Comment j’ai survécu à un directeur d’école pédophile au Mali

  • l’année dernière
À 11 ans, Youssouf, originaire de Mantes-la-Jolie, a été envoyé par ses parents dans une école coranique au Mali. Très vite, sa scolarité se transforme en cauchemar quand il découvre les abus du directeur de la madrasa.

Envoyés au bled est une série de témoignages de StreetPress. De la banlieue parisienne au Mali, à la Côte d’Ivoire et à la Mauritanie, elle raconte le parcours de trois jeunes envoyés dans le pays d’origine de leurs parents au début des années 2000.

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Transcription
00:00 En pleine journée, il appelle un élève, il le fait rentrer dans l'infirmerie
00:06 et il le force à le masturber.
00:09 On le voit, parce que la porte est entre-ouverte, tout le monde le voit.
00:14 Et c'est à ce moment-là que je me suis rendu compte qu'il était intouchable.
00:17 C'était vraiment de la torture.
00:20 Même moi aujourd'hui, je me suis toujours posé la question
00:23 « comment j'ai fait pour résister à ça ? »
00:27 Le connaisseur est proche.
00:29 Mettez-vous en attaché et ajoutez le fil.
00:32 Moi j'ai grandi à Montelageli dans les années 90.
00:37 Donc fratrie de six, six garçons, trois filles,
00:41 donc avec les parents d'origine malienne.
00:43 T'as plusieurs options en fait quand tu te retrouves au quartier.
00:46 C'est soit t'es assidu dans les études, tu poursuis ton parcours, ça se passe bien.
00:51 Soit tu fais du décroche à scolaire,
00:53 et à ce moment-là, il y a toutes les dérives qui vont, c'est vol, trafic,
00:58 et toutes les conneries qui vont avec.
01:00 Tout ce qui était considéré comme trop grave, on essayait de s'en écarter.
01:04 Il y a pas mal de familles maliennes sur Monte, et il se parle énormément entre eux.
01:17 Donc ça a commencé avec certains parents qui envoyaient leurs enfants là-bas.
01:21 De manière ferme, c'est-à-dire sur des très très longues durées.
01:24 Et ils se parlaient entre eux.
01:26 Donc voilà, moi j'ai envoyé mon fils dans tes écoles.
01:28 Là-bas ils apprennent la religion, ils apprennent la culture,
01:32 et de fil en aiguille, tout le monde commence à envoyer son fils.
01:36 Par exemple sur les familles de Monte,
01:38 je connais six familles différentes qui ont envoyé leurs enfants dans le même système.
01:43 La première fois que j'y ai mis les pièces, c'était en 2011.
01:49 J'ai vraiment passé des vacances avec mon père.
01:51 Donc à ce moment-là, je suis encore très jeune.
01:53 À aucun moment, ça me traverse l'esprit que je vais un jour aller là-bas
01:58 et passer autant de temps en fait.
02:01 En été 2002, on part tous.
02:04 Donc tous mes frères et sœurs, de l'aîné jusqu'au cadet, c'était vraiment tout le monde.
02:09 À la base, c'était des vacances, mais les vacances se sont étendues en disant séjour.
02:13 Et le séjour, c'est devenu une installation.
02:16 Même s'il y a le manque, le manque du pays, de se dire,
02:19 voilà les copains, on a envie de rentrer, ça nous manque de rentrer.
02:22 Après au final, on est obligé de s'adapter.
02:24 Les jeunes maliens sont retournés en classe à Bamako et dans ses environs ce lundi.
02:28 On allait en cours du lundi au vendredi, on partait le matin.
02:31 Là-bas, tu apprends, c'est bien.
02:35 Tu n'apprends pas, ça va mal.
02:37 Ici, dans une école, le prof, il n'a pas de foi.
02:39 À Bamako, dans certaines écoles, le prof, il est avec son fouet et il est au taquet.
02:44 Tu ne vas pas au coin, tu fais une connerie, tu vas vite comprendre que tu ne vas pas recommencer.
02:48 Quand le prof, il a une courroie de moto pour te donner une leçon, c'est radical.
02:56 Ils appelaient quatre personnes, ils te prenaient les pieds, les jambes,
03:00 et lui, il te tapait pendant que tu étais suspendu, en gros, comme si tu te faisais cartonner.
03:05 Et lui, il prenait sa courroie et il te tapait, jusqu'à ce qu'il décide de s'arrêter.
03:11 Je ne comprends pas, en fait, c'est instantané.
03:22 Je suis à la maison aujourd'hui, le soir, demain, tu vas aller dans une nouvelle école.
