Maman, j'ai arrêté l'avion - La voiture hors des clous

  • l’année dernière
A l'heure de l'urgence climatique, comment se passer de la voiture, qui incarne la modernité, la liberté et à qui on voue un culte presque mystique ?
La « bagnole » reste le moyen de transport préféré des Français, jusqu'au plus haut sommet de l'État, y compris pour des courtes distances. Comment continuer à se déplacer tout en réduisant notre empreinte carbone et la pollution au dioxyde d'azote qui tue chaque année 40 000 personnes en France ? Est-ce vraiment à la portée de tous ceux qui utilisent leur voiture pour aller travailler, et sommes-nous tous « garés » à la même enseigne, que l'on vive en ville ou à la campagne ? Quelles sont les alternatives et sont-elles toutes à portée de main ou de portefeuille ?

Pour répondre à ces questions, Daphné ROULIER, en collaboration avec Raphaël HITIER reçoit :
- Marie CHÉRON, responsable Politiques véhicules au sein de l'ONG Transport & Environnement France
- Karima DELLI, députée européenne Europe Écologie Les Verts, présidente de la commission transports et tourisme
- François ROUDIER, porte-parole de la Plateforme Automobile de France

"Maman j'ai arrêté l'avion" est un magazine sur la transition écologique présenté par Daphné Roulier.
Chaque mois, Daphné Roulier abordera un thème lié à l'actualité suivi d'un débat avec ses invités. Ensemble ils se poseront des questions concrètes et politiques quant à la transition écologique que nous devons tous mener. Comment agir ? Comment s'organiser collectivement ? Quelles solutions sont à notre portée ? Quelles sont les fausses pistes à éviter ?
L'émission de 52 minutes est construite autour de reportages tournés sur le terrain et d'interviews de politiques et/ou d'experts en plateau menées par Daphné Roulier avec, à ses côtés, Raphaël Hitier, docteur en neuroscience et réalisateur de documentaires scientifiques.
La militante écologiste Camille Etienne participera également à l'émission sous une forme artistique et percutante.

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Transcript
00:00 Bonjour à toutes et à tous, à l'heure de l'urgence climatique, comment continuer à se déplacer tout en réduisant notre empreinte carbone
00:06 et la pollution qui tue chaque année 40 000 personnes en France ?
00:09 Comment se passer de la bagnole qui reste le moyen de transport préféré des Français,
00:14 y compris pour des courtes distances et jusqu'au plus haut sommet de l'État ?
00:18 On est attaché à la bagnole, on aime la bagnole. Et moi je l'adore.
00:23 Cette bagnole qui incarne donc le progrès, la liberté et à qui on voue un culte quasi mystique,
00:28 ce doudou d'acier, disons-le, n'est pas franchement neutre, Raphaël Littier.
00:32 Non, en France, le transport représente un tiers de nos émissions de gaz à effet de fer,
00:36 dont la moitié est imputable aux véhicules particuliers.
00:39 On en compte presque 39 millions dans le pays, un chiffre en constante augmentation depuis des décennies.
00:45 Aujourd'hui, 98% du parc automobile roule au diesel ou à l'essence,
00:50 et seulement 1,5% à l'électricité exclusivement.
00:54 Alors, revoir nos mobilités est donc une nécessité, mais suffit-il de le dire pour le faire ?
01:00 Est-ce vraiment à la portée de tous ceux qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler ?
01:03 Et sommes-nous tous garés sous la même enseigne selon que l'on vit, en ville ou à la campagne ?
01:08 Quelles sont les alternatives ? Et sont-elles toutes à la portée de main ou de portefeuille ?
01:13 En attendant, les ventes de SUV explosent en France,
01:16 au point que l'on peut se demander si l'on ne roule pas à contresens de l'histoire.
01:20 Au fait, maman, j'ai arrêté l'avion.
01:22 *Musique*
01:46 Pour en parler, la députée européenne d'Europe Écologie Les Verts, Karima Dehli.
01:50 Bonjour. - Bonjour.
01:52 - Marie Chéron, de l'association Transport et Environnement France. Bonjour. - Bonjour.
01:57 - Et François Roudier, porte-parole de la plateforme Automobiles de France. Bonjour. - Bonjour.
02:02 - Bonjour et bienvenue à tous les trois.
02:04 Avant de vous laisser la parole, allons faire une halte au Salon de l'Auto,
02:07 qui s'est tenu fin septembre à Lyon.
02:09 Cette grande messe annuelle est l'occasion pour les constructeurs d'exposer leurs nouveaux modèles
02:14 et pour les particuliers de les essayer, voire plus, si affinités.
02:18 L'édition 2023 a mis la gomme sur les véhicules électriques et hybrides
02:21 et toujours à l'honneur, les SUV qui sont désormais les voitures les plus vendues en Europe.
02:26 Seulement, ces 4.4 urbains sont plus lourds, donc plus énergivores, donc plus polluants.
02:31 A la fois, champions des ventes et des émissions de CO2.
02:34 Pour résumer, un paradoxe à l'ère de la sobriété.
02:37 Le tout oppose, c'est un reportage d'Alexis Breton, Jaouar Nadi et Joseph Allais.
02:42 [Musique]
02:49 En banlieue lyonnaise, c'est jour de fête pour la bagnole.
02:52 Le Salon de l'Automobile, un événement qui a lieu tous les deux ans.
02:56 76 000 visiteurs et plus de 50 marques qui viennent présenter leurs modèles.
03:01 Parmi elles, Honda.
03:03 - Allez, on y va. Je me présente, Pierre Guignot, je suis le directeur de la main pour la France.
03:08 Et on est très heureux d'être présents aujourd'hui.
03:11 La marque japonaise, premier constructeur de moteurs au monde, fête ses 75 ans d'existence.
03:17 - Et maintenant, on va allumer ce beau gâteau.
03:21 Pour cette édition lyonnaise, la marque présente en exclusivité 3 nouveaux modèles au public.
03:26 Monsieur le directeur général nous fait une petite visite de son stand.
03:31 - Bienvenue chez Honda. - Merci.
03:34 - Juste à côté de moi, vous découvrez le nouveau Cervé.
03:37 Tout nouveau Cervé, on vient à peine de le lancer.
03:39 - L'émirat pour nous, c'est le SUV iconique.
03:42 Ça a été un des SUV les plus vendus au monde.
03:45 Cervé, 1,9 tonnes.
03:47 - Mais c'est pas la seule. Parce qu'on a lancé 3 nouveaux modèles.
03:51 Et vous avez juste devant vous le ZRV.
03:53 Là, on est sur une voiture qui fait 4,56 m. Donc c'est une voiture plus compacte.
03:56 ZRV, 1,6 tonnes.
03:58 - Après, on a le HRV. Le HRV en SUV. SUV, il vient...
04:05 CRV, ZRV, HRV. Donc là, vous avez les 3 tailles devant vous.
04:09 Donc un véhicule encore un peu plus compact.
04:11 - HRV, 1,4 tonne.
04:13 De quoi énerver surtout les opposants au SUV.
04:17 SUV ou véhicule utilitaire sportif pour les non-initiés.
04:21 Des véhicules plus lourds et plus polluants.
04:24 Au salon de l'automobile de Lyon, ils sont partout sur tous les stands.
04:28 Depuis quelques années, ce sont les véhicules les plus vendus dans le monde.
04:32 Une mode des grosses voitures, aujourd'hui dénoncée comme la pire idée,
04:36 au pire moment, par certains.
04:38 La France compte près de 39 millions de voitures en circulation.
04:44 Un chiffre en constante augmentation.
04:46 Et dans cet embouteillage de moteurs et de pots d'échappement,
04:49 un véhicule est en passe de remplacer tous les autres.
04:52 Les SUV, donc.
04:54 En France, leur vente a été multipliée par 7 en une décennie seulement.
04:58 Une mode des faux 4x4, encouragée par la publicité,
05:01 qui vante un véhicule sûr, familial et avide de grands espaces.
05:06 Plus haut, plus large et plus cher,
05:08 ils sont aussi en moyenne 200 kg plus lourds qu'une voiture classique.
05:12 Ils utilisent plus de matière première,
05:14 consomment plus et rejettent en moyenne 15 % de CO2 supplémentaire.
05:19 Voiture du futur pour les uns,
05:21 catastrophe environnementale pour les autres,
05:23 deux visions s'opposent.
05:25 D'un côté, Yves Carrat, porte-parole de l'association Mobilité Club France.
05:29 Et de l'autre, Lou Espargillière, journaliste à Vers le Média.
05:33 - Oui, la voiture fait toujours rêver.
05:35 Oui, la voiture est toujours utile.
05:37 Et oui, malgré ce que pourraient dire certains politiques,
05:40 la voiture, on l'aime parce que c'est la liberté.
05:42 - En fait, on est dans un moment où il faudrait qu'on accélère extrêmement vite
05:45 sur la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre.
05:47 Et là débarque l'arme fatale, le SUV,
05:49 le truc qui va émettre beaucoup plus de gaz à effet de serre que les autres voitures
05:52 et qui, en fait, va contrecarrer tous les efforts qui se sont faits par ailleurs.
05:57 Au salon de l'automobile, des milliers de visiteurs
06:00 attendent patiemment l'ouverture des portes.
06:02 Ils ont hâte d'admirer les nouveaux modèles, mais aussi de les essayer,
06:06 comme Dragan, qui est, lui, venu pour acheter une voiture.
06:10 - Tu veux pas ser conducteur ? - OK.
06:13 - On sait comment elle s'ouvre.
06:18 - Accompagné d'un moniteur de la marque Honda,
06:21 il va prendre le volant de ce SUV.
06:24 - On y va ?
06:25 - On a aussi les caméras qui s'allument pour les angles morts sur l'écran
06:28 quand vous mettez les clignotants. - J'adore.
06:30 - Il y a également le fait que c'est une voiture neuve.
06:32 De toute façon, avec toutes les voitures neuves,
06:34 c'est un plaisir de conduire.
06:36 - Long de 4,70 m et pesant un peu moins de 2 tonnes,
06:39 ce SUV hybride est le plus gros de la gamme Honda,
06:42 un gabarit qui peut poser des problèmes de conduite.
06:45 - Il faut juste faire attention de donner un ici, là, assez costaud.
06:49 - Ouais, carré.
06:51 - Ah ouais.
06:53 - C'est pas mal. - Testez les suspensions.
06:56 - Là, c'est pas top.
07:00 - On peut le changer ? - Ouais.
07:02 - J'adore. Vraiment.
07:08 C'est absolument ce que je recherchais au niveau du gabarit.
07:12 Une fois qu'on y a goûté, avant d'avoir les véhicules surlevés,
07:16 on a du mal à revenir aux véhicules conventionnels.
07:19 Je suis bien partant pour celui-là.
07:21 - Parfois, il y a des critiques qui sont adressées au SUV, etc.
07:24 Ce que vous en pensez, vous ?
07:26 - Question de piège.
07:29 On m'avait pas prévenu pour cette question.
