Affaire n° 2023-1056-QPC

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Date de l'audience : 27/06/2023

M. Abdelhalim R. [Durée de la détention provisoire d’un accusé en cas de renvoi d’audience par la cour d’assises]

Lien vers la décision : https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2023/20231056QPC.htm

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00:00 ...
00:23 -Bonjour. L'audience est ouverte.
00:26 Nous avons à notre ordre du jour 2 questions prioritaires
00:30 de constitutionnalité.
00:32 Nous allons commencer avec la question n°2023-1056.
00:40 Elle porte sur certaines dispositions
00:42 des articles 180 et 343 du Code de procédure pénale.
00:48 Mme la greffière, dites-nous où nous en sommes.
00:51 -Merci, M. le Président.
00:54 Le Conseil constitutionnel a été saisi le 12 mai 2023
00:57 par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation
00:59 d'une question prioritaire de constitutionnalité
01:02 posée par M. Abdelhael Lim Roubache,
01:05 portant sur la conformité aux droits et libertés
01:07 que la Constitution garantit des 8e et 9e alinéas
01:10 de l'article 181 du Code de procédure pénale
01:13 et de l'article 343 du même Code.
01:16 Cette question relative à la durée de la détention provisoire
01:19 d'un accusé en cas de renvoi d'audience par la Cour d'assises
01:22 a été enregistrée au secrétariat général
01:23 du Conseil constitutionnel sous le numéro 2023-1056 QPC.
01:29 M. Antoine Aury et Bruno Gendrin ont produit des observations
01:33 dans l'intérêt de la partie requérante
01:34 les 31 mai et 12 juin 2023.
01:37 La Première ministre a produit des observations
01:39 le 31 mai et le 13 juin 2023.
01:42 L'Association des avocats pénalistes
01:43 a demandé à intervenir et a produit des observations
01:46 à cette fin, le 29 mai 2023.
01:48 Seront entendues aujourd'hui l'avocat de la partie requérante,
01:51 l'avocat de la partie intervenante
01:53 et le représentant de la Première ministre.
01:55 -Merci, madame.
01:57 Alors, M. Aury, vous êtes avocat parole Paris.
02:01 Vous représentez M. Roubache, qui est partie requérante.
02:05 Nous vous écoutons.
02:06 -M. le Président, mesdames, messieurs,
02:12 les membres du Conseil constitutionnel,
02:14 vous êtes aujourd'hui saisis d'une situation totalement inédite
02:19 qui est permise par notre droit.
02:21 C'est celle du seul cas de figure
02:22 dans lequel la détention provisoire n'est plus limitée
02:25 par des échéances prévues par le code de procédure pénale.
02:27 C'est l'hypothèse dans laquelle l'examen de l'affaire d'un accusé
02:30 a été renvoyé par la Cour d'assise en cours d'examen
02:33 et qui, dans l'attente, reste maintenu en détention provisoire.
02:35 Alors même qu'à chacune des étapes procédurales
02:38 qui le séparent de l'audience devant la Cour d'assise,
02:40 le mis en examen, c'est que sa détention provisoire
02:43 est toujours soumise à un examen régulier
02:45 par le juge judiciaire,
02:46 examen d'ailleurs qui soulève en lui toujours une forme d'espoir
02:49 puisqu'il pourrait se sanctionner par une remise en liberté.
02:51 L'individu placé dans cette situation
02:53 se trouve face à un horizon qui est insaisissable
02:55 et presque même vaporeux,
02:57 puisque c'est celui du fameux délai raisonnable.
02:59 En d'autres termes, plus aucun délai fixe
03:01 n'est prévu par le code de procédure pénale
03:03 et la seule perspective qui est offerte aux détenus,
03:05 c'est celle de solliciter de sa propre initiative
03:08 sa remise en liberté et, en cas de refus,
03:10 d'attendre lors d'une future audience devant la Cour d'assise
03:13 d'être convoquée à une date qui est, à ce moment-là, inconnue
03:16 et dont on vous indique effectivement
03:17 du côté de Mme la Première ministre
03:20 que c'est une date qui serait nécessairement proche
03:22 sans qu'on comprenne véritablement
03:23 ce qui justifierait cette proximité.
03:25 En réalité, pour tolérer la situation qui est permise
03:27 et qui justifie cette question,
03:28 il vous faudrait vous débarrasser à la fois
03:30 d'un héritage historique et à la fois aussi
03:32 d'une jurisprudence qui est solidement établie.
03:33 Pour ce qui est de l'héritage historique,
03:35 il vous faudrait jeter aux oubliettes 28 modifications
03:38 depuis 1810 de ce régime de la détention provisoire
03:41 qui a été particulièrement vivace et sujet au changement,
03:44 mais en dépit de toutes ces évolutions,
03:46 on peut noter 2 tendances générales
03:48 dans les réformes législatives de ce régime.
03:50 1re tendance générale, c'est l'allongement
03:53 de la durée potentielle de la détention provisoire
03:55 tout en rappelant à chaque fois son caractère exceptionnel
03:58 pour, nous dit-on, en limiter le recours
04:00 avec les succès que l'on connaît
04:02 puisque la France est une des championnes de l'Union européenne
04:04 en matière de recours à la détention provisoire.