03:27 Pour moi, c'était, tu vas dans une nouvelle école, mais pas de souci, tu fais tes cours et tu rentres.
03:31 Je n'avais pas compris que c'était le système d'internat.
03:35 Je pleure toute la journée, je ne comprends pas ce qui m'arrive, je suis isolé.
03:38 Parce que je n'ai pas encore vu ceux que je connais.
03:41 Parce qu'il y a des gars de Mantes avec qui j'ai grandi,
03:44 avec qui je faisais déjà l'école arabe quand j'étais plus jeune.
03:47 À chaque fois qu'un nouveau arrivait, tu viens d'où ?
03:49 Moi, je viens de là.
03:50 Tu viens d'où ? Moi, je suis 93.
03:52 Où dans le 93 ?
03:53 À Saint-Denis.
03:54 Toi, tu viens d'où ?
03:55 Montfermeil.
03:56 Toi, tu viens d'où ?
03:57 Moi, je viens de Steint.
03:58 Tu viens d'où ?
03:59 Moi, je viens de Vitry, etc.
04:01 Donc, ça venait de partout.
04:03 C'était vraiment les Français d'origine malienne d'un côté,
04:08 les locaux de l'autre.
04:10 Et ils étaient tout le temps ensemble.
04:11 Par exemple, nous, on les appelait les Blédards.
04:14 Et eux, ils nous appelaient les Français, les Parisiens.
04:16 Donc, peu importe d'où tu viens, tu viens de France, tu es un Parisien.
04:18 Même si tu viens de Marseille, un Parisien, un Parisien.
04:20 Et nous, on les appelait les Blédards.
04:21 Donc, les Blédards, ils étaient ensemble, les Parisiens ensemble.
04:24 Et c'était plus simple.
04:25 On comprend très bien ce qu'ils disent, mais on le parle très mal.
04:27 Voire on ne le parle pas.
04:29 Donc, on reste avec ceux qui nous comprennent
04:31 et ceux avec qui on partage des liens.
04:34 Moi, étant donné que je ne voyais pas souvent mon père,
04:37 j'étais toujours isolé,
04:39 le directeur, il me voyait souvent pleurer.
04:41 Il me disait, viens, reste avec moi, etc.
04:43 Et un jour, il y a un grand qui est venu me voir.
04:45 Parce que nous, ceux qui étaient plus âgés que nous, on les appelait les grands, etc.
04:48 Il vient me voir, il me dit, fais attention.
04:51 J'ai dit, comment ça ?
04:52 Il me dit, arrête de rester avec le directeur.
04:54 J'ai dit, pourquoi ?
04:55 Parce qu'il est gentil, il m'achète tout le temps des trucs,
04:57 il me donne tout le temps à manger, etc.
04:59 Il m'a dit, reste pas avec le directeur tout seul.
05:01 J'ai dit, pourquoi ?
05:02 Il m'a dit, il fait des trucs chelous, au gosse.
05:04 Le procédé du directeur, c'était vraiment,
05:06 il ciblait un élève,
05:08 il le gardait souvent avec lui,
05:10 et dès qu'il avait une occasion, il lui faisait quelque chose.
05:13 À chaque fois qu'il me disait, viens, je t'achète quelque chose, je refusais.
05:16 Et lui, il a remarqué que mon attitude, elle l'avait changé.
05:19 Un jour, comme ça, il m'a posé la question, il m'a dit,
05:21 comment ça se fait que,
05:23 quand je te dis, viens, je t'achète des trucs, ça, tu veux pas ?
05:26 J'ai dit, parce que, j'ai pas envie.
05:28 Et là, son attitude, elle a vraiment changé.
05:30 Donc c'était des débarquements soudains en classe.
05:34 Il me disait, il travaille bien, lui ?
05:36 Avant même que le prof réponde, il m'en mettait une.
05:38 S'il travaille pas, faut le taper.
05:40 Chaque excuse était bonne pour venir me taper.
05:44 Le pire, c'est qu'un jour,
05:46 je devais me plaindre d'un truc,
05:48 parce que, je sais pas, j'avais eu une bagarre avec un mec.
05:52 Et je vais le voir pour m'en plaindre.
05:55 Sauf qu'à ce moment-là, lui, de que je tape à la porte,
05:57 il m'entend pas.
05:59 Et quand je rentre dans son espace, là,
06:04 je le surprends.
06:06 Je le surprends en train d'abuser de quelqu'un.
06:08 Il le touchait de partout, etc.
06:10 Il lui disait, tu lui touchais, c'est parti.
