Les informés de l'éco du 24 juin 2023

  • l’année dernière
Des dollars, mais pas de révolution… Le sommet de deux jours sur la réforme de la finance mondiale, accueilli par la France, s'est terminé vendredi 23 juin avec quelques avancées en faveur des pays pauvres, mais sans concrétiser le Big Bang espéré pour réorienter la finance planétaire au service du climat.


Tout reste donc à faire, mais quelles pistes adopter ? Emmanuel Cugny et Lorrain Sénéchal reçoivent Anne-Sophie Alsif, cheffe économiste au cabinet BDO France, et Patrice Geoffron, directeur du Centre de géopolitique de l’énergie et des matières premières.

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00:00 (Générique)
00:07 Bienvenue dans les informer de l'écho, 20 minutes de débat autour de l'actualité économique et sociale.
00:11 Bonjour Anne-Sophie Alsif, enseignante en économie à la Sorbonne à Paris, chef économiste du cabinet BDO France.
00:17 Bonjour Patrice Joffron, membre du cercle des économistes, directeur du centre de géopolitique de l'énergie et des matières premières.
00:24 Bonjour Emmanuel Cuny.
00:25 Bonjour à tous.
00:26 À mes côtés comme tous les samedis. Le sommet de Paris s'est terminé hier soir, sommet pour un nouveau pacte financier mondial.
00:33 Le but c'est à la fois de financer la transition écologique, d'aider aussi les pays pauvres. On fait le bilan ce matin dans les informer de l'écho Emmanuel.
00:41 Oui des dollars, des milliers, milliards de dollars mais pas vraiment de révolution.
00:46 Le sommet de deux jours donc comme vous le disiez, Laurence Sénéchal pour la réforme de la finance mondiale et aider les pays les plus pauvres.
00:53 Alors c'est terminé, c'est vrai, sur quelques avancées mais pas vraiment sur le big bang que l'on attendait pour aider ces pays.
00:59 La montagne a accouché d'une souris, c'est ce que déclare Greenpeace, l'organisation non gouvernementale.
01:05 Et en clôture du rendez-vous hier, le président de la République française Emmanuel Macron s'est quand même voulu plus positif.
01:11 Nous devons réformer en profondeur la gouvernance de l'architecture financière internationale pour qu'elle soit plus efficace,
01:19 plus équitable et plus adaptée au monde d'aujourd'hui. Là aussi il y a un consensus complet, il faut commencer le travail dès maintenant.
01:27 Voilà donc consensus complet mais un consensus ne crée pas l'action bien sûr. Alors on va voir qu'est-ce qu'on peut faire et surtout comment on peut financer tout cela.
01:35 Anne-Sophie Alsif, il aura servi à quoi ce sommet ? Il aura servi à quelque chose ?
01:39 Alors déjà oui puisque c'est toujours une bonne nouvelle quand tous les chefs d'Etat se rassemblent et discutent.
01:44 On voit à quel point aujourd'hui la diplomatie et les rencontres peuvent être importantes. Donc oui c'est toujours positif.
01:52 Après le problème en effet c'est qu'il n'y a pas de véritable déclaration, il n'y a pas d'engagement avec des sanctions si ce n'est pas respecté.
01:59 Donc là on le voit comme pour les COP c'est vrai que c'est en fonction des déclarations de chacun et que bien sûr tous les pays n'ont pas les mêmes intérêts.
02:06 Alors concernant les financements, c'est toujours l'idée de dire que ce sont les pays qui polluent le moins, qui vont être le plus infectés,
02:12 qui n'ont pas forcément les capacités financières de pouvoir financer cette transition. Il y a quand même eu des déclarations intéressantes.
02:19 Par exemple si un pays a énormément de catastrophes naturelles qui ne puissent plus justement rembourser sa dette, alors on se dit comme ça c'est une bonne idée.
02:27 Après c'est vrai qu'on peut se dire pour les investisseurs on peut regarder les pays qui vont être les plus infectés et ça peut poser des questions pour les financements
02:34 en disant voilà là c'est trop risqué donc on ne finance plus. Donc on voit qu'il n'y a vraiment pas de solution globale à ce problème.
