Ce 26 septembre, un coup de fil a mis fin à huit années de recherches effrénées menées par Hisham Terrak, le fils de ce retraité campinois malade d’Alzheimer parti un jour de son appartement du quartier des Mordacs sans laisser aucune trace. Retrouvé mort en Seine-Saint-Denis quatre mois après sa disparition, il a été enterré dans un « carré des indigents » sans que ses proches n’en soient avertis.
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00:00 Je cherche mon père depuis 8 ans alors qu'il est enterré.
00:02 Alors qu'il était mort et enterré en fait.
00:04 Alors on est d'une certaine manière dans la dernière demeure de mon papa.
00:07 Mon père a été enterré sous X dans un cimetière en région parisienne.
00:11 Tout en sachant que j'étais à sa recherche depuis 8 ans.
00:14 On ne savait pas du tout que mon père était enterré.
00:16 Ça fait depuis je crois un jour ou deux que je peux venir me reculer sur la tombe de mon père.
00:20 Il est beau mon papa.
00:22 Un vrai petit beau gosse.
00:23 [Musique]
00:48 C'est la vie de recherche qu'on a fait dès les premières heures de la disparition.
00:53 Et c'est vraiment la dernière photo que j'ai de mon papa.
00:56 J'ai vraiment mis cette vie de recherche partout.
00:59 Magasins, bus, taxis.
01:01 Tous les lieux de passage en fait.
01:03 Je pense que je vais réellement, je dirais pas ratisser.
01:06 Je dirais retourner à Paris.
01:08 Jusqu'à ne plus en pouvoir de Paris, jusqu'à ne plus pouvoir y mettre les pieds.
01:12 Bonjour à tous.
01:13 Petit message pour vous dire que malheureusement c'est pas mon père.
01:18 Voilà encore une fois on y a cru.
01:21 Merci, merci d'avoir participé à la recherche.
01:25 Merci de m'avoir envoyé des photos.
01:26 Salam à tous, j'espère que vous allez bien.
01:28 Bon je vais, je pense que je vais m'arrêter là.
01:32 Je compte depuis tout à l'heure, j'ai fait ronis, montreuil, noisettes secs.
01:37 J'ai le souvenir d'être rentré dans des camps de migrants.
01:40 Sur des, je sais pas combien de mètres, des gens qui dorment par terre.
01:46 Et avec une petite lampe torche ou mon téléphone,
01:49 à soulever les couvertures pour voir les visages.
01:52 Et ça, ça vous marque à vie ça.
01:54 Parce que là on est confronté à la vraie misère en fait.
01:57 Et donc là, se dire qu'on peut peut-être retrouver son père là-dedans, ça fait mal.
02:02 Ça fait très mal.
02:03 Alors le dénouement, bah voilà c'est le 26 septembre.
02:14 J'étais au travail, lorsque je reçois un coup de téléphone,
02:17 quand je vois ces numéros masqués, je sais que c'est la police.
02:19 Et de là, on m'annonce qu'on a retrouvé mon père.
02:21 Wow.
02:24 Au bout de 8 ans, on est en train de me dire qu'on a retrouvé mon papa.
02:29 Mon père a été retrouvé dans une ville de 1993.
02:34 Je crois qu'on l'a découvert le 5 octobre, quelque chose comme ça.
02:40 Et on l'a inhumé fin octobre 2015.
02:46 Donc quelques mois après sa disparition.
02:49 Malgré tout le bruit que j'ai pu faire à cette époque,
02:52 malgré les plateaux de télé, les revues de presse,
02:55 malgré la page Facebook, malgré tout le monde qui en parlait,
03:00 malgré le fait que des inconnus qui disaient qu'ils avaient la photo de mon papa
03:03 sur l'écran de verrouillage de leur téléphone.
03:07 Malgré tout ça, mon père a été retrouvé dans l'anonymat,
03:12 enterré sous X, à limite à 10 minutes de chez moi.
03:17 Alors le sentiment qui nous traverse lorsqu'on arrive au bout de 8 ans
03:22 sur la tombe provisoire de mon papa,
03:27 c'est un mélange de tristesse, de joie.
03:32 J'ai le souvenir d'avoir ri et pleuré en même temps.
03:35 Je crois que les premières paroles que j'ai pu lui dire,
03:36 c'était « je t'ai enfin retrouvé ».
03:39 Comme si on avait entamé une partie de cache-cache incroyable.
03:44 Mon père est enterré dans une des parties du cimetière
03:47 où on y enterre les indigents, les gens sans identité.
03:53 Quand j'ai eu les coordonnées de sa tombe, c'était « monsieur X ».
03:57 Du coup, il n'y a pas de stèle, il n'y a rien.
03:59 On va pouvoir récupérer le corps de mon père.
04:03 Il sera enterré dans une commune dans le 94,
04:08 avec un enterrement, des obsèques.
04:12 Enterré dignement en fait.
04:13 Ça fait 8 ans que je vis avec ça, que je vis dans ça.
04:19 Il n'y a pas un jour où je n'ai pas fait des détours
04:21 juste pour aller voir si je le croise au croisement d'une rue
04:27 comme ça ou sur une terrasse d'un café, on ne sait jamais.
04:30 Pour moi, le travail réellement commencera
04:33 quand j'aurai enterré mon papa une bonne fois pour toutes.
04:39 [Musique]