• il y a 2 ans
Maxime Chattam publie "Lux", chez Albin Michel. Le romancier imagine un monde futur où les écosystèmes se sont effondrés. Christophe Galfard, évoque la publication de "Voyage vers l'infini", chez Michel Lafon, un beau livre dans lequel il dévoile des photos du télescope James Webb. La poétesse québécoise Hélène Dorion parle de l'ensemble de son oeuvre. Son recueil de poésie "Coeurs, comme livres d'amour" vient de paraître chez Bruno Doucey. Marion Montaigne publie "Nos mondes perdus", chez Dargaud et signe son livre le plus personnel. Mathieu Simonet, enfin, publie "La Fin des nuages", chez Julliard, où il évoque la mort de son mari et le statut des nuages. Enfin, Augustin Trapenard a rencontré Thomas Pesquet à la BNF à l'occasion de la parution de son autobiographie "Ma vie sans gravité", publié chez Flammarion.

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Transcription
00:00 Moi, la science-fiction, j'en suis pas capable, c'est pas un domaine dans lequel je me projette.
00:04 Moi, ce qui m'intéressait, c'était de parler de nous, maintenant, de notre société.
00:07 Simplement, j'avais envie de prendre tout ce qui est un peu déréglé, tout ce qui est assez angoissant,
00:13 et de le pousser un tout petit peu pour pouvoir mettre côte à côte tous ces éléments,
00:18 et dire voilà, ça c'est le portrait de notre société aujourd'hui, dans ce cas-là, d'anxiogène.
00:21 Et donc, réfléchissant ensemble à cet avenir proche, donc je vais situer l'intrigue dans un avenir très très très proche.
00:26 - Mais alors, qui parle Maxime Chatam ? Parce que ça commence quand même sur une tempête diluvienne,
00:30 et sur des parents qui s'inquiètent de ne pas voir leurs enfants rentrer.
00:34 Il y a cette forme de peur et de culpabilité. Est-ce que c'est le citoyen qui parle ? Est-ce que ce ne serait pas le père ?
00:38 - C'est les deux. En fait, le livre, il est né de cette intention-là.
00:41 C'est-à-dire que moi, j'avais ces questions en tant que père.
00:43 Quel est le monde que je lègue à mes enfants ? Et qu'est-ce que je fais dans ce monde ?
00:46 Moi, j'ai une conscience écologique, mais je ne suis pas un activiste revendiqué.
00:51 Qu'est-ce que je fais pour mes enfants dans ce monde, avec tout ce qu'on sait de dysfonctionnel, et notamment sur le climat ?
00:58 Et je me suis dit, mais en fait, je vais commencer le livre de cette manière-là, avec une mère qui est angoissée pour sa fille,
01:02 qui est aux prises avec des éléments effroyables, c'est une tempête dans Paris,
01:06 et ça va incarner mon angoisse à moi, et ça va me permettre de parler d'un de ces sujets qui va égrener le roman,
01:13 qui est le dérèglement climatique, ce qu'on peut en faire, ce que ça raconte aussi de notre inaction politique,
01:19 mais aussi, parce qu'à un moment, les politiciens, ils sont certes avec des visions très politiciennes, très court-termistes,
01:25 mais ils sont aussi élus par les citoyens, donc c'est des choix.
01:28 Et toutes ces questions-là, j'essayais de les mettre bout à bout dans un récit qui devait être avant tout un thriller,
01:33 mais en même temps un thriller dans lequel, oui, je m'exprime moi, en tant que père.
01:36 Mais vous savez, Maxime Chata, moi je vous ai beaucoup lus, et j'ai toujours eu très très peur quand je vous lisais.
01:40 Et là, je me suis dit, avec ces peurs collectives, ce par quoi commence le roman, ça va être pareil.
01:44 J'ai été très surpris en réalité. Ben oui, j'ai été très surpris, c'est un livre qui ne vous ressemble pas beaucoup.
01:49 Oui, par rapport, oui.
01:50 Ben oui, et c'est un livre qui commence notamment au tout début en épigraphe par la définition du mot espoir.
01:55 Et l'espoir sera extrêmement important. Et vous écrivez que l'espoir, c'est aussi ce qu'on attend.
02:00 Oui, c'est ce qu'on attend, c'est ce qu'on fait, parce que l'espoir, il faut le créer.
02:04 L'espoir, il ne vous tombe pas dessus comme ça, sans raison.
02:07 Et tout le roman raconte en fait cette trajectoire vers l'espoir.
02:11 C'est l'histoire d'une mère et sa fille, chacune avec leur parcours de vie, leurs angoisses, elles sont différentes, bien sûr, leurs attentes.
02:18 Et je parle du monde avec tout ce qui, moi, en fait, me fait peur.