02:41 Ce sont des petits pas.
02:42 Ce sont des petits pas. Ce serait vraiment d'avoir un fonds et on va dire des pays les plus riches qui mettent beaucoup d'argent dans ce fonds-là.
02:49 Il faut quand même rappeler que les pays riches ont déjà des engagements concernant l'aide publique au développement qui ne sont souvent pas tenus
02:55 par rapport à ce qu'ils doivent mettre par rapport à leur richesse créée. Donc c'est vrai que c'est vraiment des petits bas et qu'on s'attendait plus peut-être à une déclaration commune
03:02 ou en tout cas à des pistes de financement. Je rappelle quand même à un moment où en France, on l'a vu encore, on a 400 milliards d'épargnes
03:10 sur les livrets A. Donc c'est vrai qu'il y a toujours cette idée de se dire on a ce stock d'épargnes colossale dans beaucoup de pays développés
03:17 qui malheureusement financent peu d'actions très productives. Et puis de l'autre côté, on a tous ces besoins de transition.
03:22 Là, il y a une vraie réponse à apporter à mon sens.
03:26 Patrice Geoffron, il y avait cette promesse il y a 15 ans que les pays riches mettent 100 milliards d'euros par an à destination des pays pauvres.
03:33 C'est peut-être sur ce point-là qu'on a un peu avancé sur ces deux jours ?
03:37 Oui, on a un peu avancé, on a rattrapé le retard. La promesse à laquelle vous faites référence est une promesse de Copenhague à la COP de 2009.
03:45 C'est un objectif qu'on devait tenir en 2020 et qu'on tient avec retard et avec beaucoup de difficultés.
03:51 Sans que ça permet de crédibiliser aux yeux des pays du Sud, les pays les plus fragiles, ça vient d'être dit, les engagements de l'accord de Paris.
04:00 Le problème, c'est qu'on a d'un côté des avancées à petits pas, ça a été dit, je pense qu'il y a un consensus sur ce point.
04:10 Mais les effets du changement climatique avancent à grands pas.
04:13 Si on compare finalement les derniers rapports du GIE qui ont été livrés au cours de la dernière année et demie,
04:18 et ce qui était la précédente livraison il y a une demi-douzaine d'années auparavant,
04:22 tout va plus vite que dans les modèles et évidemment les pays les plus fragiles vont être plus encore affectés.
04:29 A mes yeux, il est totalement incompréhensible aujourd'hui, alors que le prix du photovoltaïque s'est effondré,
04:36 qu'il y a encore, au moment où nous parlons, 600 millions de personnes concentrées très largement en Afrique subsaharienne,
04:42 qui n'aient pas du tout d'accès à l'électricité.
04:44 Et donc voilà, c'est l'arrière-plan, j'allais dire, des débats qui ont eu lieu pendant ces deux jours.
04:49 Étant entendu qu'en fait il y a deux objectifs conjoints, un objectif de transition,
04:56 donc comment est-ce qu'on permet un accès à une énergie et notamment une électricité décarbonée,
05:01 mais comment est-ce qu'on permet surtout également une adaptation de ces pays aux effets du changement climatique ?
05:06 Les besoins justement, Emmanuel Cuny, quels sont les besoins réels de financement des pays du Sud ?
05:13 Alors les chiffres circulent, effectivement, on parle de 100 milliards, de 1 000 milliards, de 3 000 milliards de dollars,
05:19 on ne sait jamais réellement combien mettre dans la corbeille.
05:22 Alors l'an dernier, le GIEC, le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat,
05:27 chiffrait à 2 800 milliards de dollars d'ici 2030 pour aider les pays du Sud,
05:33 pour atténuer les effets du réchauffement climatique, mais ce n'est que, je dirais, l'atténuation.
05:40 Là, on n'est pas dans la prévention. La réduction pure et simple, ça renvoie évidemment à l'exploitation des richesses,
05:47 des pays pauvres, des sous-sols des pays pauvres par les pays développés.