06:12 Et moi, j'étais là, j'étais choqué.
06:14 Et quand il voit ça, il voit rouge.
06:16 Et là, ça a été la cata.
06:18 À partir de là, c'est la cata.
06:20 À chaque fois qu'il y avait un problème, il me ciblait.
06:22 À chaque fois que je faisais une erreur, il me ciblait.
06:24 Il y a même une fois où,
06:26 et là, c'était vraiment le truc qui m'a le plus choqué,
06:29 en pleine journée,
06:31 il appelle un élève,
06:33 il le fait rentrer dans l'infirmerie,
06:36 et il le force à le masturber.
06:38 On le voit, parce que la porte, elle est entre-ouverte.
06:41 Tout le monde le voit.
06:43 Et c'est à ce moment-là, en fait, que je me suis rendu compte
06:45 qu'il était intouchable.
06:47 À chaque fois que je pense avoir du répit, il redébarque.
06:49 À force de se faire taper,
06:51 ça devient une routine.
06:53 Ça ne me choque plus, en fait.
06:55 Ça m'agace, ça m'énerve.
06:57 Mais je ne peux rien faire.
06:59 Et puis surtout, il a un ascendant psychologique.
07:01 C'est-à-dire que même les jours où mon père venait,
07:03 il avait cette façon, en fait,
07:05 de te mettre la pression.
07:07 Tu n'arrivais même pas à parler.
07:09 Et puis, il était imposant.
07:11 Il faisait plus d'1,90 m, il était un peu obèse.
07:13 Tu ne peux absolument rien faire face à un mec comme ça.
07:15 Surtout quand tu as 11 ans.
07:17 Il essayait toujours de la jouer différemment.
07:19 Deux fois, il la jouait gentille.
07:21 "Ouais, regarde, ton père, il n'est pas là.
07:23 Il ne t'appelle jamais.
07:25 Moi, c'est moi ton nouveau père."
07:27 Il insistait pour que tout le monde l'appelait père.
07:29 Tu imagines ?
07:31 Tu ne l'appelais pas père, il t'éclatait la gueule.
07:33 Mais à force, en fait, de s'en prendre à moi,
07:35 j'ai fini par me construire une carapace.
07:37 Il avait beau être dur avec moi,
07:39 essayer de m'humilier, ça ne m'atteignait plus.
07:41 Et au fur et à mesure que ça avançait,
07:43 les choses allaient changer
07:45 parce que je n'allais absolument pas continuer à me laisser faire.
07:47 Il ne prévient pas mes parents.
07:57 Ça veut dire que moi, je suis dans l'école pendant plusieurs jours.
07:59 Je ne peux pas manger.
08:01 Je vomis de la bile.
08:03 Je perds du poids comme ce n'est pas possible.
08:05 Et c'est par hasard,
08:07 la grande sœur de ma mère
08:09 qui venait me rendre visite ce jour-là,
08:11 avec une tante,
08:13 elle demande à me voir.
08:15 Et le directeur, il dit
08:17 "Oui, Youssouf, non, il n'est pas là.
08:19 Je ne sais où."
08:21 C'est un pote à moi qui a vu ma tante.
08:23 Il a dit "Si, il est là."
08:25 Et heureusement qu'il ne l'a pas vue, parce que je ne sais même pas ce qu'il lui aurait fait.
08:27 Du coup, elle,
08:29 elle est rentrée dans l'école.
08:31 On ne pouvait pas la retenir.
08:33 Elle est rentrée dans l'école, elle m'a cherchée.
08:35 "Youssouf, il est dans quelle chambre ?"
08:37 Et dès qu'elle est rentrée dans ma chambre,
08:39 elle m'a vue, elle s'est effondrée.
08:41 Elle m'a vue la peau sur les os,
08:43 complètement malade, impossible de réagir.
08:45 Et là, ça a été le déclic.
08:47 Le premier déclic.
08:49 Elle a appelé mes parents, elle leur a tout expliqué.
08:51 Elle a dit "Si vous ne le ramenez pas tout de suite, il va mourir."
08:53 Et c'était vraiment le cas.
08:55 J'étais à deux doigts de mourir dans l'école,
08:57 à cause de cette maladie.
08:59 Parce que je n'avais pas les bons traitements,
09:01 lui, il négligeait mon état,
09:03 et surtout, il ne prévenait pas mes parents.
09:05 Parce qu'il savait que c'était l'élément qui allait être déclencheur.
09:07 Et à ce moment-là, je suis rapatrié en urgence.
