Médecine - Oliver Cromwell, mort, enterré et... décapité deux ans après !
Philippe Charlier nous raconte la médecine à travers l'histoire d'Olivier Cromwell.
Retrouvez "Mes aïeux quelle époque !" sur : http://www.europe1.fr/emissions/mes-aieux-quelle-epoque
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00:00 "Europe 1, historiquement vôtre" avec Stéphane Bern.
00:04 Mais à eu quelle époque, mais à eu quelle époque...
00:07 Oui mais à eu quelle époque, une époque et même plusieurs qu'on vous raconte chaque jour pendant deux heures.
00:11 Toujours avec Jean-Luc Lemoyne, David Cassez-Lopez qu'on retrouve dans un instant.
00:14 Et maintenant c'est à vous Philippe Charlier, notre médecin légiste de l'histoire.
00:19 Alors ça s'est passé dans le passé, on remonte en 1660
00:23 quand un certain Olivier Cromwell a perdu la tête après avoir perdu la vie.
00:28 Et oui Olivier Cromwell n'a pas laissé un souvenir impérissable dans l'histoire anglaise,
00:32 c'est le moins qu'on puisse dire.
00:34 On est en janvier 1649, Oliver Cromwell mène la révolution en Angleterre,
00:39 il abolit la chambre des lords et il renverse le roi Charles Ier.
00:43 Il en a bien profité jusqu'à son décès le 3 septembre 1658 de Sa belle mort.
00:49 Mais alors comment a-t-il perdu la tête ?
00:51 Et bien tout est resté calme, tranquille et serein pendant deux ans.
00:54 Car en 1660, c'est la Restauration.
00:57 Charles II, le fils de Charles Ier, reprend le pouvoir et s'attaque au régicide.
01:02 Les criminels sont retrouvés, jugés, assez sommairement,
01:06 traînés dans la rue, pendus, éviscérés vivants, découpés en morceaux,
01:11 répartis un peu partout dans la ville, bref, éparpillés façon puzzle.
01:15 Mais il fallait être exemplaire et même les morts furent jugés.
01:18 Et parmi eux, Olivier Cromwell.
01:20 Le 28 janvier 1661, on procède à l'exhumation du Lord Protecteur.
01:25 Et avec d'autres traîtres, il va être transporté jusqu'au gibet
01:29 pour y être exécuté post mortem.
01:32 Au beau milieu de l'après-midi, les cadavres secs,
01:35 noircis par le bitume des soins d'embaumement, sont dressés,
01:38 ligotés, puis pendus haut et court.
01:42 Cromwell vient de mourir une seconde fois, cette fois par la justice des hommes.
01:46 - Et la tête ? - On y vient Jean-Luc.
01:48 A la suite de la pendaison, Cromwell, décidément de plus en plus mort,
01:51 est décapité et sa tête fait l'objet d'une bastonnade en règle.
01:55 Puis on l'empale sur une pique longue de près de 6 mètres
01:59 qu'on est allé placer devant l'entrée de Westminster Hall,
02:02 pour que nul n'ignore ce qu'ont fait en Angleterre des régicides.
02:06 Et le corps, me direz-vous ?
02:07 Aucune idée de ce qu'il a devint.
02:09 Pour certains, Marie, la fille de Cromwell, l'aurait discrètement subtilisé,
02:12 ce qui paraît assez incohérent avec la faisabilité historique,
02:16 et elle l'aurait enterré dans la propriété de son époux.
02:18 Ce qui est plus vraisemblable, c'est que le cadavre, assez fale,
02:21 ait fini précipité dans les égouts ou dans la tamise,
02:24 comme n'importe quel détritus encombrant.
02:27 Mais la tête, me direz-vous ?
02:28 - Mais oui, la tête, on vous dit !
02:30 - C'est quand même dingue, ça fait 3 minutes !
02:31 - Je crois que ça vous intéresse.
02:32 Eh bien, elle va connaître une suite d'aventures assez rocambolesque.
02:35 Toujours en haut de sa pique, elle tombe au sol en 1689,
02:39 à l'occasion d'une forte tempête.
02:41 Et elle est récupérée par une sentinelle qui la cache chez lui,
02:45 la dissimulant dans sa cheminée.
02:47 Ce qui va, au passage, favoriser sa conservation ultérieure
02:50 par un petit phénomène de fumage,
02:52 comme avec le saumon, ou le jambon de Parme ou d'Aoste.
02:55 Il va la garder longtemps, malgré la population londonienne
02:58 qui s'émeut de la disparition de l'art relique.
03:00 Elle réapparaît en 1710,
03:02 chez un collectionneur de curiosités franco-suisse,
03:04 un certain Claudius Dupuis,
03:06 qui l'expose dans son musée privé à Londres.
03:08 En 1738, Dupuis meurt, et son musée avec lui.
03:12 La tête réapparaît dans les mains d'un acteur alcoolique,
03:14 Simon Russell, quelques décennies plus tard,
03:16 une sorte de vieux souvenir historique un peu glauque.
03:19 Elle est ensuite achetée par un certain Cox,
03:22 permettant à Russell d'éponger ses dettes.
03:25 Les trois fers Hughes la rachètent alors
03:27 pour l'exposer dans une sorte de petit musée
03:28 centré autour du personnage de Cromwell.
03:30 On est en 1799,
03:32 plus de 100 ans après son exécution post-mortem,
03:35 et la tête se maintient encore dans un relatif bon état.
03:38 Les traces de la décapitation, de l'empalement et de l'embaumement
03:41 sont encore bien visibles,
03:43 mais le doute s'est installé quant à l'authenticité des restes.
03:46 S'agit-il vraiment du Lord Protector ?
03:48 Ne pourrait-ce être quelqu'un d'autre ?
03:49 - C'est un peu la tête maudite du coup.
03:51 - Oui, c'est ça, plus personne n'en veut,
03:53 et c'est presque à se demander si elle ne porterait pas un peu malheur.
03:56 Alors on la propose à Sir Joseph Banks,
03:58 qui refuse avec ce trait d'humour tout britannique.
04:01 Pardonnez-moi de ne pas vouloir observer
04:03 les ristes d'un vil et ancien républicain.
04:05 Mentionner simplement son nom
04:07 me fait bouillir le sang d'indignation.
04:09 En 1915, la tête est vendue à un certain Josiah Henry Wilkinson,
04:13 qui la place dans la salle à manger.
04:15 En 1957, Wilkinson meurt.
04:18 Il transmet la tête en héritage à son fils.
04:20 Celui-ci se refuse à la conserver,
04:22 il prend attache avec le Sydney Sussex College,
04:24 qui l'enterre dans un lieu tenu secret,
04:26 le 25 mars 1960.
04:29 Mais l'affaire n'est rendue publique que deux ans plus tard,
04:31 par crainte du scandale.
04:33 Mais si par hasard vous voulez voir le véritable visage de Cromwell,
04:36 ça n'est plus sur cette tête passablement abîmée
04:39 qu'il faut se pencher.
04:40 C'est sur son masque mortuaire,
04:42 conservé et présenté au château de Warwick,
04:44 qu'il faut regarder.
04:45 Les yeux clos, les lèvres pincées,
04:47 la barbe et la moustache,
04:49 on dirait qu'il dort profondément,
04:51 sans savoir ce que les Anglais
04:53 vont bientôt faire avec sa tête.
04:55 - Merci beaucoup Philippe, mais aïeux quelle époque !
04:58 Dans un instant c'est le début de la fin,
04:59 ou le début tout court,
05:00 mais avant de partir, on remonte aux origines,
05:02 avec David Cassel Lopez et son canon de Pachelbel.