Haïm Korsia est l'invité de "Face à Duhamel" au lendemain des marches contre l'antisémitisme qui a réunit 185.000 personnes dans toute la France.
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00:00 Suite de BFM TV, à cette heure-ci, c'est le moment de retrouver Alain Duhamel.
00:04 C'est l'heure du "Face à Duhamel".
00:06 Avec aujourd'hui en débatteur le grand raman de France, Saïm Korsia.
00:17 Bonsoir.
00:18 On va bien sûr revenir sur cette marche contre l'antisémitisme.
00:21 Bonsoir Alain.
00:22 La semaine dernière, vous aviez évoqué cette manifestation
00:25 et vous avez même donné un étiage, presque pris un pari.
00:29 Je ne dirais pas un pari, mais un étiage.
00:32 Vous aviez pris un risque aussi.
00:34 On va vous réécouter et puis on en parle.
00:36 Si par hypothèse il y a 30 000 personnes dimanche, c'est une catastrophe.
00:41 Si il y en a 100 000, c'est un échec.
00:44 Si il y en a 300 000, c'est un succès.
00:46 Donc, 100 000 hier à Paris, 180 000 dans toute la France.
00:52 On est entre quoi ? Semi-échec ? Demi-succès ?
00:55 Échec ? Je ne vais pas m'en tirer par une boutade,
01:00 mais j'aurais préféré qu'il y ait trois fois plus de monde.
01:02 Si vous me demandez mon désir, je trouve que c'est un sujet,
01:05 lutter contre l'antisémitisme, qui mérite ça.
01:08 Il ne faut pas oublier qu'à Londres, 48 heures avant,
01:11 il y en avait eu 300 000 en faveur de la Palestine.
01:13 Donc là, je ne rêvais pas.
01:15 Par ailleurs, j'ai quand même un petit peu de mémoire.
01:17 Je me rappelle des manifestations.
01:19 Il y a eu des manifestations plus nombreuses sur des sujets différents.
01:22 Beaucoup moins maintenant, je suis d'accord.
01:25 Mais si on fait à l'échelle de la France, par exemple,
01:30 rappelez-vous, pendant les retraites, très souvent,
01:32 le soir, on disait 600 000, 700 000.
01:35 - Pas loin du million, même. - Oui, pour l'hexagone.
01:38 Donc, je ne rêvais pas. Maintenant, comme j'essaye...
01:40 - Je ne suis pas un spécialiste, et on parle de chiffres.
01:44 D'abord, c'était un grand succès, parce que quand on était dedans,
01:47 c'était une sorte de nappe de partage, de bonheur,
01:52 presque de bienveillance.
01:54 Et je dirais que ça, ça n'a pas de prix.
01:56 Maintenant, je ne suis pas un spécialiste,
01:58 je décompte du nombre de manifestants.
01:59 Je n'ai pas manifesté souvent dans ma vie.
02:01 Mais vous voulez me dire, pardon, je ne suis quand même pas complètement idiot,
02:05 et j'ai une maigre connaissance,
02:07 mais tout de même, des matchs de football, ça, c'est ma vie.
02:11 Vous allez me dire que toutes les personnes qui avaient rentré quasiment au Stade de France,
02:15 même pas en rêve.
02:17 Parce que quand on est arrivé, moi, j'étais tout devant en tenir la banderole,
02:20 quand on est arrivé au Luxembourg,
02:23 les gens commençaient seulement à bouger aux Invalides.
02:26 - Oui, oui, mais on l'a vu.
02:27 - Donc, on n'est pas 105 000, je ne sais pas comment c'est pris en compte.
02:30 Moi, je ne vais pas vous dire...
02:31 - On met en cause des chiffres de la préfecture.
02:33 - Non, non, non, je n'en sais rien.
02:34 Mais je dis simplement, la perception,
02:36 on parle beaucoup de perception en ce temps-ci,
02:38 la perception, c'est que nous étions nombreux,
02:40 et en tout cas, tous ceux qui étaient le faisaient au nom des 70 millions.
02:43 - Alors, moi, ce que je voulais dire,
02:45 puisque je n'avais pas tout à fait terminé,
02:47 ce que je voulais dire,
02:49 c'est qu'en revanche, ce que j'ai apprécié,
02:51 c'était le climat qui était très perceptible,
02:54 qui était un climat d'unité,
02:56 qui était un climat de sérieux,
02:59 qui était un climat de tolérance,
03:01 où, au fond, on voyait des Français défiler
03:05 comme on rêverait de voir défiler les Français.
