CONFERENCE - Quels parents sommes-nous ? L’éducation positive en question

  • l’année dernière
Une conférence interactive animée par Ali Rebeihi, producteur de l’émission « Grand bien vous fasse » tous les jours à 10h sur France Inter.
Parents, nous souhaitons avant tout le bonheur de nos enfants pour les accompagner au mieux vers l’âge adulte. Mais qu’est-ce que la parentalité en 2023 et quelle est la place de l’enfant dans nos sociétés ?
Depuis les années 2000, de plus en plus de parents pratiquent l’éducation positive, mais les critiques sont nombreuses, parfois très virulentes.
Alors que vaut l’éducation positive aujourd’hui à l’épreuve de la vie quotidienne ?
Comment ne pas tomber dans l’obsession de la parentalité parfaite et le piège de l’enfant tyran ?
Et que nous dit vraiment la recherche à ce sujet ?
Quels sont les outils pour favoriser une communication efficace parents/enfants ?
Et nos enfants dans tout ça ? De quoi ont-ils vraiment besoin ?
De la théorie à la pratique, les bienfaits et les impasses de l’éducation bienveillante.
Transcript
00:00:00 *Musique*
00:00:05 *Applaudissements*
00:00:20 Ce générique me dit quelque chose.
00:00:23 Bonjour à toutes et à tous, je suis ravi de vous accueillir ici au studio 104 de la maison de la radio et de la musique.
00:00:31 Et vous aussi, derrière votre écran, je sais que vous êtes très nombreux à suivre ce stream depuis chez vous.
00:00:37 Alors pour commencer, pour se mettre dans l'ambiance, je vous propose de regarder une vidéo de Mélissa Effret qui va forcément vous parler.
00:00:46 "Nous on a pas encore d'enfants, mais on a des principes. Moi j'ai des enfants donc j'ai plus de principes."
00:00:51 *Musique*
00:00:53 Déjà, on donnera pas la tétine.
00:00:55 "Je vais aller racheter plein et des flûons, comme ça on arrêtera de les chercher partout parce que ça me rend dingue !"
00:00:59 Avec nous, pas d'enfant roi.
00:01:01 "Oh la la, oh la la, venez nous regarder comme ça avec cette bouillie, on pourrait y aller refuser hein ! Demande tout ce que tu veux à maman, elle fera tout pour toi maman, tout tout tout !"
00:01:08 "Faut qu'il soit autonome."
00:01:10 "J'arrive, je viens t'essuyer !"
00:01:11 Faut que ça file droit à un seul mot.
00:01:13 "Autorité."
00:01:14 Arrête de faire ça. Arrête de faire ça ! Bon bah fais-le mais pas longtemps.
00:01:18 "Autorité."
00:01:19 Écoute-moi sinon... sinon... sinon mais... mais écoute pas.
00:01:24 "Autorité."
00:01:25 Un, deux...
00:01:26 "Au-to-ri-té."
00:01:28 77 !
00:01:29 "Y aura pas d'écran."
00:01:31 Non.
00:01:32 "Ok, je vais charger le portable à fond comme ça on sera tranquille pour le resto."
00:01:35 Yes !
00:01:36 Les dessins animés ça rend débile.
00:01:37 *Musique*
00:01:41 "Par contre, faut pas qu'ils nous envahissent."
00:01:43 "Ah non, on a plus de salon, c'est sa salle de jeu."
00:01:46 "C'est mieux pour lui. Nous maintenant, on prend l'apéro dans les chiottes."
00:01:49 "D'ailleurs si tu veux, y a des tomates cerise et des Monster Mug sur la cuvette."
00:01:52 "Faut les préserver de nos états d'âme."
00:01:53 "Mais si ça continue, bah on va mettre la tête dans le four et c'est pas pour aller chercher un gâteau."
00:01:57 En fait, on pense que ça n'importe rien de crier.
00:01:59 *Musique*
00:02:04 Pour la nourriture, on fera tout nous-mêmes. Non parce qu'on sait pas ce qu'ils mettent dans la bouffe.
00:02:07 *Musique*
00:02:11 "Une alimentation équilibrée."
00:02:13 *Musique*
00:02:15 Nous, on pense que la clé...
00:02:17 "C'est pas se faire bouffer."
00:02:18 Exact. 3 histoires, 5 chansons, 1 gros câlin et maman reste avec toi jusqu'à ce qu'elle s'endorme.
00:02:23 Jusqu'à ce que tu t'endormes.
00:02:25 Important, il faut savoir délimiter les espaces.
00:02:27 Chacun sa vie privée.
00:02:29 "Bah bien sûr mon bébé, tu peux venir dormir avec nous. Viens."
00:02:32 "Allez viens."
00:02:33 Ça va, on peut les laisser un peu pleurer.
00:02:35 "Il a gémi, je vais le chercher."
00:02:36 On s'habillera pareil, hein.
00:02:38 Tout ce qu'on va redonner pour nos photos Insta sera trop mignon.
00:02:41 Ah si, on est coordonné, on porte tous les deux une couche et un pyjama.
00:02:44 On garde du temps pour notre couple.
00:02:46 "Allez, on se retrouve dans 5 ans."
00:02:48 Moi, je ferai tout pour rester désirable.
00:02:50 *Musique*
00:02:53 Garder du temps pour moi.
00:02:55 "Ouh, merde, c'est moi. J'ai encore oublié de me laver cette semaine."
00:02:58 Ce sera important de préserver notre vie sociale.
00:03:00 "Mais voilà, il a de la fière. Bah, on annule la soirée."
00:03:04 Je veux absolument pouvoir toujours être à l'écoute de mes copines.
00:03:07 *Musique*
00:03:11 "Allez, un petit bonbon de temps en temps."
00:03:13 Un seul, hein.
00:03:14 Non mais laisse, tu le papiers, ça l'occupera.
00:03:16 De toute façon, c'est passé dans le définitif, donc...
00:03:18 "Ah, nous, on changera pas de tritme."
00:03:20 Non, non, non, il va falloir qu'il s'adapte.
00:03:21 Pécable, j'ai calé toutes mes réunions sur ces siestes.
00:03:23 En gros, nous, ce qu'on veut, c'est faire ce qu'on veut.
00:03:26 On fait ce qu'on peut.
00:03:28 *Musique*
00:03:29 La vidéo...
00:03:31 La vidéo de Mélissa et Fred vous a sans doute interpellé.
00:03:34 Qui dans le public s'est senti...
00:03:36 concerné ?
00:03:38 Qui s'est reconnu ?
00:03:39 Levez la main.
00:03:40 Sondage.
00:03:41 Aux doigts mouillés.
00:03:42 Ouais, pas mal.
00:03:43 Alors, comment appliquer les principes d'une éducation bienveillante face à la dure réalité ?
00:03:48 Comme le disait ce cher Lacan, le réel, c'est quand on se cogne.
00:03:53 Ce soir, je vous propose de nous questionner sur la parentalité en 2023.
00:03:57 Quel type de parent êtes-vous ?
00:03:59 Vous verrez, ce soir, que vous êtes peut-être un parent hélicoptère, un parent drone ou un parent curling.
00:04:05 Que vaut l'éducation positive à l'épreuve de la vie quotidienne et de la recherche scientifique ?
00:04:11 Pour certains, l'éducation positive reste la condition sine qua non pour rendre les enfants heureux.
00:04:16 Et pour d'autres, il s'agit d'une éducation laxiste qui produirait des enfants de droit divin, des enfants tyrans.
00:04:23 Alors, comment ne pas tomber dans la tyrannie de la parentalité ?
00:04:27 Parfaite, cette parentalité calme, bienveillante, sans cris, sans reproches, sans punitions.
00:04:34 Est-ce qu'elle est tenable, cette éducation, à l'épreuve du réel ?
00:04:38 Nous verrons quels sont les véritables principes de l'éducation positive, loin des caricatures et des clichés.
00:04:45 Alors, quels sont les réels bienfaits de cette éducation positive sur le développement des enfants et quels sont aussi ses impasses ?
00:04:53 Et puis surtout, dans la dernière partie, je sais que vous êtes là, ici, à la Maison de la Radio et derrière votre écran.
00:04:59 Comment la mettre en pratique, cette éducation, grâce à notre boîte à outils et quelques scénettes
00:05:05 interprétées par un couple de comédiens à la ville, comme à la Seine.
00:05:10 Vous verrez par exemple, quelle est la place de la récompense et des punitions.
00:05:15 Derrière votre écran, vous pouvez d'ores et déjà poser vos questions.
00:05:18 Je vous attends là, j'ai une tablette et j'ai toutes vos questions qui arrivent au fur et à mesure.
00:05:22 Et dans le studio 104 de la Maison de la Radio et de la Musique, il y a un micro qui va circuler.
00:05:27 N'hésitez pas à poser vos questions.
00:05:29 Alors permettez-moi de vous présenter mes invités, des experts réputés dans leur domaine.
00:05:35 Bonjour Didier Pleu.
00:05:36 Bonjour Ali.
00:05:37 Vous êtes le doyen.
00:05:38 C'est pour ça que je commence par vous.
00:05:40 Vous dirigez l'Institut français de thérapie cognitive et vous enseignez à l'Université populaire de Caen.
00:05:46 Vous avez publié chez Odile Jacob "L'éducation positive, ça suffit, ça promet ce soir".
00:05:52 Bonjour Docteur Catherine Guéguen.
00:05:54 Bonjour.
00:05:55 Vous êtes médecin pédiatre spécialisé dans le soutien à la parentalité et formatrice de professionnels à l'enfance.
00:06:02 Et vous avez notamment publié aux Arènes "Petites et grandes questions pour une enfance heureuse".
00:06:08 Bonjour Bruno Hombec.
00:06:09 Vous êtes le belge de l'étape.
00:06:12 Vous êtes psychopédagogue et directeur de recherche au sein du service des sciences de la famille de l'Université de Mons.
00:06:19 Et vous avez notamment publié chez Mardaga "Hyperparentalité, apprendre à lâcher prise pour le bien des parents et des enfants".
00:06:25 Bonjour Rebecca Shankland.
00:06:27 Bonjour.
00:06:28 Vous êtes la lyonnaise de l'étape.
00:06:29 Vous êtes professeure des universités en psychologie du développement.
00:06:33 Vous êtes responsable de l'observatoire de la parentalité et du soutien à la parentalité.
00:06:38 Et vous avez publié chez Errol "S'initier à la psychologie positive" avec une préface de notre cher ami Christophe André.
00:06:45 Petite réaction à la vidéo que nous venons de regarder où les principes se heurtent à la réalité.
00:06:52 Bruno Hombec.
00:06:53 On a tous voulu être un parent idéal avec un enfant idéal dans un monde idéal.
00:06:57 On sait qu'évidemment ce n'est pas vrai. On n'est pas des parents idéaux.
00:07:00 On va recommencer mon cher Bruno parce qu'on ne vous entendait pas.
00:07:03 Vous voyez, vous avez un micro main rien que pour vous.
00:07:06 Cette vidéo montre effectivement ce qu'on a tous été, c'est-à-dire ce qu'on a tous rêvé d'être.
00:07:12 Un parent idéal avec un enfant idéal dans un monde idéal.
00:07:15 Et puis on a dû faire le deuil du fait qu'on n'était pas des parents idéaux, qu'on n'avait pas à l'être d'ailleurs.
00:07:20 C'est un très mauvais plan d'essayer et de devenir un vrai parent idéal.
00:07:24 Une mère idéale ne fait jamais que des enfants parfaitement crétins.
00:07:27 L'enfant va se construire dans le manque.
00:07:30 Si vous répondez en permanence aux besoins de votre enfant, il ne va pas les mentaliser.
00:07:34 Et évidemment l'enfant n'est pas idéal.
00:07:36 Il va très vite démontrer qu'il ne correspond pas à ce qu'on souhaite.
00:07:40 Et le monde, on est bien placé pour le connaître pour le moment.
00:07:43 Il n'y a rien du monde idéal dans lequel on a convoqué à naître nos enfants.
00:07:47 Puisque pour la plupart d'entre nous, les enfants, ce n'est pas des heureux événements, ce n'est pas des accidents.
00:07:52 Ils sont littéralement convoqués à naître.
00:07:54 Et ça crée effectivement à ce moment-là ce qu'on voit sous forme humoristique, mais qui est parfois aussi un peu tragique, ce triple deuil.
00:08:01 - Rebecca Shanklam. - Oui, cette vidéo m'a rappelé une recherche qui a été menée par Martin Hoffmann
00:08:07 qui a montré que 70% des interactions qu'on a avec nos enfants autour de l'âge de 7 ans portent sur un aspect disciplinaire.
00:08:16 Et donc la question c'est quel type de méthode disciplinaire va être efficace ou non ?
00:08:21 - Catherine Guygen. - Là, cette vidéo montre la réalité des parents.
00:08:26 C'est-à-dire que la plupart des parents, ils veulent bien faire, mais dans la réalité, ils se sentent totalement démunis.
00:08:33 Et en fait, ils ont beaucoup, beaucoup de mal à savoir comment faire au mieux.
00:08:38 Et ils ont, ça c'est mon leitmotiv, ils ont absolument besoin d'être soutenus et accompagnés.
00:08:43 - Didier Pleu. - Je rejoins Catherine parce qu'ils sont bien gais les parents.
00:08:48 Mais moi, je vois surtout les parents en burn-out, qui sont complètement épuisés, qui ne savent plus quoi faire.
00:08:52 Mais par contre, c'est bien au niveau des clichés, parce que tous parents, on bascule toujours un petit peu dans le permissif, un peu dans l'autoritarisme.
00:08:59 J'espère que ce soir, notre rencontre fera qu'on reprendra mon leitmotiv, amour et frustration, les deux. Est-ce que c'est possible ?
00:09:06 - Alors, avant de faire un bond dans le passé, de faire une brève histoire de la parentalité depuis deux siècles,
00:09:13 et d'esquisser donc la place de l'enfant dans les familles depuis un siècle et demi,
00:09:18 j'aimerais vous citer une étude publiée par Opinion Way et la MAE, notre partenaire ce matin, ce soir, ce soir,
00:09:26 d'après cette étude publiée en mai 2022, le dialogue, l'amour, la protection, la complicité,
00:09:34 demeurent les principaux piliers de la relation parent-enfant, sans oublier la co-décision.
00:09:39 Je ne vous révélerai pas un scoop en vous affirmant qu'il y a un siècle et demi, l'amour, la protection, la complicité, la co-décision
00:09:47 n'étaient pas vraiment les piliers de la parentalité.
00:09:50 Sachez que d'après le dictionnaire historique de la langue française d'Alain Rey, la parentalité n'apparaît, vous le savez,
00:09:57 qu'en 1931 pour désigner le statut, l'état de parent, et jusque-là, le mot de parentalité était utilisé dans le domaine de la biologie.
00:10:07 Alors, l'histoire des enfants des années 1890 à nos jours, d'Eric Allary, raconte comment les enfants sont passés
00:10:13 du statut de quasi-objet à celui de personne au cours des années 1960.
00:10:19 Au fil du temps, l'enfant est donc devenu un sujet de droit protégé et considéré, Rebecca Shankland.
00:10:26 Oui, tout à fait, et c'est ce qui a amené d'ailleurs à la loi en 2019, pour l'interdiction de la FEC,
00:10:32 de baser sur une quantité de recherches qui ont montré les effets néfastes des châtiments corporels.
00:10:37 Catherine Gaguen.
00:10:39 Oui, tout à fait. Avant, l'enfant n'était pas désiré, il n'y avait pas de contraception, et il était souvent utilisé et il travaillait.
00:10:47 Il faut se rappeler qu'au XIXe siècle, il travaillait 15 heures dans les mines, certains enfants, et dans les ateliers.
00:10:53 Donc, l'enfant à l'heure actuelle, grâce à la contraception, la plupart du temps, il est choisi, il est désiré.
00:11:00 Et les parents, évidemment, ils veulent bien faire et faire au mieux. C'est ça, la difficulté.
00:11:06 Parce qu'on veut faire au mieux, mais la réalité nous montre que c'est très compliqué et très difficile.
00:11:12 Bruno Hombec, pendant longtemps, la forte mortalité infantile, la rareté d'un contrôle des naissances,
00:11:19 a eu tendance à freiner l'attachement des parents à leurs enfants. Il ne faut pas l'oublier.
00:11:24 C'est pour ça que c'est important de faire cette petite histoire, ce petit historique,
00:11:27 avant de comprendre comment l'éducation positive a pris une telle place dans nos vies.
00:11:32 Tout à fait. Et un petit complément pour la notion de parentalité, parce que c'est vrai que ça vient de la biologie à la base,
00:11:36 mais ça a très vite envahi le champ des sciences humaines.
00:11:38 J'étais chercheur en éducation familiale et puis est arrivé dans les années 80 le mot parentalité,
00:11:43 qui signifiait simplement que l'éducation, c'était quelque chose dont chaque enfant allait se réapproprier la forme.
00:11:49 Vous avez trois enfants, vous donnez la même éducation aux trois enfants, vous aurez trois enfants différents.
00:11:53 Et la parentalité, c'est lié à cette idée que maintenant, l'éducation, c'est aussi quelque chose qui est transformé par l'enfant.
00:12:00 Et la pédagogie positive est venue effectivement dans le creuset de cette idée de développement personnel,
00:12:06 de dire comment est-ce que je vais faire en sorte que mes trois enfants se développent de manière singulière
00:12:12 et s'épanouissent aussi de manière singulière, avec alors une pression énorme sur le dos des parents,
00:12:17 puisqu'il ne s'agissait plus seulement de bien élever des enfants.
00:12:20 Auparavant, vous transmettiez des valeurs, ils étaient bien élevés.
00:12:23 Maintenant, il faut participer à leur développement et donc ça va donner effectivement non seulement beaucoup de pression,
00:12:29 mais aussi des critères d'évaluation beaucoup plus compliqués à gérer.
00:12:32 Quand un enfant survivait, il était considéré comme une bouche à nourrir et comme des bras pour travailler.
00:12:37 À la fin du XIXe siècle, l'enfant est soumis à la toute-puissance du pater familias,
00:12:42 de l'autorité parentale indiscutée et indiscutable.
00:12:45 Didier Pleu, vous êtes le fruit de cette éducation aussi, jusque dans les années 50 ?
00:12:50 Alim Rajouni. Oui, je suis né en 52.
00:12:54 Donc effectivement, même si j'étais souvent critique envers Dolto, j'aurais bien voulu que mes parents lisent Dolto à l'époque.
00:13:00 C'est ça en fait. On était victime du pater familias.
00:13:04 Moi, je me souviens, j'étais à la droite de mon père parce qu'il avait moins de distance pour me baffer.
00:13:08 Donc, c'est un petit peu moyen.
00:13:10 Mais c'est vrai aussi qu'on avait besoin de quoi, nous ?
00:13:14 À l'époque, on avait besoin d'empathie, de tendresse, de respect.
00:13:17 Et je crois que c'est ça qui a été la grande révolution.
00:13:20 Dolto, faut-il toujours d'accord, m'a fait les bonnes choses dans ce qu'elle disait.
00:13:23 Mais ce que je dis maintenant, c'est de quoi ont besoin nos enfants ?
