Gérald Darmanin est-il un petit Donald Trump à la française ? La question mérite d'être posée, selon notre chroniqueur Cyprien Caddeo : le ministre de l'Intérieur multiplie les sorties mensongères, crée des polémiques pour occuper le terrain et entretient un rapport décomplexé aux violations de l'État de droit. Un démagogue qui sied à son époque.
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00:00 T'as vu cette histoire là à Valence ?
00:01 Non
00:01 Y'a des policiers qui sont rentrés dans un chamas tacos
00:04 Parce qu'il y avait un problème sur l'enseigne, un problème électrique
00:06 Et du coup on lisait "Amas tacos"
00:08 Et du coup ils ont menacé de faire fermer le magasin
00:10 Nan mais tout le monde devient un zinzin là
00:12 Moi j'ai plus les mots, franchement j'ai plus les mots
00:14 Et puis bon, cette histoire là, ça nous éloigne quand même des vrais sujets
00:17 Les tacos, faut bien que quelqu'un le dise
00:19 C'est dégueu
00:20 T'es sérieux ?
00:21 Bah quoi ? On peut plus rien dire ?
00:23 Non bah Pascal Pro a raison, on ne peut plus rien dire dans ce pays
00:25 C'est sérieux quoi
00:26 *Musique*
00:34 Gérald Darmanin
00:36 Est-ce que ce serait pas un petit peu notre Donald Trump à nous ?
00:38 Ok, la question est un peu bourrine, je vous l'accorde
00:40 Tout en que Trump a quand même une sacrée avance, ok
00:43 Mais on va se la poser quand même
00:44 Tant le ministre de l'intérieur a multiplié les sorties mensongères, abjectes et en roue libre depuis 15 jours
00:49 Il faut dire que le contexte s'y est à merveille au style outrancier de Gérald Darmanin
00:53 Et on le voit bien en profiter pour se hisser patiemment jusqu'à l'Elysée en 2027
00:57 Aux prises des attentats sur le sol européen propices à un discours simpliste et sécuritaire
01:01 Conflits au Croche-Orion qui déteint sur les débats en France
01:03 Loi immigration dans les cartons
01:05 C'est un bingo pour Darmanin
01:07 Non mais calmez-vous madame, ça va bien se passer
01:08 Bah non ça va pas bien se passer Gérald, parce que tu racontes n'importe quoi
01:11 Et en fait c'est même une stratégie
01:13 Faire polémique sur tout pour fixer l'agenda médiatique autour de sa personne
01:16 En dicter le rythme, c'est une vieille technique
01:18 Trump en a été le champion incontesté
01:20 Et Darmanin s'y essaie comme le 16 octobre sur CNews
01:23 Nous avons fermé 1100 établissements islamistes
01:26 Et depuis quelques semaines, je m'intéresse particulièrement, monsieur Benzema est en lien
01:30 On le sait tous, notoire avec les frères musulmans
01:33 Vous l'avez forcément vu passer, voilà donc le ministre de l'intérieur qui s'en prend à l'ancien attaquant des bleus
01:38 Coupable à ses yeux d'un tweet de soutien aux victimes gazaouies de la contre-offensive israélienne
01:42 Evidemment l'accusation est totalement absurde
01:44 Et Darmanin n'a aucun élément pour l'étayer
01:46 Mais il s'en fiche, ça marche
01:48 On parle de ça, on parle de lui
01:50 C'est pas pour rien non plus qu'il est en une du JDD de Bolloré cette semaine
01:53 Faisant de lui le premier ministre de premier plan
01:55 A rompre le cordon sanitaire et à parler à l'hebdo d'extrême droite
01:58 Darmanin veut être le maître des horloges
02:00 Et le piège se referme sur les autres
02:02 Le ministre de l'intérieur il a rien d'autre à faire que de lire les tweets de Benzema
02:05 Je découvre le contrôle de tweets au faciès
02:08 Gérald Darmanin se déshonore absolument, complètement avec cette opération
02:13 La gauche en parle, gaspille de son temps d'antenne à répondre sur Benzema
02:16 Jusqu'à porter le sujet à la tribune de l'Assemblée nationale
02:19 Ainsi le footballeur Karim Benzema serait un dangereux extrémiste
02:22 En lien avec les frères musulmans pour suiter monsieur Darmanin
02:26 Pour la gauche c'est en fait quasi impossible d'éviter le showstrap
02:29 C'est compliqué de pas toucher un mot des délires du ministre