07:32 Sur les véhicules, ils ont raison.
07:37 Sur tous les véhicules.
07:39 J'ai carrément. On peut.
07:41 - Les écologistes ont raison,
07:44 mais il va quand même acheter ce monstre de tôle et d'acier.
07:47 En France, 46% des véhicules sont en plastique.
07:50 46% des nouvelles immatriculations sont de SUV,
07:53 devenus en quelques années les voitures les plus populaires.
07:57 - Les voitures ont pris du poids, les voitures ont pris de la taille.
08:00 On a mis un mot dessus, SUV.
08:02 Mais je crois que c'est une erreur en marketing.
08:05 Si on avait mis "voiture familiale", ça passerait mieux.
08:08 Appelez le Manospace, il y aura plus de problèmes.
08:10 - En comptant la fabrication et le roulage des SUV dans le monde,
08:14 tout ça émet quasiment 1 milliard de tonnes de CO2.
08:17 Pour se donner un peu un ordre d'idée, c'est ce qu'émet le Japon en un an,
08:20 où la France et l'Allemagne réunissent.
08:22 Donc voilà, en gros, si les SUV étaient un pays, appelons-le Suvlande,
08:26 ce serait le 6e pays le plus émetteur de gaz à effet de serre sur Terre.
08:29 - Des chiffres à faire frémir n'importe quel habitant un peu sensé de la planète.
08:33 Et les écologistes aussi, évidemment.
08:36 À l'entrée du salon, Clément Drogniart, porte-parole d'Alternatiba,
08:40 tente avec ses camarades d'alerter le public.
08:43 - Bonjour. Est-ce que vous voulez une petite file d'info sur les SUV ?
08:45 - Non, merci. - Non ? Y a pas de souci.
08:48 On a fait une petite fiche d'information sur les SUV.
08:51 Si ça vous intéresse, non ?
08:52 On fait un peu de communication sur qu'est-ce que c'est qu'un SUV,
08:55 pour un peu contrebalancer le message publicitaire des constructeurs.
08:59 - OK. Merci. - Voilà.
09:00 - Ça vous parle, monsieur ? C'est... - Les SUV, oui, oui, ça me parle.
09:03 - Vous en avez un ? - Oui, oui.
09:05 - Écoutez, nous, on n'est pas écolo, ça nous intéresse pas.
09:07 - Bah, écoutez, y a pas de... Y a pas de souci. Y a pas de souci.
09:10 Pas facile de convaincre ces passionnés d'automobiles.
09:14 - C'est vraiment pour contrebalancer cette omniprésence médiatique
09:20 de la publicité pour les véhicules lourds.
09:22 Donc, l'année dernière, on a eu des constructeurs
09:25 qui ont dépensé à peu près 2 milliards d'euros dans des publicités pour les SUV.
09:29 Donc, bah, en fait, c'est vraiment quelque chose qu'il faut qu'on arrête.
09:32 - Dernière tentative avec ces étudiants en école d'ingénieur.
09:35 Ce sera encore pire.
09:37 - On a des informations sur les véhicules lourds, la mode des véhicules lourds.
09:41 Donc, bah, si ça vous intéresse...
09:42 - Non, tant qu'il y a un gros V10, nous, ça nous va.
09:45 On s'en a rien à faire de la consommation.
09:47 - C'est vrai ? - Ouais.
09:48 - Ah ouais ? - Ouais, ouais.
09:49 - Tous les questions écologiques autour de l'automobile.
09:51 - Perso, moi, je m'en fous.
09:52 - Moi, je suis pas très écologiste non plus.
09:54 J'avoue, j'aime bien quand ça fait du bruit aussi.
09:56 Mais je pense que c'est bien si on peut trouver des alternatives
09:58 qui gardent tout ce qui fait du bruit, mais qui permet de moins polluer.
10:01 Comme ça, au moins, ça plaît à tout le monde.
10:02 - Bah, les SUV, ouais, c'est une aberration en soi.
10:04 Mais ça, après, les gens, ils recherchent de la sécurité aujourd'hui.
10:07 Donc, il faut les comprendre aussi.
10:08 - Ah, ça, ça fait plaisir.
10:09 Petite Mustang, là, voilà, ça fait plaisir.
10:11 - Ouais, ça y est. - Bon, je vais y aller.
10:13 Bonne journée.
10:14 - Avec de tels ingénieurs, la planète est sans doute mal barrée.
10:18 - Aujourd'hui, il y a une voiture sur deux vendue, c'est un SUV.
10:21 Donc, c'est une voiture normale.
10:23 Faut pas oublier que depuis 20 ans, l'automobile, et tant mieux,
10:26 a fait des efforts considérables en matière de pollution.
10:29 Des filtres à particules pour les diesels, beaucoup moins de consommation.
10:33 - Pour des trajets de 1 km ou moins, réalisables en 12 minutes à pied.
10:36 Les gens vont prendre la voiture à 50%.
10:38 Donc, en fait, on est dans une culture de la voiture
10:40 où la voiture est plébiscitée pour quasiment tous les trajets,
10:43 même les trajets les plus courts,
10:44 parce que c'est le mode de transport le plus commode aujourd'hui
10:46 pour une partie immense de la population française.
10:48 - Une culture de la voiture qui devient une culture du SUV.
10:52 Et pas seulement en France.
10:54 Aujourd'hui, en Europe, plus d'une voiture vendue sur deux est un SUV.
10:58 Mais au lieu de freiner la tendance,
11:00 l'industrie a trouvé la solution pour en vendre encore plus.
11:03 Le SUV électrique.
11:05 Anne-Marie Baesner est la directrice du Salon de Lyon depuis 2015.
11:10 - Moi, je l'aime bien, la 208.
11:15 Son rôle, faire venir les marques et s'assurer que ses clients sont satisfaits.
11:19 - Ca va, Renaud ? Tu vas bien ?
11:22 Les commandes, là, ça se passe bien ? Le rythme ?
11:24 - Le rythme des commandes, on est dans un avancement qui nous va bien.
11:28 Renaud Mouly représente le groupe Stellantis,
11:31 qui détient notamment les marques Peugeot ou Citroën.
11:33 Il propose plusieurs modèles de SUV électriques.
11:36 - Il y a un mouvement très fort sur l'électrification.
11:39 Ca, il est clair. Et vous le voyez ici.
11:41 On a des concurrents que je vois ne présenter que des véhicules électriques.
11:45 - En 2019, sur le marché français,
11:47 la part de véhicules électriques et hybrides rechargeables, c'était de 2%.
11:52 Et fin août 2023, c'est de 24%.
11:56 - En tout cas, il se vend 8 voitures sur 10 en hybride.
11:58 Donc, on peut rouler 30 à 40% de son trajet en électrique.
12:02 En ville, ce qui est pas mal. Et le reste du temps, en thermique.
12:05 Donc, c'est écologique, c'est économique.
12:07 Un peu moins à l'achat, mais en tout cas, c'est très pratique.
12:10 - Un SUV électrique, il est beaucoup plus lourd qu'un SUV thermique.
12:13 Sur toute sa durée de vie, il va émettre beaucoup moins de gaz à effet de serre
12:16 qu'un véhicule thermique.
12:17 En revanche, comme une grande partie de la pollution en ville
12:19 est due aux particules fines issues du roulage et du freinage,
12:22 plus le véhicule est lourd, plus il va émettre ces particules fines.
12:25 Et donc, on ne règle pas le sujet de la pollution de l'air en ville.
12:28 - Sans compter la pollution engendrée par la fabrication des batteries électriques.
12:33 Mais alors, pourquoi achète-on autant de SUV ?
12:36 C'est peut-être parce que nous sommes constamment incités à le faire.
12:40 C'est ce que pensent Eline et Tom, 2 militants d'extinction rébellion.
12:44 - Je trouve que c'est un peu mensonger, quand même, le salon de l'automobile.
12:47 Où sont les voitures, là ? Moi, je ne vois que des minibus, en fait.
12:49 J'ai l'impression qu'il n'y a plus un seul constructeur automobile qui ne fait pas de SUV.
12:53 Putain, la taille de la Jeep, là-bas, aussi !
12:55 Les 2 jeunes écologistes sont des habitués des actions coup de poing.
12:59 Mais pas cette fois.
13:01 L'année dernière, 11 de leurs camarades s'étaient collés les mains
13:05 à des Ferrari au Mondial de l'Auto à Paris.
13:08 Une action pour laquelle ils devaient être jugés en octobre dernier.
13:12 Eline et Tom ne souhaitent pas leur porter préjudice avant le procès.
13:16 - On peut ouvrir le coffre ou pas ?
13:23 - Oh, mon Dieu ! - Ouais, en fait, c'est ça qui est dingue.
13:25 - Ça, c'est mon avance !
13:27 - C'est que là, il y a un petit salon, ici.
13:29 Moi, j'ai des amis qui vivent dans des voitures plus petites que ça.
13:32 Même s'ils gardent le sourire, ils n'oublient pas l'essentiel.
13:36 Leur combat contre les SUV et leur cheval de Troie, la publicité.
13:41 - C'est la pub qui joue énormément, en fait, dans le truc de vendre
13:44 une image de quelque chose de très, très désirable.
13:48 Il y a quand même un imaginaire qui est développé de...
13:50 "En fait, je suis tout seul sur ma route.
13:53 "Pas envoyé jamais un SUV dans des bouchons
13:55 "ou en train de galérer dans une ville."
13:57 C'est genre dans des espèces de grandes autoroutes en lacets.
13:59 Je sais pas où ils les trouvent, d'ailleurs.
14:01 - Effectivement, dans leur publicité, voici ce que nous montrent les grandes marques.
14:04 De magnifiques routes sans la moindre circulation,
14:07 dans des décors de rêve qui nous parlent d'aventure,
14:10 avec des slogans qui se veulent percutants.
14:13 - Nous, les humains, ne sommes pas les animaux les mieux équipés.
14:19 - Pas de fourrure, pas de griffes...
14:23 - Mais des SUV.
14:25 - Les SUV for the city.
14:30 - Alors que la réalité, c'est ça.
14:35 Ça change tout, n'est-ce pas ?
14:37 - On constate bien, les SUV en ville, c'est coincé dans les bouchons,
14:40 ça klaxonne, ça dépasse des places de stationnement.
14:42 Ce qu'il faut être capable de faire, c'est de combattre le greenwashing
14:45 qu'il y a dans la publicité, parce que beaucoup d'SUV nous sont vendus
14:47 comme écolos parce qu'ils sont hybrides, alors qu'en fait,
14:50 ils ont un impact climatique déplorable.
14:52 Et il faut, je sais pas moi, investir l'imaginaire dans le cinéma.
14:55 Moi, je rêve d'une course-poursuite dans un James Bond
14:58 où ils seraient là avec un vélo électrique, au lieu de faire une course
15:00 avec une grosse bagnole, et tout le monde trouverait ça méga classe.
15:03 Donc voilà, il faut ringardiser les SUV, pas parce que les SUV,
15:06 c'est mauvais en soi, mais parce que c'est un grave problème
15:08 pour le climat aujourd'hui.