09:09 Donc je rentre en France, je passe deux semaines à l'hôpital.
09:11 Ils me donnent des traitements très durs.
09:13 Voilà, je reprends des forces au fur et à mesure.
09:15 Pour moi, ça y est, le calvaire, il est fini.
09:17 Donc on me réinscrit à l'école.
09:19 J'avais raté la sixième
09:21 et la moitié de la cinquième,
09:23 parce que j'avais fait quasiment un an et demi.
09:25 Donc je rentre en cinquième,
09:27 je fais mes cours, ça se passe bien.
09:29 Je finis l'année scolaire,
09:31 et je fais la quatrième.
09:33 A peine commencé la quatrième,
09:35 je repars.
09:37 Premier jour où j'arrive dans l'école.
09:39 Le premier jour où j'arrive dans l'école,
09:41 je prends un bidet
09:43 pour aller mettre de l'eau.
09:45 Et je récupère l'eau dans une grande jarre.
09:47 Je récupère l'eau dans la grande jarre,
09:49 je mets l'eau dans mon bidet.
09:51 Le directeur me voit.
09:53 Et quand je passe, comme le bidet est un peu rempli,
09:55 il y a un peu d'eau qui se renverse.
09:57 Il m'a massacré.
09:59 "Ah, tu joues avec l'eau, etc."
10:01 En fait, il attendait juste ça.
10:03 Il m'attendait au tournant.
10:05 Et il me l'a dit, clairement.
10:07 "Regarde, t'es revenu.
10:09 Tes parents t'ont re-ramené."
10:11 Et à ce moment-là, je ne sais même pas quoi lui dire.
10:13 Je me dis, "Oui, il a raison, je suis là."
10:15 Et c'est reparti.
10:17 Il fallait que je parte.
10:23 Vu que mes parents,
10:25 je n'arrivais pas à les avoir
10:27 et que je n'arrivais pas à trouver d'échappatoire à ce niveau-là,
10:29 j'ai pris la décision de moi-même.
10:31 Je connaissais le chemin pour aller chez mon oncle.
10:33 Je suis parti de moi-même.
10:35 Mon oncle me dit, "Tu ne repars plus dans l'école."
10:37 Et ma mère, "Pourquoi elle est partie de l'école, etc."
10:39 Et lui, il leur a expliqué, sans rentrer dans trop de détails,
10:41 "Le directeur, il fait beaucoup de choses pas bien.
10:43 Il frappe tout le temps, etc.
10:45 Il s'est sauvé de l'école. Il reste à la maison."
10:47 Ma mère, elle était catégorique,
10:49 elle a dit, "Il ne repart pas."
10:51 Elle repart dans l'école pour lui demander des comptes.
10:53 Qu'est-ce qui s'est passé ? Comment ça s'est passé ?
10:55 Elle essaie de comprendre pourquoi j'étais parti de l'école.
10:57 Et il essaie de détourner, en fait.
10:59 "Oui, non, c'est parce qu'il ne veut pas travailler, etc."
11:01 J'ai dit à ma mère, "J'ai appris tout ça."
11:03 Je ne pouvais pas manger, parce que tout ce que je lui disais,
11:05 c'était fluide. Et elle a vite compris,
11:07 c'est ma mère, elle a vite compris que je disais la vérité.
11:09 Et à ce moment-là, ça a fait un scandale.
11:11 Elle a commencé à appeler mon père,
11:13 à lui expliquer tout ce qui se passait dans l'école,
11:15 mais sans avoir à rentrer dans les détails
11:17 de ce qu'il faisait aux autres élèves.
11:19 Ça, je n'ai jamais abordé le sujet.
11:21 Donc, je sors de l'école,
11:23 et ensuite, on rentre ensemble.
11:25 Mais quand on rentre ensemble, voilà,
11:27 il y a les sévices, il y a tous les stigmates
11:29 qui reviennent, et mon attitude,
11:31 elle change quand je reviens ici.
11:33 Je ne veux plus apprendre,
11:35 je fais plein de conneries.
11:37 Donc, c'était vol, vol à l'arraché,
11:39 raquettes, cambriolage,
11:41 je faisais toutes les conneries possibles et imaginables.
11:43 Et sans but, en fait.
11:45 Je ne sais pas ce que je recherchais dans ça,
11:47 parce qu'il n'y avait pas de réel intérêt à mon âge.
11:49 Je sais que je ne faisais pas ça pour rien.
11:51 Il y avait forcément une raison, parce que le moment où j'ai un déclic,
11:53 je me dis, il faut que j'avance.
