« Ce n’est pas en dépenser toujours plus qui résoudra les problèmes de notre école »

  • l’année dernière
Le rapporteur Olivier Paccaud (LR) a exprimé la position de la commission des finances du Sénat sur le budget 2024 de l'Education nationale, ce 1er décembre 2023.

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Transcript
00:00 -M. le Président, M. le ministre, M. le rapporteur pour avis,
00:04 en rentrant dans cet hémicycle, M. le ministre,
00:06 vous avez peut-être croisé le regard d'Albattre,
00:08 d'un de vos éminents et peut-être même mythique prédécesseurs,
00:12 Jules Ferry.
00:13 Si nous sommes en 2023, notre école, notre société,
00:16 notre République reste profondément marquée
00:19 par les idéaux des pères fondateurs de la IIIe République,
00:22 ceux d'une société émancipatrice pour tous,
00:26 où le progrès, la justice et l'harmonie sociale
00:29 s'ancrent d'abord par l'école,
00:32 celle des hussards noirs chers à Charles Péguy,
00:34 obéis, respectés, admirés,
00:36 où les querelles des hommes ne pénétraient pas,
00:39 où la transmission du savoir, l'instruction, la méritocratie,
00:43 l'égalité des chances, partout et pour tous,
00:46 constituait des points cardinaux.
00:49 Hélas, cet âge d'or est bien lointain.
00:52 Et aujourd'hui, bien tristement,
00:56 l'école rime avec harcèlement, violence, échecs,
01:01 laïcité bafouée, cher Max Brisson,
01:04 démission de professeurs, crise du recrutement,
01:07 classement PISA médiocre,
01:09 malgré 850 000 enseignants dévoués,
01:12 mais souvent prisonniers d'un système à bout de souffle.
01:15 Monsieur le ministre, votre héritage est bien compliqué.
01:19 Vous êtes donc athlée à la tâche, sans tabou,
01:23 et avec un talent médiatique certain.
01:27 Néanmoins, seuls les actes comptent,
01:30 res non verba.
01:32 Or, avec la baguette, non pas magique, mais budgétaire,
01:36 vous avez un outil précieux
01:37 pour remettre en marche notre école en panne.
01:41 Qu'en est-il donc ?
01:42 Un budget de 63,5 milliards, le premier de l'Etat.
01:46 63,5 milliards d'euros, bien sûr.
01:48 En hausse de 3,9 milliards, soit 6,5 %, comme l'an dernier.
01:53 Un effort notable qui affirme d'abord
01:55 une volonté de revaloriser la rémunération des enseignants.
01:59 Un impératif, car sans professeur, pas d'école.
02:03 Or, la fonte des vocations,
02:04 le nombre sidérant de démissions traduit un fort malaise.
02:08 Le plus beau métier du monde n'attire plus,
02:10 parce que de plus en plus difficile, mal considéré, mal payé,
02:14 nettement moins que la plupart des autres enseignants européens,
02:17 mais aussi que la plupart des autres salariés français
02:20 à diplôme équivalent.
02:22 Cette dynamique de rattrapage repose en premier lieu
02:24 sur celle du point d'indice dont bénéficient tous les fonctionnaires.
02:28 2,5 milliards quand même sur ce budget,
02:30 ainsi que sur certaines primes d'attractivité,
02:33 exceptionnel des pouvoirs d'achat,
02:35 mais aussi sur le doublement des indemnités de suivi
02:38 et d'accompagnement ou d'orientation des élèves,
02:41 les fameuses ISOE et ISAE,
02:43 qui atteindront 2 250 euros bruts par an désormais.
02:49 Vous avez enfin proposé un pacte aux enseignants.
02:52 Travailler plus pour gagner plus,
02:54 c'est peut-être votre petit côté sarkoziste.
02:57 Et il est trop tôt pour tirer un bilan objectif de ce dispositif,
03:00 qui peut s'avérer efficace pour les remplacements de courte durée
03:04 et qui offre des soeurs supplémentaires bien payées.
03:06 Néanmoins, l'accueil ne fut guère enthousiaste,
03:10 et si le ministère annonçait initialement
03:12 une enveloppe de 900 millions d'euros,
03:13 elle a été ramenée à 628 millions.
03:16 La promesse présidentielle d'une revalorisation
03:18 de 10 % des enseignants était tenue.
03:20 Presque. Pas pour tout le monde, cependant,
03:22 notamment pour les enseignants en fin de carrière.
03:25 Par ailleurs et malheureusement, l'inflation a contribué
03:27 à éroder l'impact de ces louables efforts budgétaires.
