Céline Pina - "Hanouka à l'Élysée : comment on défend la laïcité quand Macron se comporte ainsi ?"
L'édito de Céline Pina, chaque vendredi à 8h10
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Transcript
00:00 - A 8h13, Céline Pina, bonjour. - Bonjour.
00:02 - Je le disais, vous êtes partagée sur l'initiative d'Emmanuel Macron
00:06 qui a allumé des bougies hier soir pour Hanoukka, c'est la fête juive, dans la cour de l'Elysée. Pourquoi ?
00:12 - Alors je suis d'autant plus mal à l'aise que finalement dans un contexte de montée de l'antisémitisme,
00:18 le fait que le président choisisse un symbole fort pour montrer à quel point les Français de confession juive
00:24 sont chers à la France était nécessaire.
00:27 Il eût pu par exemple aller se recueillir devant l'astelle du Veldiv,
00:31 que l'islamiste qui a tué le jeune allemand souhaitait profaner par haine antisémite.
00:35 - Alors pourquoi cette gêne ?
00:37 - Parce que dans une société fracturée comme la nôtre, où les questions religieuses,
00:41 instrumentalisées notamment par l'islam politique, prennent une importance mortifère,
00:46 comment vont réagir les représentants des autres religions
00:49 à qui on oppose la laïcité pour expliquer que les symboles religieux n'ont pas leur place au sein de la République ?
00:55 Comment est-ce qu'on défend la laïcité quand on se comporte ainsi ?
00:58 - Vous craignez que cela n'ouvre la porte à toutes les revendications, c'est ça ?
01:02 - Oui, si une mosquée se fait taguer ou que ses fidèles se font attaquer,
01:05 il fera quoi notre président ? Il sacrifiera un mouton pour l'Aïd ?
01:08 - Bon, vous êtes un peu sarcastique là tout de même.
01:10 - Pas seulement. Tout comme les victimes d'attentats méritent mieux que des nounours et des bougies de la part de leur gouvernement,
01:16 même déposées sous forme de paroles martiales désincarnées et de comparsions larmoyantes,
01:21 les Juifs de France méritent mieux que des symboles qui peuvent encore se retourner à terme contre eux.
01:26 Ils méritent la sécurité, que leurs enfants puissent aller à l'école publique,
01:30 qu'ils ne représentent plus la plus petite communauté de France, 0,6%,
01:34 mais aussi la plus victime des actes antireligieux, plus de 1700 en deux mois,
01:39 quand les autres religions catholiques et musulmanes sont autour de 1000 actes antireligieux en un an
01:45 pour la catholique et 170 en un an pour la religion musulmane.
01:50 Ce qui a boosté l'euphorie antisémite, et en plus le fait que les Juifs ont été victimes d'un massacre atroce en Israël,
01:57 parce qu'ils étaient Juifs.
01:59 Des femmes, des enfants, des hommes, des bébés ont été torturés, abattus,
02:03 et le résultat est, en Europe, une explosion des actes antisémites,
02:09 et un président qui explique de surcroît que par souci de neutralité,
02:13 il ne peut participer à une marche destinée à lutter contre le réveil de cet antisémitisme,
02:20 et tout ça pour à la fin faire allumer par le grand rabbin de France la première bougie de Hanoukka dans la cour de l'Elysée.
02:26 Comment est-ce qu'on peut s'y retrouver ?
02:28 - Oui, quel est le risque alors ?
02:29 - Que tout cela ne soit que le énième pétard symbolique mouillé.
02:33 Si l'on ne pose pas un diagnostic sur le fait que cette explosion de violences antisémites
02:38 est liée à un travail de radicalisation politique qu'organisent chez nous l'extrême gauche et l'islamisme,
02:43 alors on ne peut agir.
02:45 Pour combattre concrètement l'antisémitisme, il faut dire comment il se manifeste et à quoi il est lié.
02:51 Et en fait, il est lié à un réveil de la religion,
02:54 à travers le militantisme sur le voile, le prosélytisme religieux, le refus de l'intégration,
03:00 la détestation de la France vue comme esclavagiste et colonialiste,
03:03 la justification de la violence politique,
03:06 l'importation du conflit israélo-palestinien, idéalisé de façon messianique,
03:10 bref, face à cela, il est temps d'arrêter de s'aveugler.
03:14 - C'est ça. Et comment vous expliquez alors le mélange de déni et de tentative de réveiller des symboles,
03:20 donc même de façon maladroite ?
03:22 - Je ne doute pas que ces personnes veulent réellement bien faire,
03:25 mais je pense qu'elles ont déjà perdu le contrôle.
03:28 Elles pensent que leur pouvoir est faible et que trop d'autorité fera éclater une société déjà fracturée.
03:34 Ils essaient donc juste de gagner du temps et ils pallient l'impuissance par des mots et des images.
03:39 Le problème, c'est que la réalité est en train de rattraper tout le monde.
03:43 Notre modèle de société n'est pas parfait, certes, notre histoire a sa part d'ombre, oui,
03:47 mais quel est le modèle de société des islamistes, de l'extrême gauche ?
03:51 C'est Daesh ? C'est l'Iran ? C'est la terreur ?
03:54 Que font-ils concrètement des libertés individuelles, de l'égalité en droit, de la laïcité ?
03:59 Pour agir, il faut commencer par avoir une doctrine qui permette à l'État de se positionner
04:05 et de lutter contre ce qui attaque sa légitimité,
04:08 c'est-à-dire ce qui attaque les principes et idéaux sur lesquels il est bâti.
04:12 Ce combat est politique, judiciaire, policier, éducatif, culturel et surtout culturel.
04:17 Il commence par poser des mots, pas pour faire joli, pour reconnaître le réel.
04:22 Ce serait déjà un grand pas.
04:23 Eh bien avec Elisabeth Born et son sentiment d'insécurité, le moins qu'on puisse dire, c'est que ça commence mal.
04:29 - Oui, merci Céline Pina.