11:55 Et là, je passe à autre chose.
11:57 Et ce qui faisait que mon attitude changeait,
11:59 c'est que les reproches de mes parents,
12:01 c'était, on t'a envoyé au bled,
12:03 t'as fait plusieurs allers-retours,
12:05 t'es revenu, tu ne veux rien faire,
12:07 t'écoutes pas, tu fais encore plus de conneries.
12:09 Et plus j'entendais des reproches,
12:11 plus ça me rongeait, en fait.
12:13 Parce que je me dis, mais si seulement ils savaient,
12:15 ils n'oseraient pas me dire ça.
12:17 Si seulement ils savaient, en fait, j'ai vécu des trucs de fou.
12:19 Jusqu'au jour où,
12:21 ça y est, ça sort.
12:23 Je dis, mais attendez, vous me reprochez d'être parti
12:25 pendant des années,
12:27 de ne rien avoir étudié.
12:29 T'es conscient que j'avais ça ?
12:31 Quand j'avais ça, vous étiez où ?
12:33 Quand ils me faisaient ça, t'étais où ?
12:35 Et quand j'ai commencé à parler,
12:37 ils ne parlaient plus.
12:39 Je les ai scotchés.
12:41 En fait, dans ce que je leur ai dit,
12:43 j'ai ressenti qu'ils étaient vraiment conscients
12:45 qu'ils avaient loupé quelque chose.
12:47 Parce que quand je leur ai vraiment donné
12:49 les détails de ce qui se passait là-bas,
12:51 entre ce moment-là
12:53 et aujourd'hui,
12:55 je n'ai plus jamais entendu une seule fois
12:57 un reproche concernant cette période-là,
12:59 même après avoir fait
13:01 des conneries même plus grandes,
13:03 sans rentrer dans les détails.
13:05 Mais même après ça, je n'ai pas eu de retour dessus.
13:07 Parce que j'ai vraiment mis
13:09 les points sur les lits.
13:11 C'était vraiment de la torture.
13:13 Et à ce moment-là, à l'âge que j'avais,
13:15 même moi aujourd'hui, je me suis toujours posé
13:17 la question comment j'ai fait pour
13:19 résister à ça. Très peu
13:21 en ont ou osent en parler.
13:23 Parce qu'il y en a beaucoup qui sont revenus,
13:25 ils se sont transformés. Ils ne sont plus du tout les mêmes.
13:27 S'ils se sont soit réfugiés dans l'alcool,
13:29 soit dans la drogue, soit même pire.
13:31 Ça laisse supposer qu'il y a des choses
13:33 qui se sont passées ou qu'ils ont pu voir
13:35 qui ont influencé leur comportement
13:37 d'aujourd'hui. Donc il y a eu des séquelles, des séquelles énormes
13:39 pour certains. Il y en a qui s'en sont parmis.
13:41 - Ça représente quoi ce passage
13:43 de ta vie aujourd'hui ?
13:45 - Au risque de te surprendre,
13:47 j'en tire le meilleur.
13:49 J'ai appris beaucoup de choses.
13:51 Ça a forgé mon mental.
13:53 Aujourd'hui, comme je te dis,
13:55 il y a très peu de choses qui peuvent m'atteindre.
13:57 Ça m'a permis
13:59 d'aller toujours au bout de mes objectifs.
14:01 Et quand je te dis ça,
14:03 c'est que vraiment, peu importe
14:05 les épreuves que j'ai pu traverser,
14:07 problèmes financiers, problèmes de couple,
14:09 problèmes avec la justice,
14:11 il n'y a rien qui m'atteint. Rien.
14:13 C'est que je me relève tout le temps.
14:15 Chaque fois qu'il y a un truc qui vient, je me dis
14:17 "Avec ce que j'ai vécu à 11 ans, c'est de la merde."
14:19 Du coup, je poursuis.
14:21 Et puis surtout, j'ai appris énormément de choses sur la religion
14:23 parce que moi, je suis quelqu'un de pieux.
14:25 Je pratique, je lis, j'écris, etc.
14:27 Donc,
14:29 ce côté-là,
14:31 c'est la plus grande richesse
14:33 que j'en tire. Traverser
14:35 cette épreuve-là, ça m'a permis d'en endurer d'autres.
14:37 Et je pense que si je n'avais pas vécu ça
14:39 dans ma vie, je ne prends pas ça
14:41 pour quelque chose de positif
14:43 non plus. Mais je pense que ça
14:45 m'aurait fait prendre certaines dérives.
14:47 Pire que celles que j'ai pu prendre.
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