Charles BAUDELAIRE
1821 - 1867
Le crépuscule du soir
Voici le soir charmant, ami du criminel ;
Il vient comme un complice, à pas de loup ; le ciel
Se ferme lentement comme une grande alcôve,
Et l'homme impatient se change en bête fauve.
Ô soir, aimable soir, désiré par celui
Dont les bras, sans mentir, peuvent dire : Aujourd'hui
Nous avons travaillé ! - C'est le soir qui soulage
Les esprits que dévore une douleur sauvage,
Le savant obstiné dont le front s'alourdit,
Et l'ouvrier courbé qui regagne son lit.
Cependant des démons malsains dans l'atmosphère
S'éveillent lourdement, comme des gens d'affaire,
Et cognent en volant les volets et l'auvent.
A travers les lueurs que tourmente le vent
La Prostitution s'allume dans les rues ;
Comme une fourmilière elle ouvre ses issues ;
Partout elle se fraye un occulte chemin,
Ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main ;
Elle remue au sein de la cité de fange
Comme un ver qui dérobe à l'homme ce qu'il mange.
On entend çà et là les cuisines siffler,
Les théâtres glapir, les orchestres ronfler ;
Les tables d'hôte, dont le jeu fait les délices,
S'emplissent de catins et d'escrocs, leurs complices,
Et les voleurs, qui n'ont ni trêve ni merci,
Vont bientôt commencer leur travail, eux aussi,
Et forcer doucement les portes et les caisses
Pour vivre quelques jours et vêtir leurs maîtresses.
Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment,
Et ferme ton oreille à ce rugissement.
C'est l'heure où les douleurs des malades s'aigrissent !
La sombre Nuit les prend à la gorge ; ils finissent
Leur destinée et vont vers le gouffre commun ;
L'hôpital se remplit de leurs soupirs. - Plus d'un
Ne viendra plus chercher la soupe parfumée,
Au coin du feu, le soir, auprès d'une âme aimée.
Encore la plupart n'ont-ils jamais connu
La douceur du foyer et n'ont jamais vécu !
► Un petit don :
https://fr.tipeee.com/marc-quenehen-le-divin-chauve
1821 - 1867
Le crépuscule du soir
Voici le soir charmant, ami du criminel ;
Il vient comme un complice, à pas de loup ; le ciel
Se ferme lentement comme une grande alcôve,
Et l'homme impatient se change en bête fauve.
Ô soir, aimable soir, désiré par celui
Dont les bras, sans mentir, peuvent dire : Aujourd'hui
Nous avons travaillé ! - C'est le soir qui soulage
Les esprits que dévore une douleur sauvage,
Le savant obstiné dont le front s'alourdit,
Et l'ouvrier courbé qui regagne son lit.
Cependant des démons malsains dans l'atmosphère
S'éveillent lourdement, comme des gens d'affaire,
Et cognent en volant les volets et l'auvent.
A travers les lueurs que tourmente le vent
La Prostitution s'allume dans les rues ;
Comme une fourmilière elle ouvre ses issues ;
Partout elle se fraye un occulte chemin,
Ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main ;
Elle remue au sein de la cité de fange
Comme un ver qui dérobe à l'homme ce qu'il mange.
On entend çà et là les cuisines siffler,
Les théâtres glapir, les orchestres ronfler ;
Les tables d'hôte, dont le jeu fait les délices,
S'emplissent de catins et d'escrocs, leurs complices,
Et les voleurs, qui n'ont ni trêve ni merci,
Vont bientôt commencer leur travail, eux aussi,
Et forcer doucement les portes et les caisses
Pour vivre quelques jours et vêtir leurs maîtresses.
Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment,
Et ferme ton oreille à ce rugissement.
C'est l'heure où les douleurs des malades s'aigrissent !
La sombre Nuit les prend à la gorge ; ils finissent
Leur destinée et vont vers le gouffre commun ;
L'hôpital se remplit de leurs soupirs. - Plus d'un
Ne viendra plus chercher la soupe parfumée,
Au coin du feu, le soir, auprès d'une âme aimée.
Encore la plupart n'ont-ils jamais connu
La douceur du foyer et n'ont jamais vécu !
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ÉducationTranscription
00:00 Le crépuscule du soir de Charles Baudelaire
00:04 Voici le soir charmant, ami du criminel.
00:09 Il vient comme un complice à pas de loup.
00:12 Le ciel se ferme lentement comme une grande alcove
00:17 et l'homme impatient se change en bête fauve.
00:20 Ô soir, aimable soir, désiré par celui dont les bras sans mentir peuvent dire
00:28 « Aujourd'hui, nous avons travaillé. »
00:31 C'est le soir qui soulage, les esprits qui dévorent une douleur sauvage,
00:36 le savant obstiné dont le front s'alourdit et l'ouvrier courbé qui regagne son lit.
00:42 Cependant, les démons malsains dans l'atmosphère s'éveillent lourdement comme des gens d'affaires
00:49 et cognent en volant les volets et le vent, à travers les lueurs qui tourmentent le vent.
00:54 La prostitution s'allume dans les rues, comme une faux-minière elle ouvre ses issues.
00:59 Partout, elle se fraye un occulte chemin ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main.
01:04 Elle remue au sein de la cité de fange comme un verre qui dérobe à l'homme ce qu'il mange.
01:09 On entend, ça et là, les cuisines siffler, les théâtres glapir, les orchestres gonfler,
01:15 les tables d'hôtes dont le jeu fait les délices s'emplissent de catins et d'escrocs, leurs complices.
01:22 Et les voleurs qui n'en y trêvent ni merci vont bientôt commencer leur travail, eux aussi,
01:28 efforcer doucement les portes et les caisses pour vivre quelques jours et vêtir leur maîtresse.
01:35 Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment et ferme ton oreille à ce rugissement.
01:41 C'est l'heure où les douleurs des malades s'y grissent, la sombre nuit les prend à la gorge.
01:47 Ils finissent, leurs destinées vont vers le gouffre commun.
01:51 L'hôpital se remplit de leurs soupirs.
01:53 Plus d'un ne viendra plus chercher la soupe parfumée au coin du feu le soir auprès d'une âme aimée.
02:00 Encore la plupart n'ont-ils jamais connu la douceur du foyer et n'ont jamais vécu.
02:07 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
02:10 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org