Alain Deloeil, à l'occasion de sa dernière saison comme directeur sportif chez Cofidis, fait le point avec DirectVelo.
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00:00 On se retrouve ici à Namur à l'occasion du Tour de Wallonie avec Alain Deloeil.
00:09 Alain Deloeil qu'on ne présente plus forcément, figure emblématique, la légende de Cofidis
00:16 qui nous fait le plaisir d'être avec nous pour Direct Vélo, pour faire un peu le bilan de ta carrière Alain.
00:24 Bonsoir déjà.
00:26 Bonsoir.
00:27 Quel plaisir de t'avoir ici pour parler de la Cofidis.
00:33 Il y a beaucoup de choses à dire forcément.
00:35 Oh là, énormément de choses effectivement.
00:38 Depuis 27 ans.
00:40 27 ans je vais dire.
00:41 27 ans de bons et loyaux services et de fidélité surtout à la marque Cofidis, au sponsor Cofidis
00:50 dont j'étais fier de porter et je porte encore d'ailleurs les couleurs depuis 27 ans.
00:57 On va essayer un peu de faire le bilan de ces 27 ans.
01:01 Il faudrait des heures pour raconter tout ce que tu as vécu mais on va essayer de le faire en 20 minutes plus ou moins.
01:10 On va essayer de schématiser, de définir les bons et les moins bons moments.
01:18 Voilà la première question.
01:20 Tu t'y attends forcément.
01:22 Si tu devais pointer un, allez voir deux ou trois grands moments de ta période chez Cofidis, qu'est-ce qui te viendrait à l'esprit ?
01:35 J'ai beaucoup réfléchi à cette question parce qu'effectivement ce n'est pas la première fois qu'on me pose la question.
01:41 Mais bizarrement je n'arrive pas à trouver un événement, quelque chose qui me fait monter au plafond.
01:52 J'ai fait ce métier avec passion et j'ai toujours trouvé des bons moments à chaque instant.
02:06 Par exemple, le tout début, c'est quand l'équipe s'est créée.
02:12 La première mission que j'ai eu à faire, c'est d'aller chercher Maurizio Fondriest à l'aéroport de Zaventem.
02:18 Maurizio Fondriest qui avait été champion du monde et moi je le regardais à la télé.
02:22 Je regardais le vélo à la télé bien évidemment.
02:25 J'avais pour mission d'aller chercher Fondriest, champion du monde, à l'aéroport de Zaventem.
02:32 C'était un honneur pour moi. J'avais mis les pieds dedans.
02:39 Ensuite, il y a eu Tony Rominger avec qui j'ai eu de très bons rapports également.
02:46 Tony était quand même un grand champion. J'ai eu ces tout premiers instants vraiment des moments sympathiques.
02:55 Donc difficile de pointer...
02:58 Après, il y a eu d'autres moments. Il y a eu l'épisode Frank Vandenbroek bien évidemment.
03:04 Frank avec qui j'avais de bonnes relations. J'ai partagé beaucoup de choses, beaucoup de victoires avec lui.
03:12 Notamment sa Vuelta, etc.
03:14 Liège.
03:16 Donc forcément, avec Frank, j'ai des souvenirs impérissables qui resteront gravés à jamais.
03:25 Ensuite, il y a eu David Moncoutier également avec la victoire de David autour de France.
03:32 Sa toute première victoire autour de France.
03:35 Donc ça, c'est encore aussi des souvenirs qui sont vraiment gravés dans ma mémoire.
03:42 Il y a eu Sylvain Chavanel également avec qui j'avais aussi de bonnes relations.
03:48 Sylvain, ça a été quelqu'un de formidable. C'était quelqu'un d'humain.
03:54 C'est quelqu'un aussi que je porte dans mon cœur parce que franchement, on a passé d'excellents moments.
04:02 Donc il y en a beaucoup.
04:04 Tu parles de Chavanel. Il gagne en 2008, si ma mémoire est bonne, autour.
04:11 C'était aussi la dernière victoire de Cofidis autour avant l'édition qu'on a connue avec les deux victoires d'étape.
04:19 C'était ça.
