Marc La Mola : «La politique managériale au sein de la police est abjecte et inhumaine»

  • l’année dernière
L’ancien policier, Marc La Mola, revient sur le suicide d’un policier qui travaillait sur les fêtes de Bayonne : «La politique managériale au sein de la police est abjecte et inhumaine».

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Transcription
00:00 J'ai appris avec effroi le suicide de ce collègue ce matin, 55 ans, abominable, abominable, j'en ai ras le bol.
00:08 Je vais encore pousser un coup de gueule, décidément, on va dire, là bon là il casse pied,
00:11 mais j'en ai ras le bol d'entendre ça en permanence, une cinquantaine de mes collègues se foutent en l'air,
00:17 tous les ans, sans que quiconque, et notamment les autorités et les ministres qui se sont succédés,
00:23 ne puissent prendre des décisions et des actes, des actes, plus que des paroles, je vous l'ai dit hier,
00:27 dans mon interview, j'en ai assez des paroles, des palabres, sans cesse, et des comités théodules,
00:35 je reprends cette expression, qui ne m'appartient pas, qui est du général de Gaulle,
00:38 où on se réunit pour parler, il n'y a jamais un acte qui est fait, qui est mis en place pour entraîner,
00:47 enfin, pardon, je perds mes mots, pour enrayer ce phénomène de suicide.
00:53 C'est abominable, c'est affreux, un père de famille certainement, 50-50, et on va entendre cette phrase
00:59 qui est récurrente, et qui vient des autorités et de la hiérarchie, où on va dire,
01:03 le fonctionnaire de police était soumis à des pressions familiales,
01:06 sans prendre en considération évidemment les conditions de travail, la considération,
01:11 et l'ensemble des choses que nous avons écrites dans ce livre, nous avons la prétention,
01:15 ma femme est à mes côtés, Laure et moi, donc qui avons écrit ce livre-là,
01:19 nous avons la prétention de dire que ce livre est un catalogue exhaustif des mots MAUX
01:25 qui poussent les policiers à se foutre en l'air, et nous avons la prétention encore,
01:29 puisque le livre est scindé en deux, dans la deuxième partie il y a des propositions,
01:33 en l'occurrence, vous savez, parce que vous en avez parlé tout à l'heure,
01:35 des propositions, nous en avons une qui est concrète, ce fonctionnaire-là avait 55 ans,
01:40 si on lui avait permis, comme aux gendarmes, alors évidemment aujourd'hui parler de retraite anticipée,
01:45 c'est un problème affreux, néanmoins vous avez les collègues gendarmes qui eux,
01:49 peuvent bénéficier d'une retraite anticipée après 17 années de service,
01:53 les policiers ne peuvent pas en bénéficier, et au bout de 17 ans,
01:56 monsieur le député, ancien collègue le disait tout à l'heure,
01:59 le policier est une cocotte minute, je reprends sa métaphore,
02:02 moi je rajouterais que la cocotte minute n'a pas de soupape,
02:05 donc ça emmagasine en permanence les pressions, la pression, la pression,
02:09 et on en arrive malheureusement à ce geste ultime.
02:11 Deux questions, que faudrait-il faire, quelles sont vos propositions pour enrayer justement ce phénomène,
02:16 et évidemment, vous l'avez déjà évoqué, on ne peut pas ne pas penser au contexte
02:20 dans lequel s'inscrit ce suicide de policiers, il y en a 50 vous le disiez quasiment par an,
02:26 mais ça s'inscrit dans un contexte où on est dans une semaine de fronte de la police
02:29 après le placement en détention provisoire de deux des collègues de policiers.
02:34 Absolument, alors les mesures, je vous le disais, on les a écrites,
02:40 et puis il faut réagir très vite, une fois de plus Gauthier,
02:48 excusez-moi je suis un homme, je m'emporte, j'ai oublié votre question, excusez-moi.
02:52 Mais je voulais dire que ça s'inscrit dans un contexte particulier ce suicide de CRS,
02:57 ça s'inscrit après une semaine de fronde avec un face-à-face entre policiers et magistrats quelque part,
03:03 entre Gérald Darmanin qui défend les flics si j'ose dire,
03:07 et Eric Dupond-Moretti qui défend les magistrats,
03:09 donc on ne peut pas ne pas penser au contexte dans lequel arrive ce suicide de CRS.
03:14 Absolument, le contexte évidemment on ne peut pas l'occulter,
03:18 et dans le contexte que vous évoquiez notamment ce bras de fer entre la justice et la police,
03:22 mais moi je vais beaucoup plus loin Gauthier, si je peux me permettre,
03:25 on occulte tout le temps la hiérarchie, on ne parle pas de la hiérarchie.
03:28 Je vous l'ai déjà dit, je l'ai dit à deux reprises, je vais le dire une troisième fois,
03:31 la politique managériale au sein de la police est abjecte et inhumaine,
03:36 je le confirme, je le répète, il faut très vite enrayer cela,
03:40 aller totalement à l'inverse de ce qui se pratique.
03:44 On revient sur, puisque vous m'ouvrez la porte sur ce phénomène-là,
03:48 sur le phénomène des policiers marseillais,
03:50 moi je vais vous dire quelque chose, je vais vous faire une confidence Gauthier,
03:52 dans ces trois nuits d'émeute, on a dit aux policiers,
03:55 parce qu'on l'a dit officiellement sur les ondes,
03:57 on a dit, c'est-à-dire à la radio, on a dit "pas de prisonniers",
04:00 alors pas de prisonniers, moi je vais vous dire ce que c'est,
04:02 c'est-à-dire que la hiérarchie a donné comme instruction à mes collègues
04:05 de taper mais de ne pas interpeller.
04:07 Où sont les hiérarches aujourd'hui ?
04:09 Où est la hiérarchie ?
04:10 Est-ce qu'elle a été placée en garde à vue ?
04:11 Est-ce qu'elle a été mise en prison ?
04:13 Non, c'est le petit personnel,
04:14 ce sont mes collègues qui eux avaient la charge de rétablir l'ordre,
04:18 qui aujourd'hui sont emprisonnés, sont incarcérés
04:21 et sont mis au banc une fois de plus de la société et de la police.
04:26 La hiérarchie n'a pas de pas.
04:28 – Il faut que je fasse une précision sur ce que vous venez de dire,
04:29 ces informations, nous on ne les a pas,
04:31 elles n'engagent que vous et c'est vous qui faites ce témoignage,
04:35 nous on n'a pas les informations que vous relayez.
04:38 [Musique]
04:42 [SILENCE]

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