03:31 Autre curseur à la hausse est fortement
03:34 les crédits consacrés à l'école inclusive.
03:37 Près de 4,5 milliards contre 3,8 milliards en 2023,
03:42 avec le recrutement de nouveaux accompagnants d'élèves
03:44 en situation de handicap,
03:46 dont le nombre atteindra près de 125 000,
03:49 avec une rémunération améliorée.
03:52 De 2006 à 2023,
03:55 le nombre d'élèves en situation de handicap scolarisé
03:57 en milieu ordinaire a quadruplé,
03:59 passant de 118 000 à 478 000.
04:02 C'est évidemment une bonne chose.
04:05 Néanmoins, si le quantitatif est indéniable,
04:09 n'est-ce pas au détriment du qualitatif ?
04:13 Ainsi, quid des élèves gravement perturbés
04:16 ou présentant des troubles du comportement ?
04:18 Ce problème devenu majeur
04:21 est malheureusement totalement ignoré.
04:23 Et ce n'est pas l'article 53 transformant les PIAL,
04:27 les Pôles inclusifs d'accompagnement localisé en PASSE,
04:30 Pôle d'appui à la scolarité, qui apportera la solution.
04:33 L'organisation de l'école inclusive mérite un débat
04:37 et peut-être même une loi à part entière.
04:40 Des moyens supplémentaires sont aussi orientés
04:42 vers les lycées professionnels pour les rendre plus attractifs,
04:44 avec 400 millions d'euros
04:46 pour les gratifications accordées aux élèves en stage,
04:49 ainsi que vers l'enseignement agricole,
04:51 avec une hausse des crédits de 100 millions d'euros,
04:54 soit 6,3 %.
04:56 Mais le budget de l'Education nationale, monsieur le ministre,
04:59 ne saurait être le tonneau des Danaïdes.
05:02 Ce n'est pas dépenser toujours plus
05:04 qui résoudra les problèmes de notre école.
05:07 Il est temps de repenser en profondeur l'organisation,
05:09 le fonctionnement de notre système éducatif
05:11 de moins en moins performant
05:13 et de moins en moins équitable, surtout.
05:15 Permettez-moi de pointer ainsi la porcelaine de vos contradictions.
05:19 Vous vous glorifiez des bons résultats des dédoublements
05:21 en réseau d'éducation prioritaire
05:24 tout en accélérant les fermetures de classes
05:26 avant tout en zone rurale et périurbaine,
05:28 2 300 cette année.
05:30 Et nous arrivons ainsi à des paradoxes vécus comme des injustices,
05:33 et par les enseignants et par les parents d'élèves concernés.
05:36 À moins de 5 km de distance,
05:37 vous pouvez ainsi avoir d'un côté des classes de CP
05:41 ou CE1 à 12 élèves,
05:43 et de l'autre des classes de double niveau,
05:45 CP, CE1, à 30 élèves.
05:47 C'est pas acceptable.
05:49 Alors que la problématique sociale n'est pas le triste monopole
05:52 de certains quartiers,
05:53 la ruralité et les zones périurbaines
05:56 sont les maillots faibles et oubliés
05:58 du soutien aux élèves en difficulté.
06:00 Et ce n'est pas le dispositif des territoires éducatifs ruraux.
06:04 Chichement doté de 5,5 millions d'euros
06:07 seulement qui inversera la tendance.
06:10 Quand donc réviserez-vous la carte de l'éducation prioritaire ?
06:13 Chantier annoncé, mais jamais réalisé par vos prédécesseurs.
06:17 Un rééquilibrage des périmètres et des effectifs
06:19 doit permettre de mieux répartir les moyens
06:22 et de s'attaquer vraiment
06:23 à l'un des points très faibles de notre école,
06:25 notre taux d'encadrement, un des plus mauvais d'Europe.
06:28 Autre chantier incontournable,
06:30 celui de la formation des enseignants,
06:32 dont la sous-consommation chronique des crédits,
06:35 par ailleurs soulignée avec acuité par le rapporteur général,
06:38 interroge.
06:39 Monsieur le ministre,
06:40 soucieux de l'efficacité de la dépense publique
06:43 qui est loin d'être au rendez-vous dans notre système éducatif,
06:46 la Commission des finances a néanmoins voté
06:48 votre projet de budget,
06:50 avant tout pour soutenir les indispensables efforts salariaux
06:54 envers nos enseignants.
06:55 Mais puisse votre brio devant les micros
06:58 et votre ambition politique
07:00 ne pas vous détourner des profondes réformes structurelles
07:03 qu'attend notre école.
07:05 Je vous remercie.
07:06 (Générique)
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