15:09 En France, certaines municipalités ont décidé de ne pas attendre
15:13 les blockbusters écolos pour agir.
15:15 C'est le cas de la ville de Lyon.
15:17 La mairie, dirigée par les écologistes, souhaite réduire la place
15:21 de ces véhicules polluants dans ses rues, en s'attaquant aux stationnements.
15:26 Valentin Lugenstrasse est adjoint au maire, en charge des transports.
15:30 Il nous explique son projet.
15:32 On aura une tarification progressive du stationnement, en fait,
15:35 avec trois catégories, où en fonction du poids et de la motorisation
15:38 du véhicule, on sera dans ces différentes catégories.
15:41 Concrètement, plus la voiture est lourde et polluante,
15:43 plus le tarif est élevé.
15:45 De 15 euros par mois pour les petites citadines,
15:48 jusqu'à 45 euros pour les gros SUV.
15:51 Les grands véhicules ont un impact sur l'espace public,
15:53 sur la pollution de l'air, sur le changement climatique,
15:55 sur la sécurité routière, sur les métaux, tout simplement,
15:58 qui sont utilisés, qui sont un impact trop important.
16:00 Et il y a un certain nombre de personnes qui ont besoin
16:02 de se déplacer en voiture, il n'y a pas de souci,
16:04 mais il vaut mieux se déplacer avec un véhicule qui fait 1000 kilos
16:07 et qui prend un espace réduit, effectivement, dans l'espace public.
16:10 C'est tout sauf la liberté à la bagnole.
16:12 Il faut quand même savoir qu'en France, en moyenne,
16:14 chaque mois, un véhicule, ça coûte plusieurs centaines d'euros.
16:17 C'est entre 4 et 500 euros par mois.
16:19 Donc en fait, c'est extrêmement cher.
16:21 Et le fait de permettre aux gens de se libérer de la voiture individuelle,
16:23 c'est aussi une manière de leur redonner du pouvoir d'achat.
16:25 Et ça, c'est un discours qui doit devenir entendable
16:28 dans l'oreille de pas mal de gens, et qu'il n'est pas aujourd'hui.
16:30 La voiture, elle fera toujours partie de notre quotidien.
16:33 Quelle voiture on aura, quelle énergie on aura,
16:35 quelle taille elle aura, je ne sais pas.
16:37 Mais elle fera toujours partie de notre quotidien
16:39 pour les années qui viennent, pour le pire ou le meilleur.
16:42 Alors, pour le pire ou le meilleur, François Roudier,
16:44 on a bien compris, on n'est pas en pleine SUVmania.
16:46 Est-ce qu'elle est compatible avec les objectifs climatiques de la France
16:49 à l'horizon 2035 ? Question simple.
16:51 Si cette voiture devient ce qu'on est en train d'en faire,
16:54 c'est-à-dire si elle est électrique, oui,
16:56 parce que c'est une voiture qui, selon ce qui a été décidé en Europe,
17:01 va émettre zéro CO2 à l'échappement.
17:05 Donc, ce n'est pas tout ce qu'il faut faire.
17:08 Il y a d'autres choses à faire.
17:10 C'est ce qu'on a lancé, nous, dans l'industrie.
17:12 C'est le coût global en CO2 de toute la fabrication,
17:16 de toutes les pièces de la voiture.
17:19 Et vous savez qu'on est aussi sur une vision un peu différente
17:23 des véhicules qui sont importés de Chine,
17:25 parce qu'un véhicule importé de Chine,
17:27 il pose un gros problème en CO2.
17:30 Et pour répondre à votre question,
17:32 on ne peut pas répondre tout de suite oui ou non.
17:34 Avant de parler de l'électrique, comment expliquez-vous
17:36 que plus les normes environnementales se durcissent,
17:38 plus les SUV sont plébiscités,
17:40 sachant que ces mastodontes, on l'a entendu,
17:42 rejettent, selon les modèles, entre 11 et 26 %,
17:46 ce qui est énorme de dioxyde de carbone,
17:48 et qu'ils sont la deuxième source de croissance
17:50 des émissions de CO2 en France, juste derrière l'aérien ?
17:53 Alors, attention à l'appellation SUV,
17:56 parce que SUV, c'est devenu une appellation commerciale.
17:59 Vous avez des petites voitures,
18:01 qui, ma foi, ressemblaient à des SUV,
18:03 qu'on n'appelait pas SUV.
18:05 Une 205 ou une R5 de notre jeunesse,
18:07 ça avait le look d'un SUV.
18:09 Ah non, encore une fois, c'est pas tant l'appellation SUV
18:11 qui pose problème.
18:13 C'était carré, ça ressemblait...
18:15 On appelait ça même le 4x4,
18:17 les fameux 4x4, les mini 4x4.
18:19 Aujourd'hui, il faut appeler un chat un chat.
18:21 Un SUV est un SUV, aujourd'hui.
18:23 Non, vous ne pouvez pas dire ça.
18:25 Le problème, c'est le poids.
18:27 L'un des critères, vous le savez aussi bien que moi,
18:29 c'est la question notamment du poids.
18:32 Et à partir du poids, on commence à dessiner quoi ?
18:34 Notamment le type de véhicule.
18:36 Depuis 10 ans, nos voitures
18:38 prennent 1 cm tous les 2 ans
18:40 et 10 kg par an.
18:42 Concrètement, est-ce que vous trouvez
18:44 que l'offre des constructeurs est alignée
18:46 aux objectifs climatiques de la France ?
18:48 Ça, c'est une réalité, c'est des faits.
18:50 Oui, tout à fait.
18:52 On a vu une industrie automobile
18:54 qui a été dirigée par l'industrie allemande.
18:56 C'est simple, on le sait.
18:58 L'industrie allemande, elle a créé la voiture
19:00 telle qu'on la voit maintenant dans nos rues.
19:02 Tout le monde, pour vendre ses voitures,
19:04 a été obligé de plus ou moins copier
19:06 les voitures allemandes, même les chinois.
19:08 La marche contre constructeurs, je crois,
19:10 est un peu indexée au poids aussi.
19:12 Un fabricant de voitures a tout intérêt
19:14 à vendre une grosse voiture plutôt qu'une petite.
19:16 Ça l'était, sauf que si vous avez une voiture
19:18 thermique qui va être très lourde,
19:20 vous allez avoir des malus.
19:22 C'est quelque chose qu'on connaît bien en France.
19:24 On a intérêt, au contraire, à diminuer le poids.
19:26 Vous avez des efforts qui sont faits
19:28 sur tous les véhicules,
19:30 que ce soit les véhicules français ou étrangers,
19:32 de changement complet de conception.
19:34 On a, par exemple, un châssis
19:36 qui n'est plus boulonné, mais qui va être
19:38 coulé d'une seule fois, pour économiser
19:40 sur ce coût-là. On bloque encore
19:42 sur le problème des batteries, c'est sûr.
19:44 - Gros problème. Un tarif de stationnement
19:46 différencié selon le poids du véhicule,
19:48 comme les villes de Lyon et de Paris
19:50 s'apprêtent à le faire, c'est un bon début, Marie Cheron ?
19:52 - Oui, parce que ça donne un signal
19:54 pollueur-pégueur, dans le principe.
19:56 C'est ça.
19:58 C'est-à-dire qu'on est dans des villes
20:00 où on a un espace limité, donc il est tout à fait
20:02 normal que le paiement du stationnement
20:04 se fasse au regard de l'espace qu'on utilise.
20:06 - Ça pourrait freiner cette assubilisation galopante ?
20:08 - C'est un des signaux,
20:10 mais ça ne peut pas fonctionner
20:12 tout seul non plus. Et puis, de toute façon,
20:14 quand on est en ville, le vrai enjeu
20:16 des villes, c'est de réduire
20:18 la place de la voiture et de donner
20:20 une vraie place aux alternatives.
20:22 Donc, Lyon n'est pas du tout en retard par rapport à ça.
20:24 Mais on a besoin d'avoir une dynamique générale
20:26 beaucoup plus importante là-dessus, pour qu'on puisse
20:28 se déplacer autrement. Et que la voiture
20:30 va garder une place. C'est là où je suis assez
20:32 d'accord avec ce qu'il dit parfois
20:34 dans le reportage, c'est "oui, de toute façon, on ne va pas
20:36 s'en débarrasser de la voiture, peut-être que
20:38 des SUV, on va en garder". Mais en fait, la problématique
20:40 derrière, c'est qu'on a aujourd'hui sur le marché,
20:42 il n'y a plus que des SUV et il n'y a plus de petits modèles.
20:44 - Diriez-vous que les constructeurs automobiles ont une part
20:46 de responsabilité en privilégiant
20:48 des voitures plus lourdes, plus polluantes,
20:50 inadaptées à la vie urbaine
20:52 et accessoirement plus chères aussi, de 8 à 30%
20:54 à moteur équivalent
20:56 à l'heure des interruptions et à la sobriété ?
20:58 - Bien sûr qu'ils ont une responsabilité.
21:00 C'est des choix qui ont été faits, des choix stratégiques
21:02 de privilégier la rentabilité des modèles
21:04 au détriment
21:06 de l'espace, de la transition écologique,
21:08 de la réduction des émissions de gaz à effet de serre
21:10 et de la réduction des émissions de polluants atmosphériques.
21:12 Donc, oui, oui, ils ont
21:14 effectivement une responsabilité. Et quand on regarde
21:16 la façon dont est menée
21:18 la conversion vers l'électrique,
21:20 aujourd'hui, les SUV sont majoritairement
21:22 électriques parce que les constructeurs
21:24 européens ont choisi de rentrer dans
21:26 l'électrique par des gammes
21:28 élevées. C'est aussi pour ça que le
21:30 manque de petits modèles accessibles
21:32 et peu émetteurs est plus sobre
21:34 et criant. Il n'y en a pas assez.
21:36 - Et ça permet, en passant, d'accéder
21:38 aux subventions aussi. Même
21:40 un SUV lourd qui est
21:42 électrifié jusqu'en 2025, je crois,
21:44 bénéficie des aides
21:46 à la charge. Donc ça permet artificiellement
21:48 de baisser le prix. - Il y a aussi des stratégies.
21:50 Mais là où je rejoins M. Roudier, c'est que je pense
21:52 en effet, et tous les signaux
21:54 qu'on a sont ceux-là, c'est qu'il y a vraiment
21:56 eu cette augmentation du poids
21:58 tirée avec des stratégies très gros véhicules,
22:00 etc., et qu'on est un peu sur un plateau.
22:02 Alors, à voir, il va falloir que ça se confirme
22:04 parce que les alertes qu'on lance depuis
22:06 des années sur le fait que les véhicules
22:08 sont trop lourds, trop gros, trop consommateurs
22:10 de matières et d'énergie,
22:12 se heurtent de plein fouet à
22:14 la nécessité dans les années à venir d'économiser
22:16 l'énergie, donc de ne pas avoir des véhicules
22:18 qui consomment trop. Donc on va aller chercher, effectivement,
22:20 les constructeurs vont chercher un peu plus d'aérodynamisme,
22:22 par exemple. Donc on est peut-être
22:24 sur un plateau dans cette tendance SUV.