04:20 15 ans plus tard, 15 ans de disette.
04:23 Comment on a vécu cette période chez Cofidis ?
04:26 Parce qu'on sait bien que le Tour est très important.
04:29 Ça commence à piquer, non ?
04:31 Oui, ça commençait à piquer.
04:33 Et on avait une grosse pression parce qu'il n'y avait pas besoin de nous la mettre.
04:36 On se la mettait nous-mêmes.
04:37 On savait que si on allait au Tour, il fallait qu'on gagne une étape.
04:41 Donc voilà, c'était difficile.
04:45 Une année, deux années, cinq années, dix années.
04:48 Et elle n'était toujours pas là.
04:50 Donc cette année, ils ont fait vraiment le carton plein avec deux victoires d'étape.
04:55 Donc voilà, on est revenu à ce qu'on avait connu en 2008 avec la première étape gagnée par Samuel Dumoulin
05:00 et la deuxième étape par Sylvain Chavanel.
05:04 Donc voilà, on a mis fin à cette disette longue de 15 ans.
05:10 Un ouf de soulagement.
05:12 Un ouf de soulagement.
05:13 Mais il reste encore quelque chose à faire.
05:16 Je ne le ferai pas.
05:17 Moi, je comptais le faire.
05:18 Et ça, c'est une de mes frustrations de ma carrière.
05:22 C'est de ne pas avoir remporté le titre de champion de France.
05:26 Ah oui.
05:27 Ça, c'est vraiment…
05:29 Je pensais cette année, c'était chez moi.
05:32 C'était chez nous, à Casselles.
05:34 Et j'avais misé beaucoup.
05:37 Dans la tête, j'étais prêt, moi.
05:40 Malheureusement, les coureurs n'ont pas suivi.
05:42 Et voilà, ceux qui pédalent, ce n'est pas moi.
05:45 Un circuit très difficile.
05:47 Très exigeant.
05:48 De chaleur.
05:49 De vision.
05:50 Quelle sélection ?
05:51 C'était un des plus beaux championnats de France.
05:52 23 coureurs au finish.
05:54 Ça a été très compliqué pour beaucoup d'équipes.
05:56 23 coureurs au finish, ce n'est pas beaucoup.
06:00 Mais je pensais véritablement qu'on avait les armes.
06:03 Et on avait les âmes pour le faire.
06:05 Et je pense qu'un Victor Laffey…
06:07 Moi, je comptais beaucoup sur Victor Laffey.
06:10 On a eu notre lot, une malchance, avec des sauts de chaîne,
06:13 comme beaucoup dans les pavés.
06:15 Et puis, ça ne s'est pas déroulé comme on l'aurait voulu.
06:21 Victor, par contre, a été, 8 jours plus tard,
06:23 gagner son étape du Tour de France.
06:25 Donc, c'est sûr qu'il était prêt.
06:27 J'allais venir.
06:29 Victor Laffey, 8 jours plus tard, resplendissant au Pays Basque.
06:33 Il gagne cette étape.
06:35 Parle-nous un peu de Victor.
06:37 Tu me disais un jour, il a fait du Laffey.
06:40 C'est-à-dire que dans un bon jour,
06:42 il peut vraiment être l'un des tout meilleurs du peloton.
06:45 Exactement.
06:46 Il l'a prouvé, il l'a montré.
06:48 Le premier jour, la première étape du Tour,
06:50 jeu égal avec les deux cadors du Tour de France
06:53 dans les bosses du final.
06:55 La victoire.
06:57 Il y avait longtemps qu'on n'avait pas vu quelqu'un faire le kilomètre
07:01 comme il l'a fait au nez à la barbe de Woodvarnard.
07:04 Donc, quelque part, ça classe.
07:07 Dis-moi qui tu es, je te dirai qui tu es.
07:09 Donc, Victor, c'est quelqu'un d'atypique.
07:12 C'est un coureur.
07:14 Je pense que c'est la première fois qu'il fait 3 semaines de vélo.
07:18 Sur une course, c'est la première fois.
07:21 Il a fini le Tour.