00:13:26 Moi, ce que je vois, c'est que le problème numéro un n'est pas une carence affective,
00:13:30 n'est pas une histoire de développement personnel,
00:13:32 mais surtout une grande intolérance à la réalité, à tout ce qui est déplaisant et frustrant.
00:13:37 Donc, est-ce qu'on ne peut pas continuer le développement personnel dans le sens amour, respect,
00:13:42 mais aussi instruire nos enfants sur comment ils vont faire pour, comme disait Lacan, se colter la réalité un peu ?
00:13:48 Comme le dit Didier Pleu, et c'est très vrai, il fut un temps où l'empathie était la nécessité.
00:13:53 Et on a fait descendre Mary Poppins du ciel pour essayer de mettre un peu d'empathie
00:13:57 avec un père qui était hyper rigide, qui était uniquement le père sévère au sens plein du terme.
00:14:02 Maintenant, on a remplacé sans doute Mary Poppins par Supernanny.
00:14:06 On n'a pas gagné au change, très clairement, mais ça montre effectivement qu'il y a peut-être un manque,
00:14:11 en tout cas ressenti par les parents, au niveau des structures, des limites,
00:14:15 de la manière dont on doit punir, sanctionner, mettre de l'ordre dans tout ça,
00:14:19 tout en préservant l'empathie.
00:14:21 Alors, d'après l'historien Eric Allary, il aura fallu deux guerres mondiales pour que les adultes pensent à mieux traiter les enfants.
00:14:31 Peu à peu, l'enfant passe d'objet à nourrir à sujet de droit.
00:14:35 Au cours des Trente Glorieuses, vous l'avez dit, l'enfant devient désiré.
00:14:39 Et au fil des années 50, 60, 70, les enfants du baby-boom profitent de la prospérité,
00:14:44 l'habitat se modernise, les revenus augmentent, la santé des enfants s'améliore très nettement,
00:14:48 la mortalité des enfants chute, avec des conséquences très claires sur l'éducation des enfants.
00:14:54 Alors, l'idée, effectivement, que le but du jeu, maintenant, c'est d'arriver au développement individuel de chacun.
00:15:01 Alors, c'est vrai que c'est les sociétés d'opulence, ce ne sont pas les guerres qui ont créé ça,
00:15:05 ce sont les sociétés d'opulence qui font que, finalement, on se dit « mais j'ai convoqué un être »,
00:15:10 donc la biologie, notamment, la contraception, comme ça vient d'être dit,
00:15:14 comme les naissances programmées, par exemple, on convoque un être, nos enfants, dans un monde opulent, dans un premier temps.
00:15:22 Alors, l'hyperparentalité, évidemment, et la pédagogie positive, là, on se dit « mais ça va, tout va bien,
00:15:27 on va vers le meilleur et le mieux pour tous », et puis on se rend compte,
00:15:31 c'est pour ça qu'être hyperparent dans le contexte actuel, c'est beaucoup plus compliqué,
00:15:35 que le monde des signes de faiblesse, et avoir convoqué un être, son enfant, dans le monde tel qu'il se manifeste actuellement,
00:15:43 c'est la double peine, je l'ai fait venir, non seulement je n'arrive pas à être le parent parfait que je me suis mis en idée de devenir,
00:15:53 j'ai un enfant qui manifeste effectivement un écart par rapport à…
00:15:56 parce que c'est un petit peu ça qui a été critiqué à la pédagogie positive, le laisser croître,
00:16:00 on va laisser aller, il va devenir parfait.
00:16:02 Si j'écoute, par exemple, Céline Alvarez, moi je n'ai pas rencontré les mêmes enfants dans les écoles,
00:16:07 elle va vous dire « on donne un alphabet mobile au milieu d'un tas d'enfants, et les enfants vont spontanément faire des mots avec ».
00:16:14 Mais non, moi, dans les classes où j'ai été, ils prennent l'alphabet mobile, ils se tapent dessus,
00:16:18 ils mâchouillent les lettres, et ils font tout sauf des mots, parce que c'est beaucoup plus compliqué que ça l'éducation,
00:16:23 et je pense que ce qui est important aujourd'hui, c'est de se dire « évitons de sortir en disant il y en a qui ont raison,
00:16:28 il y en a qui ont tort », mais ça dépend, ça dépend, et tout ça est complexe,
00:16:32 mais il ne faut pas être déboussolé par rapport à ce qui se produit actuellement,
00:16:36 parce qu'on est sans doute dans, comme Didier Pleu le disait tout à l'heure,
00:16:39 l'empathie a pris tout le terrain à un moment donné dans l'éducation familiale,
00:16:43 et donc il faut surtout le préserver, et donc dire « la pédagogie positive c'est nul, il faut jeter tout ça »,
00:16:49 c'est lamentable comme attitude, il faut garder ce qu'il y a de meilleur,
00:16:52 en modulant sans doute avec, comme tout système scientifique,
00:16:56 les interrogations que pose un système lorsqu'il prend le terrain de manière complète.
00:17:00 – Rébéca Chanclambre ?
00:17:01 – Oui, en fait, je pense qu'il y a deux confusions avec le terme « éducation positive »,
00:17:05 il y a cette idée qu'il faudrait que l'enfant ne soit plus exposé à des émotions difficiles,
00:17:10 donc on croit qu'il faut qu'il soit toujours heureux, toujours joyeux,
00:17:14 donc on va essayer d'éviter tous les obstacles, alors qu'en réalité, l'objectif de l'éducation,
00:17:19 c'est d'aider l'enfant à traverser, à surmonter ses obstacles,
00:17:22 et donc développer toutes les compétences dont il aura besoin pour faire face à ces situations,
00:17:26 ce qu'on appelle les compétences psychosociales ou socio-émotionnelles,
00:17:30 qui pourraient être utiles tout au long de la vie,
00:17:32 et la deuxième confusion, c'est de croire que l'éducation positive,
00:17:36 c'est une éducation où on ne poserait pas de limites,
00:17:38 c'est-à-dire où on laisserait juste l'enfant se développer comme il le souhaite,
00:17:43 alors que l'éducation, en tout cas ce qui a été montré par les recherches en termes d'efficacité,
00:17:49 c'est à la fois, effectivement, d'être à l'écoute de l'enfant, être empathique,
00:17:54 donc pouvoir répondre à un certain nombre de besoins en fonction de l'âge,
00:17:57 mais aussi d'avoir la capacité à poser un cadre qui va être structurant pour l'enfant
00:18:02 et favoriser aussi son développement.
00:18:04 Dites-le.
00:18:05 Oui, non, je suis d'accord, mais c'est vrai qu'on est toujours soupçonné de contresens en disant
00:18:10 c'est le monde des bisounours, l'éducation positive, laxis, etc.
00:18:13 Non, non, il n'y a pas de contresens, mais quand je lis qu'il faut éviter toute colère à un enfant,
00:18:18 là je me dis que je n'y vais pas, et je te rejoins,
00:18:21 quand tu me dis que c'est un modèle général pour tous les tempéraments.
00:18:24 Il y a des colères conduissantes, et dans ce cas-là, on a besoin d'empathie, de respect, de chaleur,
00:18:29 mais il y a des colères pulsionnelles qui ont besoin de fermeté,
00:18:33 pourquoi pas d'un fil dans ta chambre quand on est un petit peu impuissant.
00:18:37 Mais c'est ça que l'on veut dire, c'est du sur-mesure.
00:18:40 Ce qu'on reproche au grand modèle de l'éducation qui vient de la psychologie positive,
00:18:44 c'est un modèle général.
00:18:46 Alors, qui dit modèle, ça veut dire dogmatique, ça veut dire qu'on perd le bon sens,
00:18:49 et les parents perdent le bon sens.
00:18:51 On verra dans les sketchs comment on retrouve le bon sens.
00:18:54 Je suis tout à fait d'accord avec toi.
00:18:56 On va revenir précisément sur ce qu'est l'éducation positive,
00:19:00 et sur ce qu'elle n'est pas, mais j'attends vos questions dans le public.
00:19:03 Je viens vers vous.
00:19:05 Alors, est-ce qu'il y a des questions ?
00:19:10 Un micro va aller vers vous, jeune homme.
00:19:14 Il y a déjà une question pour vous, monsieur Pleu,
00:19:17 mais je vous la pose dans quelques instants, juste après avoir écouté.
00:19:20 Monsieur ?
00:19:22 Moi, c'est pour vous, madame.
00:19:24 Quand vous dites que la recherche montre, par rapport à des résultats positifs,
00:19:29 une éducation qui est efficace,
00:19:32 quand on dit qu'elle est efficace, on se fonde sur quels résultats
00:19:35 pour dire que ça a été efficace.
00:19:37 Oui, très bonne remarque.
00:19:39 En fait, le terme "éducation positive", lorsqu'il est utilisé dans la recherche,
00:19:42 signifie éducation qui a des effets positifs sur le développement de l'enfant,
00:19:46 sur son bien-être et sur la qualité des apprentissages.
00:19:49 C'est ça, les deux variables qu'on va regarder,
00:19:51 et qu'on va regarder à long terme sur la prévention des conduites à risque,
00:19:54 sur les problématiques de santé mentale, comme l'anxiété et la dépression.
00:19:58 Y a-t-il une autre question, ici, au studio 104 de la Maison de la radio,
00:20:02 sur cette partie-là ?
00:20:04 Il y a une question pour vous, Didier Pleu.
00:20:06 Vous pourfondez, évidemment, l'intolérance à la frustration dans beaucoup de vos livres.
00:20:10 Cédric nous demande pourquoi souhaiter frustrer volontairement les enfants
00:20:14 dans une société qui n'est pas pensée pour eux et qui s'en charge très bien.
00:20:18 La plupart des environnements ne leur sont pas adaptés.
00:20:22 Oui, c'est la question, est-ce qu'on adapte le monde à l'enfant,
00:20:25 ou est-ce que l'enfant doit s'adapter au monde ?
00:20:27 Je pense que c'est pas parce qu'on a un climat assez permissif qu'il faut dire
00:20:31 "Arrêtez, ils sont assez frustrés comme ça, on va pas commencer à poursuivre ça à la maison."
00:20:36 Non, je crois que c'est...
00:20:38 Vous savez, j'ai toujours parlé des histoires du striatum, comme disait Sébastien Boller.
00:20:41 Le striatum, c'est une structure dans le cerveau où siège le principe de plaisir.
00:20:46 Oui, je crois que c'est le creuset humain du principe de plaisir.
00:20:49 Donc, plus on est jeune, et même si on est adulte, on voit bien ça,
00:20:52 on est branché biologiquement pour le principe de plaisir.
00:20:55 On est branché aussi pour avoir un attachement sécure et formidable,
00:20:59 mais aussi pour "je veux tout, tout de suite", c'est ça le problème.
00:21:02 Et selon les tempéraments, il y a des enfants anxieux, plutôt introvertis, distanciés,
00:21:06 qui n'ont pas ce problème, ils ont peut-être un petit striatum,
00:21:09 mais j'en vois de plus en plus, qui sont à quémander, à l'immédiateté, etc.
00:21:13 Donc, il faut leur apprendre, on ne va pas dire moralement "ce n'est pas bien".
00:21:16 Non, je vais t'apprendre, un peu comme je vous racontais
00:21:19 avec mon petit enfant par alliance.
00:21:23 Je lui ai dit...
00:21:24 Racontez-nous, vous nous racontiez ça avant la conférence.
00:21:27 Il est sympa, mais cet été, il vient au petit déjeuner,
00:21:29 il passe devant moi sans dire bonjour.
00:21:31 Donc, moi, je dis "attention, qu'est-ce qui se passe ?"
00:21:33 Il a quel âge ?
00:21:35 11 ans. "Retourne d'où tu viens."
00:21:37 Il vient, il a compris, il revient, il dit "bonjour", mais il ne me regarde pas.
00:21:40 Alors, tu recommences.
00:21:42 Il repart, et puis après, il revient en me souriant, etc.
00:21:44 Un espèce de fourrière un peu focu.
00:21:46 Mais après, là, j'étais dans le côté "non pas fil d'entachant", mais je stoppe.
00:21:50 Pour moi, c'est un comportement d'insolence.
00:21:52 On avait préparé le petit déjeuner, il n'y avait rien qui justifiait ça.
00:21:55 Par contre, je l'ai revu après.
00:21:57 Et après, je lui ai expliqué "si tu ne dis pas bonjour comme ça,
00:22:00 c'est parce que tu avais faim, tu veux te jeter sur la bouffe tout de suite ?
00:22:03 On n'existe pas."
00:22:04 Ils ne sont pas pervers, les enfants.
00:22:06 Ils sont rois, je ne dis pas qu'ils le font exprès.
00:22:08 Ils sont tellement prisonniers de "j'ai faim, je mange" qu'on ne voit pas l'autre.
00:22:12 Et c'est ça que j'essaie d'enseigner.
00:22:14 Je lui ai dit "écoute, tu as du mal avec ça, quand tu as envie, il faut que ça se passe."
00:22:18 "Ah oui, c'est un peu ça, on a repris tout ce qui ne marchait pas à l'école."
00:22:21 Et je lui ai dit "écoute, je vais te filer un petit bracelet que m'a donnée une Québécoise,
00:22:24 dessus c'était marqué, je vais vous le dire avec l'accent québécois,
00:22:27 "je n'aime pas ça, mais c'est comme ça."
00:22:29 Il a mis le bracelet, je l'ai revu il y a 15 jours, ce n'était pas vu depuis un mois et demi,
00:22:33 il l'avait encore.
00:22:34 Alors il m'a dit "c'est dur, mais j'essaie, j'essaie d'apprendre."
00:22:37 Je crois que c'est ça, la transmission.
00:22:39 Mais je ne suis pas autoritariste, je n'ai pas filé de baffe, je n'ai pas engueulé,
00:22:42 je n'ai pas traité de petit con ni quoi que ce soit.
00:22:44 Oui ?
00:22:45 - Rébecca Chancland ?
00:22:46 - Oui, tout à fait, je pense que c'est un très bon exemple de ce qu'on appelle aussi l'induction
00:22:51 dans les modalités pédagogiques, où plutôt que simplement de punir,
00:22:56 ce qui va être peu efficace, on va expliquer en fait,
00:22:59 essayer de montrer qu'on a compris que ça peut être compliqué.
00:23:03 - Mais je n'ai pas accueilli son émotion, j'ai dit "niette".
00:23:06 - C'est ça, au moment où il y a le comportement, le fait d'arrêter,
00:23:10 mais vous avez repris derrière cette question.
00:23:13 - Oui, mais dans les luttes contre le positif, on doit accueillir l'émotion.
00:23:16 - C'est plutôt cette idée de comprendre en fait, c'est la dimension de l'anthropostype.
00:23:20 - En phase 2, en phase 2.
00:23:25 - Allez, qu'est-ce que l'éducation positive ?
00:23:28 Depuis 1989, les enfants bénéficient d'une convention internationale des droits de l'enfant.
00:23:36 C'est dans ce contexte nouveau que l'éducation positive s'est épanouie au cours des années 2000.
00:23:42 Et en 2006, c'est tout récent, le Conseil de l'Europe définit l'éducation positive
00:23:47 comme un comportement qui vise à élever l'enfant et à le responsabiliser.
00:23:51 Un comportement non violent qui lui fournit reconnaissance et assistance
00:23:56 en établissant un ensemble de repères favorisant son plein développement.
00:24:01 Rebecca Shankland, cette définition du Conseil de l'Europe satisfait la chercheure que vous êtes ?
00:24:08 - Exactement, en fait, la première apparition de ce terme de parentalité positive
00:24:14 a été proposée par le Conseil de l'Europe.
00:24:16 On peut considérer que ce n'est peut-être pas la terminologie qui a été la plus utile au final
00:24:22 puisque ça a généré un certain nombre de fausses représentations.
00:24:25 Mais au départ, c'était l'idée d'une éducation non violente, donc positive,
00:24:29 au sens où elle va avoir un certain nombre de conséquences positives sur le développement.
00:24:33 Et effectivement, aujourd'hui, on se retrouve avec beaucoup de fausses représentations.
00:24:38 Donc c'est une terminologie que nous, personnellement, en tout cas, j'utilise moins
00:24:43 puisqu'elle va générer des représentations fausses auprès du public.
00:24:48 Donc on va plutôt essayer de travailler sur l'éducation,
00:24:51 on nous rappelle ça, l'éducation fondée sur les recherches,
00:24:54 où on peut apporter un certain nombre d'informations de ce qui a été observé dans les recherches
00:24:58 qui sont bien sûr ensuite adaptées à chaque situation.
00:25:01 Vous disiez, on propose un modèle, alors ce n'est pas tant un modèle que tout le monde doit appliquer.
00:25:06 C'est des principes qui indiquent que statistiquement,
00:25:10 telle ou telle méthode va être plus efficace que telle autre.
00:25:13 Bruno ?
00:25:14 Je pense que ce sont des pédagogies à finalité positive, mais elles le sont à peu près toutes.
00:25:18 Et je voudrais un petit peu revenir sur la petite passe d'armes qu'il vient d'avoir entre Rebecca et Didier,
00:25:22 parce que c'est ça en fait, qui mobilise aussi les gens,
00:25:24 parce qu'on se dit, si tout le monde est d'accord, ça ne fonctionne plus.
00:25:26 Donc il faut bien comprendre que là, il y a un désaccord fondamental.
00:25:29 Quelqu'un qui dit, il faut accueillir l'émotion de l'enfant,
00:25:31 et quelqu'un qui dit, aussi, il faut accueillir l'émotion de l'adulte.
00:25:35 La position de l'adulte qui est en colère, elle a aussi du sens dans l'éducation.
00:25:40 Et ça, je vois un mouvement réalisé dans l'éducation positive actuellement,
00:25:44 qui simplement dit, il faut accueillir les émotions des enfants,
00:25:47 mais les enfants doivent apprendre à tenir compte des émotions des adultes.
00:25:50 Et si on résume cette petite passe d'armes,
00:25:53 je suis belge, donc j'habite du consensus en permanence,
00:25:57 mais on se dit, ils ont tous les deux raison dans leur manière de dire les choses,
00:26:02 mais le point de rencontre, parce qu'on fait le focus sur l'enfant,
00:26:05 c'est l'enfant qui devait ceci, c'est l'enfant qui devait cela.
00:26:08 Mais je pense qu'il faut effectivement tenir compte
00:26:10 qu'on a affaire à des situations éducatives qui impliquent un enfant, bien entendu,
00:26:14 mais un, deux parents, voire un ensemble d'autres personnes,
00:26:18 dont il faut aussi apprendre à tenir compte des émotions
00:26:21 et faire en sorte que l'enfant perçoive les émotions.
00:26:23 Moi, ce qui me plaît dans la petite scène qui a été évoquée par Didier,
00:26:26 c'est qu'il était visiblement en colère et qu'il n'a pas comprimé cette colère,
00:26:30 et c'est cette colère dont l'enfant a pris conscience,
00:26:33 et c'est grâce à celle-là qu'il met maintenant son petit bracelet.
00:26:35 J'étais frustré, je sais baisser ma colère, c'est ce qu'on enseigne aux parents,
00:26:39 comment ne pas péter les plombs, justement.
00:26:41 La frustration, c'est l'intelligence de la colère.
00:26:43 Vous disiez ?
00:26:44 Mais je l'accepte.
00:26:45 Mais que la frustration, c'est l'intelligence de la colère,
00:26:47 c'est-à-dire qu'en fait, quand on est frustré, on est en colère.
