Entretiens avec deux participants au SIBCA qui proposent des solutions de projets de construction bas carbone. Woodeum, filiale du Groupe Altarea, spécialisée dans la construction en bois massif, avec une réflexion sur l'isolation et la consommation d'énergies. Puis, OSESAM transformation d’anciens bâtiments pour les faire répondre aux impératifs d'aujourd'hui, avec un focus sur la géothermie.
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00:00 On découvre tout de suite des solutions concrètes, des projets immobiliers qui ont justement
00:09 cette ambition bas carbone avec mes invités Stéphane Pessic.
00:13 Bonjour, bienvenue.
00:14 Vous êtes le cofondateur d'eau sésame, Julien Pemzec.
00:18 Bonjour.
00:19 Bienvenue à vous aussi.
00:20 Vous êtes le directeur général de Wood & Home.
00:22 Je commence avec vous.
00:23 Comme son nom l'indique, votre métier, c'est le bois, c'est ça ? Que des projets avec
00:28 du bois ?
00:29 Oui, c'est le bois, mais c'est surtout l'approche bas carbone.
00:32 Et le bois comme moyen, effectivement, tout simplement parce que le bois qui est un matériau
00:37 naturel arrive à stocker le carbone plutôt que d'en émettre.
00:40 Et donc, on a trouvé que c'était un des leviers les plus puissants pour accélérer
00:44 la décarbonation de nos réalisations.
00:47 L'entreprise existe depuis quand et à quel point elle est, on va dire, boostée par les
00:51 nouvelles réglementations ?
00:52 L'entreprise, elle a 10 ans.
00:53 Il y a 10 ans, vraiment, c'était le far west sur le bas carbone.
00:57 On ne savait même pas le mesurer.
00:58 Donc, on a d'abord appris à mesurer l'empreinte carbone.
01:01 On a fait le constat terrible que l'immobilier était coupable d'un tiers des émissions
01:05 de carbone.
01:06 Et on s'est dit, là, il faut agir.
01:07 Et il y a un levier, effectivement, d'innovation important.
01:10 On s'est attardé sur le bois.
01:13 Et puis après, on a réfléchi aux énergies.
01:15 Et puis après, les énergies, on a réfléchi aussi à tous les matériaux qui constituent
01:18 l'ensemble du bâtiment, les parquets, les portes, les peintures, tout ça dans l'objectif
01:22 de réduire l'empreinte carbone.
01:23 Et la réglementation vous a rattrapé après, c'est ça ?
01:25 La réglementation s'est alignée avec nos ambitions.
01:27 Et ça, c'est parfait pour nous parce qu'effectivement, en 2020, la RO 2020 impose à tous les constructeurs
01:35 la mesure de trois critères.
01:36 L'isolation thermique, le confort d'été et la baisse de l'empreinte carbone.
01:41 Et ça tombe bien parce que tous les bâtiments qu'on était en train d'inventer étaient
01:44 alignés avec ça.
01:45 Stéphane Pesic, vous êtes le cofondateur d'Océsam.
01:47 Vous l'avez créé il y a bientôt trois ans.
01:49 Absolument.
01:50 C'est ça.
01:51 C'est quoi ? Avec quelle idée ? C'est quoi Océsam ?
01:52 Océsam, c'est une petite société à comparer avec Oudéon.
01:56 On est une toute petite structure qui est née il y a trois ans maintenant, c'est ce
02:00 que vous rappeliez, avec l'idée de s'impliquer sur des opérations à taille humaine et des
02:04 opérations sur lesquelles on donnait du sens.
02:06 Je venais d'un grand groupe où il y avait déjà du sens qui était donné, mais on
02:10 avait l'intention de s'inscrire dans une logique de restructuration d'actifs, de laisser
02:14 tomber les opérations neuves et de venir mettre une patte écologique sur nos programmes.
02:19 Donc, avec des programmes d'investissement, c'est ça, dans des programmes de restructuration
02:23 d'immeubles essentiellement aujourd'hui ?
02:25 Absolument.
02:26 Nous sommes un investisseur, un asset manager qui est représentant des intérêts de multifamilies
02:31 office.
02:32 Et à ce titre, les multifamilies office, les familles qui investissent derrière nous sont
02:35 très préoccupées par cette question de plus en plus aujourd'hui.
02:38 Elles ont pris la mesure de la transition énergétique, des efforts qui doivent être
02:43 faits.
02:44 Et en qualité d'investisseur, c'est important de cocher les cases à la fois sur les enjeux
02:49 climatiques, mais aussi de cocher les cases sur les enjeux stratégiques, les enjeux économiques.
02:54 Il y a un bon exemple que vous mettez en avant d'ailleurs à l'occasion de ce deuxième
02:58 CIPCA.
02:59 On est à Paris, on est dans le 11e arrondissement.