03:07 Donc, ça, ça me plaisait.
03:08 Donc, je pensais en regardant ça,
03:10 j'ai passé toute la journée à regarder,
03:12 depuis que ça a commencé,
03:14 je me disais, il y a la qualité,
03:16 et j'aurais rêvé qu'il y ait encore plus de quantité.
03:19 - Mais, alors, au-delà de votre métier,
03:22 donc, on pourrait considérer que tous ceux qui ont regardé,
03:25 qui ont participé à la manifestation,
03:28 en la suivant à la télé,
03:30 étaient, au fond, motivés, intéressés par la question,
03:32 et ne sont pas les appés sur un feuilleton,
03:34 x, y, z, sur une autre chaîne.
03:35 Donc, en fait, vous dites que,
03:38 aujourd'hui, le mode d'engagement
03:41 ne passe plus forcément par
03:43 fouler le pavé de nos rues,
03:45 mais passe par un autre type d'engagement.
03:47 Et moi, je trouve que, c'était très joli, d'ailleurs,
03:49 la façon que le président du Sénat
03:51 et la présidente de l'Assemblée nationale
03:53 ont eu de conclure cette marche,
03:55 chacun avec leur mot,
03:57 et le président du Sénat a dit,
03:59 c'était une marche, maintenant, il ne faut qu'une démarche.
04:01 Autrement dit, ça ouvre quelque chose.
04:02 J'aime bien la formule, elle est jolie.
04:04 En fait, elle dit que ce ne peut être qu'un début.
04:06 - D'accord, mais certes, mais, excusez-moi
04:08 d'être un peu l'avocat du diable dans cette histoire,
04:11 mais peu de jeunes,
04:13 peu de Français de confession musulmane,
04:16 le principal parti de gauche n'y était pas,
04:18 les Insoumis, le président, pour d'autres raisons,
04:20 n'a pas voulu venir.
04:21 - Pas le président de la Conférence épiscopale de France ?
04:24 - Oui.
04:25 - Oui, il y avait un évêque.
04:26 - Il y avait un évêque, oui, il n'y avait pas lui.
04:28 - Il y avait des musulmans.
04:29 - Tout le monde n'était pas dans la rue,
04:30 c'est-à-dire que toutes les composantes
04:32 de la société française n'ont pas manifesté dimanche.
04:34 - Je ne sais pas si on peut considérer
04:36 qu'il faut que chacun vienne avec une sorte
04:38 de carte d'identité,
04:39 si on vient dire "voilà tout ce que je vois".
04:41 - Les jeunes, vous voyez qu'il n'y avait pas beaucoup de jeunes,
04:43 à part peut-être des jeunes qui étaient directement concernés
04:45 de confession juive,
04:46 mais c'était quand même une manifestation
04:48 où les cheveux blancs étaient plus nombreux
04:51 que les cheveux d'urgence.
04:53 - Mais c'est vrai qu'il y avait,
04:55 moi ce que j'ai trouvé de positif,
04:57 c'est qu'il y avait visiblement un esprit de concorde.
05:00 Or la concorde, c'est très souvent ce qui manque à la France,
05:03 et là c'était un bon sujet pour qu'il y ait de la concorde.
05:05 - C'était même bon enfant,
05:07 dans la manifestation c'était bon enfant.
05:09 - C'était poli ?
05:10 - Non, c'était poli, si vous voulez, au sens de polité.
05:13 - Recueillis courtois.
05:14 - Courtois, des applaudissements,
05:17 des centaines et des centaines,
05:19 des milliers de personnes,
05:21 passées au bord de la manifestation,
05:23 à pouvoir suivre cette manifestation,
05:25 d'une certaine manière y participer.
05:26 Voilà ce qui est important.
05:27 - Alain Duhamel.
05:28 - Oui, moi j'avais, alors j'ai un regret,
05:32 comme je l'avais dit également avant le week-end,
05:37 j'assume, j'ai un regret,
05:40 c'est qu'il n'y ait pas eu au moins un quart d'heure
05:42 pour ouvrir la manifestation Emmanuel Macron,
05:45 et d'ailleurs de préférence Emmanuel Macron et Brigitte Macron.