00:26:49 Bon, quand on est un intellectuel, on dit qu'on est frustré,
00:26:51 mais quand on est comme moi, un peu plus basique, on dit qu'on est en colère.
00:26:54 Non, parce que c'est la colère qui fait que les parents vont passer à la baffe,
00:26:57 ils vont passer à l'insulte.
00:26:58 Ça, c'est la crise de colère.
00:26:59 Oui, mais la crise de colère, ça veut dire je n'accepte pas ce comportement-là.
00:27:02 Moi, je pars du principe qu'il aura ce comportement-là,
00:27:05 il y a de grandes chances, c'est un enfant, il est biologiquement nien-nien,
00:27:07 je veux manger tout de suite.
00:27:09 OK, eh bien, j'ai une stratégie pour que tu arrêtes,
00:27:11 et après, on va travailler ça.
00:27:12 Catherine Guigan ?
00:27:14 Alors moi, je vais rebondir sur ce que vous avez dit.
00:27:17 Je pense que c'est extrêmement important de comprendre les enfants, les parents,
00:27:21 et que les parents, ce sont les premiers à être compris,
00:27:25 justement, dans leurs émotions, dans ce qu'ils éprouvent,
00:27:28 et dans leur façon d'être vis-à-vis des enfants.
00:27:32 Et justement, l'accompagnement des parents, c'est d'abord aider les parents,
00:27:37 et leur montrer que oui, l'éducation est extrêmement difficile,
00:27:41 et qu'on peut péter les plombs, on peut se tromper,
00:27:45 on peut avoir des mots qu'on n'aurait pas dû dire,
00:27:48 ou des gestes qu'on n'aurait pas dû faire,
00:27:50 et ce n'est pas grave, parce que ça arrive à tout le monde,
00:27:53 à tous les éducateurs.
00:27:55 Et quand on a eu un mot de trop, eh bien, on dit à l'enfant,
00:27:58 "Excuse-moi, j'étais fatigué, j'aurais certainement pas dû te faire ça."
00:28:03 Et pour l'enfant, une grande partie de l'éducation se fait en imitant les adultes.
00:28:09 Et donc, quand l'enfant va voir que le parent admet qu'on est tous faillibles,
00:28:14 et qu'on peut faire des erreurs,
00:28:16 lui-même, quand il va péter les plombs, avec sa petite sœur,
00:28:20 ou bien son copain dans la cour de récréation,
00:28:23 il va comprendre que lui aussi peut s'excuser
00:28:26 quand il aura eu un mot de trop ou un geste de trop.
00:28:28 Mais qu'est-ce qu'on dit, docteur Gehgen, à l'enfant de 3 ans,
00:28:32 en tant que parent, on a pété les plombs,
00:28:35 qu'est-ce qu'on lui dit concrètement ?
00:28:37 On lui dit, "Écoute, si on a pété les plombs en lui donnant une baffe,
00:28:42 on lui dit, 'Excuse-moi, j'aurais pas dû te donner une gifle.
00:28:46 Bien sûr, j'étais fatigué, je n'aurais pas dû le faire,
00:28:49 j'espère que je ne le referai plus."
00:28:52 Et ça arrive à tout le monde de pouvoir faire des erreurs.
00:28:57 Tout à fait, et l'enfant apprend aussi par imitation,
00:29:01 apprend au départ essentiellement par imitation.
00:29:03 Donc, tout ce que les parents vont pouvoir montrer aussi,
00:29:06 en termes de caractère faillible, on n'est pas du tout parfait,
00:29:09 on peut faire des erreurs, mais du coup, après, il y a des conséquences
00:29:12 et donc on va s'excuser, apprendre à s'excuser.
00:29:15 L'enfant peut après reproduire ce même type de comportement.
00:29:19 Et je voulais juste rebondir sur le fait qu'aujourd'hui,
00:29:22 les parents sont effectivement sous pression,
00:29:24 des pressions multiples, à la fois aussi liées au résultat des recherches
00:29:28 qui montrent le poids finalement de l'éducation sur le développement de l'enfant,
00:29:32 les recherches aussi dans le champ de la santé avec Bisphenola et compagnie.
00:29:36 Donc, en fait, pour toutes les questions que les parents se posent,
00:29:39 les parents ont plus de 200 choix à faire par jour à propos de petites choses,
00:29:44 de qu'est-ce qu'il faudrait manger, pas manger, etc.
00:29:46 Donc, c'est une charge mentale très importante, une pression très forte.
00:29:50 Et plus ils sont sous pression, plus ils vont avoir tendance à mettre en œuvre
00:29:54 des comportements automatiques qui ne correspondent pas forcément
00:29:58 à ce qu'ils voudraient faire.
00:29:59 Donc, quand on parle de soutien à la parentalité,
00:30:01 ce n'est pas pour prescrire un modèle à suivre,
00:30:04 c'est pour permettre aux parents de pouvoir mettre en œuvre
00:30:07 les comportements qu'ils souhaiteraient avec leurs enfants.
00:30:10 Petit sondage de l'Institut du Doigt Mouillé.
00:30:12 Qui se sent sous pression ?
00:30:14 Tiens, ici, à la maison de la radio, levez la main.
00:30:17 Levez la main, ceux qui… les parents présents qui se sentent sous pression.
00:30:20 Qui osent lever la main ? Il y en a quelques-uns qui lèvent la main.
00:30:24 Oui, vous êtes nombreux. J'imagine derrière votre écran
00:30:27 que vous l'êtes également. Bruno Mbek.
00:30:30 Alors, c'est là où j'ai un petit souci. Dans ce qui vient d'être dit,
00:30:33 il faut s'excuser, il faut comprendre les parents,
00:30:37 presque leur pardonner. Moi, dans ce que Didier exprime,
00:30:40 dans cette petite scène qui me plaît vraiment beaucoup,
00:30:42 je ne vois pas en quoi il devrait s'excuser.
00:30:44 Je ne vois pas en quoi il devrait être désolé.
00:30:46 Il n'a pas mis une gifle ? Il a eu de la colère.
00:30:48 Et on a droit, en tant que parent, aux émotions.
00:30:50 On n'a pas le droit, et là vous avez tout à fait raison,
00:30:52 à déborder dans ses émotions, comme l'enfant n'a pas le droit
00:30:55 non plus de déborder dans ses émotions.
00:30:57 Et vous le dites avec beaucoup de justesse,
00:30:59 l'enfant apprend de ses parents.
00:31:01 Si l'enfant voit effectivement ses parents
00:31:04 accueillir ses émotions d'enfant,
00:31:06 il doit apprendre à accueillir les émotions de l'adulte.
00:31:08 Mais c'est cette culture de l'excuse qui me pose parfois un peu question ou souci.
00:31:13 Un parent qui a débordé doit s'excuser d'avoir débordé,
00:31:15 mais il ne doit pas s'excuser d'avoir été en colère.
00:31:17 Il y a des enfants qui sont effectivement difficiles à supporter
00:31:20 dans un certain nombre de comportements,
00:31:22 et on doit comprendre, effectivement,
00:31:24 c'est un mot magnifique en éducation,
00:31:26 quand on dit à son enfant, on devrait pouvoir le dire à son conjoint aussi,
00:31:29 "je t'aime, mais là je ne te supporte pas".
00:31:31 Et on doit pouvoir maintenir, c'est ça maintenir un lien.
00:31:34 L'autre peut être insupportable dans le lien,
00:31:37 que ce soit un conjoint ou un enfant,
00:31:39 et la véritable affection, c'est la capacité de lui dire,
00:31:42 et le véritable amour, c'est la capacité de l'entendre.
00:31:44 Mais là, on est au cinquième étage du passage à l'acte de l'enfant en général.
00:31:48 Quand un enfant nous met en excès et nous fait péter les plombs,
00:31:51 c'est qu'on a raté toute l'autorité, ce que j'appelle en amont.
00:31:55 Et c'est vrai que je reprenais avec mon petit garçon,
00:31:58 ce qui s'est passé, j'avais bien vu qu'effectivement depuis deux jours,
00:32:01 j'étais plutôt animateur de Club Med qu'autre chose,
00:32:03 et j'étais chausifié gentiment dans les goûters et les trucs,
00:32:05 parce que je m'étais dit, finalement, ce n'est pas mon petit fils biologique,
00:32:08 donc j'avais été drôlement dans l'empathie, etc.
00:32:11 Mais comme c'était un cheval fougueux, il avait besoin aussi d'autre chose.
00:32:14 Donc c'est ça qu'il faut expliquer aux parents, quand vous pétez les plombs,
00:32:17 c'est que quelque part, vous avez mangé votre chapeau toute la journée,
00:32:21 à essayer d'être tout le temps dans du positif, du faire avec, etc.
00:32:25 Quand ça marche, oui, mais quand ça ne marche pas,
00:32:28 c'est qu'on n'est pas devant un tempérament qui apprécie le Club Med,
00:32:31 mais qui a plutôt besoin, non pas d'un camp de concentration,
00:32:34 mais d'un tuteur, d'un mentor, d'un dominant.
00:32:37 Je parlais de Boris Sionnik récemment, et il est d'accord avec moi.
00:32:41 Une gentille pouliche, quand on frotte les naseaux et qu'on est gentil avec,
00:32:44 on la monte, il n'y a pas de problème.
00:32:46 Un cheval fougueux, vous faites la même chose, vous oubliez de le brider,
00:32:49 ils vous virent.
00:32:51 Alors je ne dis pas que ce sont des animaux, les enfants,
00:32:53 qui ont des pouvoirs biologiques,
00:32:55 où ils ont besoin de stopper le pulsionnel.
00:32:58 Il y a des enfants qui n'y arrivent pas.
00:33:00 Et c'est ça la priorité pour moi.
00:33:02 Phase 2, on partagera empathie, beaucoup de choses.
00:33:05 Mais phase 1, j'arrête la pulsion.
00:33:08 Alors oui, mais la question c'est le comment, en fait.
00:33:11 Parce que là, dans ce que vous décrivez, il n'y a pas du tout de violence.
00:33:15 Et en fait, ce que montrent les recherches qui est inefficace,
00:33:18 c'est le fait d'utiliser des moyens coercitifs.
00:33:21 Oui, mais l'autorité en amont, ce n'est pas la violence,
00:33:24 ce n'est pas l'autorité en aval, c'est justement être conflictuel.
00:33:27 C'est-à-dire, tu ne fais pas ce que tu veux, tu participes au petit-déjeuner,
00:33:30 tu tournes la blouse avec moi. C'est ça l'autorité.
00:33:32 Ce n'est pas gueuler quand le mot vous dit pas bonjour.
00:33:35 Mais Didier vient d'exprimer un concept un peu nouveau.
00:33:38 C'est une situation de grand-parentalité, donc ça existe aussi.
00:33:41 Et c'est le phénomène qu'on appelle celui des chics ouf.
00:33:44 C'est-à-dire, on reçoit les enfants chics, on va les avoir.
00:33:47 Et puis au moment où on les redépose, c'est ouf.
00:33:49 Parce qu'on se transforme et c'est une...
00:33:51 Il y a des chics ouf dans la salle.
00:33:52 Certainement, il y en a partout.
00:33:54 Ils se démultiplient et il faut oser le dire,
00:33:56 parce que les grands-parents, ce ne sont pas des baby-sitters.
00:33:58 Et on a tendance à imaginer que la parentalité,
00:34:01 ça nous oblige non pas à nous préoccuper des enfants,
00:34:04 ça c'est une réalité, mais à nous occuper de full-time.
00:34:07 Et donc on devient animateur de Club Med, etc.
00:34:09 Et à un moment donné, on se dit là, c'est plus possible,
00:34:12 parce qu'il y a une partie du rôle éducatif qui m'échappe.
00:34:15 Et il faut le reprendre en main.
00:34:16 Alors la condamnation des châtiments corporels,
00:34:19 c'est bien sûr l'un des principes essentiels de l'éducation positive.
00:34:22 Le Code civil enterrine le principe selon lequel
00:34:26 l'autorité parentale s'exerce sans violence physique ou psychologique.
00:34:30 Jusque dans les années 1980, on pouvait trouver des martinets
00:34:34 en vente dans les supermarchés, à la caisse,
00:34:37 le martinet utilisé pour corriger les enfants.
00:34:40 Alors des méta-analyses ont clairement montré
00:34:43 quels étaient les effets des châtiments corporels
00:34:46 sur le développement des enfants, Rébéka Chanclombe.
00:34:48 Tout à fait. C'est basé notamment sur une méta-analyse
00:34:51 qui a porté sur plus de 180 000 enfants,
00:34:54 qui a montré des effets sur, notamment, certaines zones du cerveau,
00:34:58 notamment le cortex préfrontal.
00:35:00 Et du coup, c'est une sorte de cercle vicieux,
00:35:02 puisqu'on va chercher à corriger l'enfant
00:35:05 à travers des châtiments corporels,
00:35:07 pour qu'il obéisse mieux et qu'il ait moins de problèmes de comportement.
00:35:10 Et en réalité, cette zone est impliquée dans la capacité à réguler les comportements.
00:35:14 Donc plus on va utiliser ces châtiments,
00:35:16 plus on risque de retarder la capacité à réguler au mieux
00:35:20 ces comportements et ces émotions.
00:35:22 Mais cette maltraitance-là, elle est heureusement de plus en plus rare.
00:35:25 C'est pour ça qu'en éducation positive, c'est assimiler
00:35:28 certains comportements de parents à des violences éducatives ordinaires,
00:35:32 en nous disant "il est en train de sécréter l'hormone cortisol,
00:35:34 on va faire des destructions neuronales".
00:35:36 Wow ! D'abord, on sait que c'est faux,
00:35:39 parce que ce sont des enquêtes sur les petits rats
00:35:41 et sur les enfants hyper maltraités tous les jours.
00:35:43 Mais non, il n'y a pas de violences éducatives ordinaires destructrices.
00:35:47 Les gens font l'amalgame avec ce que vous dites.
00:35:49 Oui, les martinets, mais c'était dans les années 50, ça.
00:35:52 Non, je vous assure, dans les années 80,
00:35:54 on retrouvait des martinets à la caisse des supermarchés.
00:35:58 Et dans les années 90, il y avait encore 80% des parents qui m'étaient défessée.
00:36:03 Donc ce n'est pas parce que ça arrive une fois ou l'autre,
00:36:06 c'est pas ça le problème, mais effectivement,
00:36:08 ce que montrent les recherches, c'est plusieurs fois par mois,
00:36:10 lorsque c'est plusieurs fois par mois.
00:36:12 Non, mais ça c'est de la maltraitance.
00:36:13 Mais beaucoup de parents, non, ne faisaient pas ça.
00:36:15 Docteur Gehgen, je rappelle que vous êtes pédiatre.
00:36:17 Oui, oui. Eh bien, il y a une étude de la Fondation pour l'enfance
00:36:23 et de l'IFOP en automne dernier,
00:36:25 qui a montré que trois quarts des parents avouaient utiliser
00:36:30 des violences éducatives ordinaires régulièrement.
00:36:33 Et la moitié de ces parents disaient qu'ils étaient complètement démunis
00:36:37 et qu'ils voudraient être aidés.
00:36:39 Ce qu'il faut savoir, c'est que la violence,
00:36:42 la plupart des parents ont subi eux-mêmes des violences dans leur éducation
00:36:46 et c'est très, très compliqué pour eux d'envisager une autre éducation.
00:36:51 L'OMS et l'UNICEF rappellent que dans le monde,
00:36:55 il y a plus d'un milliard d'enfants qui subissent des violences quotidiennement.
00:36:59 Et en Europe, c'est 118 millions d'enfants qui subissent des maltraitances.
00:37:04 Et l'OMS et l'UNICEF ont lancé un appel à tous les gouvernements nationaux
00:37:10 en octobre 2021 pour que tous les gouvernements instituent
00:37:16 un soutien universel des parents pour qu'ils sortent de la maltraitance.
00:37:20 Donc, ce n'est pas un petit problème.
00:37:22 Et ils recommandent que ce soutien soit basé sur la parentalité positive,
00:37:27 sur les dernières données scientifiques, sur la théorie de l'attachement
00:37:32 et sur le développement des compétences émotionnelles et sociales.
00:37:35 Et ça, j'aurais aimé que dans notre pays, on parle de cet appel
00:37:39 à tous les gouvernements du monde.
00:37:41 Donc, il ne faut pas penser que la maltraitance est un petit problème.
00:37:44 C'est encore un immense, immense problème.
00:37:47 Et nous, pédiatres, je voudrais terminer, on voit encore énormément d'enfants
00:37:52 qui sont maltraités dans nos hôpitaux.
00:37:54 Et c'est un sujet ultra tabou en France.
00:37:57 Mais on est d'accord, on est tout à fait d'accord.
00:38:00 Je te remercie.
00:38:01 Le martinet, évidemment, personne ne veut en entendre parler.
00:38:05 Mais le problème, c'est que les parents ont perdu
00:38:07 sur leur monde des modèles.
00:38:08 Et moi, ce qui me fait peur, ce n'est pas le martinet.
00:38:10 Il existe encore, il ne doit plus exister, c'est très clair.
00:38:13 C'est la nostalgie du martinet.
00:38:15 Si vous regardez La Petite Maison dans la Prairie,
00:38:17 c'est mignon tout plein, c'est la famille moderne.
00:38:20 Pas post-moderne, mais moderne.
00:38:22 17 fois, Charles Ingalls s'en va chercher un martinet.
00:38:26 Il a un air un peu contri.
00:38:28 Il avait l'air gentil dans mon esprit, Charles Ingalls.
00:38:30 Il est super gentil.
00:38:31 Mais c'est la grosse différence entre lui et Homer Simpson,
00:38:34 c'est que Charles Ingalls, il trouve des solutions à tout.
00:38:37 Un épisode d'Ingalls, c'est toujours le même fonctionnement.
00:38:41 Un enfant pose problème, généralement Laura Ingalls.
00:38:44 Charles coupe du bois, règle le problème.
00:38:47 Et puis on danse autour de la table et il fait du violon.
00:38:49 Et on a réglé le problème.
00:38:51 C'est l'époque où le soutien à la parentalité,
00:38:54 il était quand même beaucoup plus facile à donner.
00:38:56 On donnait des conseils aux gens.
00:38:57 Et les conseils, on sait en éducation que ça ne sert à rien.
00:38:59 Ceux qui en ont besoin, ils ne sont pas prêts à les entendre.
00:39:02 Ce sont les parents maltraitants.
00:39:03 Et ceux qui sont prêts à les entendre, ils n'en ont pas besoin.
00:39:05 Et donc le principe même, c'est de se dire attention
00:39:08 quand on donne des solutions inefficaces à des parents.
00:39:12 Du style, je vais prendre le titre d'un livre,
00:39:14 "Éduquer sans punir".
00:39:16 Et puis le parent se dit, mince, j'ai pas le droit au martinet, ça.
00:39:19 Je sais bien, je vois Charles Ingalls qui le fait,
00:39:21 mais moi j'ai pas le droit.
00:39:23 Parce que Charles Ingalls, c'est les cow-boys.
00:39:25 Donc j'ai pas le droit.
00:39:26 Et puis mon gamin, il me monte sur la tête.
00:39:28 Et on me donne des petits trucs du style,
00:39:30 "Utilisez l'humour, utilisez des tas".