22:26 - Il faudrait instaurer des malus poids ?
22:28 - Absolument. Et je trouve que la
22:30 Convention citoyenne qui avait commencé
22:32 justement à mettre sur le devant
22:34 de la scène des belles propositions,
22:36 malheureusement... - Ça a été détrigoté
22:38 parce qu'ils proposent... - C'est pire que ça,
22:40 c'est que la puissance publique ne
22:42 veut pas réglementer. Donc nous, on le fait au niveau
22:44 européen, on est quand même
22:46 dans un objectif de plus
22:48 de normes, non pas pour
22:50 embêter les gens, mais c'est parce que,
22:52 vous l'avez dit, et c'est le cadre de votre émission,
22:54 nous avons une urgence climatique.
22:56 C'est les SUV qui font repartir
22:58 à la hausse, notamment nos émissions
23:00 de gaz à effet de serre, ce qui n'est pas normal.
23:02 Rien que les SUV, aujourd'hui, c'est
23:04 un sixième pays émetteur de gaz
23:06 à effet de serre. C'est un milliard
23:08 de tonnes de CO2, donc c'est énorme.
23:10 Et ensuite, je voudrais revenir sur une chose, alors moi,
23:12 je pense qu'on ne dit pas assez
23:14 la dangerosité. Quand vous avez
23:16 des véhicules qui sont sur nos routes
23:18 qui pèsent plus de 1,8,
23:20 1,3 tonnes
23:22 ou plus,
23:24 c'est très dangereux. La collision
23:26 avec, justement, ce type
23:28 de véhicule, c'est deux
23:30 fois plus mortel. Et là, on va avoir un problème.
23:32 Aujourd'hui, nous sommes dans
23:34 une trajectoire qui n'est pas
23:36 du tout la bonne, notamment dans les transports. C'est la
23:38 raison pour laquelle il va falloir
23:40 légiférer. Donc, c'est pas seulement,
23:42 et je suis d'accord avec la
23:44 volonté de dire qu'il faut une taxe, notamment
23:46 sur les stationnements, etc. Ça, c'est
23:48 bien, mais c'est
23:50 comment on crée les alternatives. Et c'est
23:52 là où ça devient très important dans les villes,
23:54 c'est les transports en commun, c'est plus de vélo,
23:56 et les autres choses. - On va en parler. En attendant,
23:58 le nouveau crédeau de l'industrie de
24:00 mobile semble être produire moins,
24:02 mais vendre plus cher. Or, la pollution
24:04 des voitures est indexée à leur taille, on l'a dit,
24:06 et plus elle est importante, plus les émissions le sont.
24:08 Or, le problème ne vient pas des moteurs,
24:10 paraît-il, mais des freins et de l'abrasion.
24:12 C'est exact ? - Pas seulement du
24:14 moteur, effectivement, si on parle de pollution
24:16 aux micro-particules.
24:18 C'est d'ailleurs un secteur qui est un peu
24:20 passé, qui est un peu dans l'angle mort de la
24:22 réglementation pendant longtemps.
24:24 C'est-à-dire que les freins, quand ça frotte,
24:26 ça crée des petites particules, et les
24:28 pneus en contact avec le
24:30 vitrine, ça met aussi des particules
24:32 en suspension. On sait que c'est toxique,
24:34 on sait que ce type de pollution est responsable
24:36 de plusieurs dizaines de milliers de morts
24:38 en France, alors pas uniquement les voitures,
24:40 mais ça joue un rôle important.
24:42 Et là, on est en train de se rendre compte de
24:44 l'ampleur du phénomène, c'est que indépendamment
24:46 de la combustion et du moteur,
24:48 les particules fines issues de ces deux types
24:50 de frottements représentent plus de la moitié de cette
24:52 pollution locale, et par ailleurs,
24:54 je lisais que
24:56 sur les plusieurs millions de tonnes
24:58 de micro-plastiques qui sont rejetés dans les océans
25:00 chaque année, il y en a plus de 25%
25:02 qui viendraient des pneus. Donc on a vraiment
25:04 une pollution majeure qui n'est pas directement
25:06 liée à la question climatique, mais qui est liée
25:08 à la question environnementale, évidemment.
25:10 Justement, puisque l'on parle de nuisance, l'Union Européenne a refusé
25:12 de durcir les normes de pollution
25:14 sur les gaz d'échappement des voitures particulières
25:16 afin de préserver la compétitivité
25:18 de l'industrie automobile et de ses
25:20 14 millions d'emplois en Europe.
25:22 Elle fait bien, car
25:24 à l'heure où la pollution de l'air tue
25:26 de plus en plus, selon les
25:28 estimations, entre 40 000
25:30 et 100 000 décès par an en France.
25:32 Oui, alors elle ne fait pas bien
25:34 et moi je suis en colère et je dis que c'est un véritable
25:36 scandale, parce qu'aujourd'hui, au fait, on a une norme
25:38 Euro 7 qui ressemble à la norme
25:40 Euro 6. Donc au fait, on n'a pas bougé le truc.
25:42 Pourquoi ? Parce que les constructeurs
25:44 automobiles disent, si on met
25:46 les véhicules thermiques aujourd'hui
25:48 sur la norme Euro 7, ça va nous coûter
25:50 150, 200 euros.
25:52 Mais au fait, ça ne coûte pas énormément.
25:54 Si vous refaites faire le
25:56 vernis de votre voiture, c'est 550 euros.
25:58 Donc vous voyez, là, c'est
26:00 une véritable question de santé
26:02 publique. Et moi, je pensais
26:04 que, justement, le fait qu'on va
26:06 sortir de la vente des véhicules
26:08 thermiques en 2035,
26:10 si j'achète un véhicule thermique en 2034,
26:12 il va rouler encore 15 ans, 20 ans.
26:14 Donc c'est là qu'il faut mettre en place
26:16 la norme Euro 7. Et Vlad Tipoc, les constructeurs
26:18 automobiles, comme on dit chez moi,
26:20 excusez-moi, mais
26:22 ils ont fait un lobby d'enfer
26:24 sur toujours la même chose, c'est-à-dire
26:26 1) le manque de compétitivité,
26:28 2) menace à l'emploi,
26:30 alors que non, il n'y a pas de menace à l'emploi,
26:32 3) la volonté de dire "attendez,
26:34 on est un peu leader sur le marché, on ne va pas
26:36 revenir à l'arrière, puisque nous, notre trajectoire,
26:38 c'est faire plus, plus, plus, notamment
26:40 de l'électrique". Je le dis tout de suite, tout le monde
26:42 ne roulera pas à l'électrique.
26:44 - François Raudier, là, en l'occurrence,
26:46 le lobby d'enfer, ça vous concerne ?
26:48 - Le lobby d'enfer, c'est ça.
26:50 - Le lobby d'enfer ?
26:52 - C'est simple, nous, c'est une réaction tout à fait simple,
26:54 industrielle, commerciale. On arrête
26:56 des voitures thermiques, non pas en 2035,
26:58 mais en 2030. Chez Stellantis,
27:00 c'est fini, en 2030. Donc,
27:02 on ne va pas dépenser de l'argent pour
27:04 la fin de portée du thermique.
27:06 - Mais qu'est-ce que vous faites des véhicules qui vont être achetés avant ?
27:08 En 2029 ? - Ils vont rouler jusqu'en 2019.
27:10 - Ils vont rouler jusqu'en... - Vous savez très bien !
27:12 - Comme vous avez vu, là, dans les publicités un peu partout,
27:14 on essaie de vendre des voitures électriques.
27:16 - Dans les publicités, bien sûr. - Voilà,
27:18 il n'y a plus que des publicités sur les voitures électriques.
27:20 Et de toute façon, vous avez dû le voir, même dans les nouveaux
27:22 modèles, avant, on sortait un modèle thermique
27:24 et puis on disait "il y a aussi des versions électriques".
27:26 - Oui, mais ça, ce n'est pas juste que vous faites,
27:28 parce que vous êtes en train de prendre en otage
27:30 la santé des gens. Vous savez très bien
27:32 que tout le monde ne pourra pas... - Vous savez que la santé des gens,
27:34 elle ne dépend pas des dernières voitures qui sont vendues,
27:36 elle dépend du parc automobile.
27:38 - Justement ! - Vous, les politiques, supprimez.
27:40 - Justement, il faut mettre en place... - Mais attendez,
27:42 les voitures thermiques... - François Roudier,
27:44 François Roudier, c'est vrai, monsieur Roudier,
27:46 vous êtes de mauvaise foi, là. - François Roudier,
27:48 à Paris, on commence
27:50 à dépolluer... - Il a tourné les gens.
27:52 - On commence à dépolluer l'air dans les cours
27:54 d'école, avec des purificateurs
27:56 d'air géant. C'est le cas notamment de l'école
27:58 Victoire, un établissement du 9e arrondissement,
28:00 que l'on en soit réduit
28:02 à capter les particules fines
28:04 pour ramener la pollution de l'air
28:06 au-dessous des seuils fixés par l'OMS,
28:08 vous trouvez ça normal ? - Mais non,
28:10 vous avez vu ce qui roule à Paris ? Vous avez vu ce qui
28:12 roule à Paris, que ce soit en voiture particulière
28:14 ou, pire, en camionnette ?
28:16 Non, mais c'est délirant,
28:18 on est quasiment dans les années 70, maintenant,
28:20 sur les trucs là. Et c'est ça le problème,
28:22 le problème, c'est le parc automobile. Et là, on a besoin
28:24 des politiques pour sortir
28:26 ces véhicules, ils l'ont dit,
28:28 il y a 31 millions de voitures,
28:30 avec les VUL, les véhicules
28:32 utilitaires légers qui circulent,
28:34 je ne vous parle pas des camions, les camions de 3 tonnes 5,
28:36 qui viennent de Pologne ou Lituanie...
28:38 - Mais comment vous allez en faire des véhicules électriques,
28:40 monsieur Roudier ? Vous croyez que vous appuyez
28:42 sur un bouton, on va avoir 31 millions
28:44 de véhicules électriques ?
28:46 - Mais on peut déjà rajeunir le parc.
28:48 - On est au-delà du budget, à présent,
28:50 de cette voiture électrique dont on nous vante
28:52 les mérites. Pour la rendre
28:54 accessible à tous, le gouvernement a rehaussé
28:56 le bonus écologique pour les ménages les plus modestes,
28:58 de 6 à 7 000 euros, selon les critères
29:00 de poids et de prix du véhicule.
29:02 La liste des modèles subventionnés sera connue,
29:04 je crois, en décembre, mais ces autos
29:06 sont pourtant loin d'être la panacée
29:08 écolo. Raphaël Littier, c'est l'heure
29:10 de votre Climatoscope.