05:51 Alors un seul exemple, si on part le chiffre, et si on prend les 2 700 à 3 000 milliards de dollars par an pour aider les seuls pays du Sud,
06:00 il faut savoir que les pays riches devraient réunir 19 000 milliards de dollars jusqu'à 2030.
06:06 Si on accumule.
06:07 Voilà, effectivement. Et si on fait un petit comparatif, les pays occidentaux ont mobilisé pour la crise Covid,
06:14 écoutez bien, 28 000 milliards de dollars dans le cadre de leur réponse à la pandémie.
06:20 En quelques mois seulement.
06:21 Et oui, donc on voit que l'argent est là quand on peut le débloquer. Est-ce qu'on va faire la même chose pour l'aide aux pays du Sud ?
06:27 Anne-Sophie Alcif, dit comme ça, effectivement, l'argent existe.
06:31 Comme ça, ça paraît possible. Bon, alors après, on l'a dit, il faut qu'il y ait des volontés politiques. Et là, ce sera plus compliqué.
06:37 La difficulté, c'est aussi après les problèmes d'endettement, puisqu'on revient souvent à des problématiques nationales,
06:43 où après, beaucoup de pays, on l'a vu, se sont beaucoup endettés avec le Covid et avec les problèmes énergétiques,
06:50 se diront toujours, ben voilà, c'est vrai que les besoins sont plus dans notre pays.
06:54 C'est pour ça qu'on ne respecte pas les objectifs des COP, c'est pour ça qu'on ne fait pas autant en termes d'aide au développement,
07:00 parce qu'il y a des énormes besoins de financement dans vos pays.
07:03 Donc c'est vrai que c'est possible sur le papier, il n'y a pas de problème. Voilà, s'il y a une vraie volonté, on peut trouver la liquidité.
07:08 Alors après, avec beaucoup de travail de coopération, on l'a vu, pour le Covid, ça a été possible.
07:13 Après, encore une fois, il faut se mettre d'accord avec des États qui ont des intérêts très divergents, qui ne sont pas impactés pareil.
07:19 Donc il y a beaucoup de pays qui vont vous dire, ben voilà, nous, on est moins impactés, on n'a pas eu cette prospérité économique,
07:25 de quel droit, voilà, on ne pourrait pas y avoir accès. Donc ça, c'est compliqué.
07:29 Et puis juste pour finir, il faut quand même rappeler l'aspect démographique, qui est excessivement important, qu'on met souvent en retrait.
07:36 Ces pays-là ont en effet un taux de natalité beaucoup plus important, ont beaucoup plus de jeunes populations qui vont devoir aller travailler.
07:43 Donc on va avoir aussi énormément de migration climatique, mais ça ne touchera pas que les pays pauvres, ça touchera absolument tous les pays.
07:49 On pense souvent aux Pays-Bas, par exemple, qui sont juste à côté de chez nous, qui pourraient avoir de grandes conséquences.
07:55 Et là, en effet, économiquement, ça a aussi un énorme impact en termes de ressources humaines, vous avez la moitié des populations qui s'en vont.
08:01 Donc c'est vrai que c'est important, je pense, de ne pas régler, voir le problème seulement sur le prisme du financement,
08:06 mais de voir toutes les modalités, que ce soit en termes économiques, démographiques et bien évidemment de financement de la transition.
08:12 Patrice Geoffron, financement de la transition, il en a été question ces deux derniers jours.
08:16 Il y a l'exemple du Sénégal, avec cet accord trouvé, les pays riches mettraient 2,5 milliards d'euros sur la table
08:22 pour aider le Sénégal à se développer en se passant du charbon.
08:27 Oui, parce que le drame, finalement, c'est que dès lors que les vieux pays que nous sommes ont brûlé massivement du charbon, du pétrole, du gaz,
08:35 et continuent d'ailleurs partiellement, ça crée une contrainte qui limite la capacité des pays du Sud à extraire leurs propres ressources et à les brûler à ce moment-là.
