Mardi 5 septembre 2023, SMART IMPACT reçoit Yasmina Auburtin (Consultante nouveaux récits, Imagine 2050) et Pierre Gilbert (Co-dirigeant, Sator)
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00:05 -Le débat de ce Smart Impact,
00:07 je vous présente mes invités, Yasmina Auburtin.
00:10 Bonjour. -Bonjour.
00:11 -Vous êtes consultante Nouveaux Récits
00:14 chez Imagine 2050.
00:15 Pierre Gilbert, bonjour. -Bonjour.
00:17 -Cofondateur de Sator.
00:19 Il y a une expression que j'emploie quasiment tous les jours,
00:22 c'est "transformation environnementale et sociétale".
00:25 Quand je dis ça, c'est pas très sexy.
00:27 Le métier, c'est de rendre cette transformation
00:30 plus désirable. -Exactement.
00:32 Moi, c'est mon...
00:33 mon envie première au quotidien,
00:37 de retourner dans ces métiers que j'ai pratiqués
00:39 par le passé. J'ai beaucoup travaillé
00:42 dans les médias traditionnels, que ce soit la presse,
00:45 les sites Internet et beaucoup de télévision, justement.
00:48 Puis, après, de la publicité.
00:50 Je sais le pouvoir de ces métiers
00:52 pour, justement,
00:55 infuser nos modèles de société.
00:58 Ca infuse nos désirs, nos envies,
01:01 les modèles, les rôles modèles auxquels on a envie de ressembler.
01:05 Et on est vecteur de transformation.
01:08 -Avec une responsabilité importante.
01:11 C'est quoi, Imagine 2050 ?
01:12 -Alors, Imagine 2050, c'est un collectif d'intervenants
01:17 qui viennent de ces métiers-là, justement,
01:19 et qui viennent former dans les médias,
01:23 dans les groupes de publicité.
01:24 Donc, on travaille avec TF1,
01:28 à France Télé, où on a accompagné des récits
01:31 tels que "Plus belle la vie", par exemple.
01:33 On est allés infuser ces nouveaux récits,
01:35 "Nouvelle manière d'être au monde",
01:37 et "Face à l'environnement", aussi,
01:40 avec les scénaristes de "Plus belle la vie".
01:42 Des éditeurs. On a travaillé avec Gléna
01:45 sur une nouvelle série de romans jeunesse
01:48 qui voulaient adresser ces sujets-là.
01:51 Voilà. Groupe publiciste, bientôt, Avas.
01:55 -On en reparlera du rôle de la pub,
01:57 car c'est une question centrale.
01:59 On va parler notamment de formation dans ce débat.
02:03 Pierre Gilbert, c'est la vocation de Sator.
02:05 Pourquoi vous l'avez créée ?
02:07 -Absolument. Sator, c'est la première plateforme
02:09 de grande masterclass francophone dédiée aux transitions.
02:12 On va chercher les plus avant-gardistes
02:15 et on construit avec eux un cours qui fait une dizaine d'heures
02:18 en épisode d'une demi-heure.
02:20 C'est comme si on Netflixais des cours du Collège de France,
02:24 mais sur des enjeux qui sont ou directement liés aux transitions
02:28 ou qui sont des outils au service de ces transitions.
02:31 -Qui faut former ?
02:32 Vous parliez... C'est prioritairement
02:34 les décideurs, les chefs d'entreprise,
02:37 les cadres dirigeants et dirigeantes.
02:40 Qui faut former ?
02:41 -C'est tout à la fois. Il faut tirer tout azimut.
02:44 On n'a plus trop le temps.
02:46 On a une interface grand public
02:48 où chacun peut acheter un cours Sator.
02:50 On forme les entreprises, on est Calliopis.
02:52 Les élus, les fonctionnaires...
02:54 -Les élus, oui. J'ai oublié les élus dans ma liste.
02:57 Ils sont importants.
02:58 -Tout le monde en parallèle.
03:00 C'est l'intérêt de nos formats, c'est qu'on peut se caler.
03:03 -On parlait d'écologie culturelle avec Isabel Giordano.
03:06 C'est un concept que vous avez forgé avec d'autres.
03:09 Ca veut dire quoi, exactement, pour vous ?
03:12 C'est quoi, l'écologie culturelle ?
03:14 -Par définition, chacun peut y transposer ce qu'il veut.
03:17 C'est l'objectif.
03:18 On a écrit ce manifeste de l'écologie culturelle
03:21 avec Patrick Scheder et Nicolas Escaq
03:23 pour populariser ce qui, nous, dans notre ADN culturel,
03:26 en tant que Français, était déjà écolo.
03:29 L'écologie n'a pas 30 ans, elle a plusieurs siècles en France.
03:32 On a des grands auteurs comme Victor Hugo,
03:34 George Sand, qui étaient déjà écolos.
03:37 Le pire ennemi du changement, c'est le cerveau humain.
03:40 On a tout un tas de biais qui nous encouragent à ne pas changer.
