentes à pied à la fin.
00:16:35 - C'est beau de vous voir arriver comme ça, main dans la main.
00:16:39 - Oui, en ski alpiniste, il y a beaucoup, en Coupe du Monde, toutes les courses individuelles avec plusieurs formats différents.
00:16:46 Le format historique du ski alpiniste, c'est les grandes courses.
00:16:49 Il y a un circuit grande course avec notamment la Pierre Amantal, Tour du Ritter, Metzalama, Patrouille des Glaciers.
00:16:55 Des courses qui sont vraiment belles et qui sont belles parce qu'on les partage avec des équipiers.
00:17:02 Et ça, c'est vraiment important, je trouve.
00:17:05 - Là, on voit des images de la Pierre Amantal à Beaufort cette année.
00:17:10 Vous étiez encore avec Mathéo Jacquemout sur cette épreuve qui est un peu le Tour de France.
00:17:14 On parlait de Paris-Roubaix pour Chamounix-Hermade.
00:17:16 C'est un peu le Tour de France, si on fait la comparaison avec le cyclisme, pour le ski alpinisme.
00:17:20 - Oui, c'est ça. C'est ce qu'on aime bien dire.
00:17:23 C'est quatre jours de compétition dans le Beaufortin.
00:17:27 Il y a tous les meilleurs mondiaux. Il y a énormément de public, souvent sur les sommets.
00:17:31 C'est ce qui fait la renommée de cette course, l'ambiance qui règne là-bas, dans le Beaufortin, pendant toute cette semaine de compétition.
00:17:38 - Vous faites des compétitions, Benjamin, de ski alpiniste ? Vous auriez votre mot à dire, je pense, sur ce genre d'épreuve.
00:17:43 - Non, je ne fais pas de compétition de ski alpiniste. - Pas du tout ?
00:17:45 - Je n'ai jamais fait. Je crois que j'en ai si.
00:17:47 Pour tout vous dire, j'ai pris le départ d'une compétition.
00:17:50 C'était le Tour du Grand Véhement, je me souviens.
00:17:52 - Vous avez arrivé dans l'Isère.
00:17:53 - J'ai eu un souci technique, donc je n'ai pas du tout passé la ligne d'arriver.
00:17:57 Après, j'ai arrêté.
00:17:59 Ça m'a toujours un petit peu botté, mais je ne me sens pas capable de faire ça.
00:18:04 Pour moi, c'est trop de stress. C'est hyper ambitieux pour moi.
00:18:08 - Les sélectionneurs de l'équipe de France ne sont pas venus vous solliciter ?
00:18:11 - Non, je ne pourrais pas faire le sprint, tout ça.
00:18:15 - Heureusement pour nous que sur les courses longues, il ne prend pas de dossard.
00:18:19 - Non, mais ça serait beau de faire un départ sur les courses par équipe.
00:18:24 J'y pensais il y a encore une semaine.
00:18:26 On faisait la Metsalama, traversait des monts roses.
00:18:29 Là, qui est vraiment une magnifique course d'altitude.
00:18:31 Là, c'est clairement une course pour Benjamin.
00:18:33 - Ça, je me plairais, ça. Un jour, pourquoi pas.
00:18:35 - Si vous voulez retenter l'expérience après le Tour du Grand Véhement,
00:18:38 donc en Isère, il y a la belle étoile dans le massif de Belle-Dôme,
00:18:42 que connaît bien Samuel.
00:18:44 Ce sont des images justement de cette année où vous étiez en tête
00:18:47 à la sortie de la première grande montée avec, toujours, Mathéo Jetmoux,
00:18:50 puisque ça se court aussi en équipe de deux.
00:18:53 La belle étoile, ça fait aussi partie des belles classiques du calendrier français.
00:18:57 - Oui, il y a le circuit des grandes courses que j'évoquais tout à l'heure.
00:19:00 Et pour moi, il y a la belle étoile derrière,
00:19:03 qui est vraiment une des plus belles courses françaises.
00:19:06 Cette année, on a eu une édition qui était vraiment magique,
00:19:10 avec des conditions au niveau logique top
00:19:12 pour organiser des parcours alpins, vraiment techniques et intéressants.
00:19:16 Et donc, encore une fois, avec Mathéo, c'était vraiment un réel plaisir
00:19:19 de courir à la maison sur ces deux belles journées de compétition.
00:19:22 - Ce sont des images de Pierre Gignoux, qui vous attendait au sommet,
00:19:27 qui, lui, a le record de la traversée de Belle-Dôme en 24 heures en ski alpinisme.
00:19:33 Il a réalisé ça l'hiver dernier.
00:19:35 Benjamin, vous êtes allé faire un peu la même chose dans le Keras pendant cet hiver.
00:19:40 - Oui, c'est vrai que ce n'était pas dans une optique de record,
00:19:43 c'était plus dans une optique de me tester justement un peu pour chamaniser un mat.
00:19:47 Remettre mon corps à des épreuves à 6000 mètres, de déniveler à 7000 mètres.
00:19:52 Et puis, c'était de découvrir ce Keras que je connais,
00:19:55 mais pas aussi bien que ce que je pensais.
00:19:58 Et ce n'est pas si loin de ma maison.
00:19:59 Et voilà, j'ai fait ça début janvier.
00:20:01 C'était deux jours superbes.
00:20:04 - Samuel, quand on fait de la compétition à très haut niveau,
00:20:07 quand on est champion du monde dans l'équipe de France,
00:20:09 on vide son sport en ski alpinisme.
00:20:11 Aujourd'hui, comment ça se passe ?
00:20:13 - Eh bien oui, c'est quand même bien démocratisé là-dessus.
00:20:17 Moi, j'ai la chance depuis un an de vivre de mon sport,
00:20:20 notamment grâce à l'armée des champions et à l'Alpe d'Huez
00:20:24 qui me soutiennent financièrement pour vivre de ça.
00:20:28 Et avant, quelques années en arrière, c'était quand même assez compliqué.
00:20:33 Il fallait travailler à mi-temps et tout ça.
00:20:35 Maintenant, ça se démocratise vachement.
00:20:36 Donc c'est génial.
00:20:37 Il y a pas mal de monde dans l'équipe de France qui peuvent vivre de ça
00:20:41 et qui peuvent se consacrer vraiment au sport.
00:20:44 - Le ski alpinisme essaye de faire évoluer aussi ses formats
00:20:47 pour attirer un public un peu plus large.
00:20:50 Parce que ce n'est pas évident d'aller voir et encourager des coureurs
00:20:53 sur des compétitions en haute montagne.
00:20:55 Donc il y a des formats de course sprint.
00:20:58 On voit là une épreuve de la Coupe du Monde à Flènes.
00:21:01 C'est des types de courses très rapides qui ressemblent assez ludiques.
00:21:09 On voit le parcours avec des obstacles, etc.
00:21:11 Ce n'est pas ce dont vous êtes le plus fan, Samuel ?
00:21:14 - Oui, moi, je ne précis pas trop ces formats très courts
00:21:18 parce que je ne suis pas très performant dedans, honnêtement.
00:21:21 Mais voilà, c'est quelque chose...
00:21:24 Ils se sont inspirés un peu des formats ski de fond, sprint, etc.
00:21:27 pour aller vers l'Olympique.
00:21:31 - L'informe olympique.
00:21:33 - Voilà, donc ça a été retenu pour les Jeux olympiques,
00:21:35 le sprint et le relais mixte.
00:21:37 Donc c'est une bonne chose pour le sport en général, je pense.
00:21:40 Et si le sport se développe, c'est grâce à ça.
00:21:43 Après, il ne faut pas tendre ces dernières années.
00:21:46 On sent que ça tend vraiment là-dessus, tout le temps plus court,
00:21:48 tout le temps plus nerveux.
00:21:50 Je pense que c'est très bien qu'il y ait ces formats
00:21:52 qui soient là pour aller au JO.
00:21:54 Mais qu'on garde vraiment des formats historiques,
00:21:57 les grandes courses et puis les courses individuelles classiques,
00:22:00 des formats un peu plus longs, d'une heure et demie, deux heures.
00:22:03 Et en fait, c'est très bien que ça soit différencié.
00:22:05 Alors, ils ont tendance des fois à vouloir un peu rapprocher les deux.
00:22:08 On veut mettre l'individuel aussi aux Jeux olympiques,
00:22:10 donc il faut réduire les temps pour les droits de télé, les choses comme ça.
00:22:13 Moi, je ne suis pas persuadé que ça soit bien.