29:12 [Musique]
29:18 - Alors, la voiture électrique n'est pas la panacée
29:20 effectivement, néanmoins,
29:22 il n'y a pas de doute sur le fait qu'un véhicule
29:24 électrique a un impact carbone moindre
29:26 qu'un véhicule thermique. C'est-à-dire
29:28 on estime, si on prend tout en compte
29:30 le cycle de vie, qu'une voiture
29:32 électrique a un impact 2 à 3 fois inférieur
29:34 à celui d'une voiture thermique
29:36 en moyenne. Donc, au regard du
29:38 climat, la voiture électrique, c'est mieux
29:40 qu'une voiture thermique, ça, c'est
29:42 acquis et on peut maintenant
29:44 discuter de l'intérêt de la voiture électrique.
29:46 - Alors pourquoi autant de critiques ? Et de sceptiques ?
29:48 - Parce que ce qui est vrai aussi, c'est que le bilan
29:50 carbone de la voiture électrique à la fabrication
29:52 est beaucoup moins favorable
29:54 parce qu'il faut fabriquer la carcasse,
29:56 il faut fabriquer le moteur et il faut
29:58 fabriquer en plus la batterie, qui est très coûteuse
30:00 en énergie et qui en plus nécessite
30:02 d'aller chercher du lithium, notamment,
30:04 dont l'extraction est
30:06 plutôt coûteuse.
30:08 Donc, au départ, c'est plutôt
30:10 un désavantage environnemental.
30:12 Mais comme on ne brûle pas d'essence à son
30:14 utilisation, on rattrape
30:16 en fait ce bilan
30:18 carbone et on estime qu'en France,
30:20 en moyenne, au bout de
30:22 50 000 km, le bilan carbone
30:24 devient favorable pour le véhicule
30:26 électrique. - En France, mais quid des
30:28 centrales qui roulent au charbon ? - Effectivement.
30:30 Alors en France, on a une électricité plutôt
30:32 décarbonée, en Pologne, c'est un peu moins le cas,
30:34 la Chine, c'est encore moins le cas.
30:36 N'empêche qu'au bout du compte, à la fin
30:38 de vie du véhicule, on est quand même sur un bilan
30:40 CO2 qui est favorable.
30:42 Ça prend plus de temps parce que le coût initial
30:44 est plus important, mais à la fin, on y est quand même.
30:46 Alors, maintenant, si
30:48 on roule en véhicule électrique,
30:50 est-ce qu'on est
30:52 sur un versant purement écologique ?
30:54 Non, parce qu'il y a un autre paramètre
30:56 qui est très important, c'est le poids
30:58 du véhicule. On en discutait tout à l'heure.
31:00 Le problème, c'est que le SUV,
31:02 même électrique, reste une aberration
31:04 car la puissance de la batterie
31:06 qui est indexée sur le poids du véhicule,
31:08 gros véhicule, grosse batterie,
31:10 gros impact écologique,
31:12 et il est beaucoup plus difficile de compenser
31:14 les émissions de gaz
31:16 à effet de serre liées à sa production.
31:18 Donc avec une voiture électrique et légère,
31:20 on n'est pas certain d'être absolument écolo ?
31:22 Non, et on n'est pas encore
31:24 arrivé à destination
31:26 quand on a une voiture légère et électrique
31:28 parce que si on passe de "je suis tout seul
31:30 dans ma voiture thermique" à "je suis tout seul
31:32 dans ma voiture électrique", on ne rentre pas
31:34 dans le cadre des accords de Paris.
31:36 C'est-à-dire que la neutralité carbone
31:38 va imposer une réduction du nombre
31:40 de véhicules au niveau du parc,
31:42 ce qui veut dire du partage,
31:44 du covoiturage et
31:46 augmenter les transports en commun
31:48 pour permettre aux gens de se passer
31:50 de la voiture. Aujourd'hui, c'est un petit peu
31:52 compliqué en termes d'urbanisation et tout ça,
31:54 mais si on veut que le transport
31:56 rentre dans les accords de Paris,
31:58 il va falloir agir sur ces trois facteurs.
32:00 Il faut rentrer dans l'électrique,
32:02 il faut alléger les véhicules et
32:04 il faut faire d'autres propositions de transport.
32:06 Un mot des batteries.
32:08 Si les voitures électriques restent telles quelles,
32:10 c'est-à-dire des SUV à grosse batterie,
32:12 les matières premières vont nécessairement
32:14 commencer à manquer pour répondre
32:16 à la demande croissante d'ici 2035.
32:18 L'approvisionnement au lithium
32:20 risque-t-il d'être un autre problème
32:22 à Nichérou ?
32:24 Il n'y a pas de problème de réserve,
32:26 de ressources disponibles.
32:28 La difficulté, c'est le temps nécessaire
32:30 pour mettre en place, ouvrir
32:32 les mines, etc., et répondre à la demande.
32:34 C'est tout ce travail
32:36 d'exploitation et de mise sur le marché des produits.
32:38 C'est un coût écologique ?
32:40 L'extraction du lithium a un coût écologique ?
32:42 Exactement. C'est loin d'être neutre.
32:44 L'Europe s'est défait de toutes ses activités minières
32:46 depuis plusieurs décennies.
32:48 On va préférer les mettre un peu plus loin.
32:50 Il y a un vrai enjeu aujourd'hui avec certains
32:52 projets miniers en Europe.
32:54 L'Union européenne souhaite relocaliser
32:56 la fabrication des batteries.
32:58 Beaucoup de gens ne veulent pas de ça.
33:00 Ils ne veulent pas de gisements d'exploitation.
33:02 Beaucoup de gens n'en veulent pas, mais d'un point de vue écologique,
33:04 le mal est aussi important,
33:06 que ce soit à l'autre bout de la planète ou chez nous.
33:08 La voie chez nous, c'est aussi de se mettre face
33:10 à l'impact de nos consommations, et c'est d'assumer
33:12 et donc sans doute, de pousser
33:14 vers la sobriété.
33:16 Peut-être même d'avoir les moyens de réduire l'impact.
33:18 Il y a aussi un gros enjeu à avoir des mines
33:20 qui soient beaucoup plus... des activités minières qui soient beaucoup plus responsables.
33:22 Dans la responsabilité,
33:24 il y a aussi limiter
33:26 et maîtriser la consommation
33:28 qui va être extraite. Et derrière, l'autre gros enjeu,
33:30 c'est d'aller mettre en place,
33:32 dès aujourd'hui, les activités
33:34 de recyclage qui vont permettre
33:36 d'ici 10 ou 15 ans,
33:38 quand le stock de batteries sera...
33:40 de batteries en fin de vie
33:42 sera suffisant, de pouvoir
33:44 les recycler et de les réutiliser.
33:46 Et donc là-dessus, on a quand même une directive,
33:48 un règlement batterie au niveau européen
33:50 qui fixe des objectifs de réutilisation
33:52 de métaux recyclés.
33:54 Oui, mais ça, c'est quand même important.
33:56 C'est vrai qu'on a ces 10-15 ans qui sont difficiles,
33:58 mais il y a un vrai débat en France sur est-ce qu'on enjure...
34:00 Mais justement, que dire aux populations locales qui voient
34:02 d'un très mauvais oeil l'ouverture
34:04 d'une mine près de chez eux ? On l'a vu à Echassière
34:06 dans l'Allier, mais aussi à Debrecen en Hongrie
34:08 ou à Loznika en Serbie, où les riverains
34:10 se mobilisent contre l'ouverture
34:12 d'une usine de batteries ou l'exploitation
34:14 d'un gisement de lithium. Bref, ils refusent
34:16 de sacrifier leur région au nom
34:18 de la transition énergétique européenne.
34:20 Qu'est-ce qu'il leur dit ?
34:22 Il faut analyser les projets, voir s'ils sont vraiment
34:24 implantés au bon endroit. C'est plus intéressant
34:26 de le faire sur des sites qui ont
34:28 déjà été des endroits où il y avait
34:30 une exploitation minière que dans des nouveaux sites.
34:32 C'est le cas d'Echassière.
34:34 Et puis, comme c'est le cas en Serbie
34:36 ou au Portugal, où on a des sites
34:38 qui sont aujourd'hui des espaces
34:40 agricoles avec des petites
34:42 exploitations, et on vient proposer un projet
34:44 de mine, là, ça peut effectivement...
34:46 Enfin, ça pose de fait des problèmes.
34:48 Et dans les sites qui avaient été repérés en France,
34:50 puisqu'au départ, il y avait... Il y a plusieurs
34:52 sites qui ont été explorés, et finalement,
34:54 celui qui est retenu est un site
34:56 anciennement déjà industrialisé.
34:58 Donc, oui, il faut faire
35:00 des choix raisonnés. Donc, je crois
35:02 que ça, ça va être essentiel. Et après,
35:04 il y a les questions liées à la ressource
35:06 en eau, etc. Donc, là, la responsabilité...
35:08 Mais c'est pas notre...
35:10 Il faut être absolument très strict sur la responsabilité
35:12 environnementale. On a parlé de l'électrique.
35:14 Un mot des voitures à hydrogène, peut-être ?
35:16 On peut en parler, mais on ne peut pas
35:18 faire de l'électrolytique.
35:20 - Et le transport aux alouettes ?
35:22 - Pour l'instant, c'est une des solutions,
35:24 mais à grand gabarit, sur des grands volumes
35:26 de véhicules, je vous le dis, ça va pas
35:28 être possible. - Pour les flottes...
35:30 - Toyota, François Reddy, il croit que
35:32 c'est dur comme fer. - Mais en tout cas, pour l'instant,
35:34 c'est pas la panacée. Moi, je voudrais
35:36 revenir sur ce que dit Marie Cheron, parce que
35:38 lorsqu'on a des visions, par exemple, sur des
35:40 mixes énergétiques totalement nouveaux,
35:42 etc., c'est que l'industrie automobile
35:44 est en train de se débrouiller.
35:46 Parce qu'on doit pas juste penser la batterie.
35:48 On doit penser l'ensemble, notamment,
35:50 du véhicule, et la filière, c'est la seconde vie,
35:52 c'est comment on recycle l'ensemble des matériaux,
35:54 etc. Et il y a un marché, par contre,
35:56 sur lequel, moi, je trouve qu'on réfléchit pas assez,
35:58 c'est ce qu'on appelle l'industrie du rétrofit.
36:00 Qu'est-ce que c'est, messieurs-dames ?
36:02 - Oui, qu'est-ce que c'est ? - C'est très simple.
36:04 Vous avez un véhicule thermique,
36:06 en fait, on change le moteur pour en faire un véhicule
36:08 électrique. - Oui, absolument.
36:10 - Et ça, c'est quand même dingue, parce qu'on a les meilleurs
36:12 en Europe. Vous êtes d'accord, François Roudier ?
36:14 - Oui, Renaud le fait, mais le problème, c'est le coût.
36:16 C'est le coût, et après, c'est la sécurité
36:18 du véhicule qui a été fait
36:20 il y a quelques années, puisqu'il a rétrofité,
36:22 avec une batterie qui est plus lourde,
36:24 un freinage différent. Pour tous ceux qui ont
36:26 essayé des voitures électriques, vous avez vu, ça n'a pas du tout
36:28 le même comportement. Un moteur
36:30 thermique, ça monte en puissance,
36:32 un moteur électrique, c'est tout de suite la puissance. - Donc, c'est dangereux ?