03:43 Pour casser ces biais-là, on s'est dit
03:46 qu'on allait expliquer aux gens que l'écologie,
03:48 c'est pas quelque chose de nouveau.
03:50 On n'a pas à en avoir peur.
03:52 C'est quelque chose qui est là depuis des siècles.
03:55 Et puis, oui, moi, mon apport en tant que prospectiviste
03:59 en matière de risque climatique dans ce collectif,
04:02 c'est aussi d'aller convoquer un peu la science,
04:04 notamment les neurosciences et la psychologie,
04:07 pour détecter les biais qui empêchent la transition écologique.
04:11 -Quels outils vous utilisez, vous,
04:13 pour... Je reste sur cet enjeu qui va avec, évidemment,
04:17 de formation pour, finalement, diffuser ces impératifs,
04:21 parce qu'on en est là, d'écologie culturelle,
04:24 à vos interlocuteurs, que ce soit des chaînes,
04:27 des patronnes, des patrons...
04:29 -Ces grands leaders des industries culturelles et créatives
04:33 qui, justement, alimentent ces récits,
04:35 qui font nos imaginaires,
04:37 ils ont besoin de quoi ? Ils ont besoin de plusieurs choses.
04:40 Ils ont besoin de comprendre les enjeux, déjà.
04:43 -Il y a un langage commun, en quelque sorte.
04:45 -Il y a la connaissance scientifique,
04:47 tout ce qu'on n'a pas appris à l'école,
04:50 au moment où on a été journaliste, producteur,
04:52 comme moi, à une certaine époque.
04:54 Il y a vraiment un besoin de connaissance.
04:57 Au-delà de la conscientisation que les choses vont mal,
05:00 que ce soit au niveau de la planète ou de la justice sociale,
05:04 il y a un besoin de vraie connaissance.
05:06 Il faut apporter cette connaissance-là,
05:08 et ça sert d'avoir été journaliste par le passé,
05:11 on peut les aider aussi,
05:14 de l'inspiration, beaucoup d'inspiration.
05:17 Ils ont besoin de belles histoires, qu'on leur raconte
05:20 ce mode de société désirable,
05:22 qui est à la fois respectueux des limites planétaires
05:25 et de la dignité humaine.
05:27 On pense dans la théorie du donut de Kate Trayworth.
05:30 Il y a une vraie carence à imaginer comment ça pourrait être bien,
05:34 comment ça pourrait bien se passer.
05:37 Là, on met de nouvelles lunettes
05:39 pour ne pas aller chercher à imaginer
05:41 des utopies bisounours qui sortent de nulle part.
05:46 On s'appuie sur des expériences qui marchent,
05:49 qui existent déjà, et on leur donne la preuve
05:52 qu'ils peuvent l'incrémenter dans leur métier
05:54 en leur donnant de l'inspiration.
05:56 Quelle campagne de pub, quel film a réussi
06:00 à instiller tous ces éléments
06:04 qui vont rééduquer notre regard
06:07 sur une société qui pourrait être très différente
06:10 de celle dans laquelle on vit ?
06:12 Ils ont besoin qu'on leur source des outils qui existent
06:15 et qui vont leur permettre d'être agissant
06:18 tout en apprenant directement au sortir de nos formations.
06:22 Vous parliez, Pierre Gilbert, des intervenants
06:26 dans ces conférences, ces sessions de formation.
06:29 Vous disiez "avant-gardistes".
06:31 C'est intéressant. Ils peuvent être pionniers ou pionnières
06:35 avec le risque que ça suppose.
06:37 L'une des difficultés de cette transformation
06:40 c'est de prendre la bonne route,
06:42 de choisir des solutions qui sont les bonnes solutions.
06:45 Parfois, on peut se tromper.
06:47 Vous êtes sûrs que vos avant-gardistes sont les bons ?
06:50 On est sûrs de rien. C'est un processus alchimique.
06:53 Ça va du général Vincent Desportes,
06:55 ancien directeur de l'école de guerre,
06:58 sur l'art de la stratégie,
06:59 qui est le premier grand théoricien et praticien
07:02 à l'avoir apporté dans l'entreprise.
07:04 On a 9h30 avec lui là-dessus, où il file tous les outils,
07:07 jusqu'à...
07:09 On a le responsable du pôle énergie de Carbone 4,
07:11 qui nous a fait un cours sur la transition énergétique,
07:14 qui a une vision d'ingénieur,
07:16 mais très structurée, très claire.
07:19 On alterne un peu ses profils.
07:21 On va avoir un cours avec l'économiste Gal Girod.
07:24 Après, est-ce que leur vision est la bonne ?
07:30 On ne sait pas. Mais comme le disait Yasmina,
07:33 il faut essayer d'inspirer,
07:34 parce que c'est comme ça qu'on met en branle les émotions.
07:38 Sur le rôle de la publicité,
07:39 je voudrais que l'on se concentre là-dessus.