02:31 Benzema n'a pas besoin d'avocat en fait
02:33 Il en a déjà un qui fait ça très bien
02:35 Moi je peux être tout à fait clair et précis là dessus
02:38 Non, il me dit n'avoir jamais eu le moindre lien avec les frères musulmans
02:42 Ni aucune sympathie pour les idées des frères musulmans
02:45 Et je crois qu'il ne les connaissait même pas
02:47 Effet collatéral est sans doute calculé
02:49 Gérald Darmanin permet à Marine Le Pen de se recentrer encore un peu plus
02:52 Madame Le Pen ne nomme pas l'ennemi
02:54 Je trouve qu'en effet vous êtes plus molle que nous pouvons l'être
02:57 Alors je sais pas si il la trouve toujours trop molle
02:59 Mais en tout cas elle lui permet de passer pour modérée
03:01 Car quand elle est appelée à réagir à cette polémique
03:03 Comme toutes les autres, Marine Le Pen dit ceci
03:06 La mise en cause de monsieur Benzema qui vit même plus en France
03:10 Enfin je veux dire de la part du ministre de l'intérieur
03:13 C'est à mon avis une diversion
03:15 Alors que nous sommes confrontés à des problèmes qui sont majeurs
03:18 Pourtant le R.A. n'aime pas Benzema
03:20 Il tape dessus depuis longtemps et il continue de le faire
03:22 Il est accusé de ne pas chanter la marseillaise
03:24 Rendre trop visible sa pratique de l'islam
03:26 Mais comme l'argument est repris par le ministère de l'intérieur
03:28 Désormais Marine Le Pen peut se dédiaboliser
03:31 Alors vous me direz, ok c'est bien sympa tout ça
03:33 Mais la technique de la polémique diversion
03:35 C'est pas l'apanage de Darmanin
03:37 Ils font tous un peu ça à droite et à gauche
03:39 C'est vrai, c'est les règles du jeu médiatique
03:41 On en parlait d'ailleurs à la dernière fête de l'Humain
03:43 Moi y'a un truc qui effectivement me frappe
03:45 Et que je trouve assez terrible
03:47 C'est qu'aujourd'hui pour un responsable politique
03:49 Ca n'est pas possible de ne pas s'exprimer sur un sujet
03:52 C'est à dire que un responsable politique
03:55 Qui ne réagira pas à l'événement dramatique du moment
03:59 Ou même à la politique du moment
04:01 Se le verra reprocher
04:02 Mais il y a une autre marque
04:04 Trumpienne de Darmanin
04:05 C'est sa tendance à prendre l'état de droit par dessus la jambe
04:08 Avec ce côté ultra démagogue
04:10 "Ah oui les règles on s'en fout un peu, l'important c'est d'agir, l'action, l'action"
04:13 Tout de suite après l'attentat de la race
04:15 Qui a coûté la vie au professeur Dominique Bernard
04:17 Le ministre prend la parole
04:18 Il y a 4000 étrangers délinquants
04:21 Que je ne peux pas expulser du territoire national
04:24 Alors même que je le veux
04:25 Parce que la loi empêche de les expulser
04:28 Soit parce qu'ils sont mariés en France
04:30 Soit parce qu'ils ont eu des enfants en France
04:32 Soit parce qu'ils sont arrivés avant l'âge de 13 ans sur le territoire de la République
04:35 Quand bien même ils auraient commis leur acte après 18 ans
04:38 Anticipant les critiques sur sa droite et son extrême droite
04:40 Darmanin essaye de les doubler
04:42 Et explique carrément qu'il y a ce fichu droit là qui lui lit les mains
04:45 Et l'empêche d'agir correctement
04:46 Lorsqu'un ministre de l'intérieur vous dit
04:48 "Mais on va arrêter de respecter la jurisprudence européenne"
04:52 "Parce que finalement moi je préfère être condamné par la cour européenne"
04:55 "Et donc je préfère violer la convention européenne des droits de l'homme"
04:59 "Plutôt que d'exposer une population à un risque sécuritaire"
05:04 "Là ça y est, le palier est franchi"
05:09 "L'état de droit est malmené par de tels propos"
05:12 Quitte à suggérer qu'on l'empêche finalement d'expulser les terroristes
05:15 Comme cela aurait été le cas pour le tueur d'Arras
05:17 Ce qui n'est pas tout à fait vrai
05:19 "Quand on nous explique que dans l'absolu cette personne là n'est pas expulsable"
05:23 "C'est pas vrai, c'est pas vrai"
05:25 "Et ce qui m'inquiète c'est qu'on l'entend de la part de ministres, du gouvernement"
