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Frédéric Péchenard, vice-Président de la région Île-de-France chargé de la Sécurité, ancien Directeur général de la Police nationale, est l'invité du Grand Entretien.

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Transcription
00:00 - Nous sommes invités du grand entretien de la matinale avec Marion Lourdes, nous recevons
00:03 le vice-président de la région Île-de-France en charge de la sécurité et de l'aide aux
00:08 victimes, également vice-président du parti Les Républicains, ancien directeur général
00:13 de la police nationale.
00:14 Vos questions, vos réactions au 01 45 24 7000 ou sur l'application France Inter.
00:20 Frédéric Péchenard, bonjour.
00:21 - Bonjour.
00:22 - Et bienvenue, on va commencer par ces fausses alertes à la bombe qui se multiplient.
00:28 On l'entendait dans le journal de 8h que c'était quasiment une épidémie, elle se répète
00:32 partout ces derniers jours en France.
00:34 Il y a eu 11 aéroports qui ont été évacués, le château de Versailles fermé pour la quatrième
00:40 fois, de nombreux établissements scolaires qui sont aussi concernés.
00:44 299 depuis la rentrée et 75 pour la seule journée d'hier, disait Gabriel Attal.
00:52 Comment est-ce qu'on analyse d'abord ce phénomène d'alerte à la bombe qui se multiplie et
00:58 comment est-ce qu'on y met fin ?
00:59 - Les alertes à la bombe, notamment dans les établissements scolaires, c'est un sport
01:04 national, c'est une chose qui se passe assez régulièrement.
01:06 Ce qui est vraiment, par contre, caractéristique en ce moment, c'est le nombre tout à fait
01:11 effrayant des alertes à la bombe et spécifiquement d'ailleurs dans les aéroports, ce qui désorganise
01:16 fondamentalement l'organisation de notre société.
01:19 Donc c'est un vrai sujet.
01:21 Je pense que derrière ces alertes à la bombe, il y a, comme l'a dit le ministre de la Justice,
01:26 quelques guignols et puis aussi probablement quelques militants qui de manière systématique
01:31 font finalement, c'est une première forme d'attaque bénigne par rapport bien sûr à
01:35 des attentats, mais forme d'attaque, de désorganisation.
01:38 Quand vous êtes obligé de reporter des avions, de faire poser des avions dans d'autres aéroports,
01:43 tout ça a un coût, un coût financier, un coût politique qui n'est pas neutre.
01:46 - Donc ça n'est pas qu'une question qui peut faire sourire ?
01:48 - Non, moi ça ne me fait pas sourire du tout.
01:50 On est dans une forme d'attaque, de sabotage, de petit sabotage, mais de sabotage quand même.
01:57 Alors comment y faire face ? Il n'y a pas mille solutions, il n'y en a qu'une.
02:00 Il faut que les services de police, naturellement, il faut prendre en compte sérieusement tout
02:04 ce qui se passe parce que la meilleure façon pour un terroriste de placer une bombe, c'est
02:10 de faire plusieurs alertes successives et puis finalement quand on baisse les bras,
02:13 de poser réellement une bombe.
02:15 Donc la seule solution, en dehors du principe de précaution, c'est d'interpeller les gens
02:20 qui font ça.
02:21 Il y en a d'ailleurs 18 qui ont été interpellés ces jours-ci et qui ont eus des sanctions
02:24 suffisamment significatives pour dissuader les autres.
02:27 - On voit quand même que tout ça reflète un climat de plus en plus tendu depuis l'attaque
02:32 du Hamas contre Israël il y a presque deux semaines maintenant.
02:35 Le Conseil d'Etat et le Tribunal administratif ont par deux fois empêché l'interdiction
02:38 des manifestations pro-palestiniennes qui avaient été demandées par l'Etat aux préfets,
02:43 alors hier soir à Paris, une manifestation qui était interdite et puis qui a été autorisée,
02:47 on n'y comprend plus grand-chose, c'est vrai.
02:48 Vous qui êtes en charge de la sécurité à la région Île-de-France, vous pensez
02:52 qu'il faut les interdire ces manifestations ?