04:06 Et puis 2e tendance générale qu'on peut observer
04:09 parmi toutes ces modifications législatives,
04:11 c'est la fixation d'échéances régulières
04:13 pour examiner le bien-fondé de la détention provisoire.
04:16 Ca, c'est le mouvement dans lequel s'inscrit la détention provisoire
04:18 et dont les dispositions attaquées s'écartent
04:20 puisqu'elles tolèrent qu'un simple délai raisonnable
04:22 constitue un horizon acceptable
04:24 et même satisfaisant pour un accusé.
04:26 Et c'est d'ailleurs pour rester fidèle à cette volonté
04:28 qui est exprimée à de nombreuses reprises par le législateur
04:30 qu'il vous sera demandé dans le cadre de l'abrogation
04:32 que je vais détailler
04:34 de prévoir un dispositif transitoire
04:36 avant l'intervention future du législateur
04:38 empêchant de maintenir l'accusé dont l'affaire serait renvoyée
04:40 au-delà d'un délai de 3 mois,
04:42 délai qui pourrait être prolongé une fois
04:45 pour un nouveau délai de 3 mois
04:46 avec l'intervention du juge judiciaire
04:47 pour être conforme à votre jurisprudence
04:49 puisque ce que vous demande également la Première ministre,
04:51 c'est de faire fi d'une jurisprudence
04:52 qui est solidement établie.
04:54 Sur ce point, vous l'avez rappelé à de nombreuses reprises,
04:56 pour la protection de la liberté individuelle,
04:57 vous imposez constamment que le juge judiciaire
05:00 soit saisi systématiquement et d'initiative
05:04 pour examiner le bien-fondé d'une mesure privative de liberté.
05:07 Vous l'avez rappelé, par exemple, en matière d'isolement,
05:09 vous l'avez rappelé en matière d'hospitalisation d'office,
05:11 et puis plus récemment, vous avez précisé,
05:14 et je dirais même renforcer cette position,
05:15 puisque en matière de prolongation des détentions provisoires
05:18 pendant l'état d'urgence sanitaire,
05:19 vous avez considéré que l'absence d'intervention systématique
05:21 du juge judiciaire était contraire à l'article 66 de la Constitution,
05:24 et puis plus récemment encore, en juin 2021,
05:26 en matière d'hospitalisation sans consentement,
05:28 vous avez censuré pour le même motif les dispositions litigieuses,
05:31 et ce qui est très intéressant,
05:32 au-delà même du contenu de ces décisions,
05:34 c'est la manière dont elles sont commentées,
05:36 effectivement, par la doctrine autorisée,
05:38 et ce que l'on comprend, c'est que la force de cette garantie
05:41 qui impose de saisir systématiquement et automatiquement
05:44 le juge judiciaire, c'est en fait de pallier à l'inertie
05:47 de la personne détenue, c'est-à-dire qu'on ne puisse
05:49 se satisfaire de la situation dans laquelle on livre à elle-même
05:52 et à ses demandes de mise en liberté de la personne détenue,
05:55 et c'est exactement ce que considère la Première ministre
05:57 comme étant une garantie acceptable à rebours de votre position,
05:59 à rebours également de la position
06:01 de la Cour européenne des droits de l'homme
06:02 et de la lecture qu'en fait la Cour de cassation.
06:05 Et donc, autre point que vous répond, effectivement,
06:06 sur tous ces éléments, la Première ministre,
06:08 c'est que vous avez déjà jugé,
06:10 en matière d'écrou extraditionnel et de mandat d'arrêt européen,
06:13 que le délai raisonnable était un horizon satisfaisant
06:16 pour la détention.
06:17 Là-dessus, ce sont des comparaisons
06:19 qui ne sont absolument pas pertinentes,
06:20 et je vais vous expliquer pourquoi.
06:21 La 1re raison, c'est que, évidemment, vous l'avez compris,
06:23 le régime de l'extradition et du mandat d'arrêt européen
06:25 n'est absolument pas comparable au régime
06:27 de la détention provisoire.
06:28 Le régime de l'écrou extraditionnel
06:29 et du mandat d'arrêt européen, il a un objet très simple,
06:31 c'est de remettre à un Etat requérant un individu
06:34 qui est recherché pour être soit jugé,
06:36 soit parce qu'il a été condamné par défaut.
06:37 Voilà à quoi sert l'objet de cette privation de liberté
06:40 en matière d'écrou extraditionnel
06:41 et en matière de mandat d'arrêt européen.
06:43 Et ça n'est absolument pas comparable
06:44 avec ce qui est prévu par l'article 144
06:46 du Code de procédure pénale,
06:47 qui organise la détention provisoire classique
06:49 et qui a vocation in fine à juger un individu
06:52 qui commet un crime sur le sol français,
06:53 ou bien un français qui commet un crime à l'étranger
06:55 selon les règles de compétences que vous connaissez.
06:57 La Cour de cassation, elle a, de nombreuses reprises,
06:59 exclu cette comparaison qu'on puisse faire
07:01 entre, d'un côté, l'écrou extraditionnel
07:03 et le mandat d'arrêt européen,
07:04 et, de l'autre côté, la détention provisoire.