03:02 On va parler d'un bâtiment qui a une histoire, c'est l'ancienne manufacture des pianos
03:07 Gavot, c'est ça ? Vous êtes en train d'en faire quoi ?
03:09 C'est vrai que c'est un sujet qui nous a plu puisqu'on est là sur un bâtiment
03:14 historique, fin du 19e siècle, un immeuble sur lequel sortaient quasiment 1500 pianos
03:22 tous les ans, avec un fort cachet industriel.
03:25 Et l'idée c'était d'en faire de cet immeuble un immeuble moderne qui répondait
03:29 aux usages de bureaux, puisqu'on est un immeuble de bureaux, on le maintient en bureau.
03:34 Il y avait cette envie d'offrir des services, des plateaux, un mode de fonctionnement qui
03:42 s'adaptait aux usages des salariés d'aujourd'hui, même si le télétravail, parce que le télétravail
03:46 j'ai envie de dire, fait partie de cette condition qui nous a amené à modifier le
03:52 bâtiment pour en faire un immeuble moderne.
03:54 On va rentrer dans le détail avec vous dans un instant.
03:56 Julien Pemzay, l'une de vos réalisations emblématiques, c'est une tour en structure
04:01 bois à Lyon, je crois.
04:03 Est-ce que vous pouvez nous la décrire déjà ? Quand on dit une tour, elle monte jusqu'où
04:07 ? Elle fait 56 mètres de haut.
04:10 Ça commence à être impressionnant.
04:12 Effectivement, une vraie prouesse.
04:13 C'est la deuxième tour à l'actif de Woodéon.
04:16 La première a été réalisée à Bordeaux, elle s'appelait Hyperion avec Jean-Paul Viguet.
04:20 Effectivement, là à Lyon, dans un grand ensemble bas carbone constitué de bureaux,
04:25 de logements, de commerce et d'activités, on fait cet ouvrage.
04:28 C'est un immeuble de 16 étages dans lequel il y a une cinquantaine de logements, et puis
04:33 du commerce et du bureau au pied du meuble.
04:35 Il y a une vue incroyable.
04:36 J'y étais encore il y a quelques jours quand on est dans les étages supérieurs.
04:39 Il y a une vue panoramique sur Lyon époustouflante.
04:42 Quand vous comparez, on commence par un bilan carbone, et vous avez toujours cette obsession
04:49 en tête d'une certaine façon.
04:50 Si vous comparez ce bâtiment avec une tour classique, c'est quoi le différentiel ?
04:57 C'est simple.
04:58 On a divisé par deux l'empreinte carbone grâce à l'usage du bois.
05:02 Cette tour est constituée de béton de très bas carbone dans les sous-sols, la cage d'escalier
05:08 et la cage d'ascenseur, qui constituent une espèce de premier squelette ou de première
05:13 vertébrale.
05:14 Ensuite, tous les planchers, les murs porteurs de façade sont constitués en bois.
05:19 On l'isole et on la recouvre avec un parement qui va la protéger.
05:24 On fait comme si tout le monde le savait, mais un béton bas carbone, c'est quoi ?
05:29 Il y a en ce moment beaucoup de progrès sur le béton.
05:35 Aujourd'hui, un défaut du béton est d'être assez émetteur.
05:38 Il émet à peu près 350 kg de CO2 par mètre cube, à comparer avec le bois qui lui stocke
05:43 600 kg de CO2 par mètre cube.
05:45 Cela veut dire qu'à chaque fois que vous évitez de couler un mètre cube de béton
05:48 et que vous le remplacez par le bois, vous évitez d'émettre une tonne de CO2.
05:52 Les bétons bas carbone travaillent à réduire cette empreinte carbone et vont tendre vers
05:56 100-150 kg de CO2 à comparer au 350.
06:00 C'est bien parce qu'on a besoin que tous les matériaux fassent cette économie carbone.
06:04 Stéphane Pesic, comme investisseur immobilier, on l'a compris, vous faites des choix environnementaux
06:10 pour les clients que vous représentez.
06:12 Par exemple, on reste dans ce bâtiment, dans le 11e à Paris, la géothermie.
06:16 Quand j'ai préparé l'émission, je me suis dit qu'à Paris, ça doit être compliqué
06:20 parce que c'est déjà un gruyère le sol parisien.
06:22 Comment on creuse ? Comment on fait de la géothermie ?
06:24 Absolument.
06:25 C'est un véritable enjeu.
06:27 C'est tout l'intérêt de pouvoir inscrire la géothermie au programme de son projet
06:33 le plus tôt possible parce que ça nécessite de faire appel à des experts, ça nécessite
06:36 un forage.
06:37 Pour tous ceux qui ne le savent pas, la géothermie, ça consiste à venir chercher les calories
06:43 qui sont produites par la terre.