02:54 - En fait le Conseil d'Etat et le Tribunal administratif n'ont pas dit tout à fait la
02:56 même chose.
02:57 Le Conseil d'Etat a dit "on ne peut pas interdire systématiquement une manifestation pro-palestinienne".
03:02 Voilà ce qui avait été demandé au départ par l'Etat.
03:05 Et puis après, la manifestation, celle-là, celle d'hier, avait été interdite par le
03:09 Préfet de police, le Tribunal administratif a estimé qu'on n'aurait pas dû l'interdire
03:14 celle-là.
03:15 - Et vous ?
03:16 - C'est donc depuis ce soir.
03:17 Vous savez, moi je ne suis pas en charge.
03:19 Moi je suis toujours un petit peu étonné que quand le Préfet de police interdit une
03:27 manifestation, c'est assez rare.
03:28 Il faut savoir qu'il y a plusieurs dizaines de milliers de manifestations chaque année
03:31 à Paris, toutes confondues, des interdictions se comptent probablement sur les doigts des
03:35 deux mains ou d'une main.
03:36 Et quand on voit les images qu'on a vues hier de la place de la République, finalement
03:42 on se demande si ce n'était pas une bonne idée de l'interdire.
03:44 Moi ça ne me dérange pas.
03:45 - 4000 personnes dans le calme dès l'agence France Presse.
03:47 - Oui c'est ça, il n'y avait pas énormément de monde.
03:49 Mais il y a quand même eu des slogans qui sont un petit peu choquants.
03:52 Ça m'embête pas qu'on dise que Dieu est grand, mais qu'on le dise en disant "Allah
03:57 ou Akbar" alors que c'est avec ce cri qu'ont été assassinés le professeur Haras et
04:06 les civils israéliens.
04:08 C'est un peu choquant.
04:09 - C'est aussi une expression commune au départ.
04:11 - C'est une expression commune mais comme elle est employée systématiquement par les
04:14 terroristes avant de passer à l'assaut, c'est quand même une expression qu'il faut utiliser
04:19 à bon escient.
04:20 - Alors fin juin, vous réclamiez l'état d'urgence lors des émeutes qui ont suivi
04:24 la mort de Nahel.
04:25 Est-ce que ce serait le cas aujourd'hui vu la situation ? Il faudrait aller jusqu'au-là.
04:29 - Alors pour l'instant, le plan Vigipirate a été renforcé.
04:33 Le plan Vigipirate, qu'est-ce que c'est ? C'est un plan de défense qui ne joue pas
04:36 et qui ne change pas fondamentalement les règles juridiques.
04:38 L'état d'urgence, c'est autre chose.
04:40 L'état d'urgence permet au gouvernement, à l'État, de s'affranchir d'un certain
04:44 nombre de règles de droit, par exemple sur les perquisitions.
04:46 - La liberté d'aller et de venir aussi.
04:47 - Et la liberté d'aller et de venir pour certaines personnes.
04:50 Aujourd'hui, on n'en est pas là, même si je ne suis pas très optimiste pour l'avenir
04:56 et ce n'est pas un outil qu'il faut négliger éventuellement.
04:59 - Mais est-ce que l'état de droit pour vous peut parfois constituer un obstacle à la garantie
05:05 de la sécurité des citoyens ? C'est un principe, l'état de droit, qui est remis en cause régulièrement
05:11 depuis quelques mois et particulièrement chez les Républicains ?
05:14 - Non, je ne pense pas qu'on remette en cause l'état de droit.
05:17 L'état de droit, qu'est-ce que c'est ? C'est une démocratie dans laquelle il y a des gens
05:21 élus, les sénateurs et les députés, qui votent des lois.
05:24 Et l'état de droit, ça veut dire qu'on ne s'affranchit pas de ces lois.
05:27 Mais les lois peuvent évoluer.
05:28 À aucun moment, les Républicains, naturellement, ne sont hostiles à l'état de droit.
05:32 On est fondamentalement, c'est un parti fondamentalement républicain et démocrate.
05:36 Donc, le respect des lois est une nécessité.
05:39 Maintenant, est-ce que dans certains moments, on peut changer les lois ?