00:22:15 Il y a des disciplines pour, c'est très bien.
00:22:17 Il y a des disciplines plus historiques, plus alpines,
00:22:20 qui sont vraiment bien.
00:22:21 Encore une fois, un sprint, oui, c'est du spectacle.
00:22:24 Oui, c'est facile à mettre la télé dessus.
00:22:27 Quand je repense encore la semaine dernière à la Mezzalama course en Italie,
00:22:31 à 3 800 m sur le plateau du Brighthorn, à 6 heures du matin,
00:22:37 il y a presque 1 000 personnes, 1 000 passionnés pour encourager.
00:22:40 Alors, c'est faux de dire qu'il faut faire le sprint
00:22:42 pour qu'il y ait des spectateurs, non, des courses de montagne.
00:22:45 Et la Pierra Monta, ça en est aussi l'exemple.
00:22:48 Elles sont là et sont historiques et ça a toujours marché comme ça.
00:22:51 Donc, voilà, c'est très bien qu'il y ait les deux.
00:22:53 Il faut respecter les deux, je pense.
00:22:55 L'arrivée du skatepiniste aux Jeux olympiques, ça vous trotte dans la tête
00:22:57 d'essayer de faire partie de la sélection pour la prochaine Olympiade ?
00:23:00 Honnêtement, au début, il devait y avoir la course individuelle.
00:23:04 Donc oui, carrément.
00:23:06 Maintenant, on sait que ça va être le sprint, le relais mixte,
00:23:09 les quotas, ça sera 18 athlètes maximum.
00:23:12 Donc, en gros, c'est un par nation.
00:23:14 Donc, moi, non, je n'y irai pas.
00:23:17 Au final, ce n'est pas ce qui me fait envie dans le ski alpin.
00:23:21 D'ailleurs, quand on voit ces épreuves de sprint dans un stade,
00:23:26 même si c'est en plein air, on n'est plus vraiment dans du ski alpinisme.
00:23:30 Le mot alpinisme, là, est un petit peu, un petit peu calvoté.
00:23:34 Je crois que tous les deux, Camille et Samuel,
00:23:39 vous voulez parler de la professionnalisation de la compétition.
00:23:42 Vous voulez devenir guide de haute montagne.
00:23:44 Ça fait partie des projets.
00:23:47 Ça fait partie des projets long terme.
00:23:48 Celui-là, c'est un des projets le plus long terme et qui me tient beaucoup à cœur
00:23:53 parce que j'adore partager ma passion avec la slackline et la highline
00:23:57 à travers des festivals et des stages.
00:23:59 Et pour moi, guide de haute montagne,
00:24:01 ça serait une des suites logiques de cette envie de partage.
00:24:04 On a de la highline, l'épreuve de passage des guides.
00:24:09 Je me tourne vers le sol, je vais pleurer.
00:24:11 Heureusement pour nous.
00:24:13 Sam, par contre, t'es en formation.
00:24:15 T'es à quel stade de la formation ?
00:24:16 Moi, je suis aspirant et je vais part à l'Aspie 3 bientôt.
00:24:21 Il n'y a pas encore d'épreuve de...
00:24:23 Il faudrait l'intégrer parce que ça devient une pratique de la montagne à part entière.
00:24:27 Oui, c'est pas faux.
00:24:28 Peut-être qu'un jour, on proposera ça aux clients.
00:24:30 De faire les traversées le plus lentement possible.
00:24:33 Comment ça se passe ?
00:24:36 Déjà, Benjamin, je ne sais pas si vous avez le temps d'emmener des clients,
00:24:38 mais quand vous êtes sur le terrain avec des clients,
00:24:42 vous les sélectionnez pour qu'ils soient capables de suivre votre rythme ?
00:24:45 Non, moi, sincèrement, le métier de guide, je l'apprécie aussi à un rythme lent.
00:24:50 Je ne recherche pas tout le temps des clients performants
00:24:52 parce que les clients performants, ce n'est pas toujours les plus faciles à gérer
00:24:55 dans le sens où il faut avoir une super bonne météo,
00:24:57 il faut avoir des bonnes conditions de terrain.
00:24:59 Et du coup, c'est une prise de tête qui n'est quand même pas anodine.
00:25:02 Et en plus, si tu as des projets personnels pour toi,
00:25:04 donc tu as l'envie, par exemple, de faire le record de la traversée de la mèche,
00:25:09 je ne sais pas, ou de décoller d'un joli sommet,
00:25:11 il faut que toi, tu sois disponible ces journées-là.
00:25:14 Tu vois, les journées où il fait grand beau,
00:25:16 pendant lesquelles tes clients veulent aussi faire des belles courses.
00:25:18 Donc finalement, des fois, je me souviens que je préférais bosser
00:25:20 les jours où il ne faisait pas très beau,
00:25:22 faire des belles randonnées glaciaires avec des belles trouées de ciel bleu
00:25:26 entre des zones un peu plus dépressionnaires,
00:25:29 et puis après, profiter des belles journées pour moi.
00:25:32 Alors, votre spécialité, c'est d'aller vite, vite fait, bien fait, sur les skis,
00:25:36 mais aussi et surtout dans les parois alpines.
00:25:41 Vous avez réalisé cet hiver l'ascension express de la voie Gousseau
00:25:45 de Maison aux Grandes Jaurasses.
00:25:47 Les Grandes Jaurasses, c'est une des faces mythiques,
00:25:49 une des faces nord mythique des Alpes,
00:25:51 qui fait rêver les amateurs comme les professionnels, finalement.
00:25:55 Oui, la face nord des Grandes Jaurasses, c'est quand même un mythe qui reste un mythe.
00:25:58 C'est indémodable et c'est une paroi immense de plus d'un kilomètre,
00:26:02 très large également, où il y a un nombre d'itinéraires incroyables.
00:26:06 Et ça reste le cœur de l'alpinisme mixte, je trouve, dans les Alpes.
00:26:12 Et comme me disait Cora Pesquet, qui est malheureusement décédée en Patagonie,
00:26:18 c'est un endroit où tu peux avoir des conditions très particulières,
00:26:22 comme en 2014, par exemple.
00:26:24 Et du coup, profiter de ces conditions-là, qui sont exceptionnelles,
00:26:27 et que tu ne pourrais pas avoir ailleurs en expédition,
00:26:30 il faudra avoir une chance incroyable pour arriver au Pakistan.
00:26:33 L'avantage des Jaurasses, c'est qu'il y a Chamonix au pied,
00:26:36 ce n'est pas très loin, et c'est un profil qui est parfait pour nous, les alpinistes.
00:26:40 Alors vous avez choisi une voie qui, en plus, est chargée d'histoire,
00:26:44 qui a fait la une des médias il y a plus de 50 ans.
00:26:48 On ne s'en souvient pas forcément, mais ça fait partie de l'histoire de l'alpinisme.
00:26:52 C'était en février 1971 que René Desmaisons,
00:26:56 qui est un peu le Benjamin Védrine de l'époque,
00:26:58 on peut peut-être faire le parallèle,
00:27:01 en tout cas c'était une des stars de l'alpinisme français,
00:27:03 il s'est attaqué en hiver à cette face nord des grandes Jaurasses
00:27:06 avec son coéquipier Serge Gousseau.
00:27:09 Alors ils n'étaient pas sur le même rythme que vous,
00:27:11 eux ils étaient partis pour faire cette première sur au moins une semaine.
00:27:17 On voit quelques images d'époque, et ça s'est bien passé au début,
00:27:24 ils ont progressé dans cette voie très technique.
00:27:29 Et puis malheureusement, au bout d'une semaine, la cordée s'est retrouvée bloquée.
00:27:33 - Elle s'est retrouvée bloquée, alors la comparaison entre moi et Desmaisons,
00:27:38 elle est un peu peut-être exagérée, dans le sens où à l'époque,
00:27:43 effectivement Desmaisons était quand même plutôt mal vue d'une certaine partie de la communauté.
00:27:48 Et c'est vrai qu'il avait même du mal à trouver des compétences cordées à ce point-là.
00:27:52 Et c'est vrai que Serge Gousseau, il le connaissait très peu à cette époque.
00:27:55 Il n'avait jamais fait d'ascension avec lui.
00:27:57 Jeune d'une vingtaine d'années, 23 ans, il avait à peu près Serge Gousseau.
00:28:01 Il s'est engagé dans cette ascension avec ce René Desmaisons.
00:28:04 Et c'est vrai que malheureusement, à 80 mètres du sommet, bloqué dans la tempête,
00:28:11 après je ne sais plus combien de tièmes jour, il me semble que c'était le 10e.