07:06 Et puis vous-même, d'ailleurs, c'est intéressant de le souligner,
07:08 dans la fameuse décision dont la Première ministre se prévaut
07:11 au sujet du mandat d'arrêt européen,
07:12 vous aviez exclu de considérer
07:15 que les personnes en situation de mandat d'arrêt européen
07:17 détenues pour un mandat d'arrêt européen
07:19 et les personnes en détention provisoire
07:21 puissent être dans des situations estimées comparables.
07:23 Et c'est d'ailleurs sur ce fondement
07:24 que vous aviez estimé que l'atteinte
07:26 au principe d'égalité n'était pas constituée
07:28 puisque les régimes étaient différents.
07:30 Ca achève de démontrer donc que cette comparaison
07:32 qui vous est mobilisée par la Première ministre
07:34 n'est pas pertinente.
07:35 En revanche, je considère qu'il y a également un 2e sujet,
07:37 puisque je parlais de principe d'égalité devant la loi,
07:40 qui, là, à mon sens,
07:41 trouve particulièrement matière à s'appliquer.
07:43 Le raisonnement est très simple.
07:44 On va essayer de vous expliquer de l'autre côté de la barre
07:46 que les personnes qui n'ont pas encore comparu
07:49 devant la Cour d'assises
07:51 et les personnes qui ont comparu
07:52 mais dont l'affaire a été renvoyée,
07:53 ce qui est le cas du requérant,
07:54 seraient dans des situations différentes.
07:57 Parce que, en fait, et c'est ce qui justifierait d'ailleurs,
07:59 que les premières voient leur détention provisoire
08:01 plafonnée par des délais prévus par le Code de procédure pénale
08:04 et que les secondes
08:05 ne voient leur détention provisoire
08:07 soumise qu'à un délai raisonnable.
08:08 Et c'est cette différence dont on vous parle
08:09 qui justifierait cela.
08:10 En réalité, il n'y a rien qui justifie
08:12 cette différence de traitement,
08:13 puisque les 2 types d'accusés se trouvent dans la même situation.
08:16 Ils ne sont toujours pas jugés en 1re instance,
08:18 ils sont toujours détenus provisoires
08:20 et donc prévenus aux yeux de la loi
08:22 et aux yeux de l'administration pénitentiaire,
08:23 et ils sont toujours présumés innocents.
08:24 Donc on est dans une situation
08:25 qui sont formellement et rigoureusement les mêmes.
08:28 Parce que le fait, en réalité,
08:30 d'avoir comparu devant une cour d'assises
08:31 et que cette cour d'assises ait renvoyé l'examen de l'affaire
08:33 à une autre date,
08:35 ne change en vérité rien pour l'accusé,
08:37 sinon peut-être de lui procurer ce sentiment
08:39 d'avoir cru toucher du doigt le soulagement propre aux détenus
08:42 qui, une fois condamnés, connaissent le terme de leur sort
08:44 et acquièrent enfin la certitude d'une libération,
08:47 quand bien même elle serait lointaine.
08:48 Il faut se figurer que dans le dossier
08:50 qui a permis de poser cette question,
08:53 certains accusés se trouvent en détention provisoire
08:55 depuis plus de 6 ans, depuis avril 2017,
08:58 et leur affaire avait été repoussée en janvier 2023
09:00 à l'occasion d'une situation
09:01 qui avait effectivement fait couler beaucoup d'encre,
09:03 puisque c'était en raison de l'indisponibilité
09:06 d'une magistrate dont la 1re présidence
09:08 de la Cour d'appel de Paris avait estimé
09:09 qu'il n'était pas nécessaire de la remplacer
09:11 en amont du procès, et c'est cette situation
09:13 qui a conduit au renvoi s'inédier de cette affaire
09:15 qui était prévue depuis presque 2 ans.
09:17 Toute la particularité, monsieur le président,
09:19 mesdames, messieurs, les membres du Conseil constitutionnel
09:21 de la détention provisoire
09:22 réside justement dans cette cruauté
09:24 qui n'appartient qu'à elle,
09:26 puisqu'elle fait planer sur l'accusé
09:27 une incertitude sur son sort, sur sa durée et son issue.
09:31 Apollinaire lui aussi a résumé d'ailleurs très bien
09:33 les tourments en particulier que cette mesure cause aux détenus
09:36 et qui lui sont propres dans un des rares poèmes
09:38 qu'il a écrits à la Maison de la Santé en 1911
09:40 où il fut incarcéré, avec les vers suivants.
09:43 "J'écoute les bruits de la ville et prisonnier sans horizon,
09:45 "je ne vois qu'un ciel hostile et les murs de ma prison."
09:48 "Telle est la souffrance, monsieur le président,
09:50 "mesdames, messieurs, les membres du Conseil,
09:51 "que cause la détention provisoire,
09:53 "c'est une souffrance sans but."
09:55 Les dispositions attaquées ajoutent à cette absence de but
09:57 une absence d'horizon, et c'est la raison
09:59 pour laquelle je vous demanderai de les abroger.
10:01 -Merci, maître.
10:03 Maintenant, nous allons écouter maître Spinozzi,
10:06 qui est avocat au Conseil,
10:08 qui représente l'Association des avocats pénalistes,
10:11 partie intervenante. Maître.
10:13 -Monsieur le président, mesdames, messieurs les membres du Conseil,
10:20 je serai relativement bref.
10:22 A mon avis, la question se pose d'une façon assez claire
10:25 à votre Conseil.
