Aurélien Rousseau, ministre de la Santé et de la Prévention, était vendredi 1er septembre le Grand témoin de la matinale de franceinfo. il répondait aux questions de Jean-Rémi Baudot.
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00:00 - Bonjour Aurélien Rousseau, vous êtes ministre de la Santé depuis bientôt deux mois et hier vous étiez avec la première ministre Elisabeth Borne
00:06 qui a fait un certain nombre d'annonces. Alors on va parler de l'hôpital, des revalorisations des soignants,
00:10 mais d'abord parlons de certaines annonces finalement très concrètes pour les Français.
00:14 Il sera bientôt possible d'aller chez le pharmacien pour obtenir des antibiotiques pour certaines maladies, pathologies, angines, cystites.
00:22 Quelle est la logique ?
00:23 - La logique c'est de faciliter l'accès des Français sur des pathologies assez classiques
00:28 que souvent d'ailleurs ils reconnaissent et on a en France un réseau de professionnels de santé exceptionnel
00:35 qui est le réseau officinal, en plus évidemment des médecins.
00:38 Et donc ils vont pouvoir aller, chacun de nos concitoyens, à la pharmacie.
00:44 - Donc quand j'ai mal à la gorge, je vais à la pharmacie.
00:46 Comment le pharmacien il va savoir si mon angine est bactérienne ou virale ?
00:50 On sait que c'est quand même la clé sur les antibios.
00:51 - Absolument et j'allais dire c'est vrai sur l'angine, c'est vrai sur la cystite aussi.
00:55 Le pharmacien d'abord il faut qu'il soit intégré, si je puis dire, dans une équipe avec un vrai protocole qui a été validé
01:03 parce que évidemment il faut qu'il traite les cas qui sont les plus simples.
01:08 Donc il fait un test d'orientation diagnostique rapide, un trod.
01:13 Il verra à ce moment-là si c'est bactérien ou si c'est un virus et il peut prescrire l'antibio.
01:19 Sur la cystite c'est quelque chose de très important pour nos concitoyens, puisque c'est quelque chose qui est vécu régulièrement.
01:29 Souvent ça se passe le week-end, c'est extrêmement douloureux et il y a ce côté rageant quelquefois.
01:35 Vous savez quel médoc il faudrait prendre, le pharmacien le sait aussi, mais vous n'avez pas l'ordonnance.
01:41 Mais par contre il est essentiel de le dire, tout ça c'est dans le cas d'un partage de tâches sous la supervision d'un médecin.
01:47 Et donc le pharmacien va d'abord vous poser des questions pour éliminer le risque que ce ne soit pas simplement une cystite,
01:54 mais éventuellement quelque chose de plus grave comme une piélone effrite,
01:57 pour être sûr de ne pas passer à côté de quelque chose de grave.
02:00 Et là il vous orienterait immédiatement vers un médecin.
02:03 Juste un mot, c'est comme la vaccination pour les pharmaciens, ça paraît presque évident.
02:06 Et avant ça bloquait, qu'est-ce qui s'est passé ? Les médecins ont lâché sur ces questions-là ?
02:09 Qu'est-ce qu'ils ont obtenu en échange ?
02:11 Je ne pense pas que c'est une question de rapport de force, je pense que c'est une question de progression.
02:15 C'est souvent une question de rapport de force avec les médecins ?
02:16 Oui, ça l'est avec beaucoup de catégories de la population.
02:21 Là, la coopération progresse partout.
02:23 Il y a presque 60% du territoire et de la population plutôt qui est couverte par ces dynamiques de coopération.
02:29 Et face aussi à la pression, aux difficultés que l'on traverse, il y a ce côté "on se met ensemble".
02:36 Mais ce n'est pas pour se substituer aux médecins, c'est du partage de tâches au bénéfice des Français.
02:42 Il y a un chiffre qui a été annoncé hier, plus d'un milliard d'euros, 1,1 milliard d'euros,
02:46 enveloppe débloquée face à la crise de l'hôpital public,
02:49 une hausse pour les soignants qui travaillent les nuits et le dimanche notamment.
02:51 Est-ce que vous pouvez nous donner les grandes lignes des annonces d'hier soir ?
02:55 Oui, d'abord c'est un sujet qui a été pris l'an dernier, l'été dernier.
02:59 Je saluais l'action de mon prédécesseur François Braune, moi je veux le dire, il avait mis ce sujet sur la table.
03:05 Mais lui il avait rajouté 1 euro par heure, notamment par exemple la nuit.
03:08 Ça, ça n'était manifestement pas suffisant.
03:09 Mais c'était des mesures d'urgence qu'on a reconduites et le président de la République l'avait dit lors de ses voeux aux soignants,
03:15 qu'il voulait qu'on les pérennise.
03:17 Et donc on a travaillé, moi c'est aussi pour ça que j'ai mis un peu de temps à proposer au président et à la Première Ministre
03:22 ces annonces qu'Elisabeth Borne a faites hier.
03:24 Je voulais qu'elles soient simples, lisibles et que tout le monde puisse se projeter.
03:30 Donc c'est simple, la nuit pour les paramédicaux, et j'assume dire que c'était notre priorité,
03:35 donc notamment les infirmières, les aides-soignantes, c'est +25% par rapport à ce qu'elle touchait précédemment.
03:43 Ça veut dire, pourquoi un pourcentage plutôt qu'un chiffre ?