05:48 - Ah, il aurait pu venir, rester dix minutes et partir.
05:51 - Ça a été envisagé, mais...
05:53 - Pourquoi il a renoncé alors ?
05:55 - Je trouve que ça aurait été un symbole supplémentaire,
05:59 ça n'empêche que ce qui a eu lieu était positif,
06:02 mais ça aurait été un symbole supplémentaire.
06:04 Je sais bien qu'il doit te dire qu'on déséquilibre internationaux...
06:07 - C'est une forme de pinaillage, comme mes amis,
06:10 pinaillage, qui était, qui n'était pas...
06:13 - Pinaillé.
06:14 - Oui, il est pinailleur.
06:15 - Le président Macron, ce n'est pas du pinaillage.
06:17 - Non, je dis simplement, le président a appelé à manifester,
06:20 à venir dans un texte rare, un texte rare.
06:23 - La lettre qui a été publiée dans le Parlement.
06:25 - La lettre qui a été publiée dans le Parlement,
06:26 du président d'Abbaye, qu'on peut voir sur le site de l'Élysée,
06:28 qu'il a encore relu tout à l'heure, pour être certain,
06:30 bien des mots de l'équilibre,
06:31 il a clairement appelé à participer à toutes les manifestations.
06:35 - Mais non, mais attendez, je ne vous dis pas le contraire.
06:37 Je vous dis...
06:39 - Mais ce n'est pas la bonne stratégie.
06:40 - Je vous dis que je comprends très bien pourquoi,
06:42 pour des raisons internationales,
06:43 parce qu'il y a les négociations sur les otages aussi peut-être, etc.
06:46 Il était obligé de réserve, c'est pour ça qu'il a fait une intervention...
06:51 - Comme il nous l'a dit ce matin.
06:52 - Une intervention... Attendez, attendez, attendez.
06:54 Une intervention le vendredi,
06:55 et puis une autre le samedi de correction, etc.
06:57 Bon, et que par ailleurs, il a été,
06:59 et là je vous suis sur ce point,
07:01 totalement clair,
07:03 sa lettre dans le Parisien était impeccable,
07:06 et il a encouragé les gens à y aller.
07:09 Reste que ce n'est pas à vous que j'apprendrai ça,
07:12 et ce n'est pas vous qui me direz le contraire.
07:14 Quand il y a une grande manifestation,
07:16 quand il y a un grand acte social en règle générale,
07:19 il y a une part de sentimentalité, d'affectivité,
07:22 et qu'il y avait un petit plus qu'il aurait pu apporter.
07:26 Et je comprends pourquoi il ne l'a pas fait,
07:28 mais je regrette qu'il ne l'ait pas fait.
07:30 - Qu'est-ce qu'il vous a dit ce matin ?
07:32 Vous l'avez vu ce matin avec les autres représentants des cultes ?
07:35 - Je me suis rencontré avec les autres cultes en France,
07:38 et un autre culte a parlé,
07:40 une personne dans la Réunion en a parlé,
07:42 d'une manifestation qui allait dimanche prochain.
07:44 Et il nous dit, vous voyez,
07:46 si j'avais été dimanche dernier, hier,
07:48 j'aurais été obligé d'aller aussi dimanche,
07:50 et le dimanche suivant, et un autre dimanche.
07:53 Alors vous allez me dire,
07:54 est-ce qu'il y aurait toutes les semaines des manifestations
07:57 à l'appel du président du Sénat et de la présidente de l'Assemblée nationale
08:00 sur les valeurs de la République et sur l'antisémitisme ?
08:02 - Oui, et au moment où ça se passe.
08:04 - Mais la question c'est que chacun, et ça je le conçois,
08:06 même si j'aurais pu aimer qu'il vienne dans une sorte de...
08:10 Mais ce texte-là, pour moi, le texte,
08:13 disait peut-être plus qu'une présence,
08:15 c'est que je ne peux pas être moi seul la République,
08:18 en disant, puisque le président est là,
08:20 c'est une réussite de manifestation,
08:22 donc les citoyens, les citoyennes se mobilisent,
08:24 parce que c'est un grand principe,
08:26 on ne peut pas être seul à faire les choses
08:29 s'il n'y a pas un mouvement.