07:22 Il n'a pas fini puisque malheureusement, il a chuté la dernière étape.
07:26 Enfin, l'avant-dernière étape.
07:28 Donc, il n'a pas pu rallier Paris.
07:30 Mais voilà, c'est comme s'il avait fini son Tour de France.
07:33 Victor, c'est quelqu'un qui est...
07:36 Pour faire la sélection du Tour de France,
07:38 avec mes collègues et puis Cédric Vasseur,
07:41 on a longtemps réfléchi sur le cas Victor l'a fait.
07:44 Parce que voilà, est-ce qu'on le met ?
07:46 Est-ce qu'on ne le met pas ?
07:48 Il y avait un doute.
07:50 Mais on sait quand même que Victor est capable de faire des one-shots.
07:53 Et c'est ce qu'il a fait.
07:55 On s'est dit, allez, on le met.
07:57 On le met parce que pour un one-shot, on ne sait jamais.
08:00 Et bingo, c'est ce qu'il a fait.
08:03 Donc, forcément, on est gagnant sur toute la ligne.
08:08 Donc voilà, on a eu le nez creux pour l'inclure dans l'équipe
08:15 et puis qu'il fasse le Tour de France.
08:17 Qu'est-ce qui lui manque maintenant pour aller chercher cette régularité dans ses prestations ?
08:23 Peut-être un peu plus de rigueur.
08:26 Voilà.
08:27 Un peu plus de rigueur, un peu plus d'abnégation.
08:30 Parce qu'il est capable de beaucoup de choses, sur tous les terrains.
08:35 Mais il faut déjà qu'il croit en lui.
08:38 Il faut que...
08:40 Je ne dis pas qu'il ne croit pas véritablement en lui.
08:45 Mais il a encore des lacunes à ce niveau-là.
08:48 Il n'a pas encore l'habitude de ce type d'effort.
08:53 Et est-ce qu'il connaît ses limites ? Je me le demande.
08:56 Je pense que quand il se retrouve avec Wittgenger et Pogacar en haut de la bosse, la première étape,
09:04 il n'y a pas grand monde qui était capable de les accompagner, sauf lui.
09:07 Donc, c'est vraiment quelqu'un qui a des qualités énormes.
09:11 Enormes.
09:12 Pour suivre ces deux-là,
09:14 il faut qu'il persévère là-dedans.
09:17 Il faut qu'il travaille peut-être ces qualités-là.
09:21 Et il est capable de tout.
09:24 Je vous le dis, sur une journée, il est capable de tout.
09:27 Alors, revenons-en un peu à ces frustrations, ces éventuelles déceptions.
09:32 Parce qu'évidemment, en 27 ans, il y a des bons et des moins bons.
09:35 Tu dis, le titre de champion de France, c'est un regret.
09:38 Est-ce qu'il y a d'autres déceptions, regrets que tu aimerais pointer de ces 27 ans ?
09:47 Moi, j'ai été bercé par Paris-Roubaix, en fait.
09:50 J'ai été bercé là-dedans.
09:52 Je pense que quand je suis venu dans le vélo, ma plus tendre jeunesse, c'était par rapport à Paris-Roubaix.
09:59 Mon père m'a emmené dans les pavés pour voir passer la cour.
10:02 J'étais tout petit.
10:03 Je n'ai pas beaucoup grandi, mais bon, j'étais tout petit.
10:06 Donc, j'aurais toujours, moi-même, fait deux fois deuxième de Paris-Roubaix en amateur.
10:14 C'est une course qui m'a toujours inspiré.
10:17 Et j'aurais voulu, effectivement, avoir le coureur capable de gagner Paris-Roubaix,
10:22 diriger le coureur capable de gagner Paris-Roubaix.
10:24 J'avais dit, d'ailleurs, une petite anecdote.
10:26 J'avais dit un jour à Jean-François Pécheux, qui était directeur des compétitions à ESSO.
10:35 Je lui avais dit à l'époque, si je suis en passe de gagner Paris-Roubaix avec un coureur qui est seul devant,
10:44 je rentre en voiture sur le vélodrome.
10:47 Je savais que ce n'était pas possible.
