Dominique Simonnot : "Chaque fois que je rentres dans une prison, je me dis on a touché le fond"

  • l’année dernière
Comme tous les ans, la contrôleure générale des lieux de privation de liberté a présenté aux sénateurs son rapport 2022. Cette année encore, Dominique Simonnot dresse un tableau accablant des conditions de détention, mais aussi des conditions de travail des agents pénitentiaires.
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Transcript
00:00 Chaque fois que je rentre dans une prison, je me dis "bah cette fois j'ai touché le fond"
00:07 et ben non, le fond est toujours plus loin.
00:10 Alors, je sais qu'on peut opposer surpopulation carcérale, laxisme de la justice, construction de places de prison,
00:22 toutes ces injonctions contradictoires en cours en ce moment.
00:30 Je rapproche le micro, oui ce sera mieux.
00:36 Oui parce que moi aussi ça me casse les oreilles.
00:41 Non mais j'ai l'impression qu'il me parle.
00:45 Voilà. Et donc chaque fois que je visite une prison, je pense avoir touché le fond,
00:54 mais non, le fond est toujours plus loin.
00:57 Moi je suis allée à Gradignan l'an dernier, Bordeaux-Gradignan.
01:02 Comme vous. Vous avez pu voir l'état de cette prison.
01:09 C'est là que j'ai rencontré des surveillants qui m'ont dit "moi, détenue, je refuserais de rentrer dans ces cellules".
01:16 Donc on leur disait "oui mais quand les détenus refusent de rentrer dans la cellule,
01:20 vous leur mettez un compte rendu d'incident et ils passent au prétoire et après ils vont au MITA".
01:25 On dit "oui mais c'est comme ça". Mais n'empêche qu'on refuserait, c'est trop horrible.
01:29 On travaille dans une détresse absolue.
01:31 Bois d'Arcy, après, je me suis dit, mais là j'ai touché le fond également,
01:36 parce que là j'ai regardé, je sais pas, vous voyez une prise qui sort du mur,
01:43 elle a une prise à laquelle s'accroche un fil de multiprise,
01:47 à laquelle s'accrochent des dizaines de fils avec des multiprises.
01:52 Et on se dit "mais ça va sauter un de ces jours".
01:56 Il va y avoir un truc grave, un incendie.
02:01 Et je parle toujours, on prend soin au contrôle général de parler de la sécurité à la fois des détenus,
02:09 mais aussi des surveillants, parce qu'il faut bien voir que la vie des surveillants en prison est un enfer également.
02:16 Je suis allée à Perpignan récemment, vous allez voir sortir d'ailleurs des recommandations en urgence.
02:23 J'entre dans une cellule, les détenus me disent "Madame, asseyez-vous".
02:28 Et tout de suite ils me disent "non, surtout ne vous asseyez pas, parce qu'il y a les punaises de lits".
02:34 À ce moment-là, ils montent leurs manches, ils montent leurs membres dévorés de bouffées par les vermines.
02:41 Et les surveillants me disent "Madame, surtout quand vous rentrez, pas question, faites comme nous.
02:48 Aucun de nos vêtements ne rentre chez nous. On met tout dans des sacs en plastique, on se déshabille sur le pas de la porte.
02:55 On met tout dans des sacs plastiques et tout au congélateur pour 72 heures, ce que j'ai fait en rentrant chez moi.
03:01 Heureusement, c'était très tard et aucun voisin n'est passé me prendre pour une folle avec mes sacs plastiques et mon congélateur.
03:09 Bon, mais c'est quand même... Est-ce que ça peut continuer comme ça ? Je ne crois pas.
03:17 Et d'ailleurs, je vous le confie parce que vous allez le voir sortir bientôt, nous avons réuni au contrôle général une quarantaine d'associations, d'organisations,
03:30 de syndicats pénitentiaires, de magistrats, d'avocats, d'associations qui oeuvrent en prison.
03:39 Parce que tous nous sommes d'accord, ça ne peut pas durer.
03:44 [Musique]

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