08:44 Donc évidemment, il faut des mécanismes de compensation. On s'est un peu perdu dans tous ces chiffres,
08:48 toute cette avalanche de milliers de milliards. Mais retenons simplement qu'il s'agit de manière très constante, dans le temps jusqu'en 2050 à peu près,
08:57 de faire un effort qui est un effort équivalent à 2, 3, 4 % du PIB par an.
09:02 Et c'est en fait la constance de cet effort qui est absolument essentiel.
09:06 Et vous l'avez dit, dans le cas du Sénégal, on a un effet de levier avec quelques milliards de dollars ou d'euros.
09:12 Donc ne négligeons pas l'effet pratique qui est susceptible d'être mis en œuvre avec quelques milliards.
09:18 Patrice Joffron, vous restez avec nous. Anne-Sophie Alsif également. Les informés de l'écho reviennent dans un tout petit instant.
09:24 9h50, c'est le Fil info avec Sophie Echenne.
09:26 Vladimir Poutine admet que la situation est difficile à Rostov, ville russe, près de la frontière ukrainienne.
09:32 C'est là que se trouve Evgeny Prigojin et ses hommes de Wagner ce matin.
09:36 Le chef de la milice a lancé une rébellion contre l'armée russe. Vladimir Poutine assure que les traîtres seront punis.
09:41 Il dénonce un coup de poignard dans le dos. Et à l'instant, Emmanuel Macron déclare suivre la situation de près.
09:47 Le Canada ouvre une enquête sur l'accident du Titan, ce petit sous-marin disparu près de l'épave du Titanic dans l'Atlantique Nord
09:53 avec cinq personnes à bord. Enquête pour déterminer les causes de cet accident.
09:57 Monique Olivier, l'ancienne épouse de Michel Fourniret, est renvoyée aux Assises pour compliciter dans l'enquête sur la disparition d'Estelle Mouzat en 2003,
10:04 mais aussi sur l'enlèvement et le meurtre de deux autres jeunes filles à la fin des années 80.
10:09 Le diabète gagne du terrain dans le monde. Dans 30 ans, près d'un milliard et demi de personnes en seront atteintes,
10:14 selon une étude de la revue scientifique Lancet. C'est deux fois plus qu'aujourd'hui, en cause notamment des modes de vie de plus en plus sédentaires.
10:21 Le bilan du sommet de Paris sur l'aide financière au pays sud et pour financer notamment la transition écologique.
10:37 On en parle dans les informes et de l'écho, toujours avec Anne-Sophie Alsif, enseignante en économie à la Sorbonne à Paris,
10:42 chef économiste au cabinet BDO France, et avec Patrice Joffron du Cercle des économistes et du Centre de géopolitique de l'énergie et des matières premières.
10:51 Emmanuel Cuny, il a aussi été beaucoup question non seulement de l'aide au pays du sud, mais aussi de l'architecture financière internationale.
10:58 Oui, parce que finalement, ce sommet de deux jours à Paris visait à réformer la finance internationale,
11:04 en tout cas l'architecture, comme vous le dites très bien, qui est née des accords de Bretton Woods en 1944,
11:11 avec la création du FMI, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale.
11:15 Donc depuis, ce sont ces institutions qui gèrent, et on le verra tout à l'heure dans le cas de l'Afrique, ça pose peut-être problème.
11:22 Il faut revoir tout cela de fond en comble. Les pays en développement, effectivement, disent que les aides arrivent beaucoup trop tard pour se développer.
11:30 Donc comment faire ? Est-ce qu'il faut taxer, créer de nouvelles taxes internationales sur les transports, sur les avions ?
11:35 Le président Macron y est allé.
11:36 C'est ce qu'a demandé Emmanuel Macron.
11:37 Et puis, oui, du rôle désormais à l'avenir du FMI et de la Banque mondiale.
11:41 Il le demandait notamment hier matin sur France Info, Emmanuel Macron, le chef de l'État.
11:45 Qu'est-ce qui pose problème, Anne-Sophie Alsif ? Pourquoi est-ce que les pays pauvres, les pays du sud, ont du mal à se financer via le FMI et la Banque mondiale ?