10:49 Et puis, j'aurais risqué de mettre hors course le coureur, bien évidemment.
10:54 Mais pour le faire un peu, voilà.
10:56 Et ça, c'est un regret. C'est un regret de ne pas avoir eu ce coureur capable d'être dans le final de Roubaix,
11:05 de jouer la gagne, de vibrer à ce moment-là.
11:08 Parce que, franchement, c'est une course à nul autre pareil.
11:12 Est-ce que Cédric Vasseur va essayer de travailler sur ce point pour le futur, pour aller trouver vraiment un gars ?
11:19 Parce qu'on sait, pour Cofidis, cette course, c'est quand même important.
11:24 Oui, c'est important. Bon, maintenant, je ne sais pas. Je ne sais pas ce que l'avenir de Cofidis, je ne le connais pas.
11:32 J'espère. Moi, je m'en vais. C'est fini.
11:36 Mais j'espère que ça va durer encore, perdurer encore quelques années.
11:40 Peut-être qu'ils vont aller dans ce sens-là, aller chercher une équipe de classique.
11:45 Mon grand regret également, et ça, c'est très fort, c'est que j'avais monté il y a quelques années,
11:53 c'était dans les années 2000, justement, 2008, je crois, j'avais monté un pôle classique.
12:00 J'étais le premier, et j'avais été le premier à avoir cette idée.
12:04 C'était une idée comme une autre.
12:06 Mais de constituer un groupe, et à l'époque, j'avais Nick Neuhens, j'avais Sylvain Chavanel,
12:15 j'avais également Mathieu Hechebourg, il y en avait d'autres, j'oublie, Staffs, Chairlinks, etc.
12:27 Il y en avait d'autres. J'avais dans l'idée de réunir ces gars du départ, du premier stage,
12:33 c'est-à-dire du stage du mois de décembre, avec le même personnel, les mêmes mécanos,
12:39 le même docteur, le même kiné, etc. Et de ne surtout pas les lâcher jusqu'à la fin de la période des classiques,
12:50 c'est-à-dire jusque Paris-Roubaix. C'est-à-dire qu'un kiné qui massait Nick Neuhens, par exemple,
12:54 il le massait du mois de décembre jusqu'à la sortie de Roubaix, pour connaître vraiment ses jambes, son courant, etc.
13:00 Le mécano qui préparait le vélo, c'était pas un autre mécano, c'était le mécano, etc.
13:06 Voilà, j'avais monté ce pôle classique et j'avais dit "Laissez-moi deux ans et on fait la meilleure équipe de classiques au monde".
13:14 Et j'avais pas peur de dire ça parce que j'y croyais véritablement. Et la première année, on a fait notre préparation hivernale,
13:22 donc en stage, etc. La première année, on gagne l'étoile de Bessèges avec Nick Neuhens, on fait un carton,
13:28 on fait des places d'honneur et tout. Et on fait deuxième du Volk, ça s'appelait, je crois, encore le Volk à l'époque.
13:36 Et derrière, après, on a fait des classiques, enfin des tas de résultats dans les classiques.
13:44 Mais après, ça a été, la deuxième année, on a regagné la Flèche Brimbonçonne avec Sylvain Chavanel,
13:50 on a gagné à travers les Flandres avec Sylvain Chavanel. Donc on a fait des places et on a fait aussi deuxième du Tour des Flandres,
13:57 avec Nick Neuhens. Donc c'était parti en fait. Et beaucoup de courants voulaient venir nous rejoindre,
14:02 parce que l'idée était bien et c'était sympa. Et la troisième année, malheureusement, tout a été arrêté.
14:09 Tout a été arrêté comme ça. Tout a été arrêté. Donc voilà. Donc malheureusement.
14:14 Peut-être une piste à relancer, une idée à suggérer à Cédric Vasseur avant de partir.
14:19 Je l'avais relancée. Chaque manager qui est venu derrière, j'avais écrit, bon j'avais tout ça sur papier.
14:27 Et à chaque fois, je la proposais et puis non, ça n'a pas fonctionné. Et je pense que maintenant, ça a évolué.