10:29 On vous l'a dit, la situation dans laquelle nous sommes
10:32 est exceptionnelle.
10:33 C'est la seule hypothèse
10:35 où une personne qui est détenue provisoirement
10:38 et donc qui n'est pas condamnée et est présumée innocente
10:43 se retrouve avec une absence de toute perspective de délai
10:48 fixée par le législateur.
10:51 Et cette situation, elle est exceptionnelle.
10:53 Et en réalité, on essaiera de vous convaincre
10:57 de ce qu'elle est conforme aux exigences constitutionnelles.
11:02 En réalité, elle naît d'une omission pure et simple
11:07 du législateur, qui, évidemment, a toujours cherché
11:12 à ce qu'il puisse y avoir des délais
11:14 qui s'imposent en cas de détention provisoire,
11:17 puisque c'est le cas dans l'ensemble de notre législation,
11:20 et qui n'a évidemment pas prévu le cas qui nous occupe,
11:25 où, en réalité, la personne va comparaître aux assises
11:29 et puis il va y avoir une difficulté
11:30 qui fait qu'elle ne sera pas jugée
11:32 et qu'il y aura un report s'y nédier
11:36 à une prochaine audience
11:39 et que la personne se retrouve alors
11:41 dans cette indétermination complète, temporelle,
11:44 de sa détention.
11:46 Donc, je pense que c'est important de le préciser.
11:50 Je pense que c'est vraiment le rôle, en réalité,
11:53 de la question prioritaire de constitutionnalité
11:55 de confronter notre législation à des hypothèses réelles
12:01 que le législateur n'a pas pu apercevoir
12:03 ou n'a pas pu percevoir dans son rôle
12:07 de mise en place du droit a priori
12:09 et auquel il n'a pas pu penser.
12:12 Et c'est précisément l'occasion qui vous est donnée ici,
12:16 avec cette QPC, de donner au législateur
12:20 la possibilité de modifier la loi
12:23 et donc d'ajouter un délai là où il a omis de le faire
12:28 pour pouvoir réparer le trou dans la raquette juridique
12:31 que vous serez nécessairement amenés à constater.
12:35 Et à cet égard, je vous dirais que, évidemment,
12:40 il y a une inquiétude constante dès que l'on rajoute des délais,
12:43 en particulier en matière de détention provisoire,
12:45 ce qui peut être celle de la Première ministre,
12:49 qui est de dire qu'il ne faut pas déséquilibrer,
12:51 il ne faut pas porter atteinte à l'institution
12:53 et surtout, il ne faudrait pas prendre le risque
12:55 que ce qu'il puisse y avoir des libérations
12:57 qui ne seraient pas voulues.
12:59 Mais ça n'a pas vocation à être le cas.
13:02 Vous avez tout à fait la possibilité,
13:04 dans le cadre d'une décision où vous abrogeriez cet article,
13:08 évidemment, de moduler dans le temps votre abrogation,
13:13 ce qui permettrait aux législateurs de pouvoir modifier le texte
13:18 sans qu'il en résulte une quelconque difficulté
13:20 ou un quelconque risque pour les personnes
13:23 qui sont actuellement en détention provisoire
13:25 ou qui seraient susceptibles d'être confrontées à la même situation.
13:29 Et mon confrère Horry vous a incité à ce que,
13:32 en plus de cette modulation dans le temps,
13:34 vous puissiez prévoir un régime transitoire
13:37 pour les quelques très rares personnes
13:40 qui seraient dans cette hypothèse.
13:42 -Un mot sur l'argumentation qui est développée en défense
13:46 par le secrétaire général du gouvernement
13:48 pour essayer de vous convaincre de ne pas abroger.
13:52 En réalité, il y a 3 arguments
13:55 qui sont avancés par la Première ministre.
13:58 D'abord, le fait qu'il n'y aurait pas d'indétermination
14:02 ou une absence de tout délai,
14:03 puisque le renvoi serait nécessairement réalisé
14:09 à la prochaine session d'assises,
14:12 et que, dans ces conditions,
14:13 il y aurait bien une forme de terme qui serait fixée
14:17 pour que l'affaire soit réaudiencée
14:20 et donc que la personne puisse être jugée.
14:23 Mais cette notion de session d'assises,
14:26 en réalité, elle n'a aucune réalité juridique.
14:30 On le sait, hélas, en particulier aujourd'hui,
14:34 il y a une grande difficulté d'audiencement,
14:36 et donc il n'y a aucune garantie
14:38 que cette prochaine session d'assises
14:41 soit nécessairement la suivante,
14:45 ni que, lors de cette suivante session d'assises,
14:48 le dossier soit effectivement appelé.
14:52 Et puis, les 2 autres arguments
14:54 qui sont avancés par le secrétaire général du gouvernement,
14:56 c'est de dire, écoutez, de toutes les façons,
14:59 la loi prévoit, avec l'article 144-1,
15:02 que la détention pour Isoire
15:05 ne peut jamais excéder un délai raisonnable.
15:07 Et donc, si le juge venait à constater
15:10 qu'il y avait un délai déraisonnable
15:12 de cette détention provisoire,
15:14 il serait tenu à ordonner la libération immédiate
15:18 de la personne qui a été accusée
15:21 et renvoyée dans la cour d'assises.