00:28:15 - Ouais, 10e, mais alors du coup ils sont restés longtemps bloqués.
00:28:17 - Après oui, ils sont restés longtemps, ils sont restés presque une semaine bloqués.
00:28:20 - C'est vrai que de passer derrière eux, dans leur pas, après ce qu'ils ont vécu,
00:28:26 sur un mode totalement différent, entre 10 journées d'ascension plus une semaine bloquée comme ça,
00:28:32 et toi tu passes à la journée, c'est très particulier.
00:28:35 - Oui, c'est deux époques qui se croient.
00:28:37 - Non mais c'est à la fois émouvant parce que toi tu es dans une forme de facilité,
00:28:41 effectivement, mais en même temps tu as profité de leur histoire à eux.
00:28:45 C'est eux qui ont cassé des barrières psychologiques.
00:28:47 Et puis chaque génération a mis sa pierre à l'édifice.
00:28:49 - C'est vrai que de Maison n'était pas apprécié du milieu de la montagne,
00:28:52 et notamment suite à cette histoire des Grandes Jaurasses, il y a eu un peu de polémique,
00:28:56 puisqu'il y a eu une incompréhension entre les secouristes qui sortent voler la cordée en hélico,
00:29:01 qui elles réclamaient du secours, eux ont imaginé que tout allait bien,
00:29:04 et donc il a fallu plusieurs jours avant que finalement le sauvetage arrive.
00:29:08 Entre temps Serge Gousseau était mort dans les bras de René de Maison,
00:29:11 René de Maison qui lui a pu être sauvé in extremis de cette face mort des Grandes Jaurasses par les secouristes.
00:29:18 - Et ça a permis, entre guillemets, de créer une vraie professionnalisation du secours de montagne avec le PGHM ?
00:29:24 - Une forme de malchouin, bien, presque, on pourrait dire, oui.
00:29:27 Mais c'est vrai qu'il y avait des histoires politiques à cette époque-là,
00:29:29 entre le maire de Chamonix, de Maison qui n'était pas apprécié pour son tempérament très communiquant aussi,
00:29:36 entre les unes de Paris Match, etc.
00:29:39 Et puis il était un peu dans le commerce de la montagne, il avait une forte tête aussi, un caractère très fort.
00:29:45 - Il bousculait un peu les codes de l'époque ?
00:29:47 - Il n'était pas apprécié par certains pour autant, il ne faut pas qu'on généralise,
00:29:50 mais c'est vrai qu'il bousculait les codes à cette époque-là et c'est quelqu'un de très déterminé qui est revenu...
00:29:56 - Une année d'après ?
00:29:58 - Une année d'après, il est revenu pour finir les 80 fameux mètres,
00:30:01 donc c'est quand même une grande figure de l'alpinisme français.
00:30:04 - Il a écrit un livre sur cette aventure, 342 heures dans les Grandes Jaurasses, c'était en 1971,
00:30:11 vous en avez mis 9, 9 heures pour faire la même voie dans les mêmes conditions puisque c'était en hiver.
00:30:18 Vous y avez pensé à cette histoire de deux maisons ?
00:30:22 Pendant que vous grimpiez, vous avez repéré par exemple l'endroit où ils sont restés bloqués, 80 mètres sous le sommet ?
00:30:26 - C'était dur à repérer sincèrement, mais il y a plein de matériel dans cette voie d'époque,
00:30:31 tu vois beaucoup de pitons anciens évidemment,
00:30:34 puis il y a des corps de fils qui ont été un petit peu laissés dans le haut,
00:30:37 qui sont complètement décrépites, mais qui ont été laissés par certains grimpeurs qui étaient dans un style himalayen,
00:30:43 donc en fixant toute la paroi avec des corps de fils, ce qui est un autre temps encore.
00:30:47 Et puis tu as un sac à dos, je me souviens, un sac à dos complètement vieux, tout cassé, bloqué dans une cheminée,
00:30:53 alors tu ne sais pas trop d'où il vient ce sac à dos, tu sens qu'il y a du passage, il y a quelque chose,
00:30:58 il y a une âme dans cette voie, il y a de la vie, il y a des drames, il y a eu quelque chose,
00:31:02 et toi quand tu passes là, tu penses souvent effectivement à René de Maison et puis Serge,
00:31:07 qui étaient eux bloqués complètement dans le froid, enfin il faut s'imaginer, des conditions extrêmes.
00:31:12 Alors eux avaient prévu quand même dans leur équipement de passer plusieurs nuits dans la montagne,
00:31:15 pas cette fin tragique, mais en tout cas de pouvoir bivouacquer comme on dit.
00:31:19 Vous quand vous avez attaqué cette voie, vous étiez avec Léo Billon,
00:31:23 que vous connaissez bien puisque vous aviez fait les trois faces nord hivernales l'année d'avant,
00:31:29 quand vous attaquez, dans votre tête c'est sûr, c'est à la journée, vous n'avez pas le matériel nécessaire pour éventuellement bivouacquer.
00:31:36 Non, on n'a pas le matériel de bivouac, c'est une volonté pour s'alléger au maximum,
00:31:40 et puis les ascensions précédentes qu'on a pu faire notamment dans les Jauras avec la première à la journée de la Walker,
00:31:48 les Pront-Cassin de la Walker, c'était en 2018 avec ses bretelles, nous ont confirmé qu'on était capable potentiellement de faire ça,
00:31:54 mais la barrière psychologique de cette voie-là en particulier, où il n'y avait eu que des ascensions en plusieurs journées en hiver,
00:32:00 des ascensions à chaque fois difficiles en plus, ça nous laissait quand même imaginer une horaire plutôt large,
00:32:06 donc on ne pensait pas sortir de jour et aller si vite.
00:32:12 Et on a été plutôt surpris finalement de la relative facilité, mais pour nous finalement le niveau technique nous permettait d'évoluer rapidement.
00:32:21 On a voulu quand même mettre un point d'honneur à faire des bons relais, à pas forcément prendre de risques inconsidérés.
00:32:28 On ne connaissait pas la voie, donc comme là on voit dans les images, on devait à chaque fois quand même regarder le topo,
00:32:32 le papier qu'on avait pour se diriger et ne pas se tromper d'endroit.
00:32:37 Et on s'imagine maintenant en mettant en œuvre des techniques de rapidité que peuvent être par exemple la corde tendue,
00:32:45 et puis aussi la connaissance de l'itinéraire, vraiment réduire le volume horaire.
00:32:50 - On s'y est regretté.
00:32:52 - Jusqu'où je ne sais pas, mais moi je me dis au fond des fois, quand j'aurais fait d'autres projets auxquels je pense actuellement,
00:32:59 j'aimerais bien retourner pour essayer de faire dans une autre approche.
00:33:03 Alors ça sera très contesté par je pense un peu le monde de la montagne, mais c'est pas grave, j'essaierai.
00:33:09 Et dans une optique d'essayer d'aller le plus vite possible dans ce genre de voie.
00:33:12 - Donc encore plus léger en termes de matériel, d'équipement.
00:33:15 - Et je pense que c'est possible de passer sous la barre des 6 heures c'est sûr.
00:33:20 Et ça serait déjà bien, les 6 heures.
00:33:22 Après, il ne faut pas non plus être trop ambitieux.
00:33:25 Mais ça serait une belle manière d'essayer d'innover dans l'alpinisme je pense.
00:33:31 - En même titre que toi tu dis que tu as reçu les pierres à l'édifice avant,
00:33:36 toi ta volonté c'est aussi d'apporter cette pierre.
00:33:38 - Complètement, moi le but c'est...
00:33:40 Alors c'est pas dans un but philanthropique non plus, parce qu'on est quand même avant tout égoïste.
00:33:44 J'ai l'impression que dans notre milieu de la montagne, on fait des choses pour nous,
00:33:47 parce qu'on ressent ce qu'on fait.
00:33:49 Et même si on partage ce qu'on ressent, c'est avant tout le plaisir d'être là-dedans,
00:33:52 dans ce genre de projet.
00:33:54 Mais c'est tellement agréable et moi ça me passionne d'imaginer de nouvelles choses.
00:33:58 Parce que c'est l'aventure avec un grand A en fait, tu n'as pas de référence.
00:34:01 Et c'est toi qui essaye de les mettre en place, ces nouvelles références.
00:34:04 Et du coup c'est beaucoup plus prenant en fait,
00:34:06 qu'une ascension un peu plus classique où c'est répétitif.
00:34:08 Tu as l'habitude, tu sais qu'un tel a déjà fait ça, donc tu vas dormir au même endroit.
00:34:11 - Il y a des repères. - Voilà, tu as des repères.
00:34:13 Alors là, tu n'as pas de repères et tu te lances un peu dans l'inconnu.
00:34:15 Tu largues les amarres et c'est un saut dans le vide en quelque sorte.
00:34:18 Et c'est trippant de faire avancer les choses.
00:34:21 Et voilà, c'est en minimisant vraiment le matériel,
00:34:26 en minimisant et peut-être en allant à l'inverse de ce que la plupart des gens voudraient qu'on fasse.
00:34:31 C'est-à-dire être ultra light, faire une voie que tu as déjà fait, etc.
00:34:36 Ce n'est pas l'éthique de la montagne comme on l'imagine,
00:34:38 où tu pars dans une voie nouvelle, etc.
00:34:40 Ça permet d'imaginer des ascensions plus ambitieuses, dans un style plus éthique,
00:34:44 sur d'autres montagnes, notamment en Himalaya ou dans les Alpes.
00:34:47 Voilà, ça fait progresser le niveau tout simplement.
00:34:49 - Est-ce qu'on va plus vite dans une voie comme ça l'hiver que l'été,
00:34:54 avec la neige qui recouvre la paroi, qui permet peut-être de cramponner plus rapidement certains passages ?
00:35:00 - C'est une bonne question.
00:35:01 Nous, pour le coup, la voie n'était pas en super conditions.
00:35:03 Ça n'avait rien à voir avec l'année 2014, par exemple,
00:35:07 où elle était toute en plaquage de neige et glace, comme là, on peut le voir.
00:35:11 Là, il y avait des passages comme ça, qui étaient super agréables, en neige,
00:35:15 donc des beaux plaquages.
00:35:16 Mais la moitié supérieure de la voie est exceptionnellement sèche.
00:35:21 Et on a vraiment longuement hésité à s'y engager dans cette voie,
00:35:24 parce qu'on n'avait pas trop de collègues qui avaient déjà fréquenté cette voie-là dans ces conditions.
00:35:29 Il y avait une seule cordée qui avait fréquenté cette voie-là dans ces conditions,
00:35:31 c'était Patrick Vagnon et Yannick Graziani.
00:35:34 Et c'est cet appel-là qui a été décisif.
00:35:36 J'ai appelé Patrick, il m'a dit "tu as déjà fait cette voie ?"
00:35:38 Il m'a dit "ben oui, j'ai déjà fait".
00:35:39 C'était en 2004, après la sécheresse de 2003, et c'était archi sec sur le haut.
00:35:43 Et il m'a dit "ouais, ça passait bien, écoute".
00:35:45 C'est plus long, mais ça passait.
00:35:47 Et à l'époque, pour la petite histoire,
00:35:49 ils enlevaient les crampons à chaque fois qu'il y avait du rocher.
00:35:52 Donc il faut s'imaginer, ils se mettaient en mode alpinisme estival,
00:35:57 dès qu'il y avait du rocher, alors que nous maintenant, grâce au dry tooling,
00:36:01 on garde les crampons tout le long de l'ascension,
00:36:04 et ça nous évite de perdre du temps, c'est chronophage et c'est laborieux.
00:36:07 Des fois, c'est compliqué d'enlever les crampons et de les remettre.
00:36:10 Et c'est vrai que Patrick, à l'époque, ils avaient mis deux jours et demi,
00:36:13 et maintenant, on est capable de se mettre ce temps-là,
00:36:15 grâce notamment à l'évolution du dry tooling.
00:36:17 Vous avez mis 9h pour gravir la voie,
00:36:20 vous étiez parti de Chamonix en plus, pour complexifier un petit peu le défi.
00:36:25 Au total, je crois que ça a mis une quinzaine d'heures
00:36:29 pour arriver à sortir de cette face nord des grandes Jauras.
00:36:33 On voit les derniers moments où vous arrivez à sortir au soleil,
00:36:38 puisque de l'autre côté, le gazon…
00:36:39 On était au soleil sans lunettes de soleil, malheureusement,
00:36:41 puisqu'on avait prévu de sortir de nuit.
00:36:43 Donc, on s'est fait bien avoir, on était un peu surpris.
00:36:46 Et c'est toujours un grand moment, en plus, il y avait des bonnes conditions.
00:36:49 Et puis, on était très, très déçus de ne pas avoir la voile de parapente,
00:36:54 parce qu'il y avait des conditions aérologiques parfaites,
00:36:57 idéales pour décoller avec la voile.
00:36:58 Et Léo et moi, on vole, chacun a la possibilité de voler,
00:37:01 et ça aurait été un combo parfait.
00:37:03 Mais voilà, il faut arrêter d'être toujours insatisfait.
00:37:06 Et à un moment donné, on est quand même descendus, très contents de nous-mêmes,
00:37:10 un peu déçus quand même dans la croûte, j'avoue,
00:37:12 sous le reflux de Boca Latte.
00:37:13 Et à un moment donné, on a explosé, on en avait marre,
00:37:15 vraiment marre de descendre ces grandes Jauras.
00:37:18 On a mis quatre heures, et après, on était devant la pizza à Courmaillers.
00:37:21 - Pour le soir, tranquille.
00:37:22 - Ouais, c'était… Non, c'est une belle journée.
00:37:24 - Comme si de rien n'était. - Bien remplie.
00:37:26 - On parlait de la rapidité, on peut aller encore plus vite.
00:37:29 Est-ce que le faire en solo, justement, pour éviter toutes ces pertes de temps…
00:37:33 - Ouais, ouais, c'est pas évident, mais c'est imaginable.
00:37:36 J'y ai pensé, mais là, on est sur un niveau technique.
00:37:40 Moi, il y a un ou deux passages dans lesquels je me dis qu'effectivement,
00:37:44 ça serait une énorme ascension, quoi.
00:37:46 Ça serait vraiment… C'est engagé.
00:37:48 - Là, on voit des images, justement, de Charles Dubouleau l'an dernier,
00:37:51 dans la face nord des grandes Jauras, en solo intégrale, aussi, sur une ascense.
00:37:55 - Attends, là, il était… Oui, là, sur la fin, il était en solo intégrale, ouais.
00:37:58 - Et là, c'est aussi une autre approche psychologique, j'imagine, de grimper…
00:38:02 - Complètement, ouais, ouais.
00:38:03 Là, en solo, tu dois tout faire.
00:38:06 Chaque longueur, tu les fais toi-même, déjà.
00:38:08 Tu dois tout gérer l'itinéraire tout seul.
00:38:10 Les prises de décision, elles sont seules.
00:38:12 - Et puis, il faut pas tomber. - La cordée, oui, il faut pas tomber, aussi.
00:38:15 Alors là, c'est du solo intégrale sur la fin,
00:38:17 qui est pas la partie la plus difficile de la voie qu'il avait faite.
00:38:19 Et sur les autres longueurs difficiles,
00:38:22 et puis 85 ou 90 % de la voie, il était sur un style auto-assuré,
00:38:27 avec une corde, et il fixait la corde à un relais,
00:38:29 il montait au sommet, puis à chaque fois, il fallait qu'il redescende
00:38:32 pour tout déséquiper, et qu'il remonte, donc il faisait deux fois, finalement…
00:38:34 - Ouais, alors, ça, c'est plus du vite-fait bien fait, ça.
00:38:36 - Non, ça, c'est très laborieux. - C'est plus dans le registre de Blanchet-Mavédouine.
00:38:38 - Ouais, c'est extrêmement laborieux.
00:38:39 Mais ça me plairait d'essayer de faire ça un jour.
00:38:41 Mais ça me plairait aussi, effectivement, comme à Juli-Stech,
00:38:43 de faire des faces Nord hyper rapidement.
00:38:46 Mais c'est, voilà, c'est une prise d'engagement,
00:38:48 un engagement qui est quand même certain et qui est pas anodin.
00:38:50 Il faut bien y réfléchir à l'avance et préparer le projet très consciencieusement.
00:38:54 - Bon, il y a eu un autre bel exploit dans ces Grandes Jaurasses,
00:38:58 au moins deux jours avant vous, notamment avec Charles Dubouleau.
00:39:02 Là, ce sont les images de cet hiver, et Simon Velfringer et Clovis Paulin
00:39:08 pour une autre hivernale, alors la directrice-signe de la Walker.
00:39:11 Eux, ils ont pris leur temps, ils étaient trois, et ils y ont passé cinq jours.
00:39:14 - Voilà, alors, c'est pareil, c'est une voie qui a…
00:39:17 C'est la première répétition de cette voie, de cette directrice-signe Gabarou Bouvard.
00:39:23 Et au final, ce genre de voie, c'est quelque chose dans lequel
00:39:26 tu peux difficilement prétendre à une première répétition à la journée,
00:39:29 comme nous, on a pu le faire sur La Gousseau de Maison.
00:39:32 La Gousseau de Maison, on avait quand même plusieurs références de cordée
00:39:34 qu'il avait déjà répétées, et c'était plus facile pour nous de comprendre
00:39:37 à peu près ce dont on était capable de faire.
00:39:40 Eux, c'était pas le même style, c'est une voie qui est un peu plus difficile,
00:39:43 mais à l'avenir, c'est typiquement le genre d'itinéraire
00:39:45 qu'on pourrait imaginer faire à la journée.
00:39:47 Et c'est typiquement un challenge qui, je pense, pour nous, à l'avenir,
00:39:50 est hyper intéressant à faire.
00:39:52 - Je vous en donne un autre défi, enchaînée dans la journée,
00:39:54 Chamonix-Zermatt et La Gousseau de Maison.
00:39:57 Si vous tirez un peu les deux, on est bon.
00:40:00 - Il faudrait faire Zermatt-Chamonix.
00:40:01 - Oui, Zermatt-Chamonix, et on fait un petit crochet par les Grandes Jaurasses.
00:40:05 - Allez, 2030, on va dire.
00:40:07 - Ah ben…
00:40:08 - Non, non, il va me le ressortir.
00:40:11 - C'est enregistré.
00:40:12 - J'ai enlevé une petite graine, là.
00:40:14 - Il lui en faut peu.
00:40:16 - Clovis Paulin, qui est le frère, qui était dans l'expédie 3,
00:40:20 qui est le frère de Nathan Paulin,
00:40:22 qui est lui aussi un des monstres de la slackline,
00:40:26 Nathan Paulin, que vous connaissez bien, Camille.
00:40:30 Votre approche, vous, de la montagne et de la slackline,
00:40:35 est un peu différente, voire même un peu opposée
00:40:37 dans l'esprit de vitesse de celles de Benjamin et de Samuel.
00:40:41 - Voilà, nous, on fait des crêpes au sommet, des fois.
00:40:43 - Donc, c'est vrai que…
00:40:45 - Vous, vous manquez tout, la poids, l'heure est chaude.
00:40:48 - On a fait des crêpes très haut en altitude, voilà.
00:40:51 Alors moi, Nathan Paulin, je n'ai pas eu encore la chance de le rencontrer,
00:40:56 contrairement à ce qu'on a pu évoquer, là.
00:40:58 Mais je vais pouvoir, j'espère, le rencontrer cet été.
00:41:03 Avec Antoine Crétinon et Nathan Paulin,
00:41:07 ils sont en train d'organiser un projet
00:41:08 que j'ai aussi mis quelques pierres à l'édifice.
00:41:11 Et ce projet se passera dans le massif du Mont-Blanc.
00:41:16 On ne va pas trop divulguer de choses,
00:41:18 parce que ça ne se fera peut-être pas cette année.
00:41:20 Nous, on doit aussi récolter énormément d'autorisations.
00:41:25 Donc, c'est quelque chose qui est très complexe dans le temps à mettre en place.
00:41:31 Donc, voilà, il ne faut pas vendre la peau de l'ours
00:41:34 avant d'avoir récupéré le brevet de chasseur.
00:41:38 Mais c'est quelque chose qui devrait se faire quand même,
00:41:43 parce que la détermination, elle est hyper grande chez nous tous pour que ça se réalise.
00:41:48 Il y aura des figures comme aussi Antoine Moineville,
00:41:51 qui lui, du coup, est guide de haute montagne.
00:41:54 Il fait partie des Soul Flyers.
00:41:56 Des Flying Frenchies.
00:41:57 Des Flying Frenchies, pardon.
00:41:58 Les Soul Flyers, c'est une soute.
00:41:59 Voilà, c'est vrai que leur nom pourrait être ressemblant.
00:42:02 À la différence que les Flying Frenchies a été un nom que la communauté leur a donné,
00:42:06 puisque leur nom, que j'ai oublié avant, n'était pas celui-là exactement.
00:42:12 Moi, c'est des personnes qui ont justement, comme disait Benjamin,
00:42:15 qui ont aussi cassé des barrières psychologiques.
00:42:20 Moi, j'ai commencé la Slackline en ignorant l'existence de la Highline,
00:42:25 que j'ai eu la chance de découvrir dans un festival.
00:42:28 Et c'est aussi ce qui m'a motivé à créer un festival par la suite,
00:42:34 grâce au contact que j'ai obtenu par Romain Jandet aussi,
00:42:36 qui est aussi, du coup, guide de haute montagne,
00:42:40 et qui fait beaucoup, beaucoup d'escalade surtout,
00:42:42 qui a un très haut niveau sur l'escalade libre.
00:42:46 Et grâce à des personnes comme ça et des événements comme ça,
00:42:49 moi, j'ai eu la chance de pouvoir découvrir la montagne, le sport, là-haut.
00:42:55 Et de combiner, en fait, c'est ce qui m'attire le plus.
00:42:58 Et du coup, de passer des temps assez grands sur ces sommets,
00:43:03 ça change notre regard, parce qu'il y a une frénésie,
00:43:07 c'est vrai, je pense, dans notre monde.
00:43:11 Et c'est intéressant.
00:43:15 T'as des choses que tu penses que tu n'aurais pas le temps de penser autrement
00:43:20 quand t'es en train de regarder ton ami marcher en équilibre, là,
00:43:24 entre deux sommets, où tu te dis, putain, ouais, qu'est-ce que...
00:43:28 Tu te demandes un peu ce que tu fais là, bien sûr.
00:43:29 -Ouais, c'est un moment à part.
00:43:30 Mais il y a cette chose où tu te dis, c'est quand même vachement beau.
00:43:34 C'est une métaphore, pour moi, de la vie quand même très forte,
00:43:37 où on est toujours un peu à osciller, des fois à tomber, des fois à remonter.
00:43:43 Je pense que d'être plus apaisé,
00:43:45 ça permet de gérer ces oscillations de haut en bas dans nos sentiments,
00:43:50 d'avoir un rythme plus...
00:43:53 Une houle douce qu'une tempête intérieure.
00:43:58 Et la montagne, je pense, confronte à ça,
00:44:01 parce que si t'es trop en oscillation forte,
00:44:05 tu vas avoir des difficultés à t'y déplacer,
00:44:08 ça va te mettre des émotions trop fortes,
00:44:10 et du coup, tu te sentirais moins à ta place.
00:44:12 Et je pense que quand tu te sens à ta place,
00:44:14 c'est que t'as réussi à gérer toutes les contraintes qui sont présentes,
00:44:18 et du coup, tu vas te sentir à ta place.
00:44:21 Et que ça soit, du coup, un moment où tu le fais très, très vite,
00:44:26 si t'es capable de le faire très, très vite,
00:44:28 comme Benjamin le fait, et comme Samuel le fait aussi,
00:44:31 là, c'est que tu es à ta place, c'est que tu te sens apaisé.
00:44:35 Si ça fait quelques semaines que tu fais de l'alpinisme
00:44:38 et que tu veux aller suivre ce rythme parce que ça te fait rêver,
00:44:41 là, tu vas vite te rendre compte... -C'est moins le cas.
00:44:43 -Ou mourir, mais tu vas vite te rendre compte
00:44:46 qu'il va falloir ramener des pierres dans ton sac
00:44:49 avant de pouvoir le faire tout seul.
00:44:53 -Bon, il y a un côté philosophe chez Camille.
00:44:55 En attendant de revenir sur ce qui sera peut-être au Mont-Blanc cet été,
00:45:00 je crois que ce sera d'ailleurs au-dessus de 4 000 m d'altitude,
00:45:02 quand on choisit le massif du Mont-Blanc,
00:45:04 c'est aussi pour pouvoir dépasser cette altitude,
00:45:06 on va parler de quelque chose qui s'est réalisé
00:45:10 près de chez toi, en Savoie,
00:45:12 sur une autre montagne moins célèbre que le massif du Mont-Blanc,
00:45:16 mais qui, pour les habitants de la Morienne, est importante.
00:45:18 Ce sont les aiguilles d'arves qui sont reconnaissables
00:45:21 à leur forme et à leur position géographique au cœur de la Morienne ?
00:45:26 -Voilà, elles sont au cœur de la Morienne.
00:45:28 Moi, j'ai eu la chance d'habiter à Valoire,
00:45:30 où on les voit que quand on est sur les sommets.
00:45:32 Maintenant, j'ai la chance de les voir depuis la fenêtre.
00:45:34 Et ces montagnes, moi, c'est un tracé qui m'a toujours appelé.
00:45:41 Avant, je pensais qu'à la centrale et à la méridionale, qu'on les relie.
00:45:46 C'est un projet qu'avec Antoine Crétineau,
00:45:48 on a mis en place en collaboration.
00:45:51 Et on s'est investi énormément en temps, en énergie,
00:45:54 tous les deux, pour que ça se passe.
00:45:56 Grâce aussi à ma rencontre avec Philippe Vincent,
00:45:58 qui est un peu mon père adoptif, philosophiquement,
00:46:01 et qui est lui aussi guide de haute montagne.
00:46:05 J'ai eu la chance de découvrir ces montagnes avec lui aussi,
00:46:08 qui est vraiment le...
00:46:09 Il a fait plus de 145 fois, je crois, la centrale, un truc comme ça.
00:46:13 Donc, il la connaît comme sa poche.
00:46:16 Et c'est un projet qui lui tenait énormément à cœur.
00:46:19 Donc, il s'est investi aussi beaucoup en temps et en énergie
00:46:22 pour que ça se réalise.
00:46:24 - C'est des projets qui demandent un dispositif humain important.
00:46:29 Là, on voit l'expédition se mettre en route.
00:46:33 Il faut du temps, il faut des gens, il faut tout coordonner
00:46:36 pour qu'on puisse tirer une ligne comme ça entre deux montagnes.
00:46:40 Ça paraît simple une fois qu'on la voit en place,
00:46:42 mais c'est très complexe.
00:46:43 - Alors, si on est dans le milieu, ça ne nous paraît pas simple
00:46:45 une fois qu'elle est en place.
00:46:46 Si on a un oeil...
00:46:47 - Quand on regarde juste les images, on se dit oui ?
00:46:49 - Voilà, on va se dire...
00:46:52 Oui, c'est sûr que ça va être...
00:46:54 Ça paraît impossible, presque.
00:46:56 Et la force d'une équipe qui est capable de le réaliser,
00:47:00 c'est justement de répondre à toutes les contraintes humaines
00:47:02 et matérielles qui vont être soulevées.
00:47:04 Et le temps de se poser toutes ces questions,
00:47:06 ça, c'est déjà une première contrainte.
00:47:09 Il faut avoir ce temps-là de réflexion disponible.
00:47:13 Et ensuite, ça va être trouver les bonnes personnes,
00:47:17 compétentes, disponibles, motivées, évidemment,
00:47:21 et avec qui il y a un lien déjà en place.
00:47:25 On ne va pas y aller avec quelqu'un qu'on ne connaît pas comme ça.
00:47:28 - Vous n'allez pas avec Serge Bousso, par exemple ?
00:47:31 - Oui, ça serait plus complexe qu'il n'y ait pas ce lien déjà présent.
00:47:37 Il faut énormément de confiance.
00:47:39 On va mettre notre vie...
00:47:40 Là, c'est une "cordée" extensible où il y a des cordées en place de parts et d'autres.
00:47:45 Plus on installe une nouvelle cordée entre toute l'équipe,
00:47:48 et cette installation, on ne regarde pas le copain qui est en face.
00:47:52 On n'a pas le temps de le vérifier ce qu'il a fait.
00:47:55 - Il faut faire confiance.
00:47:56 - Là, il faut faire confiance.
00:47:57 Et c'est aussi ce lâcher-prise qui est intéressant aussi dans cette pratique.
00:48:01 - L'objectif de cette expédition, c'est de relier ces deux aiguilles d'arbre.
00:48:07 C'était le premier projet avec un camp de base au pied,
00:48:11 qui est installé pendant plusieurs jours.
00:48:14 C'est des longues journées de préparation.
00:48:17 - Moi, j'avais laissé ma tente parce que comme ça, j'arrêtais de la monter-descendre.
00:48:20 Donc après, elle a été fusillée, bien sûr, à cause des UV.
00:48:23 Et du coup, là, on était, de souvenir, c'était 4 jours, 5 jours de camp de base.
00:48:32 Oui, 5 jours de camp de base, c'était ça.
00:48:34 Et pendant ce projet, sur le sommet, est née l'idée au sein de l'équipe
00:48:41 de relier toutes les aiguilles d'arbre.
00:48:43 Et ça, moi, j'étais un peu le seul fou à y croire vraiment de l'équipe et à le pousser.
00:48:50 Tant bien qu'il n'y a que Antoine Crétinon qui est revenu aider aux portages,
00:48:56 aux différents portages du projet.
00:48:58 Malheureusement, il travaillait durant la fenêtre météo.
00:49:03 Et là, on a eu la chance de recréer un camp de base énorme.
00:49:07 On a fait un appel aux dons pour pouvoir récupérer de l'argent et louer des dômes.
00:49:15 Et donc là, on était 19 tentes, 2 dômes, un ami qui était chef cuisinier.
00:49:21 Donc on avait du souci en moins quand on rentrait parce que comparé à l'année d'avant,
00:49:25 c'était juste ceux qui étaient le plus rapide à descendre, etc.
00:49:28 Ou les premiers qui rentraient et qui faisaient la nourriture.
00:49:31 Donc pour tout le reste de l'équipe.
00:49:34 Donc là, on a enlevé des charges mentales au sein de l'équipe.
00:49:38 Donc il y avait un peu moins de choses à gérer.
00:49:40 Moi, par contre, j'organisais du coup en parallèle un festival qui s'est déroulé juste après le projet.
00:49:47 Et toute cette charge mentale accumulée m'a donné lieu à mon premier,
00:49:54 j'espère peut-être dernier accident en haute montagne.
00:49:57 Et qui était un peu spécifique parce que du coup, j'étais au sommet de la Médianale avec mon ami Juliette.
00:50:05 Et suite à une erreur de manipulation de mon système de détention,
00:50:10 qui est un frein débrayable pour gérer petit à petit la friction nécessaire
00:50:15 pour que les amis récupèrent sur la centrale le matériel qu'on avait mis en place.
00:50:21 Moi, j'ai fait une erreur de gestion de ce matériel et je me suis brûlé complètement les mains.
00:50:26 Et là, du coup, est arrivé un moment où, avec 70 km/h de vent,
00:50:30 des pilotes du PGHM ont pu nous sauver avec Juliette.
00:50:39 Et là, ça fait quelque chose.
00:50:43 Ça fait quelque chose mentalement parce qu'on a envie d'être autonome.
00:50:48 On a envie de redescendre des montagnes qu'on gravit.
00:50:51 Et là, d'avoir gravi cette montagne sans être capable de la redescendre, ça fait quelque chose.
00:50:59 Et donc, je les remercie bien sûr de m'avoir sauvé.
00:51:04 Et par contre, ça nous amène à réfléchir.
00:51:07 Et moi, je sais qu'aujourd'hui, c'est des projets où soit il faudrait vraiment des gros temps de transition entre les prochains,
00:51:14 soit être beaucoup plus aussi à la gestion parce que sinon, c'est quelque chose qui est énorme.
00:51:20 Là, on a 75 personnes qui ont aidé pour que le projet se passe.
00:51:25 Et après, c'est 20 personnes en direct.
00:51:28 On voit là justement un moment clé d'un projet pour tirer une ligne entre deux montagnes.
00:51:35 C'est le fil de pêche que vous envoyez d'un point à l'autre avec un drone.
00:51:39 Voilà. Là, c'est du dynéma de 1 mm,
00:51:43 qui résiste à plusieurs centaines de kilos malgré son petit diamètre.
00:51:48 Et là, du coup, c'est un pilote de chez Drone Angel qui est encadrant au sein de l'armée pour les pilotes de drone.
00:52:01 - Donc, c'est lui qui doit être précis. Là, c'est vous qui récupérez, c'est ça, le câble de l'autre côté ?
00:52:04 - Voilà. Donc là, c'est un moment...
00:52:08 Quand on diffuse encore le film d'Antoine Ménage, "Arventiel",
00:52:12 c'est un moment qui me met, quand je le regarde, qui me met toujours le palpitant de ouf
00:52:16 parce que c'était un peu le... Là, ils étaient reliés pour la première fois.