02:24 Je crois que c'est le premier roman que j'écris où je parle de mes propres peurs.
02:27 Et je me suis rendu compte que c'est un roman qui ne fait pas peur.
02:30 Ça raconte beaucoup de choses, je crois.
02:32 D'habitude, je joue avec les peurs des autres, et moi, je ne me fais pas peur.
02:36 Et cette fois-ci, j'ai plus eu envie justement de montrer la société, son dysfonctionnement,
02:41 le problème de communication, on n'arrive plus à se parler, le problème de nuances dans la communication,
02:45 le problème générationnel parfois, tout ce qu'on connaît, tout ce qu'on voit, qu'on met en avant.
02:50 Ça me fait penser à de très beaux mots d'Hélène Dorion quand elle parle du hurlement de nos peurs.
02:55 Tout à fait, c'est vrai. Et en fait, toutes les peurs sont là, sont réunies, des peurs collectives, des peurs individuelles aussi,
03:03 des secousses violentes intérieures. Il y a un moment donné où, enfin, sur la plateforme,
03:09 on dirait que ces problématiques-là se retrouvent aussi sur la plateforme.
03:13 Donc, c'est aussi dans cette... Peu importe où on va, on emporte avec nous ce qui est là,
03:19 les problématiques contemporaines qui sont là, oui. Et c'est vrai que ça ne fait pas peur.
03:23 Moi, je ne lis pas de romans qui me font peur. Et alors, j'avais un petit peu... Je craignais un peu.
03:28 - Vous aviez peur. - J'avais un peu peur de vous lire.
03:30 Mais non, j'ai vraiment adoré. Tout à fait.
03:32 - Ce que je voulais expliquer quand même, sans tout dévoiler, c'est qu'en fait, cette boule de lumière qu'imagine Maxime Chatham,
03:37 elle cristallise surtout beaucoup de questions. C'est un grand livre de questions.
03:40 Et pour tenter de répondre à ces questions, le gouvernement français va créer une commission
03:45 dans laquelle se retrouvent embarquées ces deux héroïnes, une jeune femme qui s'appelle Romier et sa mère qui s'appelle Zoé,
03:50 et qui est romancière. Leur rôle, c'est d'imaginer des scénarios qui puissent expliquer ce que serait cette sphère lumineuse.
03:56 Parce que cette commission, elle fait appel à des scientifiques, mais aussi à des scénaristes, à des musiciens, à des philosophes, à des théologiens, à des artistes.
04:04 Pour une raison que vous expliquez et vous dites, pour penser différemment, pour porter sur la société, sur le monde, un regard atypique.
04:13 Et c'est intéressant de vous interroger, Maxime Chatham, sur le regard spécifique qu'a l'artiste sur le monde, et en particulier le romancier.
04:20 - Oui, parce qu'on n'a pas une formation qui est la même que des scientifiques qui vont se regrouper à un endroit pour observer un phénomène.
04:25 Ils vont y aller avec leur éducation, leur académisme parfois, leurs outils.
04:32 Et aussi performant soit-il, c'est une façon de voir les choses.
04:36 Mais demander à des gens dont c'est absolument pas le métier de donner un point de vue, c'est parfois très enrichissant.
04:41 Et quand il s'agit d'un phénomène inconnu que personne ne peut comprendre, c'est amusant de poser des gens qui n'ont rien à voir avec le problème,
04:48 et d'écouter aussi ce qu'eux ont à raconter de leur perception de ce qu'on voit.
04:52 - Vous écrivez, ce n'est pas votre capacité d'analyse qui est attendue, mais votre fertilité émotionnelle.
04:58 - Oui, c'est intéressant. C'est aux émotions, alors ça je veux dire, ce n'est pas tout à fait de moi, ça vient de ma femme.
05:02 Moi j'écris beaucoup avec l'intention, avec une démarche très structurée, presque scientifique pour le coup.
05:08 Les chapitres, les personnages, il faut qu'il y ait un peu de tout dans le chapitre, que ça soit équilibré,
05:12 que ça évite de digérer toute l'information que moi, la documentation que parfois j'ai assimilée avant.
05:18 Une fois que j'ai ça, j'ai mes personnages, et mon épouse m'a toujours rappelé, n'oublie jamais l'émotion,
05:23 c'est quand même le cœur de tout, de ce qu'on est, des êtres humains, et ça m'a, pour le coup,
05:28 moi, emmencé cette idée-là, cette pensée que l'émotion est primordiale, et c'est un livre qui parle de ça, de l'émotion,
05:34 de comment est-ce que face au regard parfois nécessaire, scientifique, d'un phénomène inconnu,
05:38 l'émotion peut avoir au moins autant à raconter de ce qu'on ne connaît pas.

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