11:54 Parce que c'est vrai qu'il y a une vision, on l'a beaucoup appris en économie, quand j'étais étudiante, tous les modèles de croissance, qui était vraiment basé sur une vision de rattrapage.
12:04 C'est-à-dire que l'idée, c'est que vous avez des pays qui sont développés, d'autres qui le sont moins.
12:08 Et donc, on va essayer de développer le PIB, un indicateur pour revenir à un certain niveau de développement.
12:13 Donc il y a toujours une vision linéaire de la croissance, du développement, pour rattraper et pour arriver à un certain stade de maturité.
12:20 Aujourd'hui, on voit avec la transition écologique, puisque cette croissance se base majoritairement sur la consommation d'énergie fossile, de charbon, d'énergie,
12:29 est assez remise en cause pour ces pays en voie de développement qui disent "ben voilà, aujourd'hui, on a toujours eu des financements qui allaient dans ce sens-là de modèles de croissance.
12:39 Aujourd'hui, vous nous dites que ce modèle ne va plus et tout ce qu'on a mis en place ne va pas".
12:44 Donc c'est ça qui est assez difficile, qu'il faut remettre en cause. Le FMI, c'est vrai que souvent aidait ces pays-là, mais avec des contreparties,
12:51 en termes de finances publiques, en termes de gouvernance, en termes de développement économique.
12:55 On se souvient plus près de chez nous de la Grèce, par exemple, avec la crise de la dette.
12:58 Exactement, exactement. C'est un peu en voie de développement, mais en tout cas, c'est vrai qu'il y a un petit peu...
13:02 Qui était en situation de thèse, mais qui fait rappel au FMI.
13:04 Exactement, les fameuses réformes structurelles qui ont été beaucoup critiquées.
13:07 Et puis la Banque mondiale, c'est une vision souvent qui est très sectorielle.
13:11 Un pays, c'est une cause spécifique où là, il va y avoir des aides pour l'accès à l'eau, pour l'éducation des femmes.
13:17 Donc c'est assez parcellaire. Il y a moins cette vision macro que peut avoir le fonds monétaire pour essayer de développer.
13:24 Donc c'est vrai que beaucoup de pays en voie de développement, qu'est-ce qu'ils font ?
13:26 Ils se tournent vers d'autres investisseurs, vers d'autres financements.
13:29 On en a beaucoup parlé de la Chine ou de l'Inde dans ces pays-là, qui là, en général, donnent beaucoup plus d'argent facilement,
13:35 avec des lignes de crédit complètement ouvertes et qui permet en effet au gouvernement d'avoir accès à des financements et de pouvoir faire beaucoup plus ce qu'il souhaite.
13:42 Et d'autres contreparties qui peuvent arriver plus tard et qui ne sont pas forcément souhaitables pour nous.
13:46 Exactement.
13:47 Patrice Geoffron, comment on fait pour le réformer ce système ? C'est forcément de l'intérieur ou est-ce qu'il faut créer une nouvelle banque de financement de la transition écologique par exemple ?
13:55 Alors le problème, c'est qu'on est dans une course contre la montre.
13:58 Et donc si on doit faire un grand soir avec une réforme, etc. et des nouvelles institutions, on n'y arrivera pas.
14:03 Je pense qu'il faut être pragmatique. C'est un peu ce qui planait quand même sur les discussions de ces deux journées.
14:08 Donc il y a un enjeu qui est de passer finalement à la fois d'un soutien au développement, à un soutien à la transition, à l'adaptation des effets du changement climatique.
14:16 Ce n'est pas nécessairement les mêmes projets. Alors il peut y avoir des projets en commun.
14:19 L'accès à l'eau, l'accès à l'électricité, c'est à la fois évidemment favorable au développement et favorable à la lutte contre le changement climatique.
14:26 Mais il y a par ailleurs d'autres types de projets qui sont des projets d'adaptation aux effets du changement climatique.
