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C'était il y a 60 ans jour pour jour : John Fitzgerald Kennedy était assassiné à Dallas aux États-Unis. Notre invité est l'un des premiers journalistes français à avoir couvert la mort du président américain. C'est un ancien patron de RTL et un amoureux des USA : Philippe Labro, dont les "Écrits américains" sont en librairies, rassemblés pour la première fois chez Gallimard dans la collection Quarto. Plus de 1.100 pages sur sa vie américaine en quelque sorte.
Regardez L'invité de RTL Soir du 22 novembre 2023 avec Marion Calais et Julien Sellier.

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00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 Julia Sellier, Marion Calais et Cyprien Sini.
00:07 RTL bonsoir jusqu'à 20h.
00:09 Et RTL bonsoir à 18h40. La suite avec notre invité maintenant. C'était il y a 60 ans, jour pour jour, John Fitzgerald Kennedy
00:17 était assassiné à Dallas.
00:19 Bonjour mesdames et messieurs, excusez-moi je suis essoufflé mais il y a 10 ou 15 minutes une chose tragique de ce que nous savons pour
00:26 le moment est arrivé à Dallas.
00:28 Des coups de feu tirés à Dallas au Texas contre la voiture du président Kennedy, le président Kennedy qui s'est effondré grièvement
00:35 blessé à la tête. De Dallas se flash le président Kennedy est mort à 13h.
00:40 Notre invité ce soir est l'un des tout premiers journalistes français à avoir couvert la mort du président américain.
00:50 C'est un ancien patron ici à RTL, un amoureux des Etats-Unis. Bonsoir Philippe Labreau.
00:54 Bonsoir.
00:54 Merci d'être avec nous pour vous accueillir notre spécialiste littérature. Bernard Lehu nous a rejoint. Bonsoir Bernard.
00:59 Bonsoir. Et oui Philippe Labreau, vos écrits américains sont rassemblés pour la première fois chez Gallimard dans la collection
01:06 Coarto. Plus de, voilà c'est un joli pavé, plus de 1000 pages, des textes journalistiques, un remarquable
01:13 carnet biographique et vos cinq livres
01:16 inspirés par l'Amérique.
01:18 Notamment on a tiré sur le président. On a tiré sur le président cette phrase que vous entendez sur un campus du Connecticut
01:26 alors que vous êtes en reportage à l'époque pour 5 colonnes à la une. Elle vous
01:30 saisit cette phrase il y a 60 ans. Elle me saisit tellement que je laisse tomber
01:35 l'entretien que j'avais avec un prof de lettre français pour un document
01:39 sur 5 colonnes à la une. Je laisse tomber l'équipe de 5 colonnes à la une. Ils m'en ont voulu assez longtemps.
01:43 Je prends leur voiture, ils m'en ont encore plus voulu.
01:47 Fou encore à New York après avoir téléphoné à mon journal François, auxquels j'appartenais plus que 5 colonnes,
01:52 et qui m'ont dit tu laisses tomber la télé c'est un mensuel, tu pars. Et je me suis retrouvé le samedi matin
01:58 à Dallas par le premier avion. J'ai jamais volé dans un avion aussi silencieux.
02:03 Tout le monde était là avec les journaux, avec la une, Kennedy has been shot, President shot. Et arrivé là-bas
02:08 je raconte toujours ça, je monte dans un taxi pour aller très vite au commissariat de police où aux autres étaient emprisonnés
02:15 et le conducteur
02:17 typique texan, des roues flaquettes, le Stetson sur la tête et des
02:21 bottes à talons biseautés, je lui dis quelle tragédie quand même non ? Et il me répond "It was about time"
02:27 ce qui veut dire il était grand temps.
02:30 - A Dallas vous vous retrouvez au milieu de 300 journalistes américains, vous apercevez d'ailleurs la fenêtre du QG de la police
02:36 Lee Harvey Oswald arrêtée pour le meurtre de JFK. Et puis vous allez vous retrouver à quelques mètres de Oswald lorsqu'il est
02:41 escorté en dehors du QG. Et là vous dites qu'il avait un air de Ryan Gosling dans le film Drive.