00:39:32 Et puis ça fonctionne pas.
00:39:34 Non, ça ne fonctionne pas.
00:39:36 Non, mais vraiment, je suis un adepte de l'éducation positive sans problème.
00:39:41 J'ai de grosses difficultés avec les titres réducteurs.
00:39:45 "Éduquer sans punir et sans sanctionner".
00:39:47 "Parents zen".
00:39:49 Tous ces éléments qui font que le parent, il est perdu.
00:39:52 Et lorsqu'il se trouve stigmatisé,
00:39:54 parce que non pas il a utilisé le martinet,
00:39:57 mais il a eu envie d'utiliser le martinet.
00:39:59 Un bon parent, c'est un parent qui a régulièrement envie d'envoyer ses enfants par la fenêtre.
00:40:04 Un mauvais parent, c'est un parent qui le fait.
00:40:06 C'est un très mauvais.
00:40:08 Mais les parents, normalement, trouvent leurs enfants parfois insupportables.
00:40:13 - Rébéca.
00:40:14 - Oui, c'était juste pour revenir sur le fait,
00:40:17 tu as mentionné des parents maltraitants.
00:40:19 Mais en fait, tout parent peut le devenir lorsqu'il se sent totalement débordé par la situation.
00:40:25 C'est ce qu'on retrouve dans les situations de burn-out parental.
00:40:28 Les recherches qui ont été menées par des collègues en Belgique,
00:40:31 Moïra Micolajac, Isabelle Roskam,
00:40:33 montrent que le burn-out parental multiplie par 10 les risques de maltraitance et de négligence.
00:40:38 Donc, chez des parents qui n'avaient pas du tout ce type de comportement avant.
00:40:42 Donc, la question du soutien à la parentalité n'est pas pour donner des conseils.
00:40:45 Elle est pour soutenir les parents, c'est-à-dire les aider à traverser ces moments difficiles.
00:40:51 Et plus l'enfant est jeune, plus c'est difficile.
00:40:53 Lorsqu'on en a plusieurs jeunes, le rapprocher, c'est encore plus difficile.
00:40:56 Lorsqu'on est parent solo et qu'on est loin, avec des familles éloignées, c'est très compliqué.
00:41:01 Donc, toutes ces situations font qu'aujourd'hui,
00:41:03 les parents se retrouvent dans des situations où ils sont dépassés
00:41:08 et peuvent avoir recours à ce type de comportement, parce qu'ils n'ont pas d'autres possibilités.
00:41:14 Qu'est-ce qui fait qu'un parent est dépassé, Rebecca ? C'est toujours le même principe.
00:41:17 Qu'est-ce qui fait qu'un enfant est dépassé ?
00:41:19 Souvent, les parents me disent "je suis dépassé quand j'ai fait des tas de choses positives avec mon enfant".
00:41:25 Enfin, même pas d'éducation positive, des trucs sympathiques.
00:41:28 Et dans certains cas, ils pètent les plombs, l'enfant.
00:41:31 Et à chaque fois, c'est toujours mon histoire de tolérance aux frustrations.
00:41:34 Il veut manger tout de suite. On a dit "non, ça ne marche plus".
00:41:36 C'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:41:38 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:41:40 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:41:42 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:41:44 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:41:46 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:41:48 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
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00:42:06 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
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00:42:12 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
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00:42:20 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
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00:47:54 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:06 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:08 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:10 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:12 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:14 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:16 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:18 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:20 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:22 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:24 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:26 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:28 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:30 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:32 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:34 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:36 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:38 Et c'est ce qu'on disait, c'est ce qu'on disait.
00:48:40 Et je pense que nettoyer la chaussette, tu te débrouilleras, tu mettras l'autre, elle est sale.
00:48:44 Une chaussette propre, une chaussette sale.
00:48:46 L'enfant peut-être à un moment donné se dira, il vaut mieux que je mette mes deux chaussettes dedans.
00:48:50 Il aura au moins appris quelque chose.
00:48:52 - Là je bois du petit lait, c'est ça l'autorité en amont.
00:48:54 - On est d'accord. - C'est uniquement ça.
00:48:56 Il y a des conséquences aux actes posés par l'enfant.
00:48:58 C'est-à-dire que la relation n'est pas privilégiée en première étape,
00:49:02 elle le sera après pour expliquer, etc.
00:49:04 En première étape, on arrête un comportement et on donne des conséquences.
00:49:08 Et ça évite d'avoir des conséquences émotionnelles disproportionnelles.
00:49:12 Les punitions, ça fait quatre fois que tu ne mets qu'une chaussette.
00:49:14 En amont.
00:49:16 - Moi je voudrais juste redire que le parent ne doit jamais être laxiste et laisser tout faire à l'enfant.
00:49:24 Le parent doit être un vrai parent, il doit transmettre des valeurs, il doit savoir dire non, il pose des repères.
00:49:31 Et ça c'est très très important.
00:49:33 Il y a eu une confusion entre la parentalité positive et le laxisme.
00:49:36 Il n'y a aucune confusion.
00:49:38 - Oui mais Catherine, qu'est-ce qui se passe quand l'enfant continue à brûler les feux rouges et que les limites ont été posées ?
00:49:42 Je vois que tous les gens qui font de l'éducation positive, ils ne sont pas laxistes.
00:49:45 Ils me disent tous "on met des limites, Pleu".
00:49:47 Je sais, vous posez des interdits.
00:49:49 Là où ça ne va pas, c'est quand il y a le passage à l'acte.
00:49:52 On réexplique la règle.
00:49:54 On ne donne pas de conséquences négatives, etc.
00:49:56 On veut garder le lien.
00:49:58 On ne peut pas garder le lien avec un tout petit de 11 ans qui ne vous dit pas bonjour le matin,
00:50:01 alors qu'on a été positif avec lui la veille.
00:50:03 C'est au niveau, uniquement là, qu'il manque quelque chose.
00:50:06 C'est ça le maillon faible.
00:50:08 - C'est pour ça qu'il faut soutenir et accompagner les parents.
00:50:10 - Alors Didier Pleu, contrairement à ce que laisserait penser le titre de votre livre,
00:50:16 "L'éducation bienveillante, ça suffit",
00:50:19 vous étiez partisan d'une éducation positive, mais telle qu'elle est née, dans le monde anglo-saxon.
00:50:26 Vous avez par exemple défendu le programme de parentalité positive,
00:50:30 triple P, de l'Australien Matt Sanders.
00:50:34 Expliquez-nous ce qu'est ce fameux programme triple P.
00:50:38 - C'est un programme d'éducation...
00:50:40 - Ça veut dire quoi d'abord, triple P ?
00:50:42 - En anglais ?
00:50:43 - Et on va traduire en français.
00:50:44 - C'est ce que vous avez dit, Alice.
00:50:46 C'est le programme de parentalité positive.
00:50:48 - Et en anglais ?
00:50:49 - Positive Parenting Program.
00:50:51 - Mais vous étiez donc plutôt proche de ce mouvement-là au début ?
00:50:56 Est-ce que c'était quelque chose d'uniquement comportemental par rapport au poste d'oltoïste qu'on connaissait ?
00:51:01 Enfin, des gens vous disaient, il y a un savoir-faire éducatif qu'on peut vous proposer sans que ce soit dogmatique.
00:51:06 C'était toujours hypothèse, réponse, d'équite.
00:51:10 Et moi ça m'enthousiasmait, parce qu'on ne parlait plus du sens d'un comportement, on parlait d'un comportement.
00:51:15 Et justement, on ne parlait pas de l'amalgame de "t'es un méchant, mais t'as eu un comportement qui n'est pas très sympa avec ta soeur", etc.
00:51:21 Je prends un exemple. On travaillait avec Triple P sur un truc qui tracasse beaucoup les parents,
00:51:26 c'est le manque de concentration de l'enfant, par exemple.
00:51:30 Manque de concentration. On travaillait sur, est-ce que l'enfant a un projet professionnel ou un rêve professionnel ?
00:51:36 Pour se projeter, motivation. Est-ce que l'enfant, l'ado, s'est séquencé ?
00:51:40 On coupe en petites... Ils appelaient ça la technique salami.
00:51:43 Plus on mange un salami en petits trucs, c'est digestif.
00:51:45 Si on coupe un salami en deux, c'est dégueulasse.
00:51:47 Des techniques comme ça, organisation du milieu. Bien sûr, pas de téléphone avec la petite copine si t'as du mal à te concentrer sur Proust, etc.
00:51:54 Des techniques qui l'aidaient. Et nous, on rajoutait aussi,
00:51:57 qu'est-ce qui fait que ça bloque quand t'es justement devant Proust ?
00:52:01 Si c'était "je vais avoir du mal", si c'était "je ne comprends pas", si c'était "je ne vois pas le rapport",
00:52:06 là, on était dans les techniques classiques, mais souvent j'entendais "c'est parce que ça me gave".
00:52:11 Et c'est là que j'ai rajouté des choses dans le programme.
00:52:14 On a été un peu en désaccord. Moi, je voulais inclure l'apprentissage du déplaisant, de l'effort,
00:52:19 quand on n'a pas envie, ce qu'on appelait nous les piégétiens, le conflit cognitif.
00:52:22 Au moment où l'enfant est en difficulté, il y en a qui ont peur, il y en a qui ont besoin d'aide,
00:52:27 mais il y en a qui disent "je ne veux pas ça, ça me prend le chou".
00:52:30 Et malheureusement, c'est le dernier tiers qui est le plus important, le plus souvent.
00:52:34 Une question de Lydie, c'est pour vous, Didier Pleu.
00:52:37 Pouvez-vous donner des exemples concrets d'aides pour élever ce seuil de tolérance à la frustration
00:52:42 chez un enfant de 3-4 ans ? Qu'est-ce qu'on fait ?
00:52:46 Qu'est-ce qu'on fait ? Ça peut être par exemple, mon enfant, à un moment donné, a pas mal joué.
00:52:52 Et puis nous, on est fatigué en tant que parent. On dit "ah non, moi je vais faire autre chose,
00:52:56 et puis tu vas t'occuper". Si l'enfant continue à quémander, etc., c'est là qu'on lui apprend que non,
00:53:01 je ne renforce pas ta demande. Un enfant a envie de grignoter parce qu'il a faim.
00:53:05 Ben non, s'il a été satisfait à sa fierté, on ne cède pas.
00:53:09 C'est toutes ces choses qui lui disent "tu ne peux pas faire ce que tu veux", tout simplement,
00:53:13 parce que ça ne marche pas. Un enfant ne veut pas faire sa sieste. Je vois ça dans des crèches.
00:53:17 Il ne veut pas faire sa sieste, on le met à part, il est avec un adulte. Ben on renforce le truc.
00:53:21 Il garde le lien, c'est sûr, mais le gamin ne dort pas. Donc c'est du bon sens. C'est avant tout du bon sens.
00:53:26 C'est-à-dire que si un enfant est gourmand, on lui dit "écoute, excuse-moi, mais tu as tendance
00:53:31 à vraiment aimer le sucre, je vais te faire un petit gâteau qui est moins sympa,
00:53:36 je veux t'éduquer à la bonne nourriture". Frustrer, ce n'est pas faire mal, c'est apprendre la réalité.
00:53:42 En fait, la pédagogie positive paye très cher le terme "positif",
00:53:46 parce qu'on a l'impression effectivement qu'on est toujours dans le "oui, oui, oui",
00:53:51 alors qu'on doit être dans le "pas maintenant" ou "pas autant". L'histoire du sucre, c'est pas autant.
00:53:56 Le jeu, c'est pas maintenant, je ne suis pas toujours disponible. Mais honnêtement,
00:54:00 la pédagogie positive a été desservie, non pas par des gens comme vous, qui l'avez maniée positivement,
00:54:06 mais des petits bouquins à la mort moelle-noeud, disons-le clairement,
00:54:09 dans lesquels on vous donnait des petits trucs et astuces, toujours positifs.
00:54:13 Et c'est ça, ce n'est pas la pédagogie positive, je préférais l'appeler "pédagogie à finalité positive",
00:54:20 dans lequel on met des limites en demeurant bienveillant.
00:54:23 Et là, on est dans quelque chose dans lequel je crois qu'on va très vite tomber sur un accord complet
00:54:27 avec tout le monde ici autour de la table.
00:54:28 Oui, parce qu'en fait, l'idée, c'est, comme tu dis, la finalité, qui va être à plus long terme.
00:54:33 Alors que là, on croit qu'il faut que tout de suite, dans l'instant, il soit toujours content.
00:54:38 Mais ce n'est pas ça l'éducation, en fait. Donc on n'est pas dans cette immédiatité.
00:54:41 Ça me l'avait dit, Rebecca, dans tous ces livres que j'ai lus, et que ce soit les vôtres autres,
00:54:44 on dit bien que quand l'enfant demande quelque chose, et surtout s'il demande avec une certaine véhémence,
00:54:50 c'est qu'il y a un besoin fondamental à combler. Non ! Il peut y avoir...
00:54:54 Alors, vous me direz dans quels livres j'ai dit ça ?
00:54:56 Non, non, j'ai mal lu. On m'a fait le coup sur Dolto, j'ai mal lu. Je suis un crétin fini.
00:55:02 Depuis quelques années, l'éducation positive est sévèrement critiquée par certains psys,
00:55:08 à l'image de la docteure en psychopathologie Caroline Goldman,
00:55:11 que vous avez peut-être entendue cet été sur France Inter.
00:55:15 Depuis une dizaine d'années, elle constate dans son cabinet une explosion
00:55:19 des troubles du comportement chez ses jeunes patients.
00:55:22 Selon elle, le principal coupable est le dévoiement de l'éducation bienveillante,
00:55:27 avec des parents qui ont lu des ouvrages de parentalité positive,
00:55:31 et qui culpabilisent à l'idée de gronder et de punir leurs enfants,
00:55:36 de crainte de causer des dommages psychologiques irréversibles.
00:55:40 Alors, à propos des auteurs de parentalité positive, Caroline Goldman parle d'idéologues, je la cite,
00:55:45 qui ont fait croire au grand public qu'une parentalité idéale, dénuée de toute agressivité, était possible.
00:55:51 Et des idéologues, je cite toujours, qui ont bâti un cynique empire marchand
00:55:55 consistant à répondre à la culpabilité parentale.
00:55:59 Et une tribune, parue dans le monde et signée par 280 chercheurs et professionnels,
00:56:04 ont contesté Caroline Goldman dans le fameux "time out",
00:56:07 on va y revenir tout à l'heure, le "time out", vous le pratiquez peut-être sans le savoir,
00:56:11 en tout cas moi j'en ai été, voilà, quand j'étais petit,
00:56:14 c'est-à-dire d'isoler un enfant qui a outrepassé les règles dans sa chambre.
00:56:19 - Bruno Hombec sur Caroline Goldman et sur ses critiques, parfois constructives, sur l'éducation des enfants.
00:56:26 - Oui, il fallait sans doute l'appliquer, et elle a servi de bélier, disons-le clairement,
00:56:29 elle a été trop loin, parce que quand on critique la radicalité, on ne doit pas soi-même la manier,
00:56:33 et donc on s'est retrouvé avec des critiques radicales d'un système prétendu radical.
00:56:37 Là, tout ce qui est excessif est insignifiant, et ça a été trop loin.
00:56:41 Je pense que dire, par exemple, que la pédagogie positive met au monde des dictateurs,
00:56:46 si vous analysez la biographie des démocratures, de ceux qui manient la dictature dans l'illusion de la démocratie,
00:56:57 ils n'ont pas connu une pédagogie positive.
00:56:59 - Ils ont été maltraités.
00:57:01 - Ils ont vécu, c'est une constante, une pédagogie sévère, injuste, et vécue comme un désert affectif.
00:57:07 Et donc on a ces composantes-là qui ne sont pas effectivement...
00:57:11 Alors là aussi, on a mis beaucoup de pression sur les parents,
00:57:13 et je pense que quand on a un système radical qui va dans l'autre sens,
00:57:16 dire à des parents "vous menacez quasiment la démocratie,
00:57:19 parce que vous mettez en scène des enfants qui n'auront jamais de limite,
00:57:23 qui ne seront pas capables de l'entendre",
00:57:25 les parents sont perdus, parce que, sans doute que ce mouvement de balancier...
00:57:29 Alors en France, ça prend toujours une proportion démesurée,
00:57:31 en Belgique, on en rit un peu, du débat sur le time-out,
00:57:34 parce qu'on a l'impression qu'on est de nouveau en train de remettre en scène la gauche et la droite.
00:57:39 Il faut couper la tête du roi ? Ben non, il faut lui laisser la tête.
00:57:42 Et on est resté dans ce schéma-là,
00:57:44 avec des personnes qui viendraient maintenant avec un discours prétendu de droite,
00:57:48 ça n'a aucun sens, par rapport à un discours progressiste.
00:57:51 Et donc ça crée un clivage, et le clivage, vous savez,
00:57:54 quand il y a de la tension en éducation, celui qui paye l'époque assez, c'est toujours l'enfant.
00:57:58 Parce que quand il a des parents qui ne savent pas quoi faire,
00:58:00 qui ne savent pas comment faire, qui ont des injonctions,
00:58:02 et c'est là que je dis "arrêtons de dire la science dit que".
00:58:05 Parce que quand la science dit une chose,
00:58:07 et puis que vous entendez quelqu'un vous dire que la science dit exactement le contraire,
00:58:10 et que vous êtes un parent au milieu,
00:58:12 il faut vraiment que les parents entendent.
00:58:14 La science dit toujours que ça dépend.
00:58:16 Et elle ne dit rien de définitif.
00:58:18 Et en tout cas, elle dit une chose, c'est qu'en parentalité,
00:58:21 on ne doit donner aucune injonction, mais faire des recommandations.
00:58:24 Les injonctions sont toujours contre-productives.
00:58:26 Et le principe de la science, c'est bien évidemment la réfutabilité.
00:58:28 La science n'est pas une croyance qui est souvent irréfutable.
00:58:31 Rébecca Chanclambre ?
00:58:33 Oui, je trouve que c'est quand même risqué de se départir de la recherche,
00:58:38 même si c'est important de montrer toutes les nuances que présentent les recherches.
00:58:43 Je trouve que c'est important de s'appuyer sur les recherches,
00:58:46 et du coup les présenter au grand public,
00:58:48 pour que tout le monde puisse se saisir de ces informations,
00:58:51 et faire ses propres choix.
00:58:53 Jamais les présenter de façon raccourcie.
00:58:55 Quand on présente des recherches sur les rats,
00:58:57 et qu'on donne l'impression qu'on va avoir les mêmes résultats avec les enfants,
00:59:00 là évidemment que ça pose des vrais problèmes.
00:59:03 Donc la recherche en pédagogie, elle est toujours nuancée.
00:59:06 On ne peut pas dire "la science dit que",
00:59:08 on peut dire "certaines recherches prétendent que".
00:59:11 Et le fil dans ta chambre n'est pas une violence éducative ?
00:59:14 Alors que ça a été dénoncé dans ce sens-là, non ?
00:59:17 Je connais Caroline Goldman, elle n'est pas du tout autoritariste,
00:59:19 et quand vous lisez son dernier bouquin, "Pourquoi",
00:59:21 c'est plutôt de l'éducation positive, drôlement bienveillante,
00:59:24 je ne vois jamais le mot "déplaisant", "autorité", "verticalité adulte", etc.