15:23 Mais là, encore une fois, l'argument est totalement théorique.
15:26 Évidemment, jamais un juge, de par lui-même,
15:31 ne va défider face à un problème
15:35 qui est un problème d'audiencement,
15:36 de prendre le risque de libérer une personne
15:39 au seul motif qu'il estimerait que sa détention
15:42 serait devenue déraisonnable.
15:43 Et de la même manière, mais c'est au fond, en miroir,
15:47 le secrétaire général du gouvernement,
15:48 vous dit "mais en tout état de cause,
15:49 il y a un contrôle juridictionnel, ne soyez pas inquiets",
15:52 puisque, de toutes les façons, l'article 148-1
15:55 permet à la personne de toujours faire une demande
15:58 de mise en liberté à tout instant,
16:00 et que dans ces conditions, le juge, à tout moment,
16:03 est susceptible d'être saisi
16:05 et donc de prononcer la libération
16:07 de la personne qui est mise en cause.
16:10 Mais évidemment qu'il y a toujours la possibilité
16:12 de faire une demande de mise en liberté,
16:14 mais sauf que si l'on suit
16:16 le secrétaire général du gouvernement dans cette argumentation,
16:18 ça veut dire que l'ensemble des délais fixés
16:21 par le législateur en matière de détention provisoire
16:24 sont totalement inutiles.
16:25 C'est-à-dire qu'en réalité, il n'y a plus besoin
16:28 de prévoir des termes comme cela a été voulu
16:30 et comme cela a été rappelé par mon confrère
16:33 au terme d'une évolution législative extrêmement active.
16:37 Donc la logique qui a été voulue par le législateur
16:40 quand il a voulu transcrire cette obligation,
16:42 qui est l'obligation qui lui est imposée
16:45 par votre jurisprudence
16:46 comme par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme
16:49 en matière de délais raisonnables de la détention provisoire,
16:52 eh bien, il l'a fait en imposant des délais
16:55 qui sont des délais préfixes,
16:57 des délais obligatoires de réexamen systématique.
17:00 Et il n'y a aucune, aucune raison
17:03 pour qu'il en soit différemment en l'espèce.
17:05 Et c'est la raison pour laquelle, en modulant vos effets dans le temps,
17:07 nous vous demandons de réparer cette omission du législateur
17:11 en censurant les dispositions qui vous sont soumises.
17:14 -Merci, maître.
17:16 Alors, nous allons maintenant écouter M. Canguilhem
17:20 pour la 1re minute.
17:22 -Merci, M. le président.
17:25 Mesdames, messieurs les membres du Conseil constitutionnel,
17:27 le 8e alinéa de l'article 181 du code du procédure pénale
17:30 prévoit que la comparution devant la cour d'assises
17:32 d'une personne détenue provisoirement
17:33 doit se faire dans un délai d'un an
17:35 à compter de la mise en accusation définitive
17:37 ou de la date de placement en détention provisoire.
17:40 Le 9e alinéa du même article
17:42 prévoit une possibilité de prolongation
17:44 de cette détention provisoire pour une durée de 6 mois
17:47 si l'audience sur le fond n'a pas pu débuter
17:49 dans ce délai d'un an,
17:50 prolongation qui ne peut être renouvelée qu'une nouvelle fois
17:53 pour une durée de 6 mois.
17:54 Et si, au terme de cette nouvelle prolongation,
17:56 soit au bout d'un délai total de 2 ans,
17:58 l'accusé n'a toujours pas comparu dans la cour d'assises,
18:00 alors il sera immédiatement remis en liberté.
18:03 Le délai d'un an de l'article 181 du code de procédure pénale
18:06 est un délai de comparution et non un délai de jugement.
18:09 Il est donc respecté par la seule comparution
18:12 de l'accusé dans la cour d'assises,
18:13 ainsi que cela résulte notamment de la jurisprudence
18:15 de la cour de cassation.
18:17 En revanche, lorsque l'accusé a comparu
18:21 ou commencé à comparaitre
18:22 et que l'affaire est renvoyée à la prochaine session d'assises
18:25 en application de l'article 343 du code de procédure pénale,
18:28 le législateur, et c'est là le coeur de la question
18:30 qui vous est aujourd'hui posée,
18:31 n'a pas prévu de délai maximal à la détention provisoire,
18:34 et c'est en tant que l'ensemble des dispositions précitées
18:38 ne prévoient pas un tel délai qu'il est soutenu
18:40 qu'elle porterait une atteinte injustifiée et disproportionnée
18:43 à la liberté individuelle et au principe d'égalité.
18:49 Ces grièves sont toutefois infondées,
18:50 car contrairement à ce qui est soutenu,
18:51 la détention provisoire est, dans cette hypothèse,
18:54 tout de même encadrée par des exigences de délai
18:58 qui sont de nature à respecter les exigences constitutionnelles
19:01 dont la méconnaissance est invoquée.
19:04 En premier lieu, en ce qui concerne la liberté individuelle,
19:06 votre jurisprudence exige que les atteintes portées
19:08 à l'exercice de la liberté individuelle
19:10 soient adaptées, nécessaires et proportionnées
19:12 aux objectifs poursuivis,
19:13 et que la mesure primitive de liberté s'exerce
19:15 sous le contrôle de l'autorité judiciaire.