02:46 - Oui, enfin il était moins beau.
02:49 Il avait aussi pris quelques coups dans la salle de cinéma où les policiers avaient réussi à le récupérer.
02:57 Mais c'est pas tellement ça qui m'a frappé. D'abord j'avais le même âge que lui, c'était un gamin, il avait 24 ans.
03:03 C'était cette espèce de petit rictus
03:05 à la lèvre gauche comme ça qui était sui... mon intuition me faisait croire que c'était
03:11 d'un homme qui se disait "j'en sais plus que vous tous, je suis en ce moment l'homme le plus important du monde".
03:17 Et c'est ça qu'il voulait. Quelques temps auparavant il avait dit à sa femme Marina, avec qui il s'entendait très mal,
03:22 "tu verras un jour je serai l'homme le plus célèbre du monde, je ferai quelque chose qui fera
03:26 bousculer et basculer le monde".
03:28 - Alors Philippe Labraud, depuis 60 ans vous cherchez à savoir, à comprendre qui a tué Kennedy, surtout pourquoi les complotistes depuis 60 ans
03:37 en font leur choux gras. Pour vous il n'y a aucun doute, Oswald est bien le meurtrier.
03:43 - Oui, encore que,
03:44 encore une fois j'attends la preuve du contraire. Voilà c'est ça ma phrase, c'est la preuve du contraire. J'ai des
03:50 notions, je ne suis pas le seul, il y a beaucoup d'historiens américains
03:54 très connus, Robert Dallek, Robert Caro,
03:57 William Manchester qui ont écrit des livres entiers, des volumes entiers, qui disent la même chose. Ça s'appelle la tragédie sans raison.
04:03 Pour moi c'est un concours de circonstances comme il en arrive une fois tous les mille ans.
04:07 Mais je crois que c'est lié à Oswald et pas seulement. Les faits sont là.
04:11 Il a ses emprunts sur le fusil, il quitte en courant l'immeuble, il va chez lui, qu'est ce qu'il fait ? Il prend un pistolet.
04:19 Bon, c'est pas innocent. Il court, il va vers la station
04:22 d'autobus qui amène au Mexique parce qu'il essaie de fuir le Mexique. Et là sur son chemin il y a un flic,
04:29 une patrouille, qui avait déjà le signalement du suspect, qui l'arrête pour contrôler son identité, le fameux JD Tippett.
04:35 Qu'est ce qu'il fait ? Il sort son pistolet, il lui file quatre balles dans le thorax.
04:39 Donc il est complètement innocent.
04:42 Oswald sera lui-même tué deux jours plus tard par un dénommé
04:45 Jack Ruby, patron de boîte de nuit, bien connu de la pègre locale, dont on sait qu'il a eu des contacts avec des mafieux de Chicago.
04:52 Alors évidemment ce Ruby a rendu l'affaire JFK mystérieuse et unique.
04:55 Vous l'aviez rencontré quelques heures avant son passage à l'acte, il vous avait même donné sa carte de visite, il allait voir les journalistes.
05:01 Oui, je l'avais rencontré la veille.
05:02 On était tous les journalistes, on se reconnaît entre nous, et lui il n'avait pas du tout l'air d'un journaliste.
05:08 Il avait son petit chapeau de mafieux, les cheveux gominés, une énorme bagouze à la main gauche.
05:12 Il se baladait autour de nous, et je disais "mais qu'est ce que cet homme fait là ?"
05:15 Et les flics nous disaient "oh bah c'est Jack Ruby, c'est un copain, il est là".
05:18 Il connaissait toute la police, il entrait et il sortait comme il voulait, parce que c'était en moulin, on rentrait comme on voulait en se commissariat de police.
05:27 Et puis là il m'entend parler avec un copain, il entend mon accent français, donc il me dit "ah vous êtes français ?"