08:31 Or ce mouvement, moi je l'ai vu,
08:32 peu importe le chiffre, je ne vais pas pinailler sur le chiffre,
08:34 je l'ai vu parce que n'oublions pas la province,
08:36 et des rassemblements comme Lyon, où il y avait un monde fou,
08:39 des villes comme Bayonne, ont aussi eu des rassemblements.
08:43 - Donc vous êtes rassuré, vous vous sentez moins seul aujourd'hui ?
08:46 - Évidemment on se sent moins seul,
08:48 et maintenant on peut faire ce travail,
08:50 qui consiste, ce que j'ai demandé à la sortie de la réunion avec le président de la République,
08:53 à faire de la lutte contre l'antisémitisme
08:55 une vraie grande cause nationale, avec les moyens afférents,
08:58 avec le fait d'augmenter par exemple le budget de la DILCRA,
09:01 qui ne s'occupe pas, alors je vais rassurer ceux qui pensent qu'on s'occupe que de nous,
09:05 qui ne s'occupe pas que de l'antisémitisme,
09:07 c'est délégation intermédiaire de lutte contre le racisme,
09:09 l'antisémitisme, la lutte LGBT, etc.
09:11 Donc toutes les discriminations.
09:13 - Il y a beaucoup de choses à faire, on le sait très bien,
09:16 notamment à commencer par l'éducation nationale,
09:19 on sait très bien que c'est pendant la scolarisation
09:23 que les enfants puis les adolescents
09:25 intègrent un certain nombre de valeurs,
09:27 ou ne les intègrent pas, ou même portent des valeurs antagonistes,
09:30 et qu'il y a un grand travail à faire.
09:33 - Mais ça passe par les cours d'histoire notamment.
09:35 - Bah oui, les cours d'histoire d'éducation civique, c'est fait pour ça,
09:38 et c'est fait pour ça, mais depuis que la France est une république.
09:41 - Mais quand on apprend que ce sont des gamins qui chantaient des chants antisémites dans le métro,
09:46 on se dit qu'il y a du boulot à faire.
09:48 - L'éducation nationale n'a pas fait son rôle.
09:50 - Non, non, non, pardon, je veux bien qu'on incrimine l'éducation nationale,
09:54 on les met toutes les sauces, les pauvres ils ont déjà assez à faire comme ça.
09:57 Moi je vous demande, qui leur a appris ces chants ?
09:59 Et relisez le général d'Hourakin dans la Comtesse de Ségur,
10:03 - Oui, oui, merci, oui.
10:05 - C'est toujours clair et net la Comtesse de Ségur.
10:07 Le général d'Hourakin rentre chez la Comtesse,
10:10 et le petit gamin dit "le général est un dictateur".
10:13 La Comtesse foldera, elle dit "mais n'écoutez pas le général,
10:16 ce n'est qu'un petit perroquet".
10:18 Et le général dit "je sais, Comtesse, les perroquets répètent ce qu'ils entendent".
10:22 Donc la question que je vous pose,
10:24 ce n'est pas sur les enfants qui ont chanté ces chants,
10:26 mais où ils ont entendu ces chants ?
10:28 - Sur les réseaux sociaux.
10:30 - Alors, si c'est sur les réseaux sociaux, ça prouve que nous sommes dans une carence terrifiante.
10:32 - Ou chez leurs parents pour certains.
10:34 - Ben voilà, alors voyons les choses, c'est clair.
10:36 - Il y a des influenceurs sur les réseaux sociaux.
10:38 - Voilà pourquoi l'autre président nous a demandé d'aller voir les jeunes,
10:42 en disant "vous avez cette responsabilité,
10:44 vous les religieux, mais, mais, mais"
10:46 il s'est tourné vers le ministre de l'Intérieur,
10:48 il lui a dit "et la République prendra sa part,
10:50 nous allons organiser ces événements et ces moments
10:52 pour aller rencontrer les jeunes".
10:54 Au fond, on se rend compte que, pardon,
10:56 vous avez des grilles parfaites pour vous dire qui vous voit.
11:00 Est-ce que c'est à peu près les mêmes,
11:02 comment vous avez dit tout à l'heure, cheveux blancs ?
