Retrouvez la chronique de Lisa Delmoitiez dans la Bande Originale sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-chronique-de-lisa-delmoitiez
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AmusantTranscription
00:00 Si l'Isabelle Moitié !
00:02 (applaudissements)
00:04 Alors vous, Lisa, vous m'auriez trouvé ça comme ça ?
00:06 Ah bah si, c'est parfait, ne changez rien Nagui, vas-y Lisa, fais des blagues sur le suicide, qu'est-ce qui pourrait mal se passer ?
00:12 Vivement l'émission de demain, on reçoit un juif trans, quitte à se casser la gueule, autant partir en beauté.
00:16 (rires)
00:18 J'ai déjà le titre de ma chronique, se faire construire un pénis puis le circoncire, gâchis ou soucis du détail ?
00:23 (rires)
00:25 Bon let's go, François Berléand, dans la note vous interprétez Julien, un psychanalyste surpris par sa femme Maud, jouée par vous Sophie Marceau, alors qu'il tente de mettre fin à ses jours.
00:35 Tu te dis, c'est lourd, mais en fait c'est abordé avec beaucoup de légèreté, parce que bon, finalement se suicider, c'est un peu comme se branler en fait.
00:41 Quand t'es dedans t'es à fond, mais si on te surprend, t'as l'air un peu con.
00:44 (rires)
00:45 T'es tout rouge, t'as le cœur qui va exploser, tu pleures, ça y'a peut-être que moi.
00:49 (rires)
00:51 Suicide ou branlette, d'après votre personnage François, la moindre des choses c'est qu'on te laisse finir.
00:55 (rires)
00:56 Mais vous ne l'avez pas laissé finir Sophie.
00:58 (rires)
01:00 Bon le problème c'est que votre personnage François n'a pas laissé de lettres d'adieu, et moi je connais le syndrome de la feuille blanche François.
01:06 Essayez l'écriture automatique, ne réfléchissez plus, écrivez tout ce qui vous passe par la tête.
01:10 Ok, le suicide, c'est la faim. La faim, c'est vrai que j'ai faim.
01:14 Espérer à bouffer en enfer. Sans doute des griades, peut-être même un méchoui.
01:18 Oh c'est pas vrai, même en enfer il y a des arabes.
01:21 (rires)
01:22 Quand tu ne filtres plus tes pensées, c'est qu'ils peuvent te rendre compte que t'es raciste.
01:25 (rires)
01:26 Si ça se trouve au RN, ils écrivent tout leur programme en mode cadavre exquis.
01:29 (rires)
01:30 C'est pas la technique des surréalistes, cadavre exquis c'est juste le nom qu'ils donnent aux migrants en Méditerranée.
01:34 Oui, l'humour noir c'est aujourd'hui ou jamais.
01:37 (rires)
01:38 C'est d'ailleurs ce qui est très réussi dans la pièce, c'est dramatique et comique.
01:42 C'est le rôle de l'humour, alléger la lourdeur de la vie.
01:44 Je ne vais pas écrire des blagues sur un chat qui ressemble à Hitler, c'est déjà très drôle en soi.
01:48 Non, moi mon job c'est d'écrire une blague sur un chat mort tombé d'un avion sur des enfants
01:52 qui jouaient sur la plage devant leurs parents, parce que là je sers à quelque chose.
01:55 (rires)
01:56 Les humoristes qui parlent de sujets légers c'est comme les coiffeurs pour chauves, c'est redondant.
02:00 Je m'inclus dedans, vous avez devant vous quelqu'un qui écrit une chronique de 4 minutes de blagues sur les proutes.
02:05 (rires)
02:06 On est sur de hauts niveaux.
02:08 Non, sincèrement, je pense qu'il faut oser parler de suicide au théâtre.
02:11 C'est un prétexte, la pièce s'intéresse surtout aux questions que ça soulève sur la condition humaine.
02:15 Et moi je ne juge pas, une vie n'est pas une autre.
02:17 Mais j'ai personnellement du mal à comprendre le suicide, parce que, je ne sais pas si je donne cette illusion là,
02:22 mais moi j'adore la vie.
02:23 Non vraiment, j'adore la vie, je vais vous donner mon secret, il ne faut juste pas trop en attendre.
02:27 (rires)
02:30 Pour moi la vie c'est comme quand je me retrouve à bouffer un kebab à 3h du mat.
02:33 Je ne sais pas comment j'ai atterri ici, il y a trop de bruit, l'hygiène c'est franchement douteux,
02:36 mais vu la gueule du truc, c'est pas dégueu en fait.
02:38 (rires)
02:39 Et ce qui est touchant dans la pièce, c'est qu'à partir du moment où votre personnage, François, a envisagé le pire,
02:43 ben en fait ça rouvre le champ des possibles dans un couple.
02:46 Parce que parfois tu crois que t'en as marre de la vie, mais en fait t'en as juste marre de ta vie.
02:50 Mais t'es tellement déprimé que t'as plus d'imagination.
02:52 Comme moi, à ce moment-ci de la chronique, j'avais écrit "ajouter blague en grave", mais je n'ai pas trouvé.
02:56 (rires)
02:58 Franchement la vie c'est comme la taf, quand t'as envisagé de foutre le camp, ben t'as moins peur en fait.
03:02 Si t'es au travail et que t'as peur qu'on te vire, ben t'es tout le temps stressé.
03:04 Mais si tu te rends compte qu'au fond tu t'en bats les couilles et qu'on te vire, ben là tu commences à kiffer, à prendre des risques.
03:09 Si j'avais peur d'être viré par Nagui et Leïla, pensez bien que j'aurais pas gardé la blague des Arabes en enfer.
03:14 (rires)
03:16 Pourtant, quel kiff !
03:18 C'est la fameuse phrase de Cioran, "sans l'idée du suicide, je me serais tué depuis toujours".
03:23 Et sans spoiler la pièce, sans l'idée du suicide, vos deux personnages, Sophie et François, ils ne se seraient peut-être jamais autant parlé.
03:28 Et moi j'aurais pas pu faire des blagues sur le suicide, l'enfer, les Arabes et les griades.
03:32 Vous savez quoi ? Je crois que je suis prête pour le Juif Trance de demain.
03:35 (applaudissements)
03:40 - Elle est où ? - À la nouvelle scène.
03:42 - Et quand ? - Prochaine date, le 17 octobre.
03:45 - Bien joué. - Formidable.