05:32 Je lui dis "oui" il me dit "ah la France, folle berger !"
05:35 C'était sa seule vision de la France, c'était les folles bergers.
05:39 Il faut dire que lui-même dirigeait une boîte de nuit, un bar de nuit.
05:42 Un bar de sceptique.
05:43 Donc j'ai noté tout ça, j'ai fait un papier sur lui.
05:46 Deux mois plus tard, c'est là où c'est la preuve que la commission Warren travaillait,
05:49 je reçois un coup de fil de l'ambassade des Etats-Unis à Paris pour me dire "il y a deux agents du FBI qui arrivent de Washington pour vous interroger".
05:56 Parce qu'on avait lu le papier que j'avais écrit sur ma rencontre avec Ruby,
06:01 et je disais "bon peut-être que Ruby lui a dit des choses dont on a besoin pour la commission".
06:05 Alors Kennedy a changé votre vie, on peut le dire, il vous a propulsé sur le devant de la scène comme journaliste,
06:11 l'Amérique a épousé votre existence, ou inversement, je ne sais pas, c'est une partie de votre paysage intérieur.
06:17 Écrivez-vous, vous y partez, c'est ce qu'on retrouve dans ce livre Coarto, vous y partez à 17 ans,
06:23 qu'est-ce qui vous pousse là-bas Philippe Lambrou ?
06:26 - 18 ans, je fais partie d'une génération qui a vu arriver à la libération d'une autre culture.
06:32 Des films, des livres, des chansons, des accessoires, des uniformes, des jeeps, du chewing-gum, tout ça, tout ce qu'on appelle le soft power.
06:43 Le pouvoir doux qui n'est pas si doux que ça, c'est un pouvoir envahissant, parce qu'ils ont envahi nos cultures, la culture américaine.
06:50 Et donc moi ça m'a passionné, et puis j'ai toujours été habité par la curiosité, j'ai toujours eu envie de voyager.
06:55 Et j'étais curieux de cette Amérique, j'avais lu quelques livres de Jack Landon, de Cooper, de Sherwood,
07:02 et je me suis dit, il y a une prairie là-bas, j'ai envie d'y aller.
07:04 Donc la chance arrive, un jour en classe, au lycée, on nous dit qu'il y a une bourse d'échange,
07:10 on peut être candidat, je suis candidat, je lève la main, blablabla, et je vais là-bas.
07:14 Et j'arrive à 18 ans, sur un campus de Virginie, c'est glagaçon, au milieu des années 50, pur c'est glagaçon.
07:21 Et sans avoir aucune adresse, aucun nom, sinon deux noms de gens que mes parents avaient hébergés pendant la guerre.
07:30 L'un à New York, l'autre à Los Angeles.
07:32 Et comme l'université ouvrait en septembre, je suis parti en juillet, j'ai fait le stop à travers tous les Etats-Unis,
07:39 aller et retour, pour apprendre un pays.
07:41 On apprend tellement mieux en stop, malheureusement on ne peut plus le faire aujourd'hui.
07:44 - Alors de cette jeunesse aux Etats-Unis, vous tirez deux romans qu'on retrouve là, toujours dans ce volume,
07:50 "L'étudiant étranger", "Un été dans l'Ouest".
07:52 Diriez-vous que cette expérience américaine a finalement forgé l'homme que vous êtes aujourd'hui ?
07:59 - En grande partie, cela dit, je suis comme tout le monde.
08:02 Moi j'ai été forgé par Balzac, Stendhal, Flaubert, Maupassant et quelques autres, et Zola.
08:07 Et d'ailleurs les écrivains américains le disent tous.
08:09 Pour eux, les exemples, c'est les grands français du 19e siècle.
08:14 Donc ma culture, au départ, est française.
08:16 Mais il est vrai que j'ai été imprégné d'une culture américaine,
08:19 j'y suis resté deux ans sans parler un mot de français pendant deux ans,
08:22 et que j'ai reçu des leçons de journalisme, de littérature,
08:26 qui m'ont permis, d'ailleurs quand je suis rentré en France,
08:28 d'être un petit peu en avance sur ma génération.