05:43 Bien sûr, les lois, elles évoluent tout le temps et en fonction, pour ce qui concerne
05:47 les lois pénales, en fonction des menaces.
05:48 - Vous, vous êtes vice-président, on le disait, de la région Île-de-France, en charge de
05:51 la sécurité.
05:52 La presse rapporte ce matin des menaces en hausse contre les élus.
05:56 Une dizaine de députés, notamment la présidente de l'Assemblée nationale, qui aurait été
05:59 menacée d'égorgement et de décapitation.
06:01 Ça vous touche, vous aussi ?
06:02 - Oui, bien sûr.
06:03 - Vous avez eu des menaces ?
06:04 - Moi, personnellement, je n'ai pas eu de menace.
06:06 À chaque fois que vous passez à la radio ou à la télévision, vous dites des choses
06:10 et vous avez des commentaires, notamment sur Twitter.
06:13 Oui, j'ai reçu quelques menaces de mort ou de violence et autres.
06:17 Mais franchement, ce que j'ai reçu, moi, ce n'est pas très grave.
06:19 - Vous le dites avec beaucoup de calme.
06:20 - Je pense, vous savez, j'ai été policier pendant 30 ans.
06:23 Tant qu'on ne me tire pas dessus à balle réelle, je considère qu'il n'y a rien de
06:26 vraiment grave.
06:27 Mais c'est des choses qui peuvent arriver, auquel cas, vous me verrez beaucoup moins
06:30 stoïque.
06:31 Par exemple, Vincent Gembrun, qui est un élu du conseil régional à mes côtés, qui
06:36 est maire de l'Allée Rose et qui a été attaqué pendant les émeutes à son domicile
06:40 avec les émeutiers qui ont essayé de mettre le feu à sa maison alors qu'il y avait
06:42 sa femme et ses enfants.
06:43 Donc, lui, évidemment, a été beaucoup plus choqué.
06:45 Donc, oui, il y a une violence contre les élus et il faut impérativement éradiquer
06:50 cette violence contre les élus.
06:51 Les élus, en soi, ce n'est rien un élu, mais c'est ce qu'ils représentent.
06:55 Dans une démocratie, l'élection, c'est quelque chose de fondamental.
06:59 Les citoyens désignent leurs représentants pour exercer une politique.
07:04 Donc, il faut protéger les représentants des citoyens.
07:08 Mais c'est en hausse avec cette guerre au Proche-Orient ?
07:11 Pour l'instant, c'est difficile de le dire.
07:13 C'est en hausse depuis quelques mois ou quelques années.
07:16 Probablement, ça sera en hausse.
07:17 Pour l'instant, c'est trop récent pour qu'on puisse dire de manière significative
07:22 qu'il y a une hausse des atteintes contre les élus.
07:24 Est-ce que la France manque d'outils juridiques pour lutter contre un certain nombre de phénomènes
07:31 liés au terrorisme islamiste par exemple ?
07:33 On a entendu plusieurs représentants de votre parti réclamer un durcissement de la loi,
07:40 réclamer aussi une exécution systématique des OQTF, les obligations de quitter le territoire.
07:47 L'arsenal juridique dont dispose la France n'est pas suffisant, Frédéric Péchenard ?
07:52 Ça dépend. L'arsenal juridique pénal me paraît suffisant.
07:56 On a depuis 1986 les premières campagnes d'attentats terroristes islamistes,
08:04 même si en l'occurrence c'était un fauné du Hezbollah.
08:07 On a été frappé, rappelez-vous, par la suite par le GIA algérien en 1995-1996.
08:12 Et puis Daesh, l'État islamique, le Hamas depuis 2015.
08:18 Donc on a depuis 1986 une centralisation des poursuites,
08:23 on a des magistrats spécialisés, on a eu un peu plus tard l'association de malfaiteurs
08:27 en relation avec autre entreprise terroriste,
08:29 qui nous a permis préventivement d'interpeller énormément de personnes.
08:32 Donc globalement, je trouve que pénalement, on a de quoi se défendre.
08:37 Par contre, on a vraiment un trou noir qui est la lutte contre l'immigration et notamment les OQTF.
