Aurore Dumain, criminologue, présidente de l’association d’aide aux victimes du Loiret (AVL)
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00:00 - Il est 8h moins 10, Clémentine, c'est le début aujourd'hui du procès de Monique Olivier,
00:04 la veuve et complice du tueur en série Michel Fourniret, jugée dans trois dossiers,
00:08 notamment celui de la petite Estelle Mouzin.
00:11 Et nous nous demandons ce matin ce qui nous fascine autant dans ces grandes affaires criminelles.
00:15 Est-ce que c'est votre cas ? Est-ce que vous les suivez activement ?
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00:20 Au 02 38 53 25 25. Inscrivez-vous tout de suite.
00:24 - Et nous en parlons avec Aurore Dumain. Bonjour.
00:27 - Bonjour à tous. - Présidente de l'association d'aide aux victimes du Loiret,
00:31 vous avez une formation de psychologue complétée par une option en criminologie.
00:35 C'est l'étude des crimes. Pourquoi en France on est autant passionné par ce genre d'affaires ?
00:41 - Alors c'est vrai que déjà les médias jouent un grand rôle parce que c'est des affaires
00:45 qui sont souvent très médiatisées avec parfois des victimes vulnérables
00:49 ou alors des grands criminels qui ont déjà eu plusieurs victimes à leur actif.
00:55 Donc forcément on en parle beaucoup. Et puis c'est un petit peu la partie qu'on pourrait refouler de nous
01:02 parce qu'on a peut-être tous rêvé à un moment donné de tuer son mari parce qu'il nous énerve aujourd'hui
01:08 ou voilà on a en colère contre quelqu'un de passer à l'acte.
01:13 Mais le principe de la réalité fait que la plupart des personnes ne passent pas à l'acte
01:17 et ça reste vraiment seulement de l'inconscient.
01:20 - Et finalement cette fascination pour les crimes les plus sordides,
01:24 ça montre en fait ce qui est possible, les pulsions qui peuvent arriver
01:27 mais qui sont freinées finalement par notre conscience.
01:30 - Oui, oui, tout à fait parce que la plupart des personnes ne passeront jamais à l'acte.
01:33 C'est quand même une infime partie des personnes à l'heure actuelle
01:37 qui vont jusqu'au meurtre, jusqu'au viol.
01:41 Ça reste quand même assez, même si on en parle beaucoup, ça reste quand même assez minoritaire.
01:47 - Et vous le disiez, il y a une part qui vient des médias.
01:50 On sait que la télévision, les podcasts produisent énormément de contenu
01:54 sur les faits divers, sur les grandes affaires criminelles.
01:56 Dernier en date par exemple la série "Sombre" sur France Télévisions
02:01 qui a fait des cartons à un million de vues en moins de trois jours sur la plateforme.
02:05 Est-ce que ce type de contenu ça alimente finalement le goût des Français
02:10 pour les faits divers, les affaires criminelles ?
02:12 - Alors oui, oui, bien sûr ça les alimente et puis on a besoin aussi de se rendre compte
02:17 que le monstre c'est la personne qu'on va voir à la télé
02:19 et ce n'est pas nous-mêmes ou alors notre voisin.
02:22 Ça met quand même une certaine distance.
02:24 Et puis on le voit là récemment, il y a quand même pas mal de professionnels et scientifiques
02:28 qui ont l'air de dire que cette mise à distance permet vraiment de se dire
02:33 "Bon bah ok, ça ne fait pas partie de moi et c'est vraiment l'autre qui est le monstre".
02:38 Et puis aussi on le voit au niveau des mythes.
02:43 Les mythes qu'on pouvait raconter quand on était enfant, finalement ça devient des mythes modernes.
02:48 - Quel genre de mythes ? Un peu comme des légendes urbaines ?
02:52 - Oui tout à fait, où on se dit est-ce que ce criminel-là il était un criminel né ?
02:56 Est-ce qu'il était voué à tuer forcément ?
03:00 Ou est-ce que c'est venu au fil du temps, au fil de ses rencontres,
03:04 au fil de ce qu'il a pu vivre au quotidien ?
03:07 - Oui ça interroge finalement sur ce qui est possible dans la psychologie humaine.
03:11 Avec nous également Pascal Nourrisson, bonjour.
03:14 - Bonjour.
03:15 - Auteur de plusieurs livres sur les affaires criminelles du Loir-et-Cher,
03:19 notamment ce livre intitulé "Les grandes affaires criminelles du Loir-et" aux éditions de Boré.
03:25 Comment vous en êtes venu à écrire ces livres ? Est-ce que c'est par passion ?
03:29 - Alors pas du tout, moi je suis plutôt historien local
03:33 et c'est lors de mes recherches que j'ai découvert aux archives les siéryues
03:37 et je me suis intéressé à une affaire criminelle qui avait lieu sur Blois
03:40 parce que moi je suis bézoie d'origine.
03:42 Et la passion finalement de ces recherches m'a amené à effectivement
03:49 écrire beaucoup, beaucoup, beaucoup d'affaires criminelles.
03:52 - Et si vous deviez en retenir une seule, l'affaire, on va dire,
03:56 la grande affaire du Loir-et, ce serait laquelle ?