08:30 - Et des leçons de style aussi, parce que vous vous habillez à l'américaine,
08:35 à votre retour avec ces fameuses bottes à talons biseautées que vous évoquiez tout à l'heure,
08:40 la chevalière de votre université Lexington.
08:43 - Oui, je m'en souviens toujours.
08:44 - Il paraît que vous ne vous en séparez jamais, et c'est donc encore le cas aujourd'hui.
08:49 - Oui, les bottes à talons, quand je suis arrivé dans les locaux de François
08:52 pour essayer d'être candidat à rentrer dans ce journal mythique,
08:55 parce que je n'y suis pas rentré tout de suite,
08:57 ils m'ont regardé en disant "écoutez monsieur, habillez-vous comme les autres,
08:59 et revenez quand vous aurez fait votre service militaire".
09:03 Parce qu'il y avait ça aussi à l'époque, il fallait d'abord faire le service militaire.
09:06 - Et vous l'avez fait en partie en Algérie, est-ce qu'il y a d'autres aussi un livre ?
09:10 - Oui, "Les femmes à l'état".
09:11 - Philippe Labreau, vous vous êtes souvent demandé ce que le monde serait devenu
09:14 si Kennedy n'était pas mort, parce que c'est un tournant historique dans les années 60.
09:19 - Oui, le chronique c'est passionnant.
09:21 Qu'est-ce qu'il serait passé si ?
09:23 D'abord, il aurait été réélu, bien évidemment.
09:25 Il était en train de devenir un grand président,
09:28 il commençait à vraiment apprendre, à comprendre,
09:30 et il avait lancé 3-4 choses importantes,
09:32 n'oubliez pas que c'est lui qui envoie les Américains sur la lune,
09:35 c'est lui qui prend la décision,
09:36 et il dit "c'est très difficile et impossible, et c'est pour ça qu'on va le faire".
09:39 C'est ça qui m'a toujours plu dans sa personnalité.
09:41 Donc il aurait été réélu.
09:43 C'est pas évident qu'il aurait augmenté la présence des troupes américaines au Vietnam,
09:47 on ne sait pas, il se méfiait beaucoup des militaires,
09:50 alors que Johnson a été complètement pris en main par les militaires.
09:53 En tout cas, il aurait ouvert encore plus les portes de la paix,
09:57 parce que c'était la fin de la guerre froide,
09:58 après la crise des missiles à Cuba.
10:01 Donc il avait devant lui toutes sortes de grands projets,
10:03 c'était un homme en devenir.
10:06 Et c'est ça qui est d'ailleurs troublant,
10:08 et qui nous a tous frappés et émus,
10:10 c'est la mort d'un espoir.
10:12 - On se quitte avec un petit cadeau, Philippe Labraud,
10:15 "Mon Amérique à moi", de Johnny,
10:16 parce que vous avez écrit les paroles de la chanson.
10:18 - Merci.
10:19 - Mon Amérique à moi
10:23 Et mon Amérique à moi
10:29 - Johnny dans l'office, David sera notre grand invité de la deuxième heure,
10:32 dans à peine quelques minutes.
10:34 Donc merci beaucoup Philippe Labraud d'avoir été avec nous ce soir,
10:37 sur votre radio RTL, 60 ans après la mort de Kennedy,
10:40 et alors que vos écrits américains viennent de sortir en librairie.
10:43 Merci beaucoup, et on invite tous les auditeurs
10:45 à se plonger dans l'excellent et tout frais podcast Focus,
10:48 "Kennedy, grand mystère ou grand malentendu",
10:50 c'est signé Quentin Darmand, c'est absolument passionnant,
10:52 c'est sur RTL.fr et l'appli RTL.
10:55 Merci Philippe Labraud, RTL.
10:56 Bonsoir, continue dans une poignée de secondes avec le grand match des Infos pour briller.
10:59 RTL Bonsoir
11:01 Sois.

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