11:04 Ce qui est vexant pour votre serviteur, mais pour certains ici sur ce tableau.
11:06 - Regardez.
11:08 - Donc c'est gênant. Est-ce que ce sont les cheveux blancs qui vous voient ?
11:10 Ou est-ce que ce sont les gamins de 15 ans à 18 ans ?
11:12 - Non, les gamins de 15 ans à 18 ans,
11:14 ils sont sur TikTok, et vous savez très bien
11:16 qu'il y a des influenceurs antisémites sur TikTok
11:18 qui font passer des messages
11:20 visiblement aux influenceurs qui sont plus influents
11:22 que les antisémites, il faut lutter contre eux.
11:24 - Allons à la suite de la manifestation d'hier.
11:26 Premièrement, donc,
11:28 ni télé, ni journaux,
11:30 ils sont sur ces réseaux-là.
11:32 Donc, on doit mieux les contrôler.
11:34 Il faut arrêter que les GAFA nous racontent
11:36 "on ne sait pas faire, on ne peut pas contrôler",
11:38 alors qu'ils sont capables d'enlever une photo
11:40 où il y a un petit saint qui dépasse
11:42 de la République menant le peuple,
11:44 ça, ils sont capables de l'enlever,
11:46 mais tous les discours de haine, ils sont infoutus,
11:48 enfin, ils prétendent être incapables de le faire, c'est pas acceptable.
11:50 La deuxième chose, c'est
11:52 aller sur ces rencontres
11:54 et leur proposer des choses qui peuvent les toucher.
11:56 Moi, je vois le travail que je peux faire
11:58 en amenant des classes entières,
12:00 année après année, dans
12:02 un voyage à Auschwitz.
12:04 Alors, il y a tellement de lieux en France,
12:06 il y a un camp à Thil, il y a le Stroutov,
12:08 il y a les camps du Loiret,
12:10 il y a Noé, Récébédou, il y a le camp d'Émile,
12:12 il y a tous ces lieux de mémoire
12:14 qui, en France, doivent servir aussi
12:16 à éduquer les enfants.
12:18 Alors, on sait bien où ça peut mener
12:20 le non-respect de la théorie.
12:22 - Quel est le moteur, aujourd'hui, du antisémitisme ?
12:24 - La haine.
12:26 - Qui sont les antisémites, aujourd'hui ?
12:28 - Des antisémites ?
12:30 - La haine,
12:32 la haine des différences,
12:34 la force des préjugés qui sont
12:36 inscrits depuis des siècles.
12:38 Et puis, il y a des formes d'antisémitisme.
12:40 Il y a un antisémitisme
12:42 d'extrême gauche, il y a un antisémitisme
12:44 d'extrême droite, il y a un antisémitisme
12:46 moins fort qu'avant,
12:48 bourgeois, il y a un antisémitisme
12:50 populaire sur un certain nombre
12:52 d'archétypes imaginaires,
12:54 mais entretenus, justement,
12:56 par les réseaux sociaux.
12:58 Il y a des antisémitismes religieux,
13:00 évidemment. Je dirais même que...
13:02 On est un peu passé,
13:04 de ce point de vue, de la lutte des classes
13:06 à la lutte des religions, et que ça n'est pas
13:08 la meilleure des nouvelles dans cette affaire.
13:10 Il y a des antisémitismes auxquels
13:12 on ne peut répondre que sur plusieurs
13:14 plans en même temps. Bien sûr qu'il y a
13:16 les réseaux sociaux, qu'il y a l'éducation,
13:18 qu'il y a les parents,
13:20 qu'il y a les copains, et toutes
13:22 les activités sportives, par exemple.
13:24 Les activités sportives, il y a du boulot à faire, là,
13:26 pour lutter contre le racisme,
13:28 contre l'antisémitisme, et contre les racismes.
13:30 - Et le prosélitisme.
13:32 - Le prosélitisme, parce que là...
13:34 - Alain Duhamel a raison.
13:36 Regardez la haine dans les stades.
13:38 Vous trouvez normal qu'un joueur noir,
13:40 aussi talentueux soit-il, se fasse insulter
13:42 parce qu'il est noir avec des cris
13:44 de singes ? C'est une honte.
13:46 Mais ceux qui font ça l'ont bien appris
13:48 quelque part. On leur a bien dit
13:50 "ce ne sont pas des hommes comme toi".
