L'édito de Agnès Verdier-Molinié : «Pas assez d'impôts pour les riches : une fausse idée ?»

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Dans son édito du 22/09/2023, Agnès Verdier-Molinié revient sur le fait que les personnes considérées comme riches ne payent pas assez d'impôts selon une grande partie des Français.

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Transcript
00:00 C'est vrai, ces derniers temps, on nous a énormément culpabilisés.
00:04 Soi-disant, les 2% les plus riches,
00:07 dans les 1% les plus riches, ils n'auraient payé que 2% d'impôts.
00:11 Ils réussiraient finalement à échapper à l'impôt.
00:14 On a aussi le livre de Thomas Piketty qui est sorti dernièrement,
00:17 qui dit que notre système n'est pas assez redistributif,
00:20 qu'il faudrait qu'il soit plus redistributif.
00:22 En fait, on n'arrête pas d'accuser notre modèle économique et social
00:25 qui finalement permettrait aux riches de ne pas être assez solidaires avec les pauvres.
00:29 Alors là, il y a une note de l'INSEE qui est incroyable,
00:32 qui dit que c'est totalement l'inverse.
00:35 Cette note de l'INSEE, elle travaille sur la question de la redistribution élargie
00:39 et elle montre qu'en réalité, il y a vraiment une réduction des écarts
00:44 entre les pauvres et les riches grâce à ce système redistributif.
00:48 Avant transfert, les 10% des ménages les plus aisés
00:52 gagnent 18 fois plus que les moins aisés, que les plus pauvres.
00:58 Et après transfert et après service public, il n'y a plus qu'un écart de 3,
01:02 c'est-à-dire qu'ils ne gagnent plus que 3 fois plus que ceux qui sont les plus pauvres.
01:08 C'est une réduction énorme des écarts, ça !
01:11 Mais c'est absolument gigantesque.
01:13 C'est gigantesque parce que l'INSEE inclut en fait tous les transferts
01:16 et tous les services publics dans ses calculs.
01:20 Alors les transferts monétaires, Romain, c'est gigantesque, c'est 520 milliards d'euros.
01:25 Et les transferts monétaires, c'est quoi ? C'est les allocations, c'est le chômage, c'est les retraites, etc.
01:29 Et les transferts non monétaires, ça c'est l'éducation, c'est l'hôpital.
01:33 Et là, c'est 610 milliards d'euros.
01:35 Alors pour financer tout ça, qui est-ce qui finance ?
01:39 En réalité, ce sont les plus aisés.
01:41 Et là, quand on a regardé tous les chiffres avec la Fondation IFREP,
01:43 on voit que les 10%, ils payent 34% de la totalité des prélèvements obligatoires.
01:50 C'est-à-dire une énorme masse.
01:52 Et alors si on regarde les 5% les plus riches et qui gagnent le plus,
01:57 ils payent 20% de l'ensemble des prélèvements obligatoires hors TVA payés en France.
02:05 Donc...
02:06 Oui, c'est très clair.
02:07 Ça veut dire que les plus aisés payent une grande proportion de l'impôt sur le revenu.
02:11 Oui, mais de la totalité des impôts,
02:13 parce que là, c'est sur la totalité des prélèvements obligatoires hors TVA.
02:17 Et alors là, si on essaie de calculer un taux d'imposition,
02:20 on se rappelle cette fameuse note qui disait "les plus riches peuvent payer que 2% d'impôt".
02:24 Et bien là, sur les 5% les plus aisés,
02:27 par rapport à leur revenu initial avant transfert,
02:31 c'est plus de 50% par rapport à leur revenu initial.
02:34 Et si on compare par rapport à leur revenu disponible à la fin,
02:37 c'est l'équivalent de 90% de leur revenu disponible.
02:40 C'est presque incroyable.
02:42 On est vraiment très loin du paradis fiscal dont on nous parle pour les plus riches.
02:48 Alors, les propositions de certains députés, députés européens,
02:52 pour taxer plus les riches avec encore plus de progressivité de l'impôt,
02:56 ça aboutirait à un niveau de taxation à 100% si je vous suis ?
02:59 Par rapport au revenu disponible, selon nos calculs,
03:02 quand on prend toutes les propositions qui circulent en ce moment,
03:05 on serait à plus de 100%, on serait à 110% du revenu disponible in fine.
03:10 Ce serait totalement une folie et ce serait vraiment carrément l'idée de dire "bah partez".
03:15 Parce que quand vous commencez à être dans ces niveaux d'imposition,
03:20 ça devient absolument rédhibitoire et confiscatoire.
03:24 Donc là, je pense que ça remet un peu les choses au clair, à leur place.
03:31 Et finalement, on se dit "bah oui, c'est bien que l'INSEE,
03:34 de temps en temps, nous fasse ce genre d'études pour nous dire
03:36 "bah oui, le système est hyper redistributif, on est hyper taxé".
03:40 On le savait déjà, mais ça fait du bien de l'entendre.
03:44 [Musique]
03:48 [SILENCE]

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