14:37 Il faudrait faire évoluer les choses et beaucoup font un peu la même chose. Maintenant, ils ont leur pôle classique.
14:42 Voilà. Mais à l'époque, en 2007-2008, ça n'existait pas véritablement.
14:49 Alors, on est dans un cyclisme, voilà, en 2023, très axé sur données de puissance, regarder son capteur, etc.
14:59 Les watts, etc. Toi, par rapport à tout ça, tu te situes comment par rapport à ce cyclisme-là ?
15:05 Quand je suis arrivé avec Eufydis en 1997, c'est sûr qu'il n'y avait pas tout ça.
15:12 On avait encore nos téléphones avec des grandes antennes qu'on dépliait et qu'on dépliait le téléphone.
15:18 Ils étaient comme ça, nos téléphones portables. On n'avait que ça. On n'avait pas d'ordinateur.
15:23 On n'avait pas de choses comme ça. Donc, il a fallu évoluer avec son temps.
15:29 Il a fallu évoluer avec le temps et on s'y est mis tout doucement. Moi-même, je m'y suis mis parce que sinon, je me serais fait larguer vite fait.
15:39 Ce qui n'a pas été le cas. J'ai évolué avec le temps, justement, avec l'apport des entraîneurs qui sont arrivés également par la suite dans le vélo,
15:50 avec les différents managers qu'on a pu côtoyer, que j'ai pu côtoyer et tout ça. Et puis, je m'y suis mis.
15:59 Du bouton « on/off » sur l'ordinateur, il a fallu que je passe à un autre stade. Et puis, je m'y suis mis.
16:06 Donc, ce sont des choses qu'on parle régulièrement et qui me parlent sans que je sois pointu là-dedans.
16:15 Parce que maintenant, je vous dis, comme toutes les équipes ont un entraîneur, des entraîneurs, ce sont eux qui gèrent cet aspect-là.
16:25 Et puis, il y a des poils performance maintenant dans toutes les équipes, chose qui n'existait pas non plus.
16:30 Alors, tu as déjà pointé des coureurs qui t'ont marqué, évidemment Van Den Broek, Bon Coutier, Chavanel, des coureurs qui ont brillé.
16:43 Mais est-ce qu'il y aurait un coureur que tu aurais envie de mettre en évidence ?
16:47 Peut-être un coureur qui n'a pas forcément eu de grands résultats, mais qui t'a peut-être marqué un peu plus par sa personnalité.
16:55 Là, il faudrait faire le tour, le nombre de coureurs qui est passé par Cofidis.
17:05 C'est quelque chose qu'il faudrait faire également, parce que je ne sais pas, le nombre de coureurs qui… 3, 4 ans peut-être, je ne sais pas.
17:14 Donc, c'est difficile de sortir du chapeau un coureur autrement qu'un autre.
17:22 Je reviendrai peut-être sur David Moncoutier, parce que David, c'était vraiment quelqu'un qui était exceptionnel.
17:29 Il est tombé dans une période très difficile à cette époque-là, avec Armstrong, avec Ulrich et tout ça.
17:36 C'était cette période-là, donc une période dont on sait, on ne va pas épiloguer là-dessus, mais on sait que c'était une époque difficile.
17:44 David, c'était quelqu'un de pur, de sain, de tout, voilà.
17:49 Et il avait vraiment une classe folle, quoi. Une classe folle.
17:54 Et puis, c'était quelqu'un de gentil, c'était quelqu'un qui débarquait un peu à la poulie d'or, quoi.
18:00 Un peu à la poulie d'or, qui était…
18:05 Voilà, donc si je devais sortir véritablement quand même un coureur du chapeau, ce serait probablement lui.
18:13 Peut-être j'en oublie, hein. Peut-être j'en oublie.
18:16 Comme tu dis, il y en a eu beaucoup.
18:17 Voilà, il y en a eu tellement que peut-être j'en oublie un qui… J'ai eu de très bonnes relations avec beaucoup de coureurs.
18:25 Avec d'autres, moins, forcément.
18:28 C'est difficile.
18:29 C'est difficile.