19:18 Pour respecter ces exigences, la détention provisoire
19:20 se doit donc d'être encadrée temporellement
19:23 et juridictionnellement, ce qui est le cas en l'espèce.
19:28 Encadrée temporellement, car la détention provisoire
19:30 ne peut excéder une durée raisonnable
19:33 qui s'apprécie au terme des dispositions
19:35 de l'article 144-1 du Code de procédure pénale
19:38 au regard de la gravité des faits reprochés
19:40 et de la complexité des investigations
19:41 nécessaires à la manifestation de la vérité.
19:45 Cette exigence d'une durée raisonnable
19:46 n'est pas un simple objectif, mais une véritable limite
19:49 dont la méconnaissance est sanctionnée
19:51 au terme du 2e alinéa de l'article 144-1
19:54 par la libération immédiate de la personne
19:57 placée en détention provisoire
19:59 lorsque les conditions n'en sont plus remplies.
20:02 Par ailleurs, en cas de renvoi,
20:05 le terme de la détention provisoire est connu.
20:09 Il s'agit de la prochaine cession d'assises,
20:12 ainsi que cela résulte des dispositions déjà citées
20:15 de l'article 343 du Code de procédure pénale.
20:18 Les requérants et intervenants ne sont donc pas fondés
20:20 à soutenir que la combinaison des dispositions
20:22 qui sont aujourd'hui soumises à votre contrôle
20:25 se place l'intéresser dans l'impossibilité de savoir
20:27 à quel moment la juridiction sera à nouveau saisie.
20:29 L'accusé sait, dès la décision de renvoi,
20:33 que l'affaire est renvoyée à la prochaine cession d'assises.
20:37 Cette bande temporelle, certes, n'est pas fixe,
20:41 mais elle en demeure pas moins proche,
20:43 voire même immédiate ou quasi immédiate
20:46 pour ce qui concerne des juridictions,
20:48 comme par exemple la Cour d'appel de Paris,
20:49 d'Aix ou encore de Bordeaux,
20:50 dans lesquelles des cessions d'assises
20:51 se tiennent en permanence.
20:53 La prochaine cession d'assises est donc à horizon immédiat
20:57 ou quasi immédiat.
20:59 L'ensemble de ces règles forme donc un encadrement temporel
21:03 de nature à garantir la limitation de la durée
21:05 de la détention provisoire.
21:08 Encadrée dans le temps, la détention provisoire
21:09 est alors également encadrée par le contrôle
21:12 opéré par le juge judiciaire.
21:14 Cela a été dit en application du 1er alinéa
21:16 de l'article 148-1 du Code de procédure pénale.
21:18 L'accusé peut demander sa mise en liberté
21:21 à tout moment de la procédure,
21:22 notamment s'il estime que sa détention provisoire
21:25 excède alors une durée raisonnable.
21:28 A cette possibilité, il est opposé de l'autre côté
21:31 de la barre votre décision 878-879-QPC
21:34 du 29 janvier 2021,
21:36 rendue dans le contexte de l'état d'urgence sanitaire,
21:38 par laquelle vous avez estimé que le contrôle systématique
21:41 du juge judiciaire sur la détention provisoire
21:43 était nécessaire et que le seul contrôle
21:45 à l'initiative du détenu,
21:46 la seule demande à l'initiative du détenu
21:48 n'était pas suffisante.
21:49 Mais la situation est ici tout à fait différente.
21:52 Ici, contrairement à votre espèce 878-879,
21:57 le juge est systématiquement, mécaniquement même,
22:00 présent par la détermination au moment du renvoi,
22:05 par la détermination de la comparution
22:06 à la session d'assises suivante.
22:10 La détention provisoire et donc sa durée
22:11 se déroulent en permanence
22:13 sous le contrôle de l'autorité judiciaire.
22:16 Les exigences liées au respect de la liberté individuelle
22:18 étant respectées, vous pourrez écarter.
22:20 Le grief tiré de la méconnaissance de l'article
22:22 66 de la Constitu.
22:25 En 2e lieu, il est soutenu que les dispositions contestées
22:28 induiraient une différence de traitement
22:30 entre les accusés comparés devant la cour d'assises.
22:33 Ceux n'ayant pas encore comparu
22:34 voyant la durée de leur détention provisoire
22:36 limitée par la loi,
22:37 tandis que ceux ayant déjà comparu
22:38 mais dont l'affaire est renvoyée,
22:39 ne voyant leur détention encadrée
22:41 que par la seule notion de délai raisonnable.
22:44 Le principe d'égalité devant la justice,
22:46 inclus dans le principe constituel d'égalité,
22:48 impose qu'une différence de traitement
22:51 en matière de garantie procédurale soit justifiée
22:53 par une différence de situation
22:54 et ne prive pas le justiciel d'une garantie reconnue à d'autres.
22:58 En l'espèce, il n'y a pas de différence de situation
23:01 avant la première comparution devant la cour d'assises.
23:04 Tous les accusés se trouvent alors dans la même situation
23:06 au regard du délai d'un an prévu par les dispositions
23:09 du 8e alinéa de l'article 180 du code de procédure pénale.
23:12 Il n'y a pas de rupture d'égalité à ce stade.
23:14 Il n'y a pas davantage de rupture d'égalité
23:16 lorsque l'affaire a été renvoyée
23:17 après une première comparution.