06:44 On a une température de la terre qui est autour de 14-15 degrés.
06:47 On vient récupérer cette chaleur naturelle.
06:50 Ensuite, on vient l'extraire, la faire passer dans une pompe à chaleur pour la redistribuer
06:56 ensuite dans l'ensemble du bâtiment et on la rejette ensuite quand on est soit en circuit
07:00 fermé ou en circuit ouvert et on la rejette dans la nappe ou alors on la garde dans le
07:05 bâtiment.
07:06 Donc là, il y avait un défi technique d'une certaine façon, technologique ?
07:10 Il y avait un défi technique parce que vous le rappeliez, on est sur Paris, il y a évidemment
07:15 le métro, il y a évidemment toutes les formes de canalisation, il y a les égouts.
07:19 Je dirais que c'est aussi un peu de chance qu'on a eu de pouvoir faire ce forage à
07:25 quasiment 60 mètres de profondeur.
07:26 C'est forcément plus cher quand on fait ce choix ?
07:30 C'est plus cher.
07:31 C'est un choix.
07:32 C'est beaucoup plus cher ? C'est trois fois, trois fois et demi plus
07:35 cher en effet.
07:36 C'est le choix à payer.
07:39 C'est le choix pour vraiment inscrire le bâtiment dans une démarche vertueuse.
07:45 Mais l'avantage de ça, c'est que ça génère aussi des économies.
07:50 J'allais y venir, mais évidemment, on le fait.
07:54 Ça génère des économies.
07:55 Rentrons dans le détail.
07:56 Quelles économies pour ceux qui vont finalement utiliser cet immeuble de bureau ?
08:01 Comme la géothermie n'est pas encore démocratisée, il y a encore très peu de recours à la géothermie
08:06 aujourd'hui dans les bâtiments, notamment dans les bâtiments tertiaires, on estime
08:09 qu'on peut faire entre deux et quatre fois d'économies sur la facture de l'énergie
08:15 et les charges des utilisateurs futurs.
08:17 Je passe tous les jours, Julien Pemzec, en rentrant de mes émissions devant l'un de
08:22 vos chantiers qui est près du périphérique à Paris, je crois que c'est Porte-Brancion.
08:26 Ça a bien poussé pendant l'été.
08:29 J'ai été surpris en rentrant de vacances.
08:32 C'est quoi ? C'est un immeuble de bureau ?
08:33 Comme un champignon.
08:34 Non, ça va être un foyer pour jeunes travailleurs.
08:37 J'adore ce projet parce que là, il y a eu une quête écologique par l'usage du bois.
08:45 C'est un bâtiment qui va déjà atteindre les critères 2028 de l'Aéro 2020, donc
08:49 avec plus de cinq ans d'avance.
08:50 En plus, le bois a été utilisé avec son atout de légèreté.
08:54 Le bois est cinq fois plus léger que le béton.
08:57 Grâce à cette légèreté, on a pu faire un bâtiment de huit niveaux plutôt qu'un
09:01 bâtiment de trois, quatre niveaux.
09:02 On a trouvé de ce fait un équilibre économique pour la ville de Paris qui était vendeuse
09:06 de l'opération.
09:07 On a pu réaliser cette opération.
09:09 Le gros œuvre a démarré au mois de juin.
09:13 Il est terminé aujourd'hui.
09:14 On a monté huit étages en à peine trois mois, au plus le mois d'août.
09:17 Tous les ouvriers ont quand même pris des vacances.
09:19 C'était assez époustouflant comme opération.
09:21 Stéphane Péziche, il y a d'autres projets emblématiques sur lesquels vous travaillez
09:26 déjà ? C'est la grille de lecture, c'est de partir dans le bas carbone ?
09:31 Absolument.
09:32 C'est notre volonté.
09:33 C'est véritablement la stratégie sur laquelle on a décidé de s'inscrire et l'ensemble
09:38 des projets, à chaque fois que ce sera possible.
09:40 Ce qu'on a rappelé tout à l'heure, ce n'est pas une garantie que de pouvoir y avoir
09:44 recours, mais de plus en plus, on peut inscrire nos projets dans cette logique.
09:48 Avec des solutions techniques qui ne sont pas toujours les mêmes, j'imagine ?
09:50 Qui ne sont pas forcément les mêmes.
09:53 On parlait tout à l'heure de géothermie, mais sur notre projet de replay dans le 11e,
09:57 on fait aussi appel au béton très bas carbone qui nous a permis de faire quasiment 40%
10:03 d'économies en matière d'émissions de gaz à effet de serre.
10:07 Merci beaucoup.
10:08 Merci à tous les deux d'être venus nous présenter ces projets et ces solutions concrètes.
10:13 On continue, on va parler d'immobilier d'entreprise tout de suite.