18:30 Mais il y a eu… J'ai eu vraiment des… Je peux dire des amis.
18:37 Je peux dire des amis, des gens, des coureurs que j'ai appréciés beaucoup, que j'apprécie encore beaucoup.
18:42 Il y en a encore quelques-uns. Comme je suis encore en exercice, je ne vais peut-être pas citer.
18:48 Mais il y a vraiment encore des coureurs très intéressants, qui ont un aspect humain et qui sont sympas.
18:58 Alors maintenant, si tu devais me pointer ta plus grosse colère en 27 ans, une course où tu t'es dit vraiment après la course,
19:07 les coureurs, là, ils ont fait vraiment n'importe quoi.
19:10 Ma plus grosse colère, oui, ça, je peux le pointer. Elle n'est pas vieille du tout.
19:16 Elle n'est pas vieille du tout. Elle date de trois semaines, un mois. Non, un mois maintenant.
19:20 C'était le championnat de France.
19:21 C'était le championnat de France. Je crois que je suis monté dans le bus pour faire mon débriefing.
19:26 Et là, je ne sais pas, il m'est passé quelque chose dans la tête.
19:28 Mais là, je les ai mis plus bas que terre parce que je n'ai pas apprécié du tout la façon dont ils ont abordé, couru,
19:37 alors que tout avait été décortiqué au briefing, etc.
19:40 Enfin bon, on avait monté un plan comme tout le monde. Le plan a été bafoué. Il n'a pas été véritablement respecté et tout.
19:48 Donc là, je pense que ça a été ma plus grosse colère quand je suis monté dans le bus après le championnat, effectivement.
19:53 Donc, pour ta dernière année, tu t'es offert.
19:56 Oui, je me suis lâché.
19:57 Voilà. Et donc, maintenant, question dans le sens inverse. La course où tu t'es dit là vraiment, j'ai été bon comme déesse.
20:07 Mon plan a fonctionné à merveille et j'ai vraiment une grosse part de responsabilité dans la victoire ou dans la performance comme Phyllis aujourd'hui.
20:17 Il y a eu un, comment dirais-je, un tour de l'un à un moment donné où on fait pratiquement un, deux, trois avec Tara Mahé, mon coûtier, justement.
20:28 Et puis, j'ai oublié son nom. Pourtant, je m'en ai abandonné à parler il n'y a pas longtemps.
20:36 Enfin, voilà. Bref, on fait un, deux, trois. Et là, c'était véritablement du bonheur.
20:41 Une chose comme ça, c'est du bonheur. Il y a eu aussi un moment donné autour de Loire-Atlantique où on fait un, deux, trois, cinq aussi.
20:51 On avait monté une bordure. On avait dit là, c'est possible de monter un coup, de monter une bordure.
20:57 On l'avait fait. On s'est retrouvé devant pratiquement toute l'équipe et on s'est baladé.
21:04 Donc là, oui, forcément qu'on a du bonheur. Dans la voiture, on prend notre pied. C'est clair.
21:11 C'est clair que là, il y en a eu. Il y en a eu quand même.
21:16 Bien sûr, en 27 ans.
21:17 Oui, oui. Dans la carrière, il y en a eu. Il y a eu après même, pas forcément des victoires, mais des places d'honneur, des belles places ou dans des grandes courses.
21:26 Après, il y a eu les quatre jours de Dunkerque chez moi aussi avec des coureurs comme Dimitri Kless qu'on a gagné.
21:37 On a gagné pour une seconde sur une répelle. Et là, il fallait maintenir aussi. Et ça, ça a fonctionné vraiment.
21:43 Ça, c'était un bon coup tactique aussi parce qu'il ne fallait pas rentrer trop vite sur l'échappée, etc.
21:50 On a vraiment limité. Je me souviens encore à l'Oreillette, j'étais vraiment le doigt sur le...
21:57 Et je guidais un petit peu les gars comme ça sur le final pour rentrer, pour ne pas qu'il y ait eu de bonif, etc.
22:02 C'était vraiment des beaux coups tactiques.
22:05 La page de pédale.