08:43 Les OQTF aujourd'hui, qu'est-ce que c'est qu'une OQTF ?
08:46 C'est une obligation de quitter le territoire national.
08:47 Vous êtes en situation irrégulière en France,
08:49 on vous délivre à cette obligation de quitter le territoire national.
08:52 Et en fait, aujourd'hui, c'est 5% des cas qui partent réellement.
08:56 Donc vous arrivez en France, vous n'avez pas d'OQTF, vous restez.
08:59 Vous avez une OQTF, vous restez aussi.
09:01 Parce qu'il faut un laisser-passer consulaire.
09:03 Et il faut que le pays où on renvoie la personne soit d'accord pour l'accueillir.
09:07 Ce qui n'arrive pas très souvent.
09:09 Oui, alors vous savez, c'est une sorte de parcours du combat de temps.
09:12 C'est-à-dire qu'il faut d'abord rentrer dans les cases de la loi française
09:16 et des décisions européennes.
09:17 Il y a tout un tas de phénomènes qui s'opposent à votre expulsion.
09:21 Et puis in fine, quand au bout d'un moment,
09:24 on arrive à mettre l'étranger indésirable dans un centre de rétention administrative,
09:28 à ce moment-là, effectivement, il y a le problème de laisser-passer consulaire.
09:30 Mais laisser-passer consulaire, c'est...
09:31 Mais c'est un très gros problème en l'occurrence.
09:33 C'est ce qui bloque l'exécution de nombre d'OQTF.
09:37 Oui, évidemment, mais c'est un gros problème qui peut se régler un jour diplomatiquement.
09:43 Le sujet, c'est quoi ? De quoi on parle ?
09:46 Vous avez un certain nombre de personnes radicalisées en France.
09:49 Je ne parle pas des fiches S sur lesquelles on reviendra.
09:52 Des gens qui sont au fichier des radicalisées.
09:54 Ce fichier des radicalisées empêche un certain nombre de personnes d'obtenir un certain nombre d'emplois.
09:59 Parce qu'on se dit, ce n'est peut-être pas une bonne idée qu'un radicalisé
10:02 suspecte éventuellement de basculer dans le terrorisme,
10:04 soit policier, gendarme, pilote d'avion, etc.
10:07 Mais dans ce fichier, vous avez des Français, une majorité, et vous avez des étrangers.
10:12 Et à chaque fois qu'on veut expulser ces étrangers,
10:15 qui représentent un danger potentiel terroriste pour la France,
10:18 on s'aperçoit que c'est très difficile et qu'on n'y arrive pas.
10:21 Donc oui, si on pouvait changer la loi pour simplifier l'expulsion d'étrangers
10:26 qui représentent un risque pour notre pays, ça serait utile.
10:30 On l'a vu, alors je n'aime pas trop parler de ce qui vient de se passer,
10:35 parce que j'ai plutôt envie d'inscrire les idées que je porte sur le long terme,
10:41 sur la résilience.
10:42 Vous parliez de l'assassinat de Dominique Bernard ?
10:44 Oui, l'assassinat de Dominique Bernard.
10:46 L'assassin est quelqu'un qui aurait dû être expulsé depuis 2014.
10:49 Et finalement, on n'a pas réussi à l'expulser.
10:51 S'il avait été expulsé, il serait peut-être évité ce drame.
10:54 Mais vous savez, en France, j'ai remarqué, au moment de l'attentat, on sur-réagit.
10:59 Au moment de l'attentat, il faut tout changer, il faut tout bousculer.
11:01 Le président de la République se déplace, parle, etc.
11:03 Et puis, donc un jour, on n'en parlera plus de profession à assassiner.
11:07 Vous avez été expulsé d'ailleurs en raison d'une loi qui avait été votée sous Nicolas
11:12 Sarkozy et à laquelle vous étiez opposé puisqu'il avait moins de 13 ans quand il
11:16 est entré sur le territoire.
11:17 Oui, oui, bien sûr.
11:18 Mais vous savez, les lois, elles sont bonnes à un moment, elles sont moins bonnes à un
11:22 autre moment.
11:23 On ne peut pas… Il faut voir ça.