00:52:21 Et ce moment, il est hyper fort pour tout le monde parce qu'on sait qu'on a le lien.
00:52:26 Et maintenant... - Il n'y a plus qu'à tirer les cendres.
00:52:28 - Il n'y a plus qu'à tirer. Donc, normalement, là, on sait que ça se passe bien, quoi.
00:52:31 Donc, c'est un des moments les plus forts, quoi. C'est vraiment...
00:52:37 Moi, ça m'a marqué à vie, ce truc. J'ai vécu, là... On voit les images, 3 secondes.
00:52:42 Et moi, je me souviens très bien que c'était 20 secondes pour moi, quoi.
00:52:46 Là, tu étends le temps, clairement.
00:52:50 - Retirer les sangles, c'est pas non plus une mince affaire.
00:52:53 La ligne faisait 500 m entre les 2 plus grandes aiguilles.
00:52:57 Je crois que vous aviez monté 1 km de sangles pour réaliser ce défi.
00:53:04 Et puis, effectivement, il faut aussi arriver à faire correspondre la logistique
00:53:09 avec la fenêtre météo pour pouvoir ensuite marcher sur les montagnes, j'ai envie de dire.
00:53:15 - C'est ça. Donc là, on avait la chance d'avoir Florent Berthet,
00:53:18 qui a lui, son entreprise même de slackline et ingénieur,
00:53:21 qui est parapentiste aussi, sûrement futur guide de haute montagne.
00:53:25 Et lui est très... Voilà, il est très intelligent.
00:53:28 Et du coup, il nous a beaucoup aidés sur cette détection de fenêtres.
00:53:32 On bénéficiait aussi de l'expérience et l'expertise de Philippe, qui, lui, est guide.
00:53:36 Et du coup, c'était... Voilà, c'est vraiment une conjonction de plein, plein de talents, plein d'expertise.
00:53:45 Et oui, il y a parmi... Il n'y a que... Dans l'équipe, il n'y a que les meilleurs français, un peu, j'ose dire, dans ces disciplines, quoi.
00:53:53 Parce qu'il y a énormément de questions qui se sont soulevées, quoi.
00:53:56 - On voit, Camille, vous êtes le premier à tester cette ligne.
00:54:01 J'imagine que c'était un moment d'émotion, un moment où on se dresse comme ça sur la sangle.
00:54:06 - Moi, j'ai imaginé cette traversée... Donc je faisais de la slackline au sol chez moi et je m'imaginais entre elles, quoi.
00:54:14 Donc pour me préparer à ce moment, je pense que c'est le plus important, un peu, dans ces préparations-là.
00:54:22 Toute la préparation mentale en amont qui fait qu'on peut réaliser ou pas son rêve.
00:54:27 Là, mon rêve, c'était de faire à vue, donc sans tomber la première fois.
00:54:31 Heureusement, c'est quelque chose que je n'ai pas réussi, parce que j'ai beaucoup regardé sous moi, le vide, aux alentours.
00:54:37 Donc là, j'ai fait ce qu'on appelle un catch. Donc j'ai rattrapé la ligne avec, je me souviens, un cri aigu, etc., de terreur.
00:54:44 Et le lendemain, j'ai eu la chance de pouvoir faire l'aller-retour, par contre, où là, je me suis donné...
00:54:50 Je me suis dit... Parce qu'en fait, on la laisse deux jours, quoi, deux jours et demi.
00:54:54 Donc là, c'est let's go, quoi, à fond. Il faut y arriver à ce moment-là, quoi.
00:54:58 Sinon, j'aurais eu une frustration. C'est indéniable, je pense.
00:55:02 - On met combien de temps à traverser une ligne comme ça de 500 m ?
00:55:05 - Là, j'ai mis un peu plus de 15 minutes. - On voit, là, l'arrivée plein d'émotion.
00:55:10 - Là, les records sont peut-être à peu près à 7 minutes actuelles par Benoît Brume, qui est l'actuel champion du monde de vitesse,
00:55:22 qui organise lui-même ses compétitions, enfin qui va organiser les futures compétitions de vitesse en highline.
00:55:30 Donc lui est très, très rapide, même sur des longues distances. Là, moi, ça me prend une quinzaine de minutes.
00:55:37 Et puis après, des fois, il y a des gens, en une heure et demie, ils n'ont pas encore traversé,
00:55:41 parce qu'avant de débloquer mentalement et physiquement cette vitesse-là, c'est vraiment des années et des années de pratique.
00:55:51 Et surtout à ces altitudes où, du coup, on veut aussi réussir à traverser cette ligne.
00:55:58 Et du coup, on va prendre un rythme un peu plus bas aussi, le croisière, pour ne pas tomber.
00:56:04 - On est attaché quand on est sur la ligne quand même. Je ne vais pas préciser, mais il y a une petite sangle.
00:56:08 Il y a des champions du monde de vitesse qui commencent à se mettre en place, justement, pour tester les performances des meilleurs highliners.
00:56:16 - C'est ça. Donc il y a eu déjà le format de compétition en freestyle, en highline freestyle.
00:56:21 La jumpline va être, elle, au sol et on fait des figures. Le freestyle, le highline freestyle, on est attaché sur des sangles élastiques aussi et on fait des figures.
00:56:31 Donc les compétitions sur ces deux disciplines sont présentes depuis pas mal d'années.
00:56:37 Et là, maintenant, il y a aussi la speedline, on appelle. Du coup, on est tout en anglais parce que c'est le jargon.
00:56:46 Et du coup, là, c'est sur des portions de 100 mètres et on essaie d'aller le plus rapidement possible.
00:56:53 Les différentes comparaisons entre les longueurs de ligne, les propriétés des lignes, il n'y a pas encore un cahier des charges carré.
00:57:03 - Il n'y a pas encore les Jeux Olympiques. - Voilà, on peut dire ça.
00:57:07 Mais en tout cas, ça se met en place. Et puis c'est bon enfant parce que la plupart des gens se connaissent et du coup, se tirent vers le haut tous ensemble.
00:57:16 - On a vu des images du premier film, "Arventiel". Donc il y en a un deuxième en préparation.
00:57:22 On en voit quelques extraits qui reviendra sur l'ensemble du défi. Les trois aiguilles reliées par une sangle et marchées par des eyeliner.
00:57:35 Benjamin, ça donne envie quand on voit ce genre d'image. Vous avez déjà testé la "highline" en montagne ?
00:57:43 - Je suis un piètre équilibriste. Je ne saurais pas faire ça du tout.
00:57:49 Mais par contre, ça donne envie. C'est une sensation, je pense, qui est incroyable, évidemment.
00:57:53 Et puis reliée à deux sommets aussi emblématiques que moi également, je vois beaucoup depuis chez moi.
00:58:00 - De l'autre côté. - Ouais, de l'autre côté.
00:58:02 - Chacun son versant. - Ouais, on le voit depuis la vallée.
00:58:04 Et bien, c'est vrai que ça fait frissonner. Et puis surtout, c'est très esthétique. Donc les images, à chaque fois, sont dingues.
00:58:13 Et puis là, c'est vrai qu'avec les cumulus et tout, les lumières du soir et du matin, c'est beau.
00:58:19 - Voilà, les trois aiguilles qui sera le prochain film. Ce sera prévu pour la rentrée 2023 ?
00:58:25 - Oui, voilà, c'est ça. C'est le but.
00:58:27 - On a hâte parce que le premier avait déjà touché pas mal de monde, notamment pendant les rencontres Cinémontagne où il avait été diffusé.
00:58:36 Et puis on croise les doigts aussi pour le Mont-Blanc. J'imagine que ça pourra faire un autre beau sujet à traiter dans une prochaine émission.
00:58:43 Benjamin, retour au Pakistan cet été. La dernière fois que vous étiez venu, vous en arriviez. Est-ce qu'il y a d'autres projets sur ce secteur ?
00:58:50 - Ouais, là, je retourne au Pakistan. Mais je peux pas encore dire pourquoi.
00:58:55 - Ah, surpris aussi. Alors disons.
00:58:57 - Non, pour tout vous dire, en fait, au Pakistan, comme dans beaucoup de pays dans le monde où il y a des montagnes,
00:59:03 il faut des permis pour gravir les sommets convoités, certains sommets convoités du moins.
00:59:08 Et c'est des processus qui prennent du temps. Voilà. Il y a des étapes de validation à respecter, avec surtout l'armée, notamment,
00:59:16 parce que c'est notamment proche de l'Inde avec le conflit du Cachemire. Et voilà. Mais dans tous les cas, on partira. Après, on s'adaptera.