03:59 - Il y en a plusieurs, mais moi ce qui m'a marqué c'est l'assassinat
04:04 par sa femme, du maire d'Orléans, à l'époque, dans les années 50.
04:10 Ça m'avait marqué, en plus l'opinion publique avait pris fait et cause
04:15 pour la femme, puisque en plus le procès avait été délocalisé
04:19 pour éviter toutes les passions.
04:21 Mais bon, c'est vrai que ça a toujours intéressé,
04:26 les affaires criminelles ont toujours intéressé les gens.
04:29 Et comme le disait votre invitée, l'opinion publique, il est pour beaucoup.
04:34 Et les médias également.
04:36 - Et ça continue d'intéresser vos livres, il me semble qu'ils se sont très bien
04:39 vendus, ces livres sur les grandes affaires criminelles.
04:42 - Oui, les éditions de Boré, à l'époque, avaient créé cette collection nationale
04:46 et moi j'avais été sollicité justement par les éditions de Boré
04:50 pour écrire sur le Loir-et-Cher.
04:53 Et au niveau de l'impact du public, ça a été relativement un succès de librairie,
05:01 puisque en l'espace de quelques mois, les 4000 exemplaires du premier tirage
05:07 avaient été épuisés, ce qui fait que les éditions de Boré,
05:10 sentant le bon filon, m'avaient demandé d'écrire plusieurs tomes sur le Loir-et-Cher.
05:15 Effectivement, j'en ai écrit d'un tome et m'avaient demandé aussi de faire
05:19 les affaires criminelles du Loir-et-Cher et de l'Indre-et-Loire,
05:21 alors que je ne suis pas forcément originaire de ces départements.
05:25 - Et on peut les retrouver dans les meilleures librairies.
05:27 Merci beaucoup, Pascal Nourisson, d'avoir été avec nous ce matin.
05:30 - Vous êtes nos témoins de l'actu, venez participer à cet échange.
05:34 02.38.53.25.25, nous vous attendons.
05:37 Dites-nous si vous êtes fascinée ce matin par les affaires criminelles.
05:40 - Justement, horreur d'humain, c'est quoi l'affaire qui vous a fait
05:45 vous tourner vers la criminologie ?
05:47 - Alors au départ, ce qui m'a fait tourner vers la criminologie,
05:49 ce n'était pas forcément une affaire, mais plutôt l'envie de comprendre
05:53 un petit peu pourquoi justement, une personne, peut-être bien sous tout rapport,
05:57 d'un coup, va transgresser les lois et va se retrouver dans la tourmente
06:03 de ces grandes affaires et un grand criminel.
06:07 C'était vraiment la compréhension, parce qu'en psychologie,
06:10 on étudie aussi beaucoup les jumeaux.
06:13 C'est plein d'études qui sont faites pour voir comment ils se développent
06:16 et on voit aussi que finalement, deux personnes, deux jumeaux,
06:20 qui ont exactement le même ADN, vont prendre parfois
06:23 deux trajectoires totalement différentes et je me dis,
06:25 s'il y en a un qui devient un grand délinquant et l'autre un grand avocat,
06:30 par exemple, comment est-ce que ça se fait finalement ?
06:33 C'était vraiment cette envie de compréhension de la nature humaine.
06:36 - Et finalement, la question aujourd'hui, c'est vraiment l'actualité.
06:40 Monique Olivier, comment en est-elle arrivée à faire ce qu'elle a fait
06:43 ou ce qu'elle est soupçonnée d'avoir fait pour son mari, Michel Fourniret ?
06:47 Elle est jugée aujourd'hui, après une enquête du pôle Colqueys à Nanterre.
06:52 C'est important, c'est le premier procès par une enquête,
06:56 après une enquête de ce pôle-là, c'est important d'en arriver là,
06:58 d'aller jusqu'au procès, même sur ces « vieilles affaires » ?
07:02 - Oui, tout à fait, c'est primordial et je suis ravie que ce pôle puisse exister
07:07 parce que finalement, on le voit, les personnes qui peuvent commencer leur deuil,
07:12 il faut qu'elles aient des réponses et toutes ces personnes-là, finalement,
07:14 n'ont pas de réponses. Alors oui, pour la petite Estelle,
07:17 on sait maintenant, avec les déclarations qui ont été faites par Mme Olivier,
07:22 qu'effectivement, elle a bien transporté le corps avec Michel Fourniret.
07:26 Donc, on sait qu'elle est décédée, mais par contre, où est le corps ?
07:29 C'est vrai que pour entamer ce processus de deuil pour la famille, c'est impossible.
07:34 Donc, on a besoin de réponses, les personnes, même les Français ont besoin de réponses
07:37 parce que c'est des choses qu'ils ont vécues au jour le jour
07:40 et c'est important d'avoir ces réponses-là.
07:43 - Oui, ce sont des histoires qui ont été feuilletonnées.
07:45 On continue, nous, à le faire sur France Bleu Orléans et sur les antennes de Radio France.
07:49 Merci beaucoup, Aurore Dumain, d'avoir été notre invitée ce matin.
07:53 Je rappelle que vous êtes la présidente de l'association des dos victimes du Loiret,
07:58 psychologue et criminologue. Merci, bonne journée.
08:00 - Merci à vous, au revoir.