14:30 Bâtir des digues pour limiter les menaces de surgissement d'invasion par les eaux.
14:38 Le modèle économique qui est derrière tout ça, c'est un modèle qui va conduire à éviter des catastrophes,
14:43 mais dont le rendement est plus difficile à établir et à calculer.
14:49 Et puis ça suppose de pouvoir intervenir plus vite, plus haut, plus fort, si je puis dire.
14:54 Et notamment d'être très réactif par rapport à des catastrophes, parce qu'on ne sait pas où, comment et quand ces catastrophes adviendront.
15:00 Mais on a la certitude qu'elles adviendront et qu'elles adviendront parmi les pays qui sont d'ores et déjà les plus fragiles.
15:05 Donc il faut éviter leur effondrement qui va être facteur de migration et toute une série de facteurs d'instabilité par ailleurs.
15:12 Emmanuel Cuny, ces institutions, vous parliez de Bretton Woods. Elles sont issues d'un leadership à l'époque américain, occidental en tout cas,
15:18 et qui est en train de changer. On en parlait avec Anne-Sophie Alsif.
15:21 Alors il y a un autre principe dont on parle peu. C'est le consensus de Washington qui date des années Reagan, donc des années 80.
15:28 Et ce consensus de Washington, imposé via la Banque mondiale et le FMI, aux pays en développement, de gérer vraiment strictement,
15:38 vous citiez la Grèce, on était à peu près dans le même cadre. Ce qu'il faudrait, c'est redonner en fait leur souveraineté de gestion à ces pays,
15:46 notamment africains. Et le Cercle des économistes, il y a je crois deux ans, a fait une réunion à Dakar avec le président du Sénégal
15:54 pour créer en contrepoids du consensus de Washington, le consensus de Dakar, qui est justement pour remettre les pleins pouvoirs
16:01 de, je dirais, gouvernance aux pays africains eux-mêmes. En les aidant évidemment, il ne faut pas les lâcher,
16:06 mais en les aidant, en leur disant comment ça peut marcher, et en n'étant plus forcément interventionnistes comme on l'est aujourd'hui.
16:13 Est-ce que ce consensus de Dakar, finalement, peut survivre à cette idée ?
16:17 Ça veut dire qu'il faut faire confiance aux pays du Sud ?
16:20 Parce que par exemple, les agences de notation ont un rôle vraiment crucial. On a parlé de Fitch et d'autres Moody's en France.
16:28 Les agences de notation flinguent littéralement certains pays africains qui ont pourtant des richesses.
16:33 Et ça, ça ne plaît pas aux investisseurs.
16:35 Comme ils ont des mauvaises notes, empruntées très chères.
16:37 Oui, et c'est vrai que très souvent, quand on regarde les données à moyen long terme, on voit qu'en effet, ces investissements,
16:42 on voit que dans ces pays, c'est plus risqué. Mais en fait, globalement, on voit que beaucoup de ces pays remboursent,
16:46 ou en tout cas, ont beaucoup d'investissements. Et en fait, à moyen long terme, vous avez plutôt beaucoup plus de rendement.
16:51 Et pour les investisseurs, c'est beaucoup plus intéressant, on va dire, que des investissements classiques dans des pays développés.
16:56 Mais en effet, étant donné qu'il y a le problème de réputation, le problème de risque politique, climatique,
17:01 eh bien, ça décourage beaucoup d'investisseurs, alors qu'il y a vraiment des énormes opportunités, vous l'avez dit,
17:05 avec les matières premières, mais encore, surtout avec le capital humain, je rappelle, qui est essentiel,
17:10 puisque la majorité des populations sont excessivement jeunes, et donc, ont vraiment une vraie richesse avec cela.
17:15 Anne-Sophie Alcif, merci beaucoup. La Sorbonne à Paris et le cabinet BDO France.
17:19 Merci Patrice Geoffron, le Cercle des économistes et le Centre de géopolitique de l'énergie et des matières premières.
17:24 Merci Emmanuel Cuny pour les informer de l'écho. Bonne journée à tous.
17:28 *musique*

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