00:59:26 - On suivra ça après-coup. On rappelle pour ceux qui n'ont peut-être pas eu l'occasion de voir la précédente émission que Benjamin est devenu
00:59:34 l'alpiniste le plus rapide du monde au-dessus de 8 000 m en gravissant notamment cette montagne, le Broad Peak, en un petit peu plus de 7 heures, du début à la fin.
00:59:44 3 ou 4 jours en général pour les alpinistes déjà aguerris sur cet itinéraire. On en avait parlé sur ce plateau.
00:59:51 On n'avait pas les images à l'époque du sommet, la petite séquence émotion, j'imagine, quand vous arrivez après 7h28 des forts sommets de votre premier 8 000 m en plus.
00:59:59 - Oui. Alors là, c'était pas la première fois. - Vous l'aviez déjà grimpé quelques jours avant.
01:00:03 - Voilà. Quelques jours avant, j'étais déjà arrivé à ce sommet-là pour l'acclimatation, pour parfaire vraiment l'acclimatation.
01:00:08 Et du coup, là, c'est forcément un énorme moment d'aboutissement, oui, parce que c'est des mois de préparation.
01:00:14 Et puis c'est des années de pensée. Depuis longtemps, j'avais envie d'aller mettre les pieds à plus de 8 000 m.
01:00:20 - Et puis vous êtes redescendu encore plus vite de ce sommet, puisque là, pour le coup, vous aviez la voile dans le sac et que vous avez réalisé aussi un bel exploit,
01:00:29 un décollé du sommet du Brodpik à plus de 1 000 m d'altitude. - Oui, c'est pas comme au Jauras où j'avais la déception de ne pas avoir la voile.
01:00:35 Là, je l'avais, je l'avais prise. Par contre, c'était pas prévu à la base de l'expédition de décoller du sommet.
01:00:40 On pensait pas que c'était possible, en fait, en termes de relief. On pensait qu'il y avait trop de cailloux autour et que c'était trop raide.
01:00:46 Et la première ascension nous a permis de comprendre que c'était possible. Donc, ouais, un grand, grand moment et le plus beau vol de ma vie encore aujourd'hui.
01:00:57 Et puis une descente plutôt rapide, puisque 25 minutes. - En gros, au moins de 8 heures, vous avez fait l'aller-retour.
01:01:04 - Oui, au moins de 8 heures, j'ai fait l'aller-retour, ce qui est souvent plutôt nécessaire pour la plupart des gens.
01:01:09 Entre 7000 mètres et 8000, ils mettent souvent un peu plus de 8 heures. Ils mettent entre 8 et 12 heures, souvent.
01:01:14 Entre 7000 mètres et 8000 mètres, ils mettent ce temps-là. Et au-delà du temps, c'est aussi, comme on le voit sur les images,
01:01:21 c'est des angles de vue et puis une sensation d'apesanteur qui est dingue le parapente. On voit des choses qu'on ne verrait pas du sol.
01:01:29 Et on revoit où on est passé. Et là, du coup, je peux pas m'empêcher de passer au-dessus des collègues.
01:01:33 Alors, ça les nargue un peu. C'était pas le but. - Parce que là, ils sont là encore pour quelques jours.
01:01:39 - Le but, c'est dans ces moments-là, je sais pas, il y a une aimantation, une volonté de partager ce qu'on est en train de faire, en fait, avec les autres.
01:01:47 Et les autres ressentent aussi ce qu'on ressent. Et c'est fort, parce qu'on crie et les autres crient aussi. C'est beau, c'est marrant.
01:01:54 - Ça fait rêver. - C'est sûr que ça fait rêver. Il y a un film, "Edge of the Reason", qui tourne en ce moment,
01:02:02 qui retrace tout ce périple. Alors, ça fait rêver. Mais Camille, le parapente peut aussi avoir un petit peu de ses... quelques travers.
01:02:11 Regardez ce petit extrait du film. - L'engin s'apprête à décoller, mais il y a un léger vent arrière. Pas top. C'est pas top.
01:02:17 - Hé, non ! - J'avais failli mourir. - Ah ouais ? - Ah bah là, après, j'aurais dû.
01:02:29 - T'as vu, hein ? - Y avait la glace pas loin ? - Ouais. - Merde. Ah ouais, c'est pas cool.
01:02:35 - Ah ouais, c'est pas cool. C'est Nicolas Jean, qui était avec vous en expé, qui vous filme, qui vous cadre pas super bien, mais qui assiste à la scène.
01:02:41 - Oui, j'étais assez étonné de sa décontraction. - Ah ouais, il est très décontracté.
01:02:44 - Mais dans ces environnements-là, on sait qu'on prend des risques. Et sur ce coup-là, effectivement, le décollage était très compliqué.
01:02:51 Il fallait courir très vite et la neige était très dure. Et en fait, quelques mètres sous ma position, il y avait une grande plaque de glace
01:02:58 qui, après, partait dans le vide. Donc sans m'en rendre compte, ouais, j'ai failli mourir.
01:03:04 - Un premier joker. Il y en avait eu un deuxième dans cet expé. Après, vous avez tenté le K2 et vous vous êtes retrouvé...
01:03:10 Là, ce sont les images qu'on voit à 8 300 m sous le gros serac terminal, qui s'appelle le Potalnek, je crois, ce couloir.
01:03:18 - Le Potalnek, ouais. - Et là, à partir de là, c'est le trou noir. - Alors ouais, y a pas d'image après, parce que c'est la dernière vidéo que j'ai pu prendre.
01:03:24 - À partir de 2003, en fait, l'ascension à la journée, plus le manque d'oxygène, plus ma fatigue et les conditions météorologiques défavorables
01:03:33 ont fait qu'effectivement, j'ai été victime d'une hypoxie sévère. Mais ça, je l'ai su après, ouais, à l'automne,
01:03:39 notamment en collaborant et en travaillant avec Paul Robac, qui est un physiologiste et chercheur à l'École nationale de ski et d'alpinisme.
01:03:47 On a découvert que c'était ça et ça m'a amené à avoir des troubles de l'équilibre, une fatigue excessive, troubles de la conscience.
01:03:54 Et donc, je me souviens pas du tout, en fait, de tout ce qui s'est passé au-dessus de 8 300 m. - Vous avez peut-être été allé au sommet, finalement ?
01:04:00 - Ben, franchement, je... Non, j'ai des... Sincèrement, c'est quand même une très, très bonne question. - C'est très demandé.
01:04:07 - Parce que s'il y avait eu personne sur la voie normale qui aurait pu, effectivement... Là, en fait, tout le monde m'a dit
01:04:13 « Non, Benjamin, t'es pas allé au sommet ». Ils m'ont confirmé que j'étais allé peut-être à 8 400 m maximum. Mais s'il y avait pas eu ces gens-là,
01:04:19 tout seul, qu'est-ce que j'aurais pensé de mon ascension ? La question serait posée. Et du coup, ça fait en fait réfléchir sur toute l'histoire,
01:04:27 et notamment, par exemple, Yuli Stek, à la facu de la Purna. En fait, la plupart des gens qui ont fait des 8 000 à la journée,
01:04:33 beaucoup ont été victimes de cette hypoxie sévère. Et notamment Kylain Jannet, il a eu des symptômes qui se rapprochent de ça sur son 2e Everest,
01:04:42 quand il a fait les 2 Everest en une semaine. Et donc, Yuli Stek, par exemple, qui est en facu de la Purna, il a peut-être eu ça.
01:04:49 Et en redescendant, lui-même n'a jamais su en fait qu'est-ce qu'il avait fait. Parce qu'on a déjà des exemples de personnes qui sont montées
01:04:55 à des sommets, mais sans se souvenir. Donc c'est très mystérieux. - Et puis la caméra ne tournait plus. Je crois qu'il n'y avait plus de batterie.
01:05:01 Donc ça restera aussi un grand mystère. - Un grand mystère. - Un mystère. Merci en tout cas à tous les 3 d'avoir levé le voile sur vos vies
01:05:08 qui ne sont pas mystérieuses, mais qui sont trépidantes. Je vous donne rendez-vous à nos téléspectateurs pour les prochaines aventures
01:05:15 dans le grand air. Et puis vous, dès que vous aurez réalisé vos performances respectives, je vous accueillerai avec plaisir
01:05:20 pour en reparler sur une émission. - Merci à vous. - Merci à vous.
01:05:25 (générique)