05:31 "Alors que les textes sont très clairs"
05:33 "Les textes disent que l'expulsion est possible"
05:35 "Si la personne adopte des comportements de nature à portée atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation"
05:41 La cour européenne des droits de l'homme, l'état actuel du droit, Darmanin s'en cogne
05:45 Tant qu'il peut jouer les sarcobies sur les plateaux
05:47 Profiter du quasi-silence d'Emmanuel Macron
05:49 Et occuper bien sûr l'espace médiatique
05:51 Exemple, Darmanin voulait interdire purement et simplement toutes les manifs pro-palestinienne
05:56 Macron n'y a rien trouvé à redire
05:58 "Je vous donne ma position en toute sincérité"
06:00 "1) Je pense qu'il y avait un délai de décence, il y avait eu une attaque terroriste qui n'était pas bonne"
06:04 "Après je regarde partout comment ça se passe en Europe"
06:07 "Regardez dans toutes les capitales où il y a des manifs"
06:10 "Il y a des éléments très durs qui arrivent et qui font les pires trucs"
06:13 "C'est à dire, il y a des gens qui veulent manifester de manière pacifique"
06:18 "Mais dedans se greffent des éléments hyper radicaux"
06:21 "Qui vont aller brûler les drapeaux d'Israël, défendre le Hamas etc"
06:25 "Est-ce qu'on a envie de voir ça maintenant ?"
06:27 Le Conseil d'Etat lui a rappelé le droit et qu'on ne pouvait pas interdire par principe des manifestations
06:32 "C'est véritablement un camouflet qui a été infligé par le Conseil d'Etat à Gérald Darmanin"
06:36 "Parce qu'il faut bien rappeler qu'encore une fois en France"
06:38 "Il n'y a pas la possibilité de pouvoir interdire de façon systématique des manifestations"
06:42 "Encore moins à raison de leur objet"
06:44 "Et vous aviez en fait un télégramme du ministère de l'Intérieur"
06:46 "Qui permettait uniquement parce que des manifestations étaient pro-palestinienne"
06:49 "De les interdire parce qu'elles étaient considérées par principe"
06:52 "Comme pouvant porter atteinte à l'ordre public"
06:54 Pas grave, le ministère a quand même insisté auprès des préfectures
06:57 Pour qu'elles soient interdites pour des motifs parfois lunaires
06:59 On vous en a mis quelques-uns ici
07:00 Pour Darmanin on a l'impression que les bras de fer avec les institutions garantes du droit
07:04 Sont autant d'occasion de nourrir son récit de briseur de tabou
07:07 Du type qui bataille contre les pesanteurs étatiques
07:09 Parce que lui comprend ce que veut le peuple
07:11 Le vrai, le fameux bon sens du charcuter de Tourcoing
07:14 C'est un peu comme Trump qui à chaque fois qu'il est accusé par la justice américaine
07:17 Se fait passer pour une victime et ça prouve dans son récit qu'il est seul contre tout le monde
07:21 En fin de semaine à l'heure où nous publions cette vidéo
07:23 Gérald Darmanin doit souffrir encore une de ses séquences
07:26 En se confrontant au conseil d'état sur la viabilité ou non de son décret de dissolution des soulevements de la terre
07:31 "Non mais calmez-vous madame, ça va bien se passer"
07:33 Bah ouais ça va bien se passer
07:34 Parce qu'en fait dans tous les cas ce sera une victoire médiatique pour lui
07:38 Ça aussi c'est dans l'ère Trumpiste du temps
07:40 Quand Darmanin perd, il gagne
07:42 Quand la justice le désavoue dans les tribunaux
07:44 Il marque des points dans les médias auprès d'un électorat qui veut des solutions simplistes
07:48 Et pas se prendre la tête avec les droits de l'homme, les libertés fondamentales, tous ces trucs là
07:52 Darmanin, le petit provocateur d'hémagogue, s'y est à son époque
07:55 Pas de bol pour nous, c'est aussi la nôtre
07:57 "Quand j'entends le mot violence policière, moi personnellement je m'étouffe"
08:01 Voilà c'est la fin de cet épisode, merci de l'avoir suivi
08:03 N'hésitez pas à liker, commenter et à vous abonner à la chaîne et à l'huma
08:06 Nous on se dit rendez-vous au prochain numéro, allez salut !
08:09 Sous-titres par Jérémy Diaz
08:11 Abonne-toi !