13:52 - Et les chants ?
13:54 - Et les chants insupportables.
13:56 Je pense qu'à un moment, il faut être capable
13:58 de dire que la haine et la violence envahissent
14:00 une société. On ne peut pas dire que c'est
14:02 uniquement sur Internet. Non, non.
14:04 Internet et la vie réelle
14:06 sont perméables. Il faut donc être
14:08 capable de lutter contre ça aussi.
14:10 - D'accord. Mais sauf qu'aujourd'hui,
14:12 cette résurgence,
14:14 elle est liée à ce qui se passe
14:16 aussi à Gaza. Donc c'est un antisémitisme
14:18 qui est lié à un anti-Israël et
14:20 ce qu'on appelle communément l'antisionisme.
14:22 - Qui est un antisémitisme, clairement.
14:24 - Mais c'est pas de la manifestation
14:26 politique, ou dire...
14:28 - C'est un antisémitisme. Quand vous leur demandez
14:30 de citer une ville de Gaza, je serais curieux
14:32 de les entendre. La réalité, c'est que c'est
14:34 une forme de rejet,
14:36 une autre façon de dire
14:38 "mort aux Juifs". Et d'ailleurs,
14:40 les manifestations en 2014, je me souviens,
14:42 ça m'avait percuté, hurlé.
14:44 Les manifestants hurlaient en 2014 "mort aux Juifs"
14:46 dans la rue ici, à Paris.
14:48 - Mais il y a de toute façon un antisémitisme
14:50 latent, comme il y a d'ailleurs
14:52 une islamophobie latente aussi.
14:54 Et puis, dès qu'il y a un événement
14:56 déclencheur, à ce moment-là,
14:58 on voit ce à quoi on assiste maintenant, c'est-à-dire
15:00 brusquement une multiplication d'actes,
15:02 la nécessité de répliquer.
15:04 Et ça, je dirais que c'est au moment
15:06 de l'événement, dans les
15:08 semaines qui suivent, peut-être dans les mois,
15:10 mais qu'il y a le travail de fond, parce que
15:12 pour qu'il puisse y avoir ces surgissements,
15:14 comme celui qu'on voit en ce moment,
15:16 il faut qu'il y ait un fond qui
15:18 ait été entretenu, qui ait été peu à peu
15:20 intégré. Il faut
15:22 avoir inculqué des idées
15:24 fausses pour arriver à,
15:26 ensuite, des comportements aberrants.
15:28 - Hier, une partie de la gauche n'était pas là.
15:30 La France Insoumise, qui est le
15:32 premier parti à gauche, a refusé
15:34 d'y être, à l'exception de trois députés,
15:36 Ruffin, Autain et Corbière, qui étaient à Strasbourg.
15:38 Qu'est-ce que ça vous fait ?
15:40 Parce que
15:42 la gauche, a priori, devrait être dans la rue
15:44 pour dénoncer l'antisémitisme raciste.
15:46 Pourquoi cette gauche ?
15:48 C'est celle qui est majoritaire à l'Assemblée nationale
15:50 dans le camp de la gauche. C'est celle qui domine.
15:52 - Vous pouvez l'appeler extrême, mais c'est celle qui domine.
15:54 Qu'est-ce qu'il faudrait faire ?
15:56 - Quand on est numériquement,
15:58 c'est pas Léniel qui avait
16:00 dit ça en 1980, s'ils sont
16:02 numériquement plus nombreux,
16:04 alors majoritairement, leurs
16:06 idées, elles sont légitimes. Parce que quoi ?
16:08 - Si une idée aussi est portée
16:10 par une majorité, ça devient
16:12 légitime. Moi, je ne suis pas d'accord avec ça.
16:14 J'estime qu'ils ont
16:16 jeté de l'huile sur le feu sur une situation
16:18 qui était déjà lourde, tendue.
16:20 D'abord,
16:22 en stigmatisant cette manifestation,
16:24 en obliquérant complètement
16:26 son côté républicain, ouvert à tous
16:28 et à toutes. - Droite, extrême droite,
16:30 avait dit Jean-Luc Mélenchon. - Ouvert à tous.
16:32 - C'est ce qu'il a dit. - C'est ce qu'il a dit ?
16:34 - La présidente de l'Assemblée et le président du Sénat ont appelé
16:36 les citoyens et les citoyennes à venir
16:38 au-delà des engagements de partis. Maintenant, je vais vous dire.
16:40 Quoi ?
16:42 Alain Diemel a raison. Je sais bien que quand vous faites
16:44 un débat, vous voulez qu'on ne soit pas d'accord. Mais je ne peux pas dire autre chose
16:46 que je suis d'accord avec lui, en l'occurrence.
16:48 - Jean-Luc Mélenchon a dit "ceux qui seront dimanche dans la rue
16:50 soutiennent le massacre" ou "ceux qui massacrent
16:52 à Gaza". - Mais c'est tellement outrancier qu'à un moment, il faut
16:54 arrêter de faire de ce qu'il dit, l'alpha et l'oméga
16:56 de la pensée politique et spirituelle
16:58 et morale en France. - Alain Diemel.
17:00 - Alain Diemel, pardon. Alain Diemel, quand il parle de
17:02 - je traduis avec mes mots - de substrats
17:04 dans le sémitisme, au fond,
17:06 ça monte à la nouvelle étape. Moi, je ne demande pas
17:08 ce qu'on aime du judaïsme,
17:10 mais la rencontre avec l'autre.
17:12 Je me rends compte qu'il y a, et c'est un des participants
17:14 à la réunion ce matin, chez le président, qui a dit
17:16 "je vais dans des quartiers
17:18 faire des conférences". Je me rends compte qu'il y a
17:20 des jeunes, à qui je pose la question, qui n'ont
17:22 jamais rencontré un juif de leur vie.
17:24 Voilà. Donc il y a des jeunes
17:26 qui n'ont jamais vu un juif de leur vie.
17:28 - Mais qui le détestent. - Qui n'ont jamais vu une juif de leur vie.
17:30 Et donc, ils sont portés uniquement par les préjugés.
17:32 Et donc, il faut casser cela.
17:34 Et donc, je pense qu'il faut aller au-delà
17:36 de simplement lutter contre l'antisémitisme.
17:38 Il faut peut-être essayer de montrer
17:40 les apports du judaïsme à la société.
17:42 Alors, je ne veux pas faire du philo-sémitisme,
17:44 mais au moins qu'il se respecte
17:46 pour ce que le judaïsme a apporté à la France.
17:48 - Il y a un antisémitisme
17:50 latin, il y a
17:52 un anti-islamisme
17:54 latin aussi.
17:56 Les deux sont répréhensibles.
17:58 Les deux ont à la fois des explications
18:00 qui sont circonstancielles.
18:02 Bon, Gaza, c'est une explication circonstancielle.
18:04 Qu'est-ce qui s'est passé avant ? Encore plus.
18:06 Bon, chronologiquement,
18:08 il y a des éléments déclencheurs,
18:10 mais sur un fond
18:12 qui demande
18:14 un travail.
18:16 Au Moyen-Âge, des paysans
18:18 qui crevaient de faim et qui n'avaient
18:20 jamais rencontré un juif de leur vie,
18:22 ils étaient dans des petits villages, dans des hameaux,
18:24 étaient persuadés que s'il y avait la peste,
18:26 c'était les juifs, que si le prix du blé
18:28 augmentait, c'était les juifs.
18:30 - Donc c'est un combat éternel.
18:32 - Oui, mais contre lequel il faut se bagarrer.
18:34 - Remarquez, le président tunisien
18:36 a bien dit très sérieusement que s'il y avait
18:38 une tempête qui s'appelait Daniel,
18:40 c'était la faute des sionistes. - C'est les services météo-grecs
18:42 qui avaient nommé cette tempête Daniel.
18:44 - Non mais c'est tellement incroyable
18:46 que l'on dit que c'est nul.
18:48 - Mais le président tunisien,
18:50 qui est censé être un grand intellectuel,
18:52 qui est un professeur d'université,
18:54 c'était connu, c'était leur vedette
18:56 en droit constitutionnel.
18:58 Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il
19:00 utilise lui-même des clichés
19:02 qu'on s'attend à entendre
19:04 plutôt en classe de sixième.
19:06 - Merci Aïm Korsia, merci Alain Duhamel.
19:08 On vous retrouve demain, bien sûr.
19:10 Merci Aïm Korsia.