22:07 Mais ce n'est toujours pas moi qui pédale. Moi, je ne me suis jamais approprié les victoires.
22:12 J'ai été élevé dans l'humilité, je pense. Je suis quelqu'un de humble et tout.
22:20 Et quand un coureur gagne, souvent, je suis dans mon petit coin et je pleure.
22:26 Je suis quelqu'un de sensible et j'ai encore la larme facile.
22:30 Et ça m'est arrivé maintes et maintes fois.
22:33 Donc, c'est le coureur qui est dans la lumière.
22:37 Et puis, j'ai fait ma carrière, j'ai fait mon travail.
22:42 Place aux autres.
22:44 Je ne sais pas si j'aurais marqué quelque chose dans ma carrière particulièrement.
22:49 Quand même, hein ?
22:50 Oui, peut-être.
22:52 Quand même une légende du Coffee 10.
22:54 Oui, mais encore une fois...
22:56 Oui, je sais, je suis un petit peu le taulier.
23:03 Je suis à la création avec Alain Bondu.
23:07 Et puis, je suis toujours là. Je suis le plus ancien.
23:11 J'estime avoir fait mon travail comme je devais le faire.
23:15 Je ne veux pas non plus tirer la couverture à moi.
23:19 Je n'ai rien fait de plus qu'un autre.
23:21 De l'humilité, en tout cas, ça, c'est clair.
23:24 Maintenant, la question quitte de l'après, la retraite.
23:30 Tu vas reprendre ta carrière de pilote automobile ?
23:34 Parce que j'ai lu en arrivant que tu avais fait du rallye.
23:36 Oui, mais là, c'est un peu vieux aussi.
23:38 C'est très vieux, mais bon.
23:40 C'est un peu vieux aussi.
23:41 Non, j'ai toujours la passion pour les voitures de sport, ça c'est clair.
23:45 J'ai toujours une grosse passion pour ça, les rallyes et tout.
23:49 J'ai toujours dit que je préférais d'ailleurs les rallyes automobiles au vélo.
23:53 Donc, je ne m'en cache pas.
23:56 Mais bon, voilà, j'ai choisi à un moment donné et ça s'est passé comme ça.
24:01 Alors, quoi faire après ? Du canapé ? Non, je ne pense pas.
24:06 Non, je ne pense pas.
24:08 Il y a des voyages à faire, il y a une retraite à prendre.
24:12 Et puis, il y a des voyages.
24:14 J'ai un enfant.
24:16 J'ai trois enfants qui ont des petits-enfants.
24:21 Et j'ai un dernier, moi, qui a 9 ans, qui va avoir 9 ans.
24:25 Voilà, j'ai un jeune garçon, donc je vais m'en occuper.
24:31 Il y a du boulot avec ça.
24:34 C'est quelque chose de très important.
24:37 Donc, je vais beaucoup m'en occuper.
24:41 Et puis, je trouverai des trucs à faire.
24:46 Après, je ne suis pas fermé non plus d'aller faire quelques piches par-ci, par-là, si on me demande.
24:52 Voilà, ça veut dire qu'on ne se sent pas encore tout à fait prêt ?
24:56 Si, si, si, je suis prêt.
24:59 Dans la tête, je suis prêt.
25:01 Mais je sais que si je prends ma retraite au 1er janvier, comme c'est normalement acté,
25:06 je peux travailler tout de suite derrière.
25:09 Parce que j'ai mes années, donc je peux commencer à travailler
25:12 si on me demandait quelque part d'aller faire un invité,
25:16 de conduire une voiture invité, d'aller dans une organisation.
25:19 Après, j'ai également mes amis organisateurs du Grand Prix de Denain
25:22 qui m'ont demandé de rentrer dans l'organisation.
25:25 J'ai également un club chez moi de Valenciennes
25:31 qui m'ont demandé d'être vice-président de leur club, etc.
25:34 Enfin bon, il va y avoir...
25:35 Tu es déjà courtisé ?
25:36 Oui, non, il va y avoir des choses à faire, c'est sûr.
25:41 Il y a un club de jeunes dans la région ?