11:25 Mais ce qui est très important, je trouve, c'est ce qu'on appelle dans les pays qui
11:29 sont en difficulté ou les gens qui sont en difficulté, c'est la résilience.
11:32 La résilience, c'est la faculté qu'il y a de lutter tout le temps.
11:36 Pas forcément à une haute intensité, mais tout le temps.
11:39 Donc en France, on sur-réagit et après on sous-réagit.
11:42 Or, il faut avoir une ligne conductrice sur le long terme pour pouvoir être efficace,
11:48 notamment dans la lutte antiterroriste.
11:49 Et justement, Frédéric Péchenard, c'est l'objectif de la loi Immigration que défend
11:52 Gérard Darmanin qui vient justement de votre parti et qui dit "je veux faciliter l'exécution
11:59 des OQTF, que ça soit fait plus rapidement, de façon plus efficace".
12:01 Est-ce que vous, votre parti, êtes prêt à voter cette loi ?
12:04 Alors moi, je ne la voterai pas parce que je ne suis pas parlementaire.
12:07 C'est la première raison.
12:10 Est-ce que vous le soutenez ?
12:11 Alors sur le fond, je suis tout à fait d'accord avec l'idée qu'il nous faut une nouvelle
12:15 loi sur l'immigration, à la fois pour lutter contre l'immigration massive que nous subissons.
12:21 Il y avait 180 000 étrangers en session régulière.
12:25 Carte de séjour délivrée en 2012, il y en a 500 000 l'année dernière.
12:30 Il faut qu'on puisse choisir qui vient sur le territoire.
12:34 Il faut qu'on puisse les accueillir, ces gens qui viennent.
12:36 On a besoin de l'immigration.
12:37 L'idée de l'immigration à zéro est une idée absurde.
12:40 On a besoin de l'immigration, naturellement.
12:41 Mais il faut qu'on puisse les accueillir, les assimiler.
12:44 Donc, prêts à voter cette loi ?
12:45 Enfin, prêts à faire voter ou à encourager vos camarades à voter cette loi ?
12:48 Même s'il y a un titre de séjour pour les métiers en tension ?
12:50 Vous savez que pour l'instant, non, ça c'est la ligne rouge, mais je vais y revenir.
12:53 Pour l'instant, c'est discuté devant le Sénat.
12:56 Nous avons déposé, nous, les Républicains, deux projets de loi qui vont être examinés
13:01 par l'Assemblée en décembre, je crois, un projet de loi constitutionnel qui nous
13:05 paraît absolument nécessaire pour pouvoir mettre dans la Constitution un certain nombre
13:08 de choses, pour ne pas être englué par un certain nombre de traités ou décisions européennes.
13:13 Alors, en ce qui concerne le projet de loi...
13:17 Vous voulez dire le respect des libertés fondamentales ?
13:18 En ce qui concerne le projet de loi de Gérald Darmanin, il y a des tas de choses qui sont
13:23 bonnes dedans, et puis il y a des choses qui ne sont pas bonnes.
13:26 C'est dû en même temps.
13:28 On a l'impression d'entendre le président Macron.
13:30 C'est en même temps, on va lutter contre l'immigration, massive et irrégulière, bon,
13:34 pourquoi pas, mais en même temps, on régularise massivement des étrangers dans des situations
13:38 irrégulières, notamment ceux qui travaillent dans les métiers en tension.
13:41 Là aussi, chacun y retrouve ses petits, mais ça n'a aucun sens.
13:45 Ou on pense qu'il faut donner à l'État plus de moyens pour lutter contre l'immigration
13:51 et on le fait, ou on pense le contraire et on ne le fait pas.
13:54 Ça, c'est un choix politique.
13:55 Mais vous ne pouvez pas faire du en même temps sur ce sujet, et c'est un petit peu la faiblesse
13:59 de la loi présentée par Gérald Darmanin.
14:01 On file au Standard, Frédéric Pechnard.
14:03 Bonjour Juliette.
14:04 Oui, bonjour.
14:05 Merci de participer au grand entretien de France Inter.
14:08 Vous avez une question pour notre invité.
14:10 Ma question est toute simple.