36:34 - Donc, ça veut dire que
36:36 ça rajoute des contraintes au rétrofit.
36:38 Donc, ça rajoute du coût.
36:40 - Mais sur le rétrofit... - Mais c'est super d'avoir
36:42 les Méharis, par exemple, électriques, ça marche très bien.
36:44 Bon, il y a
36:46 un côté ludique sur certaines choses qui peut se faire,
36:48 sans problème. Il peut y avoir aussi
36:50 des rétrofits de camions et de camionnettes.
36:52 Ça, c'est pas idiot, parce que ça peut...
36:54 - Pourquoi c'est plus pertinent
36:56 sur les camionnettes que sur les voitures
36:58 individuelles ? - Parce qu'en fait, c'est sur des usages
37:00 qui peuvent être plus courts. Par exemple,
37:02 vous avez l'usage de la Poste. La Poste utilise des véhicules
37:04 électriques parce qu'ils font des stop-and-go.
37:06 Ils ne font pas finalement un grand trajet,
37:08 ils font faire des stop-and-go.
37:10 Vous n'avez pas la même contrainte que sur un véhicule
37:12 qui va rouler sur une route à 90 à l'heure.
37:14 - J'aimerais aller très vite sur la question
37:16 des biocarburants. Il en est beaucoup
37:18 question, notamment du superéthanol
37:20 E85 ou des carburants
37:22 de synthèse comme le E-Fuel. Ils sont tous
37:24 présentés comme l'essence du futur et pourtant
37:26 très controversés. Est-ce que l'État a raison
37:28 de leur multiplier les cadeaux fiscaux ?
37:30 - Moi, je ne suis pas d'accord sur ça,
37:32 parce que c'est un sparadrap sur une jambe de bois,
37:34 vous voyez. Et que lorsqu'on a
37:36 négocié notamment la fin
37:38 de la vente des véhicules thermiques au niveau
37:40 européen, les Allemands sont arrivés en disant
37:42 "Nous, on veut le carburant de synthèse". Mais aujourd'hui,
37:44 il n'y a pas beaucoup de pays qui savent faire
37:46 des carburants de synthèse. Et ça, il faut le dire,
37:48 même nous, en Europe, on ne sait pas le faire. Donc je crois
37:50 que ce n'est pas une bonne idée. Et la vraie question,
37:52 on n'en a pas du tout parlé, mais je voudrais le redire,
37:54 c'est que s'il faut changer des flottes,
37:56 il faut commencer par les camions.
37:58 Parce que vous et moi, les gens, les particuliers,
38:00 on peut choisir l'alternative
38:02 à la voiture. On peut prendre un train, un bus,
38:04 un métro, etc. Les marchandises, c'est
38:06 un peu compliqué. - Caréma Daly, vous oubliez la fracture
38:08 territoriale. Et d'ailleurs, d'ici 2025,
38:10 les villes françaises de plus de 150 000 habitants
38:12 devront mettre en place
38:14 des zones à faible émission. 43
38:16 métropoles sont concernées, mais
38:18 ces restrictions de circulation sont très
38:20 fortement critiquées. Elles risquent
38:22 effectivement de creuser un peu plus la fracture
38:24 territoriale. - Alors d'abord, la fracture territoriale,
38:26 elle existe. On a dit à tout le monde
38:28 "Ayez un véhicule",
38:30 non. Deux véhicules,
38:32 soyez notamment dans le périurbain
38:34 ou dans le rural,
38:36 ayez une belle maison, etc. Sauf que
38:38 à l'achat de deux véhicules
38:40 pour des ménages, aujourd'hui,
38:42 un véhicule en France, c'est
38:44 5 000 euros, donc ça fait 10 000 euros
38:46 par an. Et pas d'autres
38:48 alternatives. D'où la question
38:50 du déni, et là on peut le dire, de la
38:52 puissance publique sur la question
38:54 notamment des Gilets jaunes. Les Gilets jaunes
38:56 disaient "Mais attendez, c'était la goutte d'eau qui a fait
38:58 déborder le vin", mais parce qu'ils n'avaient pas d'alternative.
39:00 Donc, à votre question
39:02 sur les ZFE, les ZFE vont
39:04 devoir être accompagnés
39:06 par des alternatives. Moi, je pense que
39:08 je suis pour les zones à faible
39:10 émission. C'est quand même dur
39:12 pour des gens de leur dire "Tel véhicule,
39:14 vous pouvez pas passer, etc." parce
39:16 que vous avez un SUV électrique, vous
39:18 passez. Quelqu'un qui a pas les moyens
39:20 et qui est en diesel,
39:22 il passe pas. Donc là, il y a quelque chose
39:24 d'injuste en termes social.
39:26 Donc moi, je dis, il faut mettre
39:28 en place les ZFE parce que c'est un
39:30 moyen incroyable sur la pollution
39:32 de l'air qui est, je rappelle, c'est pas moi qui le dis,
39:34 c'est l'ONU, l'OMS qui dit
39:36 "C'est la maladie du XXIe siècle". Donc,
39:38 il faut le faire. Maintenant, il va falloir
39:40 programmer et intensifier
39:42 notamment les alternatives. - Difficile de parler
39:44 de mobilité sans parler de l'A69
39:46 et de ses 53
39:48 kilomètres d'autoroute défendues par la présidente
39:50 d'Occitanie, Carole Delga, pour relier
39:52 Castres à Toulouse, qui prévoit
39:54 d'ensevelir sous le bitume 400 hectares
39:56 agricoles, de forêts et de zones humides.
39:58 Un tronçon très décrié. Est-ce que
40:00 ce projet, à l'heure
40:02 des injonctions à la sobriété,
40:04 n'est-il pas anachronique ? - C'est anachronique
40:06 et c'est une aberration économique,
40:08 environnementale, tout ce que
40:10 vous voulez. En plus, une autoroute où on va faire
40:12 payer 17 euros, vous voyez, c'est un peu
40:14 une autoroute, un peu de riche. Alors que
40:16 la solution, là, il y a une voie
40:18 notamment qu'on appelle le train.
40:20 Donc, il faut la rénover, l'électrifier, et puis
40:22 tout le monde sera content. - François Roudier, sur l'A69.
40:24 - Ecoutez, nous, sur les autoroutes,
40:26 ce qu'on voit, c'est que les autoroutes,
40:28 ça devient effectivement la route du
40:30 riche. On a toutes les bornes électriques
40:32 sur les autoroutes, ce qui fait qu'on
40:34 reporte tout le trafic des camions,
40:36 les 3,5 tonnes qui roulent
40:38 le week-end parce qu'ils ne sont pas interdits
40:40 et qui détruisent les routes. Et on
40:42 a un état des routes en France, qu'elles soient
40:44 même nationales ou alors
40:46 pire, lorsqu'on descend, qui est horrible,
40:48 qui en plus, maintenant, arrive à la
40:50 charge des communautés
40:52 de communes qui ne peuvent pas les entretenir.
40:54 On déclasse des chemins en France,
40:56 des routes tous les ans.
40:58 Donc, vous parlez de fractures territoriales. La mobilité
41:00 en ruralité actuellement, c'est catastrophique.
41:02 Moi, j'essaie et j'en viens.
41:04 - Donc, il faudrait développer le rail,
41:06 comme le dit Carémadé, très justement.
41:08 Et les mobilités douces ? - Quand on dit développer le rail, ça veut dire déjà
41:10 faire venir le rail. Vous avez plusieurs
41:12 lignes. - Il y a beaucoup de lignes qu'il faudrait réouvrir.
41:14 - Si, on va les réouvrir. - Parce que le train, c'est
41:16 gagnant, gagnant. Gagnant pour le climat,
41:18 gagnant pour le pouvoir d'achat et gagnant pour l'emploi
41:20 parce qu'il va falloir embaucher.
41:22 - Mais ce que vous disiez, c'est qu'on nous a vendu un modèle
41:24 américain avec l'étalement urbain. Aujourd'hui, on ne peut plus
41:26 se passer de la bagnole. Comment fait-on pour se passer de la bagnole ?
41:28 - Absolument. Eh bien, ça tombe bien. C'est pour ça que
41:30 demain, la voiture, elle ne sera plus dans la possession.
41:32 Elle sera partagée parce que tout
41:34 le monde roule un peu tout seul dans sa voiture.
41:36 Et dans le périurbain, il faut revoir
41:38 les cadences. Le covoiturage, c'est quelque chose
41:40 d'extraordinaire. On n'a même pas réellement
41:42 de route de covoiturage. Ça se fait partout
41:44 en Europe, sauf chez nous. Et ensuite,
41:46 il va falloir aussi apprendre du
41:48 Covid. Que nous a appris le Covid ?
41:50 Ce qu'on pouvait un peu aussi,
41:52 se déplacer, faire du télétravail.
41:54 Eh bien, il y a plein de gens qui sont dans les zones rurales
41:56 qui veulent un jour ou deux
41:58 de télétravail.
42:00 Voir des lieux qu'on appelle les tiers-lieux.
42:02 Des lieux intermédiaires où on puisse aller travailler,
42:04 où il y a du lien social, etc. - Effectivement, télétravailler
42:06 un jour par semaine, c'est 170 000
42:08 barils en moins. - Vous voyez...
42:10 - Trois jours, c'est 500 000 barils de pétrole en moins.
42:12 - Sauf qu'il faut penser à toutes les professions qui n'ont pas
42:14 le choix. Je pense aux caissières, aux infirmières,
42:16 etc., qui n'ont pas le choix.
42:18 Donc, c'est dans ces lieux-là où on roule
42:20 beaucoup, où il faut mettre des bornes électriques,
42:22 où c'est là où ce sera gagnant. - Et donc, il faut aussi
42:24 imaginer des villes plus compactes, plus propices.
42:26 - Aussi. - À la marche. - Voilà.
42:28 - Et au vélo. - Et au vélo. Alors, en
42:30 attendant de façonner nos villes autrement
42:32 et de laisser la reine du bitume
42:34 au garage, certains se sont
42:36 mis en marche pour encourager nos enfants
42:38 à faire à pied, ce qu'ils font habituellement
42:40 en voiture. Tout le monde y gagne, la planète,
42:42 les marcheurs et le lien social.
42:44 Qui dit mieux ? Le monde de demain commence
42:46 aujourd'hui, comme le montrent sur le portage
42:48 d'Alexis Breton et Jawar Nadi.
42:50 [Musique]
42:57 - Marole Embry dans le Val-de-Marne,
42:59 au petit matin.
43:01 - Allez, des chaussettes.
43:03 - Mayanne,
43:05 3 ans et demi, se prépare à aller à l'école.
43:07 Lauriane, sa maman, veille
43:09 à ce que rien ne manque dans le cartable
43:11 de son petit champion.
43:13 - Tu prends Doudou, tu mets ta petite, elle est où la petite ?