07:42 La pub, si on fait le constat,
07:44 elle a accompagné depuis des décennies
07:46 le développement de la société de consommation,
07:49 parfois même de la surconsommation
07:51 de tout ce qu'on essaye de mettre de côté,
07:54 l'économie linéaire, etc.
07:58 Est-ce que c'est la mieux placée pour prendre le virage ?
08:02 - Tout le monde n'est pas convaincu de ça,
08:04 mais je suis convaincue qu'ils sont très bien placés
08:07 pour avoir autant travaillé dans les médias que la publicité.
08:10 Il y a une vraie prise de conscience d'avoir été
08:13 le bras armé de l'imaginaire qu'on nomme le business as usual,
08:19 celui qui est dans le déni des enjeux,
08:23 des limites planétaires notamment.
08:26 Ils sont aujourd'hui plus encore le bras armé
08:29 d'un imaginaire qui est dominant et peut-être plus dangereux.
08:32 Nous, on pense qu'il est plus dangereux,
08:35 c'est l'imaginaire technosolutionniste
08:37 qui ne nie pas la réalité du mur.
08:39 - Le cerveau humain trouvera la solution.
08:42 - Oui, on est le plus fort.
08:43 Mais voilà...
08:45 - Pardon, mais là, ça dépend des donneurs d'ordres.
08:48 Il y a aussi des agences de pub
08:49 qui sont derrière des campagnes
08:51 qualifiées de "greenwashing".
08:53 - Ils sont dans une dissonance,
08:56 comme nous le sommes tous,
08:58 à des niveaux très différents.
09:00 Et ce qui va manquer aujourd'hui,
09:03 c'est d'être accompagnée, justement, peut-être,
09:07 de la transformation et de beaucoup d'agences y travaillent
09:10 pour faire en sorte que la publicité
09:13 vienne accompagner un nouvel imaginaire,
09:15 ce nouvel imaginaire de sobriété,
09:17 que j'appelle de plus en plus souvent
09:20 un imaginaire de nouvelles abondances,
09:22 parce qu'il faut que ce soit sexy.
09:24 Le problème de l'imaginaire sobre,
09:26 c'est qu'on entend tout de suite ce dont on va être privé.
09:29 - Oui, on a une image de ceinture qui se serre.
09:32 - Alors qu'il va falloir mettre la lumière
09:34 sur tout ce qu'on a à gagner,
09:36 parce qu'on a beaucoup à gagner dans ce nouvel imaginaire.
09:39 Et là, les créatifs ont besoin d'énormément d'inspiration
09:43 pour faire aussi accompagner cette transition
09:45 des entreprises pour lesquelles ils travaillent,
09:48 où ils sont souvent, aussi,
09:50 à travers le planning stratégique,
09:52 promoteurs, aussi, de l'exploration
09:56 d'autres réalités qui sont, de toute façon,
09:59 aujourd'hui nécessaires.
10:00 La prise de conscience, elle est vraiment là.
10:03 - Pierre Gilbert, c'est... Je parlais des donneurs d'ordre.
10:06 Enfin, voilà, ils ne sont pas tous
10:09 au même niveau de prise de conscience, déjà,
10:12 c'est ce qu'on disait.
10:13 Pour certains, ça veut dire changer
10:15 le modèle économique de leur entreprise.
10:18 Là aussi, il faut trouver...
10:20 Comment rendre un tel message non anxiogène,
10:24 déjà pour ses salariés,
10:25 et plus généralement, pour ses clients, pour la société ?
10:28 - Alors, moi, je crois beaucoup
10:30 au fait de passer par la psychologie individuelle
10:33 et poser la question à ces décideurs-là
10:35 est-ce qu'eux-mêmes sont heureux en ayant un peu de conscience
10:39 du fait que parfois, leur entreprise
10:41 ne va pas dans la bonne direction,
10:43 par rapport au futur de leurs enfants.
10:45 Souvent, ces gens se racontent un propre récit,
10:48 sont dans le déni, mais c'est un besoin vital,
10:50 sinon, on craque.
10:51 Mais se poser la question du bonheur,
10:54 il y a beaucoup de dirigeants d'entreprises
10:56 qui ont fait des choix de réorientation
10:58 vers des business models
11:00 beaucoup plus régénératifs ou soutenants,
11:02 mais authentiquement,
11:03 et qui sont beaucoup plus heureux,
11:05 qui sont passés d'une logique de chaîne de valeur
11:08 à une logique de cascade de valeur
11:10 qui font moins de croissance, mais plus pérenne,
11:13 plus durable, et qui produisent plus de bonheur.
11:15 - Merci beaucoup, merci à tous les deux
11:18 d'être venus nous parler de cette écologie culturelle.
11:21 On vous retrouvera dans la plénière,
11:23 de Pro Durable,
11:24 c'est le 12 et 13 septembre prochain,
11:26 événement majeur de l'économie responsable.
11:30 C'est au Palais des Congrès, à Paris.
11:32 C'est notre rubrique "Start-up".
11:34 Tout de suite, à Vélocargo.