23:20 En effet, pour que le principe d'égalité soit alors respecté,
23:23 il faut, alors que la situation est désormais différente,
23:27 que l'accusé ne soit pas privé de garantie
23:29 dont bénéficie ceux dont l'affaire n'est pas renvoyée
23:33 et dont la détention provisoire n'aura pas excédé la durée d'un an.
23:37 La garantie dont il est ici question
23:39 consiste pour l'accusé à bénéficier
23:41 du délai de détention provisoire le plus court possible,
23:44 en tout cas limité à ce qui est strictement nécessaire.
23:47 Dans ces conditions, l'affaire renvoyée
23:50 ne peut, par définition, pas être jugée
23:54 avant la prochaine session d'assises organisée
23:57 au sein de la juridiction concernée.
23:59 Par hypothèse, ça ne peut pas être avant
24:01 la session d'assises suivante en cas de renvoi.
24:04 Cette borne temporelle-là,
24:06 assortie de l'exigence d'un délai raisonnable de détention,
24:09 offre donc la meilleure garantie possible à l'accusé
24:12 placée dans cette situation particulière.
24:15 Aucune catégorie de justiciale n'ayant été privée
24:17 de bénéfices de garantie légale par les dispositions contestées,
24:20 le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité
24:23 pourra être écarté.
24:26 Enfin, il résulte de ce qui précède
24:27 que vous pourrez également écarter le grief tiré
24:29 de l'incompétence négative,
24:31 dès lors que, par elle-même, les dispositions contestées
24:33 n'ont pas méconnu les droits et libertés
24:35 que la Constitution garantit.
24:38 Aucune exigence constitutionnelle n'a été méconnue.
24:40 Je vous invite à déclarer les dispositions contestées
24:42 conformes à la Constitution.
24:45 -Merci, M. Grenguyen.
24:47 Alors, nous avons entendu les arguments pour,
24:49 les arguments contre.
24:51 Est-ce qu'un des membres du Conseil a des questions à poser ?
24:54 Oui, M. le conseiller Mézard.
24:58 -Merci, M. le président.
24:59 J'aurais une question à M. Aury et à M. Spinozi.
25:03 Est-ce que vous êtes d'accord avec l'interprétation
25:05 de la Première ministre sur les dispositions 343 ?
25:11 Qu'est-ce que la prochaine session ?
25:13 Et une question à M. Canguilhem,
25:17 concrètement, quelle est la date de la prochaine session ?
25:20 Est-ce qu'il y a eu déjà une session depuis le mois de janvier,
25:25 puisque nous sommes déjà presque à 6 mois
25:27 depuis l'audience du 25 janvier 2023 ?
25:30 Puisqu'il y a quand même, je crois, plusieurs accusés
25:33 qui sont sous mandat de dépôt depuis avril 2017.
25:41 -Merci. Alors, on commence avec vous, M. Aury.
25:43 Venez à la barre, là-bas,
25:45 sinon vous ne passerez pas sur les ondes.
25:49 -Sur ce point, pour vous donner effectivement un ordre d'idée,
25:52 la prochaine session d'assises pour cette affaire-là,
25:54 c'est en octobre prochain.
25:56 En réalité, vous expliquez qu'il y avait des sessions d'assises
25:58 très régulièrement à la Cour d'appel de Paris,
26:00 ce qui est exact, mais on voit bien que là, pour ce cas de figure,
26:03 il a fallu attendre 9 mois pour réaudiencer l'affaire.
26:05 Donc cette notion de prochaine session d'assises,
26:07 et c'est ce que vous disiez, mon confrère Spinozi,
26:09 elle ne représente en réalité rien.
26:11 Et on comprend qu'il n'est pas du tout systématique
26:13 que ce soit forcément examiné à la session suivante.
26:16 Là, en l'occurrence, il a fallu attendre 9 mois
26:19 en dépit de plusieurs autres sessions d'assises entre-temps.
26:22 -Merci.
26:23 -Pardon. -Oui.
26:24 -De manière complémentaire, y a-t-il eu d'autres sessions d'assises
26:28 entre... Est-ce qu'il y en a eu entre janvier et octobre ?
26:33 -Tout à fait. Il y en a, comme l'a rappelé le Premier ministre,
26:36 il y en a tout le temps.
26:37 Donc effectivement, entre janvier et octobre...
26:39 -Est-ce que cela veut dire que cette affaire
26:41 n'a pas été renvoyée à l'audience suivante ?
26:44 -Absolument. Elle a été renvoyée à une prochaine session d'assises,
26:46 et non pas à la prochaine.
26:48 Voilà.
26:49 -Alors, M. Gordillem.
26:51 -Oui, alors, je pense que la réponse à votre question précise
26:55 sur l'affaire d'espèces a été donnée par M. Houry.
26:59 Effectivement, il y avait et il y a effectivement
27:03 des sessions d'assises tout le temps.
27:04 Et il y a un problème en l'espèce d'exécution.
27:08 Ca aurait dû être envoyé à la 1re et prochaine session d'assises.
27:11 Ca n'a pas été le cas,
27:12 mais selon la lettre de l'article 343,
27:14 ça aurait dû l'être.
27:16 Pour répondre à votre question plus générale,
27:19 la prochaine session d'assises, elle peut être connue.