00:59:27 Donc elle est plutôt de votre côté,
00:59:30 mais par contre elle est témoin de plein d'enfants qui vont mal,
00:59:33 plein de parents vont mal, parce qu'on est à la cinquième marche
00:59:37 pour intervenir en aval, trop tard.
00:59:40 En fait, la raison pour laquelle 280 chercheurs et professionnels
00:59:44 se sont réunis pour cette tribune autour de la question du time-out,
00:59:48 c'est parce que justement, elle avait présenté les choses
00:59:51 de manière totalement excessive, en proposant d'appliquer un time-out
00:59:55 qui, plus la bêtise est grave, plus il doit être long.
00:59:59 Rappelez le time-out.
01:00:01 Alors, à l'origine, c'est un terme qui veut dire
01:00:04 "time-out from positive reinforcement", c'est-à-dire c'est un temps
01:00:07 où on va retirer l'attention de l'enfant,
01:00:10 parce qu'il a fait un comportement qui était contraire
01:00:14 à ce qu'on avait demandé ou contraire à ce qui est souhaitable.
01:00:17 Donc c'est un temps qui doit être court,
01:00:20 donc ça peut être en général, en moyenne, ils disent que deux minutes,
01:00:23 c'est efficace, et que plus ça va durer, moins ce sera efficace,
01:00:28 voire ça peut être contre-productif.
01:00:30 Donc on ne dit pas que le time-out en soi, c'est mauvais,
01:00:32 on dit que ce qui est dommage, c'est que dans la manière
01:00:35 dont Caroline Godelin l'a écrit dans son livre,
01:00:37 eh bien, ce qui est proposé, c'est de commencer tôt,
01:00:41 donc dès un an, alors que dans les recherches,
01:00:44 on montre qu'avant trois ans, ce n'est pas efficace,
01:00:46 parce que l'enfant ne peut pas comprendre, en fait,
01:00:49 ce qui est recherché par ce retrait d'attention.
01:00:52 Donc ça doit aussi s'accompagner de renforcement positif,
01:00:56 c'est-à-dire que le time-out seul n'est pas explicitement efficace.
01:01:00 Donc on doit avoir aussi les autres dimensions qui sont plus efficaces,
01:01:03 que sont le renforcement positif.
01:01:05 Mais il peut être efficace quand même quand on génère,
01:01:07 par exemple, chez un enfant de 10-11 ans, un sentiment de culpabilité.
01:01:10 Avec Caroline Godelin, on était d'accord là-dessus.
01:01:12 Il y a des enfants qui ont besoin d'un sentiment de culpabilité
01:01:14 pour déterminer ce qui est bien ou ce qui est mal.
01:01:16 Je crois que Rebecca a raison, c'est effectivement,
01:01:18 le time-out est très utile quand l'enfant l'utilise
01:01:22 comme une opportunité pour réfléchir à ce qu'il a fait
01:01:24 et la façon dont il va retrouver sa place.
01:01:26 Et c'est vrai qu'un enfant de moins de 3 ans n'a pas ce potentiel.
01:01:29 Et donc là, je pense effectivement, de nouveau,
01:01:31 quand on a un débat clivant, un peu nuancé, c'est dangereux,
01:01:34 parce que le time-out est bon s'il est bienveillant
01:01:37 et respectueux des besoins de l'enfant.
01:01:39 Et là, à ce moment-là... - Et deux minutes ?
01:01:42 - Je n'irai même pas jusque-là.
01:01:44 Deux minutes pour un enfant de 4 ans, ça ne signifie pas la même chose
01:01:48 que pour un enfant de 10-11 ans qui, lui, va pouvoir rester plus longtemps
01:01:50 parce qu'il va pouvoir maturer.
01:01:52 - On reviendra tout à l'heure sur la place des punitions
01:01:55 et des sanctions dans l'éducation positive.
01:01:58 Alors, quel type de parent êtes-vous, vous demandez-vous, ce soir ?
01:02:03 Bruno Humbec, trois images permettent de bien se situer.
01:02:07 L'image du parent hélicoptère, l'image du parent drone
01:02:11 et l'image du parent curling, du nom de cette passionnante discipline sportive.
01:02:17 Commençons avec le parent hélicoptère.
01:02:20 Le but du parent hélicoptère, c'est de contrôler son enfant.
01:02:24 Et ses phrases favorites, "T'es où ? T'es avec qui ? Tu reviens quand ?"
01:02:28 et son espoir secret, ne lui faire exposer aucun risque
01:02:32 et ne l'exposer à aucun danger.
01:02:35 - Juste pour répondre, je suis convaincu ici qu'on n'a que des hyper-parents.
01:02:38 Il faut bien se dire qu'il y a Rachmaninoff à 300 mètres
01:02:41 et ils viennent écouter des gens parler de pédagogie.
01:02:43 Donc il faut vraiment être des hyper-parents.
01:02:45 Et je le dis parce qu'il faut surtout éviter de penser
01:02:48 que l'hyper-parentalité est une maladie.
01:02:50 C'est pas une maladie, c'est juste une tendance.
01:02:52 Une tendance qui est liée au fait, comme on l'a dit tout à l'heure,
01:02:54 qu'on a convoqué à naître nos enfants.
01:02:56 Et que donc, par exemple, on va avoir cette tendance
01:02:58 à manifester ce comportement de parent hélicoptère
01:03:01 parce qu'on se dit "Il faut que je garde ce que je garde sous mes yeux."
01:03:04 Il faut pas qu'il s'échappe.
01:03:06 Il faut savoir que la distance des enfants,
01:03:09 qui leur est autorisée d'accomplir sans être sous le regard des parents,
01:03:13 elle a diminué très très fort ces années,
01:03:16 au point de créer ces enfants qu'on appelle ces enfants d'intérieur.
01:03:19 Nos enfants sont de plus en plus à l'intérieur,
01:03:22 les adolescents aussi.
01:03:24 Alors ils en arrivent effectivement à devoir répondre
01:03:26 à une injonction un peu paradoxale.
01:03:28 "Reste sous mes yeux et explore le monde."
01:03:30 Résultat, ils sont sous les écrans.
01:03:32 Et les parents, effectivement, à ce moment-là, l'hélicoptère,
01:03:34 se tracassent parce qu'il est trop souvent sous les écrans.
01:03:36 - Quels sont les signes qui montrent qu'on est peut-être un parent hélicoptère ?
01:03:39 Ça dépend évidemment de l'âge de ces enfants.
01:03:42 Évidemment, on sera pas le même type de parent hélicoptère.
01:03:44 - T'es avec qui ? Tu reviens quand ? T'es où ?
01:03:47 Et dès que l'enfant n'est pas là, on est obligé de contrôler,
01:03:51 on le voit d'ailleurs là aussi, le commerceur dessus,
01:03:54 des petites puces pour vérifier où ils sont, etc.
01:03:57 Le portable, tu peux avoir un portable,
01:03:59 parce que c'est pas pour téléphoner, c'est pour qu'on puisse t'appeler
01:04:01 et savoir toujours où tu es,
01:04:03 quels que soient les mouvements que tu réalises.
01:04:05 Alors de nouveau, c'est pas un problème,
01:04:07 sauf si ça crée de la pression sur le parent lui-même,
01:04:10 qui se dit "Mon Dieu, c'est terrible de devoir contrôler."
01:04:13 D'autant que l'enfant va aller dans un univers virtuel,
01:04:15 sur les écrans, qui eux, sont pas contrôlables ou difficilement contrôlables.
01:04:19 Et c'est un problème aussi quand ça met de la pression sur l'enfant,
01:04:22 c'est-à-dire que ça limite son capacité d'autonomie,
01:04:25 tu restes près de papa, tu restes près de maman,
01:04:27 et quand ça met de la tension sur la relation.
01:04:28 - Alors attention, c'est pas une pathologie d'être un parent hélicoptère,
01:04:31 faut le redire, on peut être un parent hélicoptère,
01:04:33 heureux, avec un enfant qui supporte plutôt bien cette pression.
01:04:37 - Je dirais que si on n'est pas du tout hélicoptère,
01:04:39 c'est un problème aussi, c'est-à-dire le défaut de surveillance,
01:04:42 c'est un vrai problème aussi en éducation,
01:04:45 ça veut dire que la tendance à surveiller,
01:04:48 mais c'est la différence entre le fait de surveiller et la volonté de contrôler.
01:04:51 - Et vous défendez d'ailleurs l'idée d'audace prudente, cher à Aristote.
01:04:55 - C'est ça. - C'est un bel oxymore.
01:04:58 - C'est-à-dire que, oui, mais les bateaux sont pas faits pour rester au port.
01:05:01 On voudrait tous, effectivement, et un bateau au port, il prend moins de risques,
01:05:04 mais il faudra bien un jour partir dans la mer,
01:05:06 et c'est pour ça, effectivement, que l'image du curling,
01:05:09 elle me plaît modérément.
01:05:11 - On va y revenir. - On va y revenir.
01:05:12 - Rébecca Shankland.
01:05:13 - Oui, c'était juste pour revenir sur cette nuance,
01:05:15 c'est-à-dire que le parent hélicoptère, le risque,
01:05:17 c'est qu'il cherche à garder l'enfant toujours près de lui,
01:05:20 et même l'adolescent,
01:05:22 mais par contre, le fait de poser la question
01:05:24 où tu vas et avec qui tu vas,
01:05:26 ça, c'est de la supervision parentale,
01:05:28 et les recherches, moi, je suis désolée, je m'appuie sur la recherche,
01:05:31 les recherches montrent que c'est un facteur de protection
01:05:35 par rapport aux conduites à risque de l'adolescent,
01:05:37 aux consommations de substances,
01:05:39 donc il y a cette dimension qui est utile,
01:05:41 mais le risque, c'est d'être surprotecteur,
01:05:43 c'est-à-dire d'empêcher l'enfant de faire ses expériences,
01:05:47 de s'éloigner du milieu familial.
01:05:49 - Sondage de l'Institut du Doigt Mouillé,
01:05:51 est-ce qu'il y a des parents hélicoptères dans la salle ?
01:05:53 Osez lever la main, les parents hélicoptères,
01:05:56 présents ici, à la maison de la radio, Studio 104,
01:05:59 il y en a pas mal là-bas, il y en a quand même pas mal ce soir,
01:06:02 et j'imagine derrière votre écran.
01:06:05 Deuxième type d'hyper-parent,
01:06:07 et c'est pas pathologique, on le redit, c'est le parent-drone.
01:06:10 Alors ces phrases fétiches,
01:06:12 "je veux le meilleur pour toi", "la meilleure école",
01:06:14 "le meilleur jouet", "le meilleur stage",
01:06:16 "le meilleur vêtement", "le meilleur équipement",
01:06:18 tout pourvu que ce soit le meilleur,
01:06:20 Bruno Le Mac, je vois mal un parent vouloir le pire pour son enfant.
01:06:23 - On est d'accord, et c'est pour ça que le parent-hélicoptère,
01:06:26 le parent-drone, c'est un parent-hélicoptère amélioré,
01:06:28 c'est-à-dire que c'est normal de vouloir le meilleur pour son enfant.
01:06:31 - Mais c'est-à-dire qu'au moindre signal,
01:06:33 il vole comme un drone, devant de son enfant,
01:06:35 pour assouvir ses manques.
01:06:37 - Le gros problème, c'est que, et c'est un problème
01:06:39 dans lequel d'ailleurs la pédagogie de nouveaux positifs,
01:06:41 mal pensée, est tombée, c'est l'idée de la joie continue,
01:06:45 la satisfaction permanente, le contentement constant,
01:06:48 alors que ce qu'on recherche pour nos enfants,
01:06:50 c'est pas ça, c'est le bonheur, mais une forme de bonheur
01:06:54 qui est en train d'aller le changer, très fort de paradigme.
01:06:56 Je vais me permettre de faire un tout petit sondage dans la salle,
01:06:59 si je peux l'emprunter.
01:07:01 Je vais demander à chacun de penser à son niveau de bonheur,
01:07:04 et à se situer entre 0 et 10.
01:07:07 Tout le monde a son chiffre ?
01:07:09 Je voudrais juste demander qui a 7.
01:07:12 Alors ne bougez pas, vous avez le chiffre parfait.
01:07:15 C'est ça le bonheur parfait, c'est ça qu'on cherche dans la vie,
01:07:18 ceux qui ont 9 ou 10, soit vous êtes amoureux,
01:07:21 le plus beau moment pathologique d'un être humain normal,
01:07:24 c'est pas grave, soit vous avez une satisfaction
01:07:27 longtemps attendue qui est réalisée.
01:07:29 Trop souvent, on s'est imaginé dans l'éducation
01:07:32 qu'on devait mettre nos enfants dans la situation du 9 ou 10.
01:07:35 Le parent drone, quand il se met la pression, c'est ça.
01:07:38 Et le risque, c'est l'épuisement parental, le burnout parental.
01:07:41 Et l'épuisement de l'enfant, être tout le temps content, c'est épuisant,
01:07:44 parce qu'à chaque contentement, vous devez réclamer autre chose.
01:07:46 Y a-t-il des parents drones dans la salle ?
01:07:49 Nouveau sondage de l'Institut du Doigt Mouillé.
01:07:52 Ah, il y en a une là, oui, il y en a quelques-uns.
01:07:55 Alors, parents hélicoptères, parents drones,
01:07:58 et il y a le parent curling.
01:08:01 C'est un sport qui me passionne, vous, Bruno Hembeck.
01:08:04 On les appelle aussi les parents bulldozers.
01:08:07 Le but du parent curling,
01:08:10 c'est de déblayer tous les obstacles
01:08:13 qui pourraient entraver la trajectoire de son enfant.
01:08:16 Alors, juste pour bien situer le curling,
01:08:19 ça passe à 3h du matin, pour le moment, sur Eurosport.
01:08:22 Si vous avez des insomnies, vous regardez, vous allez voir, c'est épouvantable.
01:08:25 Vous avez des gens qui lancent un palais, ça c'était une très belle métaphore de l'éducation.
01:08:29 On lance, on lâche, et le palais va vers quelque chose qui peut évoquer le bonheur.
01:08:33 Ça, très bien. Sauf que vous avez des personnes qui balayent,
01:08:36 qui balayent de manière frénétique, en disant
01:08:39 qu'il faut qu'on contrôle le déroulement du palais.
01:08:42 Alors, il ne faut pas trop le dire trop fort, mais ça ne sert à rien.
01:08:45 Ou à pas grand-chose, mais ils donnent plein d'énergie.
01:08:48 Et c'est l'attitude qu'ont les parents, par exemple,
01:08:51 le symptôme typique du parent curling, c'est celui qui s'énerve
01:08:54 en faisant les devoirs avec son enfant. Il fait de la contre-pédagogie,
01:08:57 c'est très clair. Il agit de manière contre-productive
01:09:00 puisqu'un enfant stressé ne peut pas apprendre.
01:09:03 Le parent qui crie stresse son enfant, mais c'est un parent qui dit
01:09:06 "Il faut que tu réussisses à l'école, pire que ça, il faut que tu aies des beaux points."
01:09:10 Moi, j'ai trois photos dans mon bureau que je montre très souvent,
01:09:13 parce que beaucoup de parents qui sont atteints d'hyper-parentalité
01:09:17 qui viennent en consultation. Je remonte une première photo avec un groupe classe.
01:09:21 Et puis, je montre la photo de ces enfants en primaire, en fondamentale,
01:09:27 puis en collège, lycée, une troisième photo.
01:09:30 Entre la première photo et la deuxième photo, c'est-à-dire primaire, collège,
01:09:34 il y a une corrélation absolue. Si vos enfants ne travaillent pas bien en primaire,
01:09:38 ça ne va pas s'arranger. Ça continuera au collège, en lycée.
01:09:41 Mais j'ai une troisième photo. Le bonheur ultérieur
01:09:44 et la réussite socioprofessionnelle ultérieure, absolument aucune corrélation.
01:09:49 Ce sont des recherches qui montrent ça. Vous avez des enfants qui se sont vautrés
01:09:52 alors qu'ils avaient de très beaux résultats à l'école,
01:09:54 et d'autres qui ont très bien réussi avec des résultats catastrophiques.
01:09:57 Et puis, il y a une quatrième photo, heureusement, une photo magique,
01:09:59 qui montre les enfants qui étaient des lecteurs spontanés,
01:10:02 qui lisaient spontanément des livres, et qui transformaient leur jeu en jeu éducatif.
01:10:07 Là, il y a une corrélation absolue. Et donc, les devoirs s'énerver
01:10:10 pour prétendre, à un moment donné, assurer l'avenir de l'enfant,
01:10:15 mais casser en réalité son envie d'apprendre, parce que c'est ça qui est très dommageable
01:10:18 dans des devoirs qui deviennent des moments de torture pour l'un comme pour l'autre.
01:10:22 Et donc, c'est terriblement nocif. Et ça, ce sont des comportements problématiques
01:10:26 du parent curling.
01:10:29 - Rébéka Chankland ? - Non, tout à fait d'accord.
01:10:32 - Très bien. Dans la salle, est-ce qu'il y a des parents curling ?
01:10:35 Est-ce qu'il y en a quelques-uns qui se reconnaissent dans cette description ?
01:10:38 Il y en a beaucoup moins, là, des parents curling.
01:10:40 Ah, il y en a là-haut, là-bas. Il y en a quelques-uns.
01:10:42 Bruno Humbec, la parentalité positive, pour vous, a engendré
01:10:47 trois types de parents emblématiques.
01:10:50 Le parent zen, par exemple, qui est imperturbable,
01:10:54 quand il est face à un enfant qui est un peu difficile,
01:10:59 il est calme, très calme. Il dit "je suis très fâché" sur un ton zen.
01:11:05 Et pour vous, c'est contre-productif de faire ça,
01:11:10 de dire "je suis très fâché" sur un ton zen, en réprimant des émotions.
01:11:15 - De nouveau, je suis très conscient que je prends des images.
01:11:18 Une image, c'est toujours quelque chose qui permet de comprendre de façon fulgurante.
01:11:21 Et ce sont les excès de la pédagogie positive mal comprises.
01:11:25 J'insiste vraiment là-dessus. Mais imaginez un parent qui vient de peindre son salon.
01:11:29 Magnifique, il a bien travaillé, il laisse traîner les peaux de peinture
01:11:33 et il monte prendre sa douche. Et son petit garçon, sa petite fille,
01:11:36 vient et met les mains dans la peau de peinture et fait un fac similaire de Blasco sur le mur.
01:11:42 - Moi, il ne faut pas qu'on me le fasse. - J'imagine bien.
01:11:46 Papa redescend et puis il a lu un mauvais livre de pédagogie positive.
01:11:50 Et il explique effectivement "je comprends que tu aies une pulsion artistique.
01:11:54 Et je ne voudrais surtout pas la contrarier, mais tu dois quand même savoir
01:11:58 que papa préférerait que la prochaine fois tu le sollicites".
01:12:01 L'enfant ne va rien comprendre, parce qu'il doit voir qu'une colère, ça se manifeste.
01:12:06 - Qu'est-ce qu'on fait alors dans ce cas-là ?
01:12:07 - Eh bien on est en colère et on montre cette colère.
01:12:09 Et l'enfant va apprendre effectivement qu'il ne peut pas tout se permettre
01:12:13 et que pour un certain nombre de comportements, il doit demander des autorisations.
01:12:16 Mais si vous mutilez l'émotion de son expression, vous empêchez l'enfant de la décrypter.
01:12:22 - À côté du parent zen, le parent hyper communicant.
01:12:26 - Alors on les a vus pendant la pandémie, lorsqu'on téléphonait à des collègues
01:12:32 et qu'il était impossible d'avoir une conversation téléphonique aboutie
01:12:36 parce que le petit réclamait l'attention en permanence.
01:12:39 C'est très contre-productif pour l'enfant aussi, parce que l'attention,
01:12:42 ce n'est pas quelque chose de continu.
01:12:44 C'est quelque chose qu'on accorde de temps en temps aux autres.
01:12:47 Et on entendait très peu, trop peu de parents utiliser ce mot magique en éducation.
01:12:52 Pas maintenant. Je suis occupé à quelque chose de sérieux.
01:12:55 C'est sérieux de t'écouter et donc je t'écouterai au moment où j'aurai le temps de le faire.
01:12:59 C'est ça que la pédagogie positive intelligente...
01:13:03 - Là où tu as raison dans la surcommunication, c'est le problème de l'horizontalité parent-enfant.
01:13:10 À un moment donné, on donne autant de paroles, autant d'importance.
01:13:13 C'est la démocratie familiale, je ne suis pas contre.
01:13:16 Mais ce n'est pas possible.
01:13:18 À un moment donné, on peut dire à un enfant, je suis désolé, ce que tu dis.
01:13:22 Bon, excuse-moi, mais on est en train de parler avec maman.
01:13:25 Je vois par exemple le renforcement positif sur les colliers de nouilles.
01:13:28 Je suis désolé, les colliers de nouilles, on ne va pas dire que c'est horrible à la fête des mères.
01:13:31 On peut s'extasier.
01:13:33 J'ai vu des standing ovations dans des guignols d'enfants et on leur demandait,
01:13:39 au bout d'une demi-heure, on n'a pas dit qu'il fallait dire que c'est pourri,
01:13:42 mais on peut quand même dire, sympa, mais on arrête là, 10 minutes.
01:13:45 Moi, je fais beaucoup de guignols avec mes petits-enfants, c'est ma passion, le guignol.
01:13:49 Donc je décide, avec l'aîné qui a 11 ans, de faire un peu le scénario,
01:13:53 mais je décide surtout du temps. 10 minutes.
01:13:55 Parce que sinon, c'est du délire.
01:13:57 Non, t'arrêtes, parce que ça y est, guignol tape sur tout le monde.
01:14:01 Dernier parent, le parent super tolérant.
01:14:05 On l'a déjà évoqué en filigrane.
01:14:08 Évidemment, c'est l'illusion, de nouveau, du parent qui ne mettrait jamais de limites,
01:14:12 y compris les limites temporelles.
01:14:14 Pas maintenant, pas tout le temps, pas aussi longtemps.
01:14:17 Ce sont des phrases qu'en éducation, on ne doit pas hésiter à dire à son enfant.
01:14:23 Et beaucoup de parents ayant mal lu, de nouveau, c'est pas du tout, du tout,
01:14:27 ou alors ayant bien lu, mais une mauvaise littérature.
01:14:30 Mais il y a eu, et ça je pense que personne en pédagogie positive ne peut le nier,
01:14:33 il y a eu aussi une très mauvaise littérature.
01:14:35 Il y en a eu en psychanalyse, il y en a eu dans tous les modèles théoriques,
01:14:39 mais cette mauvaise littérature, comme toujours,
01:14:42 quand un être humain comprend mal les choses, il en fait des images.
01:14:45 C'est pour ça que je me suis permis de faire des images.
01:14:47 Parce qu'une image, c'est une compréhension fulgurante, c'est la métaphore.
01:14:50 On sait qu'effectivement, c'est jamais ça qui a été demandé par la pédagogie positive.
01:14:55 C'est pas dire, il faut tout permettre.
01:14:57 On l'a déjà dit plus d'une fois.
01:14:59 Et le parent hyper tolérant, qui s'imagine que dès qu'il met en place une limite,
01:15:04 il crée une frustration et donc il met son enfant en danger,
01:15:07 évidemment que c'est tout à fait contre-productif.
01:15:10 Et puis les parents, quelquefois, ont le même problème avec la tolérance aux frustrations.
01:15:14 L'éducation, c'est frustrant.
01:15:19 J'imagine que vous avez des questions.
01:15:21 Il y a un micro qui va circuler dans le studio 104.
01:15:26 Levez la main. Ah, il y a une question juste là, madame.
01:15:30 Nous vous écoutons.
01:15:33 Oui, bonsoir.
01:15:35 On a beaucoup parlé d'éducation positive au sein des familles,
01:15:40 mais les enfants sont aussi des élèves et ils passent énormément de temps à l'école.
01:15:46 Et donc du coup, quel est le rôle et comment peut s'adapter l'éducation positive à l'école ?
01:15:52 C'est le problème de la pédagogie trop positive.
01:15:56 Autrefois, dans une conférence, quelqu'un me demande
01:15:59 « qu'est-ce que vous pensez de la pédagogie ludique ? »
01:16:01 Alors, je demande une explication.
01:16:03 En fait, c'est rendre sympathique un thème déplaisant.
01:16:07 En gros, on va rendre plaisant l'apprentissage des verbes irréguliers en anglais,
01:16:12 des déclinaisons en allemand.
01:16:14 Dans le temps, c'était pareil.
01:16:16 L'institut blues gris, pater familia, c'était tout le temps dans le déplaisant.
01:16:20 Il était nécessaire qu'il y ait des pédagogies qui disent
01:16:23 « c'est pas mal quand même que l'enfant participe, soit créatif, soit respecté. »
01:16:26 Mais il faudra aussi mettre en amont, de certains cours, des apprentissages incontournables.
01:16:32 Pas facile.
01:16:34 Comme on fait du solfège pour la musique, comme on s'exerce en sport.
01:16:37 Et souvent, la pédagogie positive, ça a été une espèce de nivellement.
01:16:42 Et en plus, les instituteurs, les enseignants, pas tous,
01:16:45 mais certains se sont mis à l'horizontale aussi.
01:16:48 Le tutoiement, très tôt, dans les petites classes, l'absence de notation.
01:16:53 On ne note plus pour ne pas avoir un pouvoir hiérarchique, toutes ces choses-là.
01:16:56 Est-ce qu'on ne peut pas prendre ce qui était bon avant ?
01:16:58 Je suis un peu comme le philosophe Michéa, le complexe d'Orphée, ça m'agace.
01:17:02 Est-ce qu'on peut prendre ce qui était bon avant
01:17:05 et puis reprendre ce qui est bon dans la pédagogie positive ?
01:17:07 Mais c'est toujours pareil, c'est ce que disait Bruno,
01:17:09 on est toujours dans un mouvement de balancier dans notre culture.
01:17:11 C'est ou le prof d'allemand sévère, facho, le cliché,
01:17:16 ou alors l'espagnol, la bomba.
01:17:18 Donc là aussi, on se retrouve dans une potentielle caricature,
01:17:24 c'est-à-dire que l'éducation positive à l'école,
01:17:27 on va s'appuyer précisément sur le modèle dont je parlais tout à l'heure,
01:17:30 mais je n'avais pas eu le temps de le développer,
01:17:32 qui est basé sur la théorie de l'autodétermination de Deci et Ryan,
01:17:35 où on va chercher à répondre dans le contexte des interactions pédagogiques,
01:17:40 dans les séquences pédagogiques, à ces trois besoins psychologiques fondamentaux,
01:17:43 donc le besoin d'autonomie, le sentiment de compétence,
01:17:46 c'est-à-dire le fait de se sentir capable de réaliser les tâches qu'on nous demande,
01:17:50 et le sentiment de proximité relationnelle,
01:17:52 et ça ne veut pas dire qu'on doit forcément tutoyer ou se mettre au même niveau,
01:17:56 mais considérer l'élève comme une personne,
01:17:58 et pas seulement comme un cartable qui sort des cahiers.
01:18:01 Donc c'est des choses qu'on va travailler avec les enseignants,
01:18:04 on travaille depuis longtemps avec l'éducation nationale.
01:18:06 Et l'apprentissage du difficile.
01:18:08 Tout à fait, puisque pour développer le sentiment de compétence,
01:18:12 on va justement travailler sur des consignes claires,
01:18:15 comment aider l'enfant à identifier qu'il a bien réalisé chaque étape qui était demandée.
01:18:19 Donc ce n'est pas « on va juste s'amuser à l'école »,
01:18:22 c'est en fait on va développer des interactions qui vont aider l'enfant à se développer au mieux,
01:18:29 donc à pouvoir sentir qu'il est compétent pour faire l'exercice,
01:18:32 parce qu'on aura donné des consignes suffisamment claires.
01:18:35 Et moi je voudrais ajouter que quand on développe chez les enseignants
01:18:39 leurs compétences émotionnelles et sociales,
01:18:42 les enseignants vont mieux, ils se sentent plus compétents,
01:18:46 ils sont heureux d'enseigner, et ils n'ont plus de burn-out.
01:18:52 Et quand ils savent transmettre ces compétences émotionnelles et sociales aux enfants,
01:18:57 les enfants se développent au maximum de leurs possibilités dans tous les domaines.
01:19:02 Donc les compétences émotionnelles, ils vont bien,
01:19:04 sociales, il n'y a plus de harcèlement, et intellectuels.
01:19:07 Et même s'ils viennent de milieux très défavorisés.
01:19:11 Donc développer les compétences sociales et émotionnelles chez les enseignants
01:19:14 et ensuite qu'ils les transmettent aux enfants, c'est fondamental.
01:19:18 Alors je pense effectivement, tu es tout à fait d'accord,
01:19:21 mais d'accord aussi avec ce que Didier disait tout à l'heure,
01:19:23 c'est-à-dire qu'il faut considérer la pédagogie positive
01:19:25 comme un moment dans l'histoire de la pédagogie,
01:19:27 elle ne doit pas chasser le reste.
01:19:29 Les enfants ont longtemps été considérés comme des vases à remplir.
01:19:32 Là, je ne parle pas de psychologie positive,
01:19:34 je parle du développement des compétences sociales et émotionnelles.
01:19:37 Mais moi aussi, et donc on est dans la pédagogie,
01:19:39 l'enfant a longtemps été un vase à remplir,
01:19:42 puis c'est devenu un feu allumé sous l'effet des pédagogies actives,
01:19:45 puis c'est devenu une lumière à éclairer.
01:19:48 Et on est maintenant effectivement dans l'idée,
01:19:50 il faut aussi qu'il y participe parce qu'on va éveiller ses émotions.
01:19:53 Et là, la pédagogie positive a apporté quelque chose,
01:19:56 mais ça ne doit pas dénier le reste.
01:19:58 Il y a encore des moments de transmission.
01:20:00 Et j'invite tout le monde à écouter l'émission d'ailleurs,
01:20:03 qu'on a tournée, c'était mardi je pense,
01:20:05 mercredi, avec Ali,
01:20:07 où j'ai une nouvelle notion,
01:20:09 la notion de la nécessité que l'enseignant soit un phare.
01:20:12 Parce que dans l'obscurantisme par lequel on est menacé,
01:20:16 c'est important de donner des outils.
01:20:18 Et donc il faut prendre les leçons de la pédagogie positive,
01:20:21 mais savoir aussi que pour les enseignants,
01:20:23 il y a aussi d'autres enjeux.
01:20:25 [Musique]
01:20:31 - Allez, avant de regarder la première scénette de la vie parentale,
01:20:36 j'aimerais que vous nous parliez des grands principes
01:20:40 pour favoriser des relations apaisées au sein de la famille.
01:20:44 Rebecca, Shankland.
01:20:46 - Parmi les grands principes...
01:20:48 - Quel est le terreau de base, vraiment, les bases fondamentales ?
01:20:51 - Parmi les grands principes, il y a notamment
01:20:53 le développement des compétences socio-émotionnelles,
01:20:55 puisque les recherches montrent que plus les parents
01:20:58 sont capables de réguler leurs émotions,
01:21:01 de développer une communication constructive,
01:21:03 plus l'enfant va être à même, lui également,
01:21:06 de développer ces compétences-là,
01:21:08 qui vont être utiles ensuite tout au long de la vie.
01:21:10 - Alors je vous propose de regarder la première scénette.
01:21:14 Pierre et Sophie ont des approches différentes
01:21:17 pour gérer la crise de leur enfant de 3 ans.
01:21:20 Nathan, qui veut manger sa compote avant sa purée.
01:21:24 - Sophie, Nathan ne fait qu'exprimer ses préférences.
01:21:30 - Pierre, c'est bien beau l'éducation bienveillante,
01:21:32 mais il y a des règles à suivre à table,
01:21:34 et Nathan doit apprendre à les respecter.
01:21:36 - Oui, alors j'entends ton point de vue,
01:21:38 mais est-ce que tu crois qu'il est vraiment nécessaire
01:21:40 de faire une montagne de cette situation ?
01:21:42 Nathan n'est qu'un enfant de 3 ans, après tout.
01:21:45 - Pierre, je veux simplement que Nathan apprenne
01:21:47 à obéir et à respecter les règles.
01:21:48 Si on cède maintenant, il pensera qu'il peut faire ce qu'il veut.
01:21:51 - Oui, d'accord. Alors écoute-moi, on respire, tu calmes.
01:21:54 Je sais que tu veux le meilleur pour Nathan,
01:21:56 mais là, je pense que tu surréagis.
01:21:58 - C'est bien parce que tu t'occupes pas assez de ton fils
01:22:00 et que tu t'impliques pas assez que tu comprends rien, en fait.
01:22:02 - Oui, je suis pas sûr que ce soit en élevant la voix
01:22:04 qu'on va résoudre le problème.
01:22:06 - Bah quoi ? Alors c'est quoi ta solution ?
01:22:08 Tu veux peut-être me proposer un temps calme ?
01:22:11 - Hein ? Quoi, Nathan ?
01:22:16 - Tu as mélangé ta purée avec ta compote.
01:22:20 Et c'est très bon.
01:22:23 - Eh, si tu le dis.
01:22:25 - Voilà. Bon, bah...
01:22:28 - Oui. - Balle au centre.
01:22:30 - OK. - Arrête pas, toi.
01:22:32 - Bruno Humbug, c'est une fin très belge.
01:22:40 - Ah, tout à fait.
01:22:42 - Qui veut réagir à cette sénète, Didier Pleu ?
01:22:46 - Sans être méchant avec ses parents, là,
01:22:48 j'ai l'impression qu'il manque de bon sens,
01:22:50 parce que quand on met un dessert près de l'aliment à goûter,
01:22:52 il y a de grandes chances qu'il préfère le dessert.
01:22:54 C'est ça, le bon sens.
01:22:56 C'est comme je disais tout à l'heure à Bruno,
01:22:58 quand on met un ballon devant quatre caractériels
01:23:00 dans une pièce, il y en a un qui va jouer au goal
01:23:02 et on va casser la vitre.
01:23:04 - Rebecca.
01:23:06 - Oui, en complément de ça, si par malheur
01:23:08 on a quand même mis un dessert qui était visible,
01:23:10 je pense qu'après, ce qui est important aussi,
01:23:12 c'est d'identifier, si on est dans une famille
01:23:14 où il n'y a pas spécialement de problème de comportement
01:23:16 et donc on peut s'attarder à celui-ci,
01:23:18 si on considère que c'est un problème,
01:23:20 mais sinon, quand il y a d'autres problèmes
01:23:22 plus graves, par exemple de violence
01:23:24 envers le frère ou la sœur,
01:23:26 ou de difficultés de respect,
01:23:28 de règles plus graves
01:23:30 qui mettent l'enfant en danger,
01:23:32 il est utile de s'attarder d'abord
01:23:34 à ces comportements-là.
01:23:36 - C'est ça, c'est ça.
01:23:38 - Il est utile de s'attarder d'abord
01:23:40 à ces comportements-là,
01:23:42 en travaillant notamment sur le renforcement positif,
01:23:44 c'est-à-dire identifier les moments
01:23:46 où l'enfant ne fait pas ce problème de comportement
01:23:48 pour pouvoir diminuer
01:23:50 l'apparition de ce problème-là.
01:23:52 Parce que si on s'engage
01:23:54 dans un rapport de force
01:23:56 sur tous les comportements,
01:23:58 y compris ceux qui ne sont pas spécialement
01:24:00 à risque ou pas spécialement problématiques,
01:24:02 du coup,
01:24:04 le parent perd beaucoup d'énergie
01:24:06 et l'enfant ne va pas
01:24:08 savoir non plus hiérarchiser.
01:24:10 Donc on va avoir
01:24:12 moins d'efficacité
01:24:14 sur le changement de comportement global.
01:24:16 - Bruno Humbecq, je vais aller un peu plus loin
01:24:18 que la scène est interprétée par nos deux
01:24:20 comédiens.
01:24:22 Si l'enfant, il ne veut pas
01:24:24 manger, mais il jette son assiette pleine de purée
01:24:26 par terre, ça arrive ?
01:24:28 - Oui, ça fait rire dans la salle, donc je pense que c'est une scène
01:24:30 qui est déjà arrivée. - Qu'est-ce qu'on fait concrètement ?
01:24:32 - Alors je pense, très concrètement,
01:24:34 ici, ce qui est montré,
01:24:36 c'est que papa et maman, ça ne veut pas dire que
01:24:38 papa est maman. Chacun va avoir aussi
01:24:40 une réaction différente. Parce que,
01:24:42 c'est tout le problème d'un système pédagogique
01:24:44 radical. Lorsque vous pensez que vous avez
01:24:46 raison, vous imaginez nécessairement que l'autre a tort.
01:24:48 Or, ici,
01:24:50 on peut très bien, et d'ailleurs l'enfant, ce qu'il a fait,
01:24:52 c'est arriver à un consensus. Mais on y peut
01:24:54 arriver aussi, effectivement, on pourrait imaginer
01:24:56 la même scène, avec l'enfant
01:24:58 qui est soumis à une tension, et notamment
01:25:00 ces tensions éducatives qui sont très difficiles
01:25:02 à vivre pour les enfants. Quand on prône
01:25:04 un système radical, eh bien l'enfant
01:25:06 peut exploser. Et l'enfant
01:25:08 qui va jeter son assiette, c'est-à-dire celui
01:25:10 qui renonce finalement
01:25:12 à la purée et à la compote,
01:25:14 celui-là, il fait un gros sacrifice, à moins qu'il n'aime pas
01:25:16 la purée et la compote, mais il fait un gros
01:25:18 sacrifice pour que ses parents
01:25:20 sortent de la tension. Moi, je le constate tout le temps.
01:25:22 Lorsqu'on reçoit
01:25:24 des adolescents ou des enfants, ce qui les
01:25:26 fait souffrir, ce sont les excès,
01:25:28 la radicalisation des postures
01:25:30 de l'un ou de l'autre, qui se heurtent
01:25:32 à...
01:25:34 les parents qui se heurtent l'un à l'autre, avec des
01:25:36 postures radicales. L'enfant qui se sent
01:25:38 obligé de prendre partie
01:25:40 pour l'un ou pour l'autre, et qui se
01:25:42 retrouve dans des conflits de loyauté intenables.
01:25:44 Non, non, moi je suis entièrement d'accord avec Bruno
01:25:46 sur la cohérence parentale. J'ai pas de cohérence,
01:25:48 c'est le premier
01:25:50 étage pour le dysfonctionnement d'un enfant. Mais c'est
01:25:52 vrai aussi qu'il faut que l'enfant,
01:25:54 quand il pète l'épaule à ce niveau-là,
01:25:56 toujours la même chose, c'est de se dire, mais
01:25:58 qu'est-ce qui fait que cet enfant-là
01:26:00 explose à ce point-là parce qu'il a pas eu
01:26:02 ce qu'il voulait ? C'est toujours le même truc.
01:26:04 Qu'est-ce qu'on a fait avant ? Est-ce qu'on a pas
01:26:06 essayé un petit peu à lui faire son petit
01:26:08 radis favori ? Qu'est-ce qui s'est
01:26:10 passé avant ? On n'a pas habitué
01:26:12 l'enfant, quand ça marche pas,
01:26:14 il est pas habitué.
01:26:16 C'est ce que m'a dit mon petit gars cet été. Je suis pas habitué.
01:26:18 C'est-à-dire qu'on peut être
01:26:20 en désaccord, et notamment lorsque des parents
01:26:22 sont séparés. Chacun a son
01:26:24 modèle éducatif, il faut juste le rendre
01:26:26 lisible aux yeux des autres, et pas le rendre
01:26:28 envahissant. Tu n'es pas obligé de faire
01:26:30 comme je le fais. On a des stratégies
01:26:32 éducatives différentes, et c'est pour ça que
01:26:34 je me méfie toujours d'une
01:26:36 forme pédagogique
01:26:38 qui serait invasive, qui se déclarerait
01:26:40 radicale et exclusive.
01:26:42 Tout ce qu'on fait pas, comme moi, on le fait
01:26:44 de toute façon de travers. Là, c'est
01:26:46 très dangereux dans cette famille.
01:26:48 C'est, je pense, la fin
01:26:50 qui est bien. - Dans cette
01:26:52 deuxième scénette, Nathan a bien
01:26:54 grandi, il a 9-10 ans.
01:26:56 Sophie et Pierre n'ont pas exactement
01:26:58 la même méthode pour l'inciter à faire
01:27:00 ses devoirs.
01:27:02 - Sophie, je n'en peux plus
01:27:04 de cette façon. Tu vas te faire les devoirs
01:27:06 avec Nathan, tu es beaucoup trop laxiste.
01:27:08 Et à chaque fois, en plus,
01:27:10 il saisit cette opportunité pour traîner encore
01:27:12 un peu plus. - Mais Pierre,
01:27:14 tu sais bien que j'essaie d'adopter une méthode plus douce
01:27:16 pour encourager Nathan à aimer l'apprentissage.
01:27:18 Forcé, ça fonctionne pas toujours.
01:27:20 - Oui, mais il a besoin de discipline. Moi, j'ai grandi
01:27:22 comme ça, ça m'a pas fait de mal. - Je respecte
01:27:24 ton point de vue, mais on doit trouver un
01:27:26 équilibre. Nathan
01:27:28 a besoin de se sentir écouté et compris.
01:27:30 - Oui, mais il a aussi besoin
01:27:32 de comprendre que la vie, c'est pas un long fleuve tranquille.
01:27:34 C'est pas aussi facile qu'on croit.
01:27:36 Faut travailler dur pour y arriver. - Je suis
01:27:38 d'accord, mais il y a des moyens
01:27:40 de lui faire...
01:27:42 de lui montrer la discipline et
01:27:44 la persévérance sans le brusquer.
01:27:46 Non ?
01:27:48 - Oui.
01:27:50 - Vas-y, dis-moi, tu veux qu'on procède comment ?
01:27:52 Vas-y, je t'écoute. - Et ben, pourquoi ne pas
01:27:54 discuter avec lui de ses devoirs,
01:27:56 de ses projets,
01:27:58 de ses objectifs à long terme ? Le faire participer
01:28:00 activement à sa propre éducation.
01:28:02 - Oui, bon alors franchement, je suis pas vraiment sûr que ça fonctionne.
01:28:04 Mais si tu le dis,
01:28:06 je suis prêt à essayer.
01:28:08 En revanche, s'il continue à traîner comme ça, il va falloir
01:28:10 être un petit peu plus sévère, hein,
01:28:12 le cadrer. - OK.
01:28:14 Bah écoute, on va essayer ma méthode et si ça marche pas, on va l'ajuster.
01:28:16 L'important, c'est que Nathan se sente soutenu.
01:28:18 [Musique]
01:28:20 - Didier Pleu.
01:28:22 [Applaudissements]
01:28:24 Didier Pleu.
01:28:26 - Bah oui, là c'est un petit peu la caricature,
01:28:28 c'est-à-dire que le père
01:28:30 est en train de dire que ce sont des valeurs incontournables,
01:28:32 on doit accepter l'effort,
01:28:34 on tergiverse pas,
01:28:36 la discipline, le truc, tous ces mots que nous
01:28:38 on a entendus avec nos pâtères familias.
01:28:40 C'est toujours le même souci, c'est
01:28:42 mon enfant a du mal à se contraindre
01:28:44 à faire un truc qu'il a pas envie de faire,
01:28:46 est-ce qu'on peut reprendre ça ensemble avec lui
01:28:48 pour lui dire, bah dis donc, si tu peux pas t'habituer
01:28:50 à faire un truc un peu dur,
01:28:52 est-ce qu'on peut pas reprendre un peu
01:28:54 pourquoi t'as arrêté le piano quand il y avait le soft-foot,
01:28:56 pourquoi t'as arrêté le foot parce que t'étais pas avançant,
01:28:58 est-ce qu'on peut pas reprendre différemment
01:29:00 l'impression qu'on t'a laissé croire
01:29:02 qu'on pouvait avoir un objectif,
01:29:04 je vais encore dire le mot,
01:29:06 sensueux.
01:29:08 - Frustré. - Bravo.
01:29:10 - Bruno Mbek. - Alors je pense qu'effectivement,
01:29:12 on montre bien comment le consensus, ou la recherche de consensus,
01:29:14 ou le souci de consensus,
01:29:16 pas tomber sur un accord,
01:29:18 est important, parce qu'ils ont tous les deux un peu raison,
01:29:20 et donc dans l'éducation, on a toujours
01:29:22 un peu raison, mais jamais totalement,
01:29:24 et ce qui est important,
01:29:26 et j'aime beaucoup cette partie-là du sketch,
01:29:28 quand le papa se met à la place d'eux.
01:29:30 Se mettre à la place d'eux, c'est catastrophique,
01:29:32 parce que l'autre, il n'a plus de place.
01:29:34 Je le vois très souvent, moi je me préoccupe beaucoup
01:29:36 du harcèlement scolaire, quand un parent
01:29:38 dit, tu sais, moi aussi
01:29:40 j'ai vécu ça,
01:29:42 et l'enfant il est complètement perdu, il s'en fout
01:29:44 de ce que son parent a vécu,
01:29:46 et on a un personnage qui le montre très souvent,
01:29:48 c'est Babar, on connaît tous Babar,
01:29:50 d'abord il est très nocif pour induire
01:29:52 des comportements racistes, puisque les rhinocéros
01:29:54 sont cons, parce que c'est des rhinocéros,
01:29:56 et en plus, il a toujours
01:29:58 la même stratégie éducative.
01:30:00 Alexandre a un petit souci, vient sur les genoux
01:30:02 de papa Babar, qui va t'expliquer
01:30:04 comment lui faisait quand il avait 10 ans,
01:30:06 mais quand il avait 10 ans, c'était pas
01:30:08 la même société, c'était pas les mêmes façons
01:30:10 de faire, et donc il faut éviter
01:30:12 à un moment donné de se mettre à la place, parce que l'éducation
01:30:14 change, et que comme elle change,
01:30:16 il faut toujours chercher à la
01:30:18 moduler, j'ai beaucoup aimé le mot moduler,
01:30:20 on va essayer de moduler ce que je fais
01:30:22 avec ce que tu dis, ça, bravo
01:30:24 pour les parents. - Rébéka ? - Oui,
01:30:26 en complément, alors je sais pas exactement
01:30:28 ce qu'ils ont fait juste avant
01:30:30 cette cénette, mais ce qui
01:30:32 va être important aussi,
01:30:34 c'est comment aider l'enfant à s'engager
01:30:36 dans le comportement, c'est-à-dire, il n'est pas forcément
01:30:38 utile simplement de faire la morale
01:30:40 et de dire "mais il faudrait ceci"
01:30:42 ou "comment ça se fait que cela",
01:30:44 mais aider à enclencher le mouvement,
01:30:46 et en fait, ce que
01:30:48 montrent les recherches, c'est que
01:30:50 on n'est pas obligé de le faire
01:30:52 dans la durée en fait, si on le fait
01:30:54 pendant, par exemple, deux semaines, où à chaque fois
01:30:56 on va s'asseoir à côté pour qu'il sorte les cahiers
01:30:58 et enclencher les devoirs, et après
01:31:00 se retirer, après il arrive à le faire
01:31:02 tout seul, donc c'est vraiment cette idée d'enclencher
01:31:04 des mouvements, donc là,
01:31:06 j'ai l'impression qu'elle a juste peut-être dit
01:31:08 "fait les devoirs", mais qu'elle n'a pas vraiment
01:31:10 enclenché le mouvement, et donc
01:31:12 ça ressemble plus effectivement à une attitude
01:31:14 plus laxiste, qui ne serait pas efficace,
01:31:16 donc il y a vraiment ce besoin
01:31:18 d'aider l'enfant à passer à l'action
01:31:20 avec ce qu'on appelle des antécédents
01:31:22 qui sont très efficaces.
01:31:24 Troisième scénette,
01:31:26 à l'heure du dîner, Sophie et
01:31:28 Pierre sont confrontés à leur fils Nathan,
01:31:30 qui a bien grandi, c'est un adolescent,
01:31:32 qui garde son téléphone à table
01:31:34 pour aller sur TikTok,
01:31:36 Snap ou Instagram.
01:31:38 Pierre, c'est pas possible, tu peux pas
01:31:42 laisser Nathan avec son portable
01:31:44 à table déjà, c'est irrespectueux,
01:31:46 et ça ruine notre moment en famille en plus.
01:31:48 Oh, écoute Sophie, je comprends
01:31:50 que ça puisse te déranger, mais tu sais,
01:31:52 à quel point il est accro avec son téléphone ?
01:31:54 Et puis moi j'ai pas envie de créer des conflits
01:31:56 à table, ça me ballonne.
01:31:58 Non mais, il est temps qu'il apprenne
01:32:00 le respect des règles, enfin, à notre époque
01:32:02 on faisait pas ça.
01:32:04 Oui, alors excuse-moi chérie, mais à ton époque,
01:32:06 le portable n'existait pas.
01:32:08 Et puis moi, batailler et punir
01:32:10 Nathan à chaque repas, je suis pas sûr que ce soit
01:32:12 la bonne approche. On peut en discuter
01:32:14 avec lui, et essayer de lui faire
01:32:16 comprendre combien c'est important d'être présent,
01:32:18 c'est tout. Oui, mais tu veux toujours tout expliquer
01:32:20 Pierre, mais parfois les adolescents ont besoin de règles
01:32:22 strictes pour comprendre.
01:32:24 Non, alors, je ne dis pas qu'il ne faut pas avoir de règles,
01:32:26 je dis juste qu'on peut lui
01:32:28 expliquer et essayer de trouver un compromis.
01:32:30 Un compromis ?
01:32:32 Oui. Ok, et qu'est-ce que t'as en tête ?
01:32:34 Je sais pas moi,
01:32:36 tiens, par exemple, on
01:32:38 pourrait définir un temps d'utilisation
01:32:40 du téléphone avant de manger,
01:32:42 et en échange de ça, il s'engage
01:32:44 à être présent, à être
01:32:46 attentif, et profiter
01:32:48 de ce moment privilégié qu'on a
01:32:50 ensemble, à table.
01:32:52 Moment familial.
01:32:54 Ok, d'accord,
01:32:56 mais ça, ça veut pas dire qu'il pourra regarder
01:32:58 son portable pendant des heures, jouer à des jeux,
01:33:00 aller sur les réseaux. Non, parce que je veux
01:33:02 qu'il participe à nos conversations. Oui, je suis d'accord,
01:33:04 mais toi, ça c'est un bon début.
01:33:06 On va en discuter avec lui, on va lui expliquer,
01:33:08 et je suis sûr qu'on va trouver un équilibre.
01:33:10 Alors, Rebecca Champland,
01:33:16 que fait-on dans ce cas précis
01:33:18 de conflits répétés
01:33:20 à cause des écrans, du smartphone,
01:33:22 de la tablette ?
01:33:24 Oui, là, je pense que ce qui est intéressant dans cet exemple,
01:33:26 c'est que
01:33:28 il se retrouve avec le téléphone
01:33:30 à table, et donc les règles,
01:33:32 elles sont à placer en amont.
01:33:34 Je comprends le papa qui dit "Au moment où on est dans le repas,
01:33:36 là, j'ai pas envie de créer le conflit,
01:33:38 parce que c'est le seul moment où on est à table
01:33:40 ensemble, et voilà." Mais par contre,
01:33:42 c'est des règles à discuter en amont,
01:33:44 c'est-à-dire qu'on vient pas avec le téléphone à table.
01:33:46 Donc, dans tous les cas, on le pose dans l'entrée,
01:33:48 et on vient pas avec.
01:33:50 Et après, s'il est venu avec, on lui rappelle juste
01:33:52 qu'en fait, il faut le poser dans l'entrée.
01:33:54 Il y a un certain...
01:33:56 Il y a des espaces où on peut
01:33:58 avoir du temps avec le téléphone, et puis des espaces
01:34:00 où on est là pour être ensemble.
01:34:02 Alors, Rebecca vient de parler d'espace,
01:34:04 moi, je vais parler de temps. Parce qu'il y a des temps
01:34:06 différents, en fait, effectivement,
01:34:08 et il y a le temps... On doit tous apprendre,
01:34:10 et c'est quelque chose qu'on doit vraiment apprendre de manière
01:34:12 urgente, à séparer notre temps,
01:34:14 non pas en deux, le temps
01:34:16 professionnel, scolaire, et le temps
01:34:18 familial, mais en trois.
01:34:20 Le temps professionnel, scolaire, c'est un temps
01:34:22 obligé. Le temps familial,
01:34:24 c'est un temps négocié.
01:34:26 On ne fait pas ce qu'on veut, quand on est en
01:34:28 famille. Et le temps libre, c'est
01:34:30 un temps qui n'appartient qu'à toi.
01:34:32 Les japonais ont un petit truc,
01:34:34 si les personnes sortent d'ici avec ce petit truc,
01:34:36 je pense que ça peut les aider pas mal,
01:34:38 ils appellent ça un "ikigai". - C'est pas "igai".
01:34:40 - Un "ikigai". C'est pas une raison de vivre,
01:34:42 ça c'est beaucoup trop important, c'est juste une bonne raison
01:34:44 de se lever. Si vous aimez lire,
01:34:46 vous occupez de vos plantes, si vous aimez faire
01:34:48 quelque chose, faire de la gym,
01:34:50 eh bien vous, c'est un "ikigai". Et vous vous dites,
01:34:52 je vais faire ça pendant une heure.
01:34:54 Et je pose ça
01:34:56 comme socle de l'agenda. C'est-à-dire
01:34:58 qu'ils ont un proverbe qui le dit très bien,
01:35:00 si j'ai un rendez-vous avec l'empereur, tant pis,
01:35:02 l'empereur passera après, parce que
01:35:04 c'est le truc qui bouge pas dans l'agenda.
01:35:06 Chez nous, dans nos sociétés, le temps
01:35:08 libre, c'est celui qu'on va tout de suite bousculer.
01:35:10 Tant pis, j'irai pas à la gym, je dois aller
01:35:12 conduire les gosses à la... Ici,
01:35:14 chacun doit apprendre un "ikigai". Et pour les écrans, c'est
01:35:16 très important. Parce que le problème n'est pas
01:35:18 l'écran, le problème c'est l'écran à table.
01:35:20 Et donc ça, c'est le temps familial.
01:35:22 Ton écran, pendant ton temps libre,
01:35:24 tu fais ce que tu veux, tu n'as de compte
01:35:26 à rendre à personne. Si tu fais même
01:35:28 rien, il y a des adolescents qui sont grands spécialistes
01:35:30 là-dedans, eh bien tu fais rien,
01:35:32 c'est ton droit. Mais pendant ton
01:35:34 temps complètement libre, et là
01:35:36 effectivement, on évite finalement
01:35:38 une discussion qui porte
01:35:40 effectivement sur l'espace, mais aussi sur le temps.
01:35:42 C'est-à-dire, ton temps libre, le temps familial
01:35:44 et le temps... - Et puis il faut peut-être essayer, en tant que parent
01:35:46 ou adulte, d'être un peu exemplaire.
01:35:48 - Mais si vous n'avez pas d'ikigai,
01:35:50 si vous ne nous montrez pas... D'ailleurs, c'est peut-être la
01:35:52 seule exigence qu'on a. - Bruno, excuse-moi,
01:35:54 mais même quand on te cloisonne, qu'on commence à
01:35:56 dire "tu as des temps à toi pour l'écran",
01:35:58 ils ont du mal à quitter l'écran.
01:36:00 Parce que là, il y a un processus addictif énorme,
01:36:02 ils sont obligés de les aider, sans stigmatiser
01:36:04 les écrans, c'est de leur dire "non, c'est un
01:36:06 piège, c'est un secret de la dopamine,
01:36:08 t'es addict, la preuve, dans les addictions,
01:36:10 on a rajouté les écrans, donc ça ne veut pas dire interdit
01:36:12 total, mais les laisser seuls en disant
01:36:14 "t'as ton temps d'écran, et puis quand tu viendras
01:36:16 à table, tu l'auras laissé dans ta chambre",
01:36:18 avec certains tempéraments,
01:36:20 toujours les mêmes, ça ne marche pas.
01:36:22 Ceux qui sont très sensibles à
01:36:24 "je fais tout, tout de suite", ne peuvent pas
01:36:26 dire "je descends, maman, à table, parce
01:36:28 que j'ai fini mon heure d'écran". Ils le font pas.
01:36:30 - Il y a des stratégies pour rendre
01:36:32 les écrans finalement conviviaux,
01:36:34 et éviter que ce soit des écrans qui enferment
01:36:36 l'enfant à l'intérieur. Ce qui est problématique
01:36:38 dans l'écran, c'est que ça enferme à l'intérieur.
01:36:40 Il y a des écrans partagés,
01:36:42 deux enfants qui jouent sur un écran vont
01:36:44 être en interaction, c'est ça
01:36:46 un écran interactif, c'est pas l'écran qui
01:36:48 interagit, c'est deux personnes qui se mettent à
01:36:50 interagir avec l'écran. Mais le temps libre
01:36:52 doit rester un temps libre. Je crois que les parents,
01:36:54 et c'est un des problèmes dans l'hyper-parentalité,
01:36:56 qui veulent contrôler tous les moments
01:36:58 de leur enfant, en disant "ne perds pas ton temps,
01:37:00 travaille plutôt pour l'école",
01:37:02 empêchent ce temps libre.
01:37:04 Et comme Alil dit très justement,
01:37:06 le parent doit montrer aussi
01:37:08 qu'il est capable de prendre un temps libre à soi.
01:37:10 Vous savez que pendant la pandémie,
01:37:12 on a fait une recherche pour vérifier
01:37:14 notamment les mamans, parce que
01:37:16 les mamans ont une charge mentale beaucoup plus forte,
01:37:18 est-ce que vous avez un moment
01:37:20 à vous, ou un espace à vous ?
01:37:22 À part les toilettes,
01:37:24 et encore, pas pour tout le monde,
01:37:26 ce moment, ce temps n'existait pas.
01:37:28 Et donc c'est vraiment important que les enfants voient
01:37:30 des parents, c'est peut-être la seule
01:37:32 obligation qu'on a en tant que parents.
01:37:34 Il faut s'en être honnête avec nos enfants pour dire que c'est très très dur
01:37:36 pour nous, parce qu'on a le même souci.
01:37:38 On a du mal à ne pas regarder nos mails
01:37:40 juste après l'émission, ou avant l'émission.
01:37:42 Si on commence à partager ça avec l'enfant,
01:37:44 ça n'est plus de la morale, c'est
01:37:46 "je suis un être humain comme toi, mais je sais
01:37:48 plus de choses que toi, je connais plus de réalités
01:37:50 que toi, donc c'est pour ça que je te dis,
01:37:52 avec certaines choses, il faut qu'on fasse très attention,
01:37:54 mais je suis avec toi."
01:37:56 Avant de passer aux questions Internet et aux questions
01:37:58 dans le public, qu'est-ce que vous avez envie de dire
01:38:00 à tous ces parents qui se mettent
01:38:02 une pression considérable
01:38:04 en visant à la fois l'enfant parfait
01:38:06 et la parentalité parfaite ?
01:38:08 Qu'est-ce que vous avez envie de leur dire, Rebecca Champland ?
01:38:10 Je dirais que ce qu'on connaît
01:38:12 aujourd'hui au niveau de la
01:38:14 recherche peut donner
01:38:16 des pistes, mais ce n'est
01:38:18 qu'une boussole qu'on peut utiliser,
01:38:20 qu'on peut décider d'utiliser
01:38:22 lorsqu'on se trouve face à des situations
01:38:24 difficiles et on hésite entre plein de choses
01:38:26 différentes, et là, ça peut donner une piste
01:38:28 de ce qui a pu mieux marcher
01:38:30 pour un certain nombre de parents,
01:38:32 et qui après a adapté, effectivement,
01:38:34 en fonction de sa situation et de son enfant.
01:38:36 Mais ce n'est pas un comportement
01:38:38 qu'on doit mettre en œuvre 24h/24
01:38:40 toute l'année,
01:38:42 parce que ça, ce serait
01:38:44 totalement irréaliste, et c'est ça qui met une pression
01:38:46 très forte sur les parents,
01:38:48 et qui peut générer des risques d'épuisement.
01:38:50 Regardez les Simpsons,
01:38:52 je pense que c'est vraiment la recette.
01:38:54 Au niveau du soutien parental,
01:38:56 par exemple, ils sont un exemple,
01:38:58 ils nous montrent très bien, parce que c'est pas...
01:39:00 On a parlé tout à l'heure des Ingalls dans lesquels on résout le problème.
01:39:02 Chez les Simpsons, à chaque épisode,
01:39:04 vous trouvez un autre problème. C'est plus proche
01:39:06 des réalités familiales, on ne résout rien,
01:39:08 mais on s'installe sur un divan,
01:39:10 et on regarde les Simpsons. C'est ce qu'en psychologie,
01:39:12 on appelle la conscience réflexive.
01:39:14 On va s'installer avec vous sur l'écran,
01:39:16 sur le divan, et on va regarder
01:39:18 comment vous vivez, et on va
01:39:20 vous accompagner pour essayer de rendre les choses
01:39:22 vivables pour vous, pour vos enfants, pour l'ensemble.
01:39:24 On ne donne plus de conseils quand on reçoit des familles,
01:39:26 on ne dit pas "faites comme ceci, faites comme cela",
01:39:28 mis à part Supernanny,
01:39:30 qui le fait de manière excessive.
01:39:32 Nous, on va simplement regarder
01:39:34 et essayer de rendre les choses vivables
01:39:36 pour chacun des membres de la famille.
01:39:38 - Alors,
01:39:40 j'imagine que vous avez beaucoup de questions,
01:39:42 tirées des propos de nos invités,
01:39:44 ou bien des Cnet.
01:39:46 Tiens, une question
01:39:48 qui est personnelle.
01:39:50 Est-ce que vos enfants sont épanouis ?
01:39:52 C'est une question de Laurence.
01:39:54 C'est une question de Laurence.
01:39:56 - De Laurence.
01:39:58 Rébecca Chamclam.
01:40:00 - Oui, alors, peut-être que chacun a sa définition
01:40:02 d'épanoui, mais en tout cas,
01:40:04 nous, on a eu cinq enfants à la maison, parce qu'on est famille
01:40:06 recomposée, et
01:40:08 les trois grandes, qui sont déjà
01:40:10 majeures, ont chacune trouvé
01:40:12 leur chemin dans lequel elles sont,
01:40:14 en tout cas, elles se disent épanouies, et c'est ce
01:40:16 qu'on a l'air d'observer.
01:40:18 Les deux plus jeunes sont encore enfants,
01:40:20 13 ans et 10 ans, et chacun
01:40:22 là aussi, à sa manière. Nous, c'est comme
01:40:24 cinq planètes totalement différentes.
01:40:26 Nous, ce qu'on appelle
01:40:28 épanoui, c'est avoir suffisamment
01:40:30 d'amis avec qui on se sent
01:40:32 en confiance, ne pas se sentir
01:40:34 en difficulté à l'école,
01:40:36 et pouvoir s'épanouir dans des
01:40:38 activités qui plaisent. Donc, oui,
01:40:40 on a observé ça. - Bruno Himbecq ?
01:40:42 - Ils sont tous les trois en prison.
01:40:44 [Rires]
01:40:46 Non, non, ils vont très bien.
01:40:48 - Moi, j'ai vu vos filles, Didier Fleux,
01:40:50 elles ont l'air très épanouies.
01:40:52 - Ah non, non, moi je suis content,
01:40:54 c'est une grande réussite.
01:40:56 Oui, oui, mon aîné, c'était pas un cérébral,
01:40:58 il est devenu restaurateur, ma seconde,
01:41:00 une grande communicante, elle est dans les assurances,
01:41:02 et puis elle fait du tas de relationnels, et la dernière,
01:41:04 elle était plutôt artiste, péningaine.
01:41:06 C'est pourquoi j'ai pas cloné mes enfants
01:41:08 en étant un vieux réac fasciste.
01:41:10 - Catherine Guéguen ? - Moi, je suis heureuse
01:41:12 de ce que mes enfants sont devenus.
01:41:14 - Question dans le public.
01:41:16 Alors, qui a des questions ?
01:41:18 Ah, là-bas, au fond, une question.
01:41:20 Pour vous, monsieur.
01:41:22 - Oui, bonjour. - Bonjour.
01:41:24 - Je me demandais juste...
01:41:26 Ça marche ? - Oui, on vous entend très bien.
01:41:28 - Je me demandais juste si on ne donne pas
01:41:30 trop d'importance
01:41:32 à vouloir bien faire
01:41:34 avec ses enfants,
01:41:36 quitte à s'oublier, en fait,
01:41:38 dans l'histoire.
01:41:40 Moi, je sais que mon papa, par exemple,
01:41:42 il a toujours voulu bien faire avec moi,
01:41:44 et c'était très attachant,
01:41:46 mais ça ne me parlait pas
01:41:48 dans les moments qu'il fallait,
01:41:50 dans les moments critiques, comme ça,
01:41:52 où on ne se rencontrait pas, quelque part.
01:41:54 Et je me rappelle très bien, quand j'allais le voir,
01:41:56 il était professeur de musique
01:41:58 et chaque année, il faisait un spectacle de fin d'année.
01:42:00 Donc là, bon, je venais avec plaisir.
01:42:02 Et je le découvrais
01:42:04 à ce moment-là, en fait,
01:42:06 tellement
01:42:08 que je me dis...
01:42:10 Je suis enfin rentré en rapport
01:42:12 avec lui, quelque part, avec le côté
01:42:14 inspirant d'un parent.
01:42:16 Et après,
01:42:18 le respect
01:42:20 se forge, naturellement, j'ai envie de dire.
01:42:22 Et ça,
01:42:24 ça m'a questionné
01:42:26 très jeune, ça, et j'avais une écoute
01:42:28 tout à fait différente de ce
01:42:30 qu'il me disait ensuite. Et lui-même,
01:42:32 s'est retrouvé à
01:42:34 aller plus dans cette direction de faire
01:42:36 ce qui lui plaisait.
01:42:38 Et ça s'apaise naturellement, je dirais.
01:42:40 - Bruno Humbecq. - Alors ça, c'est vraiment
01:42:42 une intervention merveilleuse, qui montre,
01:42:44 effectivement, ce qu'est le vrai rôle d'un parent,
01:42:46 c'est donner envie à ses enfants
01:42:48 de grandir. Et pour donner envie à ses enfants
01:42:50 de grandir, il faut s'épanouir.
01:42:52 Pas se sacrifier pour ses enfants,
01:42:54 le fameux "j'ai tout fait pour toi, j'ai tout fait, j'ai tout fait,
01:42:56 j'ai tout fait, et puis je ne respirais plus".
01:42:58 Et donc, il est vraiment important de prendre
01:43:00 le temps de se développer et de prendre
01:43:02 les enfants à témoin.
01:43:04 Vous savez, quand vous avez des contextes d'hyper-parentalité,
01:43:06 quand on dit "on va se préoccuper
01:43:08 de papa et de maman,
01:43:10 de celui qui est en difficulté",
01:43:12 c'est l'enfant qui respire, qui souffle.
01:43:14 Parce qu'il avait deux parents qui ne regardaient que lui,
01:43:16 et que grandir sous le regard
01:43:18 de personnes qui vous disent "mais tu es
01:43:20 tout pour nous", non,
01:43:22 tu existes, on est très contents que tu existes.
01:43:24 C'est d'ailleurs tout le problème des émotions de l'enfant,
01:43:26 accueillir les émotions de l'enfant,
01:43:28 mais qu'ils connaissent aussi, les émotions de papa, les émotions de maman,
01:43:30 et le témoignage ici,
01:43:32 d'un enfant qui grandit,
01:43:34 devient adulte,
01:43:36 et puis en ayant le souvenir d'un papa
01:43:38 qui a fait quelque chose qu'il aimait,
01:43:40 c'est un souvenir qui rend évidemment
01:43:42 très fort dans la vie.
01:43:44 Oui, c'est le parent mentor, modèle,
01:43:46 c'est-à-dire que si on est tout le temps dans une
01:43:48 hypothèse de développement personnel de l'enfant,
01:43:50 on s'oublie, et on est
01:43:52 souvent chosifié, c'est mon hypothèse, alors que
01:43:54 l'enfant a besoin effectivement d'être respecté,
01:43:56 d'actualiser son potentiel,
01:43:58 mais il a besoin de voir un modèle.
01:44:00 Moi je me souviens, c'était l'obligation d'aller voir
01:44:02 Bob Dylan,
01:44:04 en dire "bah dis donc, s'ils n'aiment pas ça,
01:44:06 je m'en fous". Ils écoutent
01:44:08 leur musique, mais ils écoutent aussi ma musique.
01:44:10 La cueillette des noix en ce
01:44:12 moment, c'est le grand truc, vous croyez que ça fait plaisir
01:44:14 à un adulte de cueillir des noix ?
01:44:16 C'est mon truc, je suis un
01:44:18 cueilleur de noix, qu'est-ce que je voulais que je vous dise ?
01:44:20 Mais ils ont besoin de ça, c'est ce qu'on
01:44:22 appelle le modèle, le mentor,
01:44:24 mais on a été quand même
01:44:26 dans beaucoup d'horizontalité en disant
01:44:28 "mais ça écrase le dominant,
01:44:30 ça écrase celui qui va imposer
01:44:32 Bob Dylan". Non, non, non, que
01:44:34 Bob Dylan, c'est du pater familias,
01:44:36 Dylan, c'est ma musique,
01:44:38 et je voudrais que vous la respectiez aussi.
01:44:40 Préparez votre mot de conclusion, parce que je vais prendre une
01:44:42 dernière question dans le public,
01:44:44 qui veut poser la toute dernière
01:44:46 question ? Alors,
01:44:48 je vous vois pas, où êtes-vous ?
01:44:50 Allez-y.
01:44:52 Bonsoir.
01:44:54 A juste titre, tout à l'heure, vous avez dit
01:44:56 qu'il y a tout et n'importe
01:44:58 quoi en termes d'ouvrage
01:45:00 dans l'éducation positive.
01:45:04 Quelles sont les ressources que vous pouvez recommander
01:45:06 justement aux parents, et qui sont
01:45:08 lisibles plutôt, parce que les
01:45:10 ouvrages sérieux qui sont
01:45:12 disponibles
01:45:14 sont très difficiles
01:45:16 à adapter à la réalité des parents
01:45:18 aujourd'hui ? Moi, je dirais les
01:45:20 ouvrages de mes invités, mais
01:45:22 qui veut répondre
01:45:24 de façon objective ? Moi, je
01:45:26 crois que l'essentiel, c'est de garder le bon sens.
01:45:28 André Gilles, il disait
01:45:30 "garder le bon sens, c'est pas se laisser éblouir
01:45:32 par un sentiment ou une idée
01:45:34 aussi excellent
01:45:36 au risque de perdre de vue tout le reste".
01:45:38 Je crois que l'éducation, c'est d'abord du bon sens.
01:45:40 Mon enfant, quel tempérament ? Quel contexte ?
01:45:42 Mon histoire, etc.
01:45:44 Et on fait une petite harmonie avec ça, et non pas
01:45:46 répondre aux sirènes de ceux qui savent.
01:45:48 Si des gens, quelquefois, me disent
01:45:50 "il faut frustrer, il faut frustrer", non, je dis, il y a des enfants
01:45:52 qui n'ont pas besoin de frustration. Il y a des
01:45:54 tempéraments pour qui la frustration n'est pas bonne.
01:45:56 Par contre, je défendrais toujours la frustration
01:45:58 pour les dominants, les fougueux, les intrépides.
01:46:00 Vous voyez, c'est pas un modèle général
01:46:02 à adapter. Si vous avez bien entendu
01:46:04 ce soir, c'est ce qu'on veut, nous.
01:46:06 Adapter ce qu'on propose, point.
01:46:08 Dr Gehgen, un mot de conclusion
01:46:10 ce soir ? En conclusion, je voudrais dire
01:46:12 que cette éducation
01:46:14 qui est prônée dans le monde entier,
01:46:16 c'est une vraie révolution éducative.
01:46:18 Donc c'est normal qu'il y ait des résistances,
01:46:20 c'est normal que les parents se sentent
01:46:22 perdus, et encore une fois,
01:46:24 ce qu'on sait,
01:46:26 c'est que des enfants
01:46:28 bien traités, la société
01:46:30 va changer complètement si on
01:46:32 traite bien les enfants. Donc c'est
01:46:34 un enjeu considérable, et
01:46:36 moi je rêverais que
01:46:38 la France, comme dans les
01:46:40 pays nordiques, soutienne
01:46:42 et accompagne réellement les parents
01:46:44 qui, à un congé post-natal
01:46:46 de un an réparti entre
01:46:48 les deux parents, rémunérait
01:46:50 correctement,
01:46:52 accompagné, que les parents de jeunes
01:46:54 enfants puissent être déchargés
01:46:56 le mercredi, qu'ils aient moins
01:46:58 de travail en fin de journée, pour pas qu'ils
01:47:00 rentrent épuisés,
01:47:02 parce que quand on est épuisé, qu'on rentre du travail
01:47:04 tard, eh bien on peut pas être
01:47:06 disponible vis-à-vis de ces enfants. Donc j'aimerais
01:47:08 que notre société comprenne que être
01:47:10 parent, c'est compliqué,
01:47:12 c'est difficile, il faut pas que vous vous culpabilisiez,
01:47:14 mais il faut aider
01:47:16 et accompagner les parents. - Didier Pleu, conclusion
01:47:18 rapide. - Ah ben là, je
01:47:20 croyais l'avoir faite.
01:47:22 Amour et frustration.
01:47:24 - On passe à Rébéka Chanclombe.
01:47:26 - C'est un complément d'amour et frustration.
01:47:28 Une précision autour
01:47:30 de cette question, parce que
01:47:32 avoir vraiment cette vision aussi
01:47:34 à long terme de l'éducation,
01:47:36 et justement, c'est pas parce que sur le moment
01:47:38 il peut y avoir des frustrations, et le fait justement
01:47:40 de s'engager dans des efforts pour l'enfant
01:47:42 en fait, à terme, c'est très satisfaisant.
01:47:44 Donc bien garder à l'esprit que
01:47:46 sur le moment ça peut être difficile, mais justement
01:47:48 on va l'aider à aller plus loin.
01:47:50 - Bruno Mbec. - Alors, privilégiez les livres
01:47:52 qui vous aident à réfléchir, pas ceux
01:47:54 qui vous obligent à penser d'une certaine manière.
01:47:56 Et le tout sera d'avoir, au bout
01:47:58 du compte, ce que j'appelle moi
01:48:00 une lucidité souriante. C'est-à-dire qu'on
01:48:02 puisse être lucide par rapport aux difficultés qu'on peut
01:48:04 avoir, par rapport aux questions
01:48:06 qu'on se pose, mais toujours
01:48:08 en étant souriant par rapport à ce qu'on vit.
01:48:10 C'est pour ça que je parle beaucoup des Simpsons,
01:48:12 et que moi j'utilise les Simpsons à chaque
01:48:14 cours avec mes étudiants, parce
01:48:16 que ça introduit cette idée de lucidité
01:48:18 souriante. On ne bat pas sa culpe, comme ça
01:48:20 est dit très souvent, et on est dans cette idée
01:48:22 de "le livre qui me dit
01:48:24 quoi penser, je l'évite, je vais
01:48:26 plutôt vers le livre qui va m'aider à réfléchir,
01:48:28 et nous aider à réfléchir en tant
01:48:30 que couple parental, par exemple.
01:48:32 - Merci beaucoup, j'aimerais
01:48:34 vous remercier d'être venu ce soir
01:48:36 au studio 104 de la
01:48:38 Maison de la Radio et de la Musique,
01:48:40 et de nous avoir suivis en ligne
01:48:42 depuis chez vous.
01:48:44 Merci infiniment
01:48:46 Didier Pleu, Catherine Géguen,
01:48:48 Rebecca Changlanc,
01:48:50 et Bruno Hembeck.
01:48:52 Merci beaucoup aux équipes
01:48:54 éditoriales de
01:48:56 production et techniques de Radio France
01:48:58 et de France Inter. Merci à la MAE,
01:49:00 notre partenaire, merci à Servo et Psycho,
01:49:02 et à la RATP. Bonne fin de soirée à vous,
01:49:04 à très bientôt, merci.
01:49:06 (Applaudissements)
01:49:08 (Musique)
01:49:10 (...)
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