03:46 Ça veut dire qu'en début de carrière, vous aurez 150 euros de plus par mois sur votre feuille de paye,
03:53 c'est 300 euros en milieu de carrière, c'est plus de 400 en fin de carrière.
03:59 Or le travail de nuit, ça pèse plus sur vous quand votre organisme a déjà...
04:03 C'est une manière de reconnaître une forme de pénibilité, +25% ?
04:06 C'est une manière de reconnaître, oui, une suggestion extrêmement lourde,
04:10 qui dans toute la société est difficile à tenir, mais l'hôpital, sa vie, 24h/24, c'était indispensable de reconnaître.
04:17 C'est une mesure parmi d'autres pour l'attractivité et la fidélisation, c'est une mesure importante.
04:23 La deuxième, c'est pour les personnels qui travaillent le dimanche, une revalorisation de 20% de leur prime du dimanche.
04:31 Et puis pour les personnels médicaux, il y a le maintien et la pérennisation de la mesure
04:36 qui avait été mise en place à l'été dernier sur l'augmentation de 50% de la rémunération des gardes.
04:43 Et puis un sujet un peu plus technique, les astreintes du week-end vont être payées au même tarif que dans le privé.
04:51 C'est très important parce que derrière, ça nous permet de travailler à la permanence des soins d'établissement de santé.
04:56 Alors pour autant, les salaires notamment des infirmiers et des infirmières ne changent pas.
04:59 Je voudrais vous faire écouter Thierry Amouroux, il est porte-parole du Syndicat national des personnels infirmiers.
05:03 Le vrai problème que l'on a aujourd'hui, c'est pas une petite prime par-ci par-là.
05:08 C'est qu'il y a un vrai problème de salaire.
05:12 Vous pouvez être payé à hauteur de vos compétences et de vos responsabilités,
05:16 or l'infirmière en France est sous-payée par rapport aux autres pays.
05:20 Si vous allez en Belgique, c'est +30%, si vous allez en Suisse, le salaire infirmier est doublé.
05:26 Donc avec ces annonces, est-ce que vous, finalement, vous répondez ?
05:28 Vous avez l'impression de répondre à la préoccupation des infirmiers du monde médical ?
05:31 D'abord, premièrement, ce ne sont pas des mesurettes et ce n'est pas comme si ça commençait hier soir.
05:38 Le Ségur de la santé, c'était +183€ sur la feuille de paye d'une infirmière.
05:43 Je crois que personne ne peut dire que c'est rien.
05:45 Et d'ailleurs, quand on discute avec les personnels de santé, ils le reconnaissent.
05:48 Les comparaisons internationales, elles sont intéressantes.
05:51 Il faut aussi les renvoyer à la durée de travail.
05:55 Je ne dis pas que ça répond à tout, parce que la suggestion, ce que ça pèse de travailler la nuit,
06:03 mais ce que ça pèse de travailler à l'hôpital, la difficulté...
06:05 - Mais est-ce que ça peut rendre le métier plus attractif ?
06:06 - Ça peut rendre le métier plus attractif, d'une part.
06:09 C'est d'abord la reconnaissance d'une suggestion.
06:11 Et ça va dans un cadre global.
06:13 On va travailler sur les formations, on va travailler sur l'échelle du service
06:16 pour redonner ce sens de l'équipe.
06:19 Mais hier, on était jusqu'à tard, hier soir, même au début de la nuit,
06:23 avec la Première Ministre à l'hôpital de Rouen.
06:25 Moi, j'étais la semaine dernière à l'hôpital d'Alaise, jusqu'à 2h30 du matin.
06:28 Ce qu'on entend, c'est que cette reconnaissance financière, elle, était indispensable.
06:33 Mais par ailleurs, il faut du sens.
06:35 Il faut retrouver le temps du soin.
06:37 Et c'est ça que nous mettons en œuvre à toutes les échelles.
06:40 - Alors, je rappelle quand même le coût. 1,1 milliard.
06:42 Quel financement ? Comment est-ce que vous financez ces revalorisations ?
06:44 - C'est un choix, mais on aura l'occasion sans doute d'en reparler
06:48 au moment du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale.
06:50 - Ça sera sur le prochain budget de la Sécu ?
06:51 - Oui, absolument. Ça sera sur le prochain budget de la Sécu.
06:54 C'est une décision qui est prise au niveau national.
06:57 Et oui, il y a des priorités à assumer.
06:59 Moi, j'assume que la rémunération des personnels non médicaux la nuit
07:03 était aujourd'hui une des priorités les plus essentielles à laquelle répondre.
07:06 - Et est-ce que vous assumez de demander des efforts aux patients ?
07:08 On parle désormais d'une hausse des franchises médicales.
07:10 Vous assumez de demander aux patients de venir combler une partie du déficit de la Sécu ?
07:14 - J'assume de dire que la Sécu, c'est les cotisations des salariés, des employeurs,
07:19 enfin de ceux qui travaillent, et des employeurs, et qu'il faut qu'on soit transparent.
07:23 Les arrêts maladie augmentent très vite.
07:26 Il n'y a pas de stigmatisation. C'est la vie, c'est la réalité de la société.
07:30 La dépense de vie augmente très vite.
07:31 Et par ailleurs, on veut que l'hôpital,
07:33 on veut que les médecins et les professionnels libéraux soient mieux rémunérés aussi.
07:37 Donc, on met sur la table.
07:38 Et moi, je dis aujourd'hui, je pense que c'était prioritaire de faire ça.
07:42 Et on aura la discussion aussi sur des mesures d'économie
07:44 dans d'autres champs du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale.