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"Il avait une voix, une sincérité, un cœur qui faisaient que, tout d’un coup, avec ses réquisitoires et ses fulgurances, même les politiques les plus inflexibles l’écoutaient." À l’occasion de la sortie du film "L’Abbé Pierre - Une vie de combats", nous avons reçu Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, et Benjamin Lavernhe, comédien qui incarne l’abbé Pierre. Pour neo, ils reviennent sur l’incroyable histoire de cette légende du XXe siècle. ️

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00:00 Mes amis au secours, une femme est morte cette nuit à 3h sur le trottoir du boulevard Sébastopol,
00:06 serrant sur elle le papier par lequel avant-hier on l'avait expulsée.
00:11 Chaque nuit, ils sont plus de 2000 recroquevillés sous le gel.
00:16 Sans toit, sans pain, plus d'un presque nu.
00:21 Ça c'était les mots de l'abbé Pierre dans ce fameux appel du 1er février 54.
00:25 Il y a des choses qui ont évolué positivement depuis 54 sur la question du logement,
00:28 mais il y a encore beaucoup de monde qui n'a pas d'autre choix que de vivre à la rue et ça c'est pas acceptable.
00:32 Quand j'ai lu le scénario, j'étais vraiment ahuri de voir le romanesque de sa vie.
00:41 C'est presque une fresque, c'est épique, c'est une vie à chapitres.
00:44 En effet, je ne savais pas qu'il avait été frère capucin, puis mobilisé pendant la guerre sous officier,
00:50 résistant, un grand résistant dans le Vercors, dans le Maquis,
00:53 qu'il avait sauvé des Juifs à 3000 mètres d'altitude, qu'il les avait fait passer en Suisse,
00:57 puis député, j'avais l'impression que c'était un peu exagéré,
01:01 que les scénaristes avaient déliré alors que pas du tout.
01:03 Cette rencontre avec Lucie Coutaz, cette femme de l'ombre que personne ne connaît
01:07 et qui était absolument essentielle au mouvement Emmaüs, c'est l'histoire d'un duo.
01:10 Et ça, vraiment, je l'ai appris.
01:12 Je vais bien vous aider.
01:14 Merci ma sœur.
01:15 Je m'appelle Lucie Coutaz.
01:17 Ma sœur, c'est pour tromper les Boches et les Colabos.
01:20 Et n'imagine pas qu'une bonne sœur leur ferait un enfant dans le dos.
01:24 Comme Benjamin, je connaissais l'histoire de Lucie Coutaz,
01:27 mais pas aussi précisément.
01:29 Et c'est déterminant.
01:30 On peut presque, alors là je prends les risques en mon nom,
01:32 mais on peut presque se demander si tout ça aurait été possible sans Lucie Coutaz.
01:36 Je ne crois pas.
01:36 Et ça, c'est une magnifique histoire.
01:38 Je pense que ce film rend compte de cette histoire,
01:41 qui était une histoire de l'ombre, mais qui est déterminante.
01:43 Quand j'ai vu le film et donc revu l'abbé Pierre, ça m'a fait beaucoup d'émotion.
01:47 En particulier, le moment où l'abbé est suffisamment vieux
01:50 pour correspondre à l'époque où je l'ai connu.
01:52 Et là, ça m'a fait un choc.
01:54 Ça donne de la force, parce que c'est vraiment moi
01:56 ce qui m'avait le plus marqué chez l'abbé Pierre,
01:58 avant même de le connaître, c'est la constance.
02:01 Et moi, quand j'ai des moments de mou, parce que parfois c'est difficile,
02:03 parce qu'on n'arrive pas à aider tout le monde,
02:05 parce qu'on voit des choses très difficiles,
02:06 je repense à ce que l'abbé Pierre nous disait
02:09 ou surtout ce qu'il faisait.
02:11 Il ne lâchait pas.
02:12 C'est un grand rôle, l'abbé Pierre, en fait, c'est aussi ça.
02:13 C'est un orateur, un tribun extraordinaire.
02:16 Il avait une voix, une sincérité, un cœur qui faisait que tout d'un coup,
02:19 avec ses réquisitoires et ses fulgurances,
02:21 même les politiques les plus inflexibles l'écoutaient.
02:24 Grâce aux dons, on finance 800 projets par an
02:30 que portent 500 associations pour construire du logement, les rénover,
02:34 aider les personnes justement à pouvoir sortir de la rue,
02:36 les aider à accéder à leurs droits.
02:37 Donc, il y a tout un pan de notre société qui est extrêmement positif
02:41 et qui n'est d'ailleurs pas souvent dans le viseur de l'actualité.
02:44 Mais ça existe.
02:44 Dans la jeunesse, l'envie de dire "mais moi, je ne me contente pas d'un monde
02:48 qui produit autant d'exclusions, autant d'inégalités".
02:50 Donc, il faut le cultiver tout ça.
02:52 Le risque, c'est qu'on dégrade cette réponse sociale.
02:55 Tout le monde n'a pas vocation à être travailleur social.
02:57 Tout le monde n'a pas vocation à faire des maraudes, franchement.
03:00 Par contre, tout le monde peut apporter sa contribution
03:02 et c'est parce qu'on sera nombreux à se dire que c'est le monde que nous voulons,
03:05 que nous réussirons à faire les bons choix politiques, les bons choix économiques
03:08 et puis à exercer la solidarité concrètement au quotidien partout où on vit.
03:12 Quand un scénario arrive et qu'il y a le bonheur d'avoir à incarner ce personnage
03:15 et qu'en plus, c'est son tour des valeurs qui vous bouleversent
03:18 et qu'on a envie de communiquer, c'est gagnant.
03:20 Si le cinéma peut faire réfléchir les gens en les divertissant,
03:23 mais qu'ils sortent de la salle un peu changés et avec "pas juste, on a passé un bon moment,
03:27 mais dis donc, nous aussi, on peut apporter notre pierre à l'édifice".
03:30 Alors dans ce cas-là, oui, le cinéma peut peut-être lui aussi un peu changer le monde.
03:34 [Générique de fin]
03:36 Merci.

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