43:15 Et la voiture ? On prend Doudou,
43:17 et c'est tout, ok ?
43:19 Allez, tiens, le sac.
43:21 Allez.
43:23 Les chaussures, elles sont en bas.
43:25 [Musique]
43:29 - On essaye de se préparer,
43:31 on est généralement à l'avance
43:33 parce qu'ils se lèvent très tôt, fort heureusement.
43:35 Et du coup, on les dépose
43:37 pour 8 heures. Tu fais le bisou à ta soeur ?
43:39 Le bisou ?
43:41 Le bisou, le bisou ?
43:43 Ouais !
43:45 Bonne journée !
43:47 Allez, à tout à l'heure !
43:53 - En petite section de maternelle,
43:55 Mayanne se sert d'un moyen
43:57 de locomotion original pour aller à l'école.
43:59 - Est-ce qu'ils sont déjà arrivés ?
44:01 - Oui.
44:03 - Tu crois ?
44:05 - Oui.
44:07 - Elle utilise ses pieds.
44:09 Ça n'a l'air de rien, mais un enfant qui marche
44:11 aujourd'hui, c'est un adulte
44:13 qui ne prendra pas une voiture demain.
44:15 - Bonjour, Agnès !
44:17 - Bonjour, Mayanne !
44:19 Tu vas bien ?
44:21 - Oui.
44:23 - Bonjour !
44:25 - Ça va ?
44:27 - Agnès Lachic conduit le Pédibus depuis 2009.
44:29 - Regarde !
44:31 - Une alternative simple et efficace
44:33 à la voiture ou au car scolaire.
44:35 Quand on sait qu'en moyenne,
44:37 les enfants habitent à moins de 2 km
44:39 de leur école et qu'un adulte
44:41 sur deux privilégie la voiture
44:43 pour les trajets de 1 km
44:45 ou moins.
44:47 - Eh oui, tu vois, c'est la saison,
44:49 quand même, en automne, les marrons tombent.
44:51 On découvre les saisons.
44:53 Et ça, c'est vraiment fabuleux.
44:55 Donc, ils apprennent les noms des fleurs
44:57 et puis on leur apprend aussi
44:59 à traverser les rues.
45:01 Puis les enfants sont éveillés, ils sont bien, quoi.
45:03 Puis surtout,
45:05 on donne un exemple pour les autres parents
45:07 pour que les enfants marchent à pied, quoi.
45:09 - Imaginez,
45:11 aujourd'hui, 30 % des 26 millions
45:13 de trajets quotidiens pour emmener les enfants
45:15 à l'école se font en voiture.
45:17 Ce sont autant de trajets
45:19 qui pourraient être évités grâce à la marche.
45:21 Et c'est aussi un bon moyen
45:23 de lutter contre la sédentarité des enfants,
45:25 dont 17 % sont en surpoids en France.
45:27 - Bonjour, Sofiane !
45:29 Bonjour, Julie !
45:31 - Ça va ? - Ça va.
45:33 Donc, voilà l'arrêt
45:35 de la ligne de pédibus.
45:37 Ici, c'est Batman.
45:39 Et ça, c'est les enfants qui ont donné le nom
45:41 tout au début du pédibus.
45:43 Allez, on y va ?
45:45 - Cette année, 24 enfants sont inscrits
45:47 à ce service d'accompagnement gratuit
45:49 assuré par des retraités, mais aussi par certains parents,
45:51 comme Flavie, mère de 2 petites passagères.
45:53 - Moi, les filles sont ravies
45:55 de faire le pédibus tous les jours.
45:57 Les copains, elles...
45:59 Sauf quand il pleut, c'est moins rigolo.
46:01 - Ça permet d'éviter de prendre, du coup, la voiture...
46:03 - Tout à fait.
46:05 Tout à fait. Ça, c'est vrai que c'est pratique.
46:07 - Allez, Victor, viens.
46:09 - Donc, les 2 dernières là-bas, c'est mes filles.
46:11 - Bonjour, Maëlle !
46:13 Bonjour, Edane !
46:15 - Ça va ? - Le pédibus,
46:17 c'est sympa pour les enfants.
46:19 - Maintenant que la voiture s'arrête.
46:21 Elle s'est arrêtée,
46:23 donc on peut passer.
46:25 Merci ! On lui dit merci beaucoup.
46:27 - Mais ce n'est pas de tout repos pour les adultes.
46:29 - Maëlle !
46:31 Voilà. On se met là
46:33 et on regarde d'abord à gauche
46:35 et après à droite.
46:37 Voilà.
46:39 - En France, la voiture individuelle représente
46:41 54% des émissions de gaz à effet de serre
46:43 du secteur des transports.
46:45 Favoriser la marche,
46:47 notamment pour les petits trajets,
46:49 serait donc très bénéfique pour notre planète.
46:51 - Merci, monsieur.
46:53 - Bonjour !
46:55 - C'est les petits pas qui font de grandes avancées.
46:57 - Donc, c'est 25 minutes de marche,
46:59 mais vous voyez, même une petite section maternelle
47:01 peut tout à fait faire ça.
47:03 Et la majorité des enfants
47:05 habitent à peu près à 20 minutes.
47:07 Donc, tout le monde pourrait venir à pied.
47:09 Allez, on va à l'école.
47:11 - Depuis 14 ans,
47:13 Agnès a accompagné
47:15 plus de 400 enfants.
47:17 En France, on compte 800 lignes de pédibus
47:19 et de nouvelles sont créées chaque année.
47:21 Elles ouvrent tout le chemin
47:23 vers un avenir plus durable.
47:25 - Alors, les pédibus, ça marche du toner.
47:27 Si on additionne les 12 millions d'élèves
47:29 de la maternelle au lycée
47:31 aux millions d'enseignants,
47:33 c'est 26 millions de déplacements
47:35 à les retours chaque jour.
47:37 Ce n'est pas anonyme en termes d'empreintes carbone.
47:39 Ça fait du monde.
47:41 - Absolument, ça fait beaucoup de monde.
47:43 Le problème que nous avons, c'est
47:45 de véritablement se dire qu'il faut remarcher.
47:47 Là, on a un problème.
47:49 Ça veut dire que vraiment, la voiture nous a pris
47:51 pas seulement de l'imaginaire, mais aussi
47:53 dans nos comportements. - La voiture est le moyen privilégié
47:55 pour les trajets de domicile-travail,
47:57 y compris pour les trajets de moins de 5 km.
47:59 Ces distances, elles pourraient facilement
48:01 être faites
48:03 en mobilité douce, non ?
48:05 Qu'est-ce qui coince ?
48:07 - C'est surtout ennuyeux sur les trajets
48:09 d'un kilomètre. Attention, parce que les 5 km,
48:11 c'est souvent 5 + 5 + 5.
48:13 On va poser les enfants, on va faire des courses,
48:15 on va au travail. 15 km,
48:17 là, on entre quand même dans des
48:19 moments où il n'y a pas de plus long, on prend la voiture.
48:21 C'est vrai que
48:23 les enfants qui sont emmenés en voiture
48:25 à l'école, écoutez, pour moi,
48:27 qui suis un vieillard,
48:29 qui ai passé ma jeunesse à pied,
48:31 puis après en vélo, en cassant plusieurs vélos,
48:33 qui devaient faire 10 km par jour
48:35 aller-retour et venir manger à la maison,
48:37 je ne comprends pas. Où est venue cette mode ?
48:39 Est-ce qu'il y a eu une peur
48:41 sur la sécurité des enfants ? C'est possible.
48:43 - Ce qui est vrai, c'est que nos territoires ont été
48:45 aménagés pour et par la voiture,
48:47 aujourd'hui. - Oui, quelque chose qu'on voit
48:49 dans le reportage, c'est que le trottoir n'est pas très large.
48:51 - Oui, oui, absolument. - C'est quelque chose qui est comme ça.
48:53 C'est-à-dire que la voiture a pris de la place, a grignoté
48:55 et il n'y a plus de place. Un parent ne laisse pas
48:57 son enfant aller à l'école tout seul, s'il y a un risque de se faire
48:59 renverser. Donc il y a aussi un vrai enjeu
49:01 d'aménagement. D'aménagement de circuits
49:03 sécurisés, etc. Donc il y a plusieurs
49:05 collectivités qui travaillent dessus. Mais quand
49:07 on regarde en détail le programme des villes, c'est
49:09 très compliqué de remettre des équipements,
49:11 de recréer de la signalétique,
49:13 des choses qui soient sûres pour faire ralentir
49:15 les voitures, pour que les enfants soient bien...
49:17 - Mais concrètement, comment sortir du
49:19 tout bagnole, sachant que le véhicule
49:21 reste la pierre angulaire de nos déplacements ?
49:23 - Bah ça la reste, la pierre
49:25 angulaire de nos déplacements.
49:27 - Elle est obligatoire pour beaucoup de gens ?
49:29 - Oui, et surtout dans le périle urbain
49:31 et dans le rural. Dans les centres-villes
49:33 aujourd'hui, on a les alternatives.
49:35 On a la marche, on a le vélo,
49:37 on a les transports en commun, etc.
49:39 Le problème, c'est qu'il faut un choc d'offres,
49:41 notamment d'alternatives, dans le milieu
49:43 rural et dans le milieu urbain.
49:45 Par exemple, il n'y a pas assez, notamment,
49:47 de fréquences de transports publics
49:49 dans le rural et dans le périle urbain.
49:51 Comment se fait-il ?
49:53 - Macron ambitionne de réduire d'ici à 2030
49:55 nos émissions de gaz à effet de serre de 55%
49:57 par rapport à 1990,
49:59 et il s'est engagé à lancer
50:01 13 nouveaux projets de RER
50:03 métropolitain, Carine Madéli.
50:05 - Tout d'abord, les RER métropolitains, on est tous contents,
50:07 c'est super, il y a plus de trains, etc.
50:09 Sauf qu'il faut dire la vérité.
50:11 Ça veut dire que ça va prendre du temps,
50:13 ça veut dire que ça va prendre une dizaine d'années.
50:15 Qu'est-ce qu'il faut faire maintenant ? Tout de suite,
50:17 il faut rénover les lignes de TVR.
50:19 Ça, c'est la première chose. Deuxième chose,
50:21 il faut plus de TVR, hop, choc de l'offre,
50:23 plus de fréquences.
50:25 Deuxième objectif. Troisième objectif,
50:27 c'est le matériel roulant.
50:29 - C'est obsolète ?
50:31 - Si je n'ai pas de train, je ne peux pas
50:33 mettre des trains sur les lignes.
50:35 Donc, il faut rénover la signalisation
50:37 et il faut lancer l'industrie du train.
50:39 Et c'est là où c'est extraordinaire.
50:41 - Le fameux ticket climat !
50:43 - Et là, ça revient aussi au choc
50:45 de ce qu'on dit, l'accessibilité.
50:47 C'est la raison pour laquelle, au niveau européen,
50:49 tout le monde met en place, notamment,
50:51 des tickets climat. Ce sont des abonnements
50:53 illimités pour prendre n'importe où.