14:12 À la veille des vacances, dans ce climat, disons, un petit peu anxiogène qui règne
14:17 en ce moment, alors je vais peut-être rêver, mais est-ce qu'il ne serait pas opportun
14:23 que l'opinion de tout bord, l'opinion politique, l'opinion citoyenne, émette des messages
14:31 d'apaisement au lieu de faire monter la polémique sur des sujets extrêmement sérieux ? Voilà.
14:36 Ce serait mon souhait, mais je pense que c'est un souhait un peu pieux.
14:42 Je voudrais savoir ce que vous en pensez.
14:44 Qui c'est Frédéric Pechnard ?
14:45 Ecoutez-moi Juliette, c'est une excellente réflexion et une très bonne question.
14:49 Moi, je partage complètement votre avis.
14:52 J'essaye d'ailleurs, je ne dirais pas toujours, mais j'essaye toujours d'être
14:57 mesuré et plutôt d'apaiser les choses.
14:59 Et moi, j'appelle tous les gens qui ont des responsabilités, c'est vrai des hommes
15:03 politiques, naturellement, c'est vrai des journalistes, c'est vrai des footballeurs,
15:06 c'est vrai d'un certain nombre de personnes qui sont emblématiques, à faire preuve de
15:10 retenue et de mesure.
15:12 Vous pouvez très bien défendre, être opposé à ce qui se passe ou avoir une idée différente
15:17 et pourtant chercher toujours l'apaisement plutôt que la confrontation et le rassemblement.
15:23 L'unité nationale, c'est quelque chose qui est absolument fondamental.
15:28 Karim Benzema vous a choqué lorsqu'il a tweeté pour soutenir les populations civiles
15:33 de la bande de Gaza ?
15:34 Je vais vous dire, Karim Benzema, c'est un immense footballeur qui est suivi, je
15:39 crois, son compte Twitter est suivi par 20 millions de personnes.
15:42 Il a été sélectionné près d'une centaine de fois en équipe de France.
15:46 Il a représenté la France.
15:48 Personne n'est obligé d'aller en équipe de France, il a représenté la France.
15:51 Son tweet, quand vous reprenez ce qu'il a écrit, ça ne me choque pas.
15:55 Ce qui est dommage, c'est qu'on a un peu l'impression, en creux, que pour lui, il
15:59 n'y a qu'une seule sorte de victime.
16:01 Pas un mot sur le professeur assassiné, pas un mot sur les civils assassinés du Hamas.
16:06 Donc ce que vous lui reprochez, c'est ce qu'il n'a pas écrit ? C'est assez paradoxal.
16:10 Olivier Giroud, par exemple, Antoine Griezmann, n'ont pas tweeté sur ces questions, eux
16:14 aussi sont coupables ?
16:15 Je vais vous dire, je ne lui reproche rien.
16:17 Je ne suis pas dans la reproche.
16:19 Je suis juste en train de dire que quand vous appelez Karim Benzema, et que vous êtes
16:23 suivi par 20 millions de personnes, ce qui est vrai pour lui, est vrai pour moi, est
16:26 vrai pour vous, et que vous êtes suivi par 20 millions de personnes, on n'est pas suivi
16:30 nous par 20 millions de personnes, mais quand vous êtes suivi par 20 millions de personnes,
16:33 il faut faire extrêmement attention aux mots que vous employez.
16:35 Et il est évident que vous pouvez très bien défendre des victimes civiles, vous dire
16:40 que ça vous fait de la peine, prier pour les victimes civiles, mais à ce moment-là,
16:43 on met un petit peu d'équilibre, une victime civile, un bébé assassiné, c'est un bébé
16:48 assassiné, et c'est insupportable, quel qu'il soit.
16:51 Vous-même, Frédéric Péchenard, vous avez connu les attentats de 2012, en tant que directeur
16:55 général de la police nationale, un militaire assassiné à Toulouse, deux à Montauban,
16:58 et puis la tuerie du collège lycée juif d'Ozaratora, quatre victimes par Mohamed
17:02 Mehra, au nom d'Al Qaïda notamment.
17:05 Vous feriez la comparaison avec le climat actuel ?
17:07 L'école toujours visée aussi.
17:12 C'est compliqué.
17:13 Mohamed Mehra, c'était le début.
17:16 J'ai eu entre guillemets la chance, j'ai été cinq ans directeur général de la police
17:21 de 2007 à 2012, et à l'exception notable bien sûr de l'affaire Mehra, nous n'avons
17:27 pas eu à connaître pendant cette période d'attentats islamistes sur le sol français.
17:32 On a eu des Français tués à l'étranger, en Arabie Saoudite et en Mauritanie.
17:38 Mais sur le territoire français, on n'avait pas du tout la même situation.
17:42 D'ailleurs, on n'avait pas la même situation de la délinquance, on n'avait pas les mêmes
17:44 problèmes dans les banlieues, et finalement, avec le recul, c'était plutôt une période
17:49 heureuse et plus facile à vivre que maintenant.
17:52 Évidemment, Mehra, c'est quelque chose qui nous a choqués.
17:55 J'ai vu les images, j'ai passé presque dix ans de ma vie à Brigade Criminelle, j'ai
18:00 été sur plus de 400 scènes de crimes, je crois que je suis un petit peu endurci à
18:04 ces choses-là.
18:05 Les images de Mahmoud Mehra assassinant les enfants étaient absolument insupportables.
18:14 Et ça a été le début, c'est le précurseur de Daesh et le début de tout ce qu'on a
18:18 connu ensuite.
18:19 Là aussi, il ne faut pas l'oublier, Charlie Hebdo, le Bataclan, Amagnonville et tout ça.
18:25 Aujourd'hui, la situation est un peu différente et d'une certaine manière plus inquiétante.
18:29 Quand vous avez des tensions internationales, ça se répercute toujours, bien sûr sur
18:35 le pays, c'est illusoire de penser que quand il y a des tensions internationales, il ne
18:38 se passe rien.
18:39 Mais en ce moment, la situation n'est pas tendue, elle est explosive.
18:42 Elle est explosive.
18:43 L'attaque du Hamas, qui était une attaque ciblée contre les civils, il y a des policiers
18:50 et des militaires israéliens qui ont été tués, mais c'était tout à fait à la
18:52 marge.
18:53 L'attaque du Hamas était ciblée contre les civils, on a tué des vieux, on a tué
18:56 des enfants, on a tué des bébés, on a tué des femmes, on les a violées, on a capturé
19:00 des gens, on a capturé des otages.
19:01 C'est le plus grand pogrom de juifs depuis la Deuxième Guerre mondiale.
19:06 Et donc, le Hamas savait qu'évidemment, Israël était obligé de riposter et d'intervenir.
19:13 Ça sera très compliqué.
19:15 On est là en attente du début de l'invasion.
19:19 C'est la pire des situations pour l'armée israélienne.
19:22 Il y a des immeubles, des souterrains, des trous, des gens qui sont aguerris.
19:27 Il va y avoir énormément de victimes de part et d'autre.
19:31 Il va y avoir une tension qui ne va faire que monter.
19:33 Et cette tension qui ne va faire que monter, cette explosivité qui ne va faire que monter,
19:37 forcément, on va en ressentir les effets sur le territoire national.
19:40 Et c'est ça qui est très inquiétant.
19:41 Et comment est-ce qu'on évite ça ? Il y a le ministre de l'Éducation nationale,
19:45 Gabriel Attal, qui annonçait hier travailler à des mesures pour sortir, je le cite, les
19:50 élèves radicalisés des établissements scolaires.
19:53 Et il travaillera avec ses collègues de la justice et de l'intérieur pour permettre
19:59 de sortir ses élèves des établissements scolaires.
20:02 Est-ce que vous pensez que c'est une solution possible et souhaitable ?
20:06 En tout cas, c'est une position possible.
20:09 Gabriel Attal a pris des positions extrêmement fermes ces derniers jours.
20:14 Position que je partage à titre personnel.
20:17 Après, on va voir ce qui est de la communication et ce qui est de l'effectivité.
20:21 Mais vous savez, il faut savoir… Mais qu'est-ce qu'on fait les élèves ?
20:24 Il faut savoir de… qu'est-ce qu'on veut comme société ?
20:27 Radicalisés et qu'on sort des établissements ?
20:29 Ou vous considérez que notre modèle social, qui est une république démocratique, laïque,
20:35 mérite d'être défendue ? Ou vous considérez qu'elle ne mérite pas d'être défendue ?
20:39 Moi, je pense que notre modèle mérite d'être défendu.
20:41 J'aime la France, j'aime mon pays, j'aime la République, j'aime la laïcité.
20:45 J'ai une religion, je n'en fais pas part à tout le monde.
20:51 Et il est important de respecter les règles de la laïcité.
20:54 Si vous ne les respectez pas, vous devez être sanctionné.
20:56 Je vais vous donner un exemple.
20:57 Nous avons en région Île-de-France 67 clubs de basket qui ont fait une pétition pour
21:04 expliquer qu'ils voulaient que leurs joueuses féminines jouent avec le foulard islamique
21:09 sur la tête.
21:10 Nous, à la région Île-de-France, nous y sommes opposés.
21:14 Patrick Caram, qui est le vice-président en charge des sports, et Valérie Pécresse
21:16 ont décidé de ne plus donner de subvention à des clubs qui feraient ça.
21:20 Parce que c'est contre la laïcité et contre l'égalité homme-femme.
21:23 Donc, on va lutter.
21:26 Je pense qu'il n'y a pas d'autre moyen que de lutter contre.
21:29 Et lutter contre, ça veut dire prendre des sanctions.
21:31 Un mot de politique Frédéric Péchinard.
21:32 La cellule d'investigation de Radio France a révélé hier que trois emplois au sein
21:36 du cabinet du président de région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, sont soupçonnés
21:40 d'être fictifs en plus d'un premier déjà mis en cause.
21:42 Les collaborateurs auraient des activités qui seraient plutôt la préparation de la
21:46 campagne présidentielle.
21:47 Quelle est votre réaction ce matin en tant que membre d'ALER ?
21:49 Je n'ai pas beaucoup de réaction parce que d'abord je ne travaille pas avec Laurent
21:53 Wauquiez.
21:54 C'est votre champion à priori en tout cas celui d'Éric Ciotti.
21:56 Je ne travaille pas au sein de la région, donc je ne sais pas exactement, et même pas
22:00 du tout ce qui s'y passe.
22:01 J'ai juste vu un communiqué de presse qui dément formellement vos accusations et qui
22:07 remet en cause votre enquête.
22:08 Bon, attendons d'en savoir plus.
22:11 Il faut dire que la cellule Investigation de Radio France a 10 ans, elle va fêter ses
22:14 10 ans, elle n'a jamais perdu un procès et elle n'a jamais été accusée d'avoir
22:20 mené une enquête qui n'était pas sérieuse.
22:23 Je ne remets rien en cause, je vous dis juste que j'en sais rien.
22:26 Vous pouvez être invaincu pendant 10 ans et perdre un match, ça arrive.
22:30 Et pour vous Laurent Wauquiez, c'est l'homme de la situation, c'est votre candidat à
22:33 la présidentielle ?
22:34 C'est très prématuré pour en parler, il n'a pas été désigné.
22:37 Il ne s'est d'ailleurs pas lui-même porté candidat aujourd'hui.
22:41 Et très honnêtement, au parti, ce qui nous préoccupe maintenant en termes d'élection,
22:45 parce qu'il y a d'autres choses qui nous préoccupent bien sûr, et largement plus,
22:48 mais en termes d'élection, ce sont les prochaines européennes qui auront lieu en
22:50 juin 2024, où on aimerait bien avoir un score qui nous permette d'exister au Parlement
22:56 européen.
22:57 Parce que vous savez, dans le domaine de la sécurité, l'Europe a fait énormément
23:00 de choses et finalement c'est là-bas que ça se passe.
23:02 Les équipes communes d'enquête, le mandat d'arrêt européen, les équipes communes
23:05 de renseignement, le PNR, la montée en puissance d'Europol, toutes ces choses qui ont facilité
23:11 l'efficacité de la police judiciaire française, eh bien on le doit à l'Europe.

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