27:23 C'est-à-dire, à la date où il y a un renvoi,
27:25 en réalité, ce qui va se passer, normalement,
27:26 c'est que la prochaine session d'assises est connue
27:28 et l'affaire va être ajoutée à cette session-là.
27:32 Si jamais on se trouve devant une juridiction de taille plus modeste
27:36 où il n'y a pas de session d'assises déjà prévue,
27:38 ce qui va se passer, c'est qu'il va y avoir une session ad hoc
27:40 qui va être créée spécialement pour que,
27:43 dans un délai raisonnable,
27:45 cette affaire puisse être de nouveau audiencée.
27:48 -Merci.
27:50 Maître Spidosy.
27:52 -Un mot sur ce point.
27:57 La nature des explications que vous venez d'avoir vous démontre
27:59 à quel point il n'y a absolument aucune garantie juridique
28:02 sur cette notion de session d'assises, en fait.
28:03 On vous dit "prochaine session d'assises".
28:05 Evidemment, il y en a. On ne sait pas très bien quand.
28:07 Et en pratique, vous le savez très bien,
28:10 un audiencement, c'est compliqué, en particulier pour une affaire d'assises.
28:13 Donc on va trouver une session d'assises
28:15 qui soit compatible avec les calendriers des magistrats,
28:20 le cas échéant des avocats.
28:22 Et il y a une indétermination.
28:24 Il se trouve que là, il y a eu un temps significatif,
28:26 puisqu'il y a eu plusieurs mois,
28:28 alors même qu'on est dans des délais qui sont très restreints,
28:30 puisque l'égislateur lui-même a prévu un délai maximum de 6 mois
28:33 pour la dernière prolongation,
28:35 et il n'y a aucune garantie, en réalité, légale,
28:38 que la personne puisse avoir véritablement
28:41 un nouvel examen de son dossier
28:44 dans des délais qui soient compatibles
28:46 avec l'exigence du délai raisonnable.
28:47 Et je pense que les réponses qui vous ont été données le démontrent.
28:50 Effectivement, on vous dit "il faudrait qu'il y ait une session ad hoc",
28:53 mais on n'en sait rien. Personne ne peut le garantir.
28:56 Et on vous dit "il aurait fallu que ce soit la prochaine".
28:58 Ça n'a pas été le cas.
28:59 Parce qu'il n'y a pas de garantie qui soit donnée,
29:01 et c'est bien le rôle de la loi de garantir
29:04 des délais qui soient des délais minimaux.
29:06 -Merci. Alors, est-ce qu'il y a d'autres questions ?
29:10 Oui, M. le conseiller Sénère.
29:12 -Merci, M. le président. Pour prolonger sur cette question,
29:15 la question pour M. Canguilhem,
29:17 sans doute n'a-t-il pas la réponse là immédiatement,
29:18 mais y a-t-il à la chancellerie des éléments statistiques,
29:22 même imparfaits, sur cette problématique
29:25 du délai moyen ou habituel
29:27 entre la session qui renvoie
29:30 et la session suivante à laquelle l'affaire peut être audiencée ?
29:33 -Merci. M. Canguilhem.
29:36 Hélas, non, cette donnée statistique n'existe pas.
29:38 Donc, ni maintenant, ni plus tard, je ne pourrai vous la donner.
29:41 La seule chose qui existe comme statistique,
29:45 c'est le nombre de jours d'assises par an par juridiction.
29:48 Donc, de là, de manière très empirique
29:51 et avec des biais méthodologiques très importants,
29:55 sur la base d'une session d'assises qui durerait 10 jours,
30:00 on peut grosso modo...
30:02 Mais c'est très empirique et ce ne sont pas des statistiques...
30:06 Euh...
30:07 -Oui. -Solides.
30:08 De toute façon, cela dépend. C'est variable d'une année à l'autre.
30:12 Ce sont des statistiques, des éléments fluctuants,
30:15 par définition. -Merci.
30:16 M. le conseiller Juppé.
30:19 -Juste aussi pour M. Canguilhem,
30:21 une question de caractère statistique.
30:23 Est-ce que vous avez en tête des exemples
30:26 des tenues ayant comparu un encore jugé
30:28 et ayant obtenu sa libération dans l'intervalle ?
30:33 -M. Canguilhem.
30:34 -Je ne peux pas vous donner d'exemple en ce sens.
30:37 -C'est pas l'exemple. M. Maître.
30:39 -Si je puis simplement...
30:41 -Pour compléter la réponse qui vient de vous être faite,
30:44 pour vous donner l'exemple du requérant,
30:46 c'est en cas d'une demande de mise en liberté
30:49 frappée d'un pourvoi que cette question a été posée.
30:52 Donc, lui n'a pas bénéficié de ce délai raisonnable
30:55 dont on vous indique qu'il serait satisfaisant.
30:58 Et les deux autres, qui sont les derniers accusés détenus,
31:01 ils renvoient de l'affaire et ne peuvent pas,
31:03 ils ne l'obtiennent pas, ils sont toujours détenus provisoirement.
31:07 -Merci.
31:08 Alors, voilà, c'était intéressant comme échange.
31:11 Bon, nous allons regarder tout cela
31:14 et rendrons notre décision le 7 juillet,
31:18 c'est-à-dire vendredi.