50:55 En France, notamment, pour 49 euros,
50:57 tous les TVR et tous les transports en commun.
50:59 Parce que le gouvernement est malin.
51:01 - Ça a été mis en place en Autriche, en Allemagne, en Espagne ?
51:03 - En Allemagne, en Espagne, et récemment,
51:05 en Portugal. Sauf que le gouvernement est malin,
51:07 il parle de pass-rail, pas de ticket climat.
51:09 Parce que lui, il voit juste les TVR
51:11 et pas les transports en commun, alors qu'il faut
51:13 de l'intermodalité. Les gares, quand je sors
51:15 d'une gare, je dois avoir un vélo,
51:17 un covoiturage, un bus, etc.
51:19 Et c'est ça qui va faire en sorte que demain,
51:21 la voiture prendra de moins en moins de place.
51:23 - Il y a un vrai enjeu...
51:25 - Vous êtes d'accord, Marie ? - Complètement, carrément.
51:27 - On va vous laisser.
51:29 - Il y a un vrai enjeu à ce que tous les différents
51:31 modes soient chez... - Vous êtes d'accord, François Roudier ?
51:33 - Ah mais sur l'intermodalité, oui aussi.
51:35 - Ah, bah voilà !
51:37 - Unanimité.
51:39 - Vous arrivez avec un train,
51:41 et l'autre train, la correspondance, est partie depuis 5 minutes.
51:43 Ça, c'est récurrent dans nos gares en France, c'est typique.
51:45 Donc il y a un vrai sujet d'intermodalité.
51:47 Et puis vous arrivez dans la gare, il n'y aura pas forcément de stationnement,
51:49 il n'y aura pas forcément le mode
51:51 adapté pour vous rendre à destination.
51:53 Donc là, il y a un vrai enjeu.
51:55 Et là, aujourd'hui, c'est largement insuffisant.
51:57 Il n'y a pas de politique majeure dessus.
51:59 - En attendant, on ne le répétera jamais assez,
52:01 le passé est un bon indicateur de l'avenir,
52:03 comme chaque mois,
52:05 Charlotte Epal est allée fouiller dans les archives de l'INA
52:07 et nous a exhumé ceci, hier encore,
52:09 c'est notre coup d'œil dans le rétro, et c'est maintenant.
52:11 [Générique]
52:18 Cette fois, c'est sérieux.
52:20 À partir du 1er janvier prochain,
52:22 la lutte contre les fumées produites par les véhicules
52:24 va entrer dans une phase active.
52:26 Regardez ces camions, les principaux fautifs.
52:28 À chaque fois que leur conducteur change de vitesse,
52:30 c'est un nuage noir qui se répand dans l'atmosphère.
52:32 Et ces fumées proviennent le plus souvent
52:34 d'un mauvais réglage du moteur.
52:36 Aussi, l'arrêté que M. Marc Jacquet,
52:38 ministre des Travaux Publics, vient de signer,
52:40 prescrit-il qu'aucun véhicule
52:42 ne devra désormais émettre de fumée
52:44 nettement teintée ou opaque.
52:46 Seules pourront être tolérées des émissions fugitives
52:48 au moment des changements de régime du moteur.
52:50 Aussi bien les poids lourds que les voitures particulières.
52:52 Qui va contrôler ?
52:54 Les services techniques de la police.
52:56 À Paris, par exemple,
52:58 la préfecture de police dispose d'appareils spéciaux
53:00 qu'on branche sur le tube d'échappement des véhicules
53:02 et qui mesurent la quantité
53:04 et la nocivité des fumées.
53:06 Le camion dont l'échappement est jugé défectueux
53:08 doit être réglé et présenté à nouveau.
53:10 Si l'amélioration obtenue n'est pas suffisante,
53:12 une amende pourra,
53:14 à partir du 1er janvier,
53:16 être infligée aux contrevenants.
53:18 Quelques dérogations exceptionnelles
53:20 peuvent être pendant un an encore,
53:22 qui seront accordées par le service des mines.
53:24 Mais le combat contre la pollution de l'air des villes
53:26 exigeait une action immédiate.
53:28 Elle est engagée.
53:30 Elle est engagée, Carine Madéli ?
53:32 Elle était déjà engagée il y a quelques années.
53:34 Déjà à l'époque, on calculait les particules d'air fine.
53:36 Mais aujourd'hui, ça devient
53:38 toujours un des problèmes moteurs de nos sociétés.
53:40 C'est le cas de le dire, toi.
53:42 J'ai bien joué sans dire.
53:44 Jeu de mot naturel.
53:46 Impossible de nous quitter sans donner la parole
53:48 à notre éco-activiste préférée.
53:50 Camille Etienne est de retour et elle a quelque chose
53:52 à vous dire. C'est l'heure de sa carte verte.
53:54 Camille Etienne, c'est à vous.
53:56 Le moins qu'on puisse dire, c'est que la tendance
54:04 n'est pas au claquage de portières.
54:06 L'industrie de l'auto n'a pas prévu de rouler au pas.
54:08 On n'a jamais vendu autant
54:10 de SUV qu'aujourd'hui.
54:12 Et même s'il faut 10 tonnes de pétrole rien que pour
54:14 construire une voiture, que c'est un des plus
54:16 gros facteurs d'émission de gaz à effet de serre
54:18 dans notre pays, que les particules fines
54:20 donnent des cancers du poumon à nos enfants,
54:22 leur vente explose.
54:24 Explose littéralement.
54:26 Même le président de la République, il y a quelques jours,
54:28 dans un de ses discours officiels et polissés,
54:30 nous glissait pourtant, nous les français,
54:32 on adore la bagnole.
54:34 Alors j'ai repensé à tous ces souvenirs
54:36 construits dans mon techno-cocon.
54:38 Aux confessions sur le volant, aux copilotes monomaniaques
54:40 de Dalida, aux engueulades avec mon frère
54:42 pour savoir qui monterait devant.
54:44 Aux sandwichs triangle, les plus chers
54:46 et les moins bons de France, sur les aires d'autoroute.
54:48 Aux jambons gourdis, à la légère nausée
54:50 et au retour de nuit.
54:52 C'est vrai qu'on y est bien, dans notre techno-cocon.
54:54 Qu'on croit y être bien.
54:56 Quand on oublie que les paysages qui glissent à la fenêtre
54:58 disparaissent pour de vrai à mesure
55:00 des kilomètres. Qu'on croit y être bien
55:02 jusqu'à ce qu'on se prenne le mur
55:04 de la catastrophe climatique en plein pare-brise.
55:06 L'impact sans airbag ni ceinture
55:08 de sécurité vers lequel l'industrie
55:10 automobile nous projette à vive allure.
55:12 Alors la vraie question, et peut-être
55:14 la seule qui devrait nous obséder,
55:16 c'est de savoir si la voiture roule
55:18 encore pour nous, ou bien si c'est
55:20 nous qui roulons pour que son industrie continue
55:22 à faire du profit.
55:24 Le philosophe Jacques Ellul nous alertait déjà
55:26 sur le lien de domination entre l'homme
55:28 et l'outil. Il y a ce point de bascule
55:30 au-delà duquel le rapport s'inverse.
55:32 On devient à son service plus que l'inverse.
55:34 En 1973 déjà,
55:36 Ivan Illich faisait le calcul.
55:38 Un Américain moyen consacre
55:40 1600 heures par an à sa voiture.
55:42 Soit 4 heures par jour. Il y a le temps
55:44 en voiture, certes, mais à celui-ci s'ajoute
55:46 le temps de travail pour la payer,
55:48 puis payer l'essence, les payages, l'assurance,
55:50 les impôts et les réparations.
55:52 Pour tout ce temps donné, l'Américain moyen
55:54 parcourt une distance de 10 000 km.
55:56 Il avance donc
55:58 à 6 km/h. C'est à peine plus
56:00 qu'une marche rapide.
56:02 Je rentre d'un week-end de mobilisation
56:04 contre l'autoroute A69 entre
56:06 Castres et Toulouse. Pour gagner 17
56:08 minutes, des centaines d'arbres, autant
56:10 d'hectares de terre cultivable et des gens
56:12 expropriés de leur maison sur le tracé.
56:14 Entre garder des champs pour se nourrir
56:16 et agrandir les routes pour aller plus vite au
56:18 supermarché, ils ont choisi.
56:20 Dans une tribune, plus de 1500 scientifiques
56:22 du GIEC et du CNRS nous alertaient.
56:24 Chaque mètre carré de terre
56:26 que l'on artificialise participe à
56:28 compromettre les conditions de vie sur Terre.
56:30 Pourtant, d'ici à 2050,
56:32 il y aura plus de 25 millions de
56:34 kilomètres de routes supplémentaires, soit
56:36 600 fois le tour de la Terre.
56:38 On roule à plus de 110 km/h
56:40 vers une sixième extinction de masse.
56:42 À coup de pelleteuses, nous sommes en train de manger
56:44 le monde et de couler la vie sous du bitume.
56:46 Pour gagner quelques minutes de trajet,
56:48 ils accélèrent notre chute.
56:50 Alors on continuera, avec abnégation,
56:52 à ralentir leur monde. Contre
56:54 leur payage, à leur faire payer l'enlaidissement
56:56 du monde qui nous impose.
56:58 Face à leur couloir de bitume, on choisit
57:00 des chemins de traverse. Face à la honteuse
57:02 direction du monde qui nous dit inévitable,
57:04 on construit une autre route. Venez,
57:06 la voie est libre.
57:08 François Roudier, je vous vois écouter ça avec beaucoup d'attention.
57:10 Je respecte toutes les religions.
57:12 Une religion malade.
57:14 Vous n'avez pas envie de répondre
57:16 quelque chose à ce billet de Camille Etienne ?
57:18 C'est un beau texte.
57:20 Oui.
57:22 On partage pas mal de choses, oui, c'est vrai.
57:24 Détruire des paysages, c'est une catastrophe.
57:26 Utilisons déjà tout ce qui a été implanté
57:28 pour l'améliorer.
57:30 Vous allez nous aider contre la 69.
57:32 Avant de se quitter,
57:34 voici quelques scènes,
57:36 recommandations de lecture pour aller plus loin.
57:38 Je ne veux pas vous faire plaisir,
57:40 François Roudier, moins d'auto pour aller
57:42 au boulot de Corentin Lemartelot
57:44 dans la collection "Je passe à l'acte"
57:46 aux éditions Actes Sud.
57:48 "Tout comprendre
57:50 ou presque sur le
57:52 climat", préfacé par Valérie
57:54 Masson-Delmotte aux CNRS Éditions
57:56 et "Chaleur
57:58 humaine" de
58:00 Nabil Wakim
58:02 aux éditions du Seuil 1 mètre.
58:04 Voilà, bonne lecture d'ici là.
58:06 Et heureux, on se retrouve le mois prochain
58:08 pour vous parler du béton
58:10 vaste sujet.
58:12 Merci à tous.
58:14 [Musique]
58:16 [Musique]

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