25:44 Pourquoi pas ? Pourquoi pas ?
25:47 En fait, je suis fermé à rien et j'étudierai tout.
25:52 Et puis voilà, bon, si j'ai aussi...
25:57 Et ça, ça fait partie aussi de moi et de mon caractère.
26:00 Quand je suis sollicité pour aller parrainer quelque chose,
26:06 un club, une manifestation ou quoi que ce soit, je ne sais pas dire non.
26:10 Parce que je dis toujours, je dois rendre au vélo ce que le vélo m'a donné.
26:16 Donc voilà, c'est un petit peu ma façon de voir les choses.
26:22 Ma philosophie et ma façon de voir les choses.
26:25 Je crois que moi, sans le vélo, je ne serais rien et je ne suis rien.
26:30 Mais voilà, on est un peu, entre guillemets, un peu connu.
26:36 Donc il me doit de rendre ça un petit peu au vélo.
26:40 Voilà, je pense que tu as quand même donné beaucoup à ce sport.
26:46 Tu nous as rendu beaucoup de choses aussi à travers ton équipe, évidemment.
26:50 Ce n'est pas Alain Deleuil, Cycling Team, et bien Cofidis.
26:54 Et donc je pense que sans toi,
27:00 Cofidis ne serait sans doute pas là, à l'heure actuelle, à ce niveau-là.
27:05 C'est sûr que mon nom est lié à Cofidis.
27:07 Comme Cofidis est lié à mon nom,
27:09 il y a peut-être un parallèle à faire par rapport à ça.
27:13 Mais non, voilà, moi je sais que j'ai poussé avec le président d'avant,
27:21 François Migren, le créateur de Cofidis, qui est un ami.
27:25 Bon voilà, c'était le début.
27:28 Mais j'ai tellement de choses à raconter sur la création de Cofidis,
27:32 sur l'historique de Cofidis et tout,
27:34 qu'il faudrait des soirées entières.
27:36 Ou il faudrait écrire des livres.
27:39 Mais bon, j'ai toujours poussé en disant alors,
27:43 quand est-ce qu'on fait cette équipe pro ?
27:46 À l'époque, il y avait eu la mutuelle de Sennemarne et Aubervilliers,
27:52 qui c'était un peu l'équivalent de la Continentale maintenant,
27:59 mais ce n'étaient pas des grosses équipes.
28:01 Et moi je disais à François Migren,
28:03 mais quand est-ce qu'on fait cette équipe pro ?
28:06 Pour aller comme machin.
28:08 Il dit, si on fait une équipe pro,
28:09 ce ne sera pas la mutuelle de Sennemarne ni Aubervilliers,
28:12 ce sera une grosse équipe pro.
28:14 Et j'étais dans les bureaux de Cofidis, moi à l'époque,
28:17 et François venait me voir une heure par jour pour discuter.
28:22 J'étais un peu son défouloir en fait.
28:24 Parce qu'il était submergé de chiffres, de réunions, etc.
28:28 Et moi j'étais un peu son défouloir,
28:31 il venait me parler de vélo pendant une heure,
28:33 et puis hop il remontait, c'était son petit truc.
28:35 Et donc à chaque fois, bien évidemment,
28:37 on parlait de vélo, on parlait d'équipe pro,
28:39 on parlait de ceci et de cela.
28:40 Et un jour il a franchi la porte de mon bureau,
28:42 qui était dans ses locaux,
28:44 et avec un grand sourire il m'a dit,
28:47 bon ben on est prêt, on l'a fait cette équipe pro,
28:49 mais ce sera une grosse équipe.
28:51 Donc voilà, ça aussi c'est des souvenirs,
28:53 des moments que je n'oublierai jamais.
28:57 Je pense qu'on a fait le tour de la question Alain.
29:01 En tout cas ce fut un plaisir de t'avoir ici.
29:04 Merci.
29:05 Un bon moment,
29:07 et on te souhaite d'ores et déjà une bonne fin,
29:09 et surtout déjà une bonne retraite.
29:11 Vous me verrez encore j'espère.
29:13 On l'espère aussi.
29:15 Merci beaucoup.