"Mes personnages sont des outsiders" : Rintarō, grand maître de l’animation japonaise

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Transcription
00:00 Bonjour à tous, c'est bientôt la fin de la saison et avec un petit casse-tête de
00:04 programmation, de quoi vous parler ? De quoi ne vous avons-t-on pas encore parlé ? Qui
00:09 n'avons-nous pas encore reçu ? Alors durant ces deux semaines, on a choisi de revenir
00:13 avec Henri Leblanc et Laura Dutèche-Pérez sur ce qui nous a surpris durant ces 7 ans
00:20 de grande table.
00:21 Surpris comme surpris par la nuit.
00:23 Mon tout premier reportage pour France Culture il y a 20 ans dans les studios Ghibli à Tokyo.
00:28 Fasciné par le succès et la reconnaissance mondiale depuis, qu'a acquise l'animation
00:32 japonaise et encore plus halluciné par le boom du manga en France ces dernières décennies.
00:36 Pour fêter cela, le club accueille ce midi un grand grand nom de l'animation japonaise,
00:41 l'un des pères d'Albator et d'Astro Boy.
00:44 Il s'appelle Rintaro.
00:45 Il est avec nous.
00:46 Réalisateur de Galaxy Express 999 et de Metropolis, il a vu, connu et directement contribué à
00:56 60 ans d'animation au Japon.
00:58 A 81 ans, Rintaro est de passage en France.
01:01 Invité d'honneur du festival du film d'animation DanCi où il a présenté ce week-end son
01:05 nouveau court métrage d'animation intitulé, allez je me lance, Nezumi Kozo Jiro Kishi.
01:11 Pour fêter ça donc, on a plaisir à l'accueillir ici avec sa voix française, Miyu Mitake,
01:17 le roi.
01:18 Et bonjour à vous Rintaro.
01:19 Rintaro.
01:20 Bonjour.
01:21 On va écouter un extrait musical notamment de ce court métrage que vous avez signé et
01:32 présenté à Annecy.
01:34 (extrait musical)
01:49 (extrait musical)
02:16 (extrait musical)
02:41 (extrait musical)
03:09 (extrait musical)
03:22 A travers ce film de 25 minutes présenté à Annecy, vous vouliez rendre hommage.
03:27 Dites-vous au cinéaste Sadao Yamanaka, figure du cinéma japonais du siècle dernier, qui
03:32 a marqué le passage du muet au parlant.
03:35 Ce qu'il fait, et ce que vous faites, en redonnant vie à son personnage de bandit
03:41 de la fin de la période Edo, un bandit qui volait aux riches pour donner aux pauvres.
03:47 Mais alors Rintaro, moi je pensais que Robin des Bois était britannique, qu'il était
03:52 caché dans la forêt de Sherwood.
03:53 Et avec vous j'apprends qu'en réalité, il était aussi un peu, beaucoup, japonais.
03:59 Robin des Bois, ce bandit de grand chemin ?
04:01 Oui absolument, c'est vraiment exactement ça.
04:08 Il y avait ce personnage et je voulais vraiment le mettre dans un cadre de cinéma et que
04:16 c'était vraiment mon souhait de faire ça.
04:18 Mais qu'est-ce qu'il représente ce voleur, ce jirokichi pour vous, et dans la culture
04:23 japonaise ?
04:24 Ça fait longtemps que je fais des films et à chaque fois que j'ai un personnage
04:36 principal, c'est toujours quelque part un outsider, c'est un externe.
04:41 Et je voulais toujours faire un film avec en personnage principal le outsider.
04:50 Et c'est pour ça que je voulais finir avec Nezumi Kozo Jirokichi.
04:54 Oui, alors dans ce film on voit Jirokichi justement traqué mais plutôt plus malin
04:59 que ceux qui le poursuivent, qui n'arrivent jamais à l'arrêter.
05:02 On le voit masqué, puis à visage découvert, on l'entend dénoncé aussi par ses actions
05:08 la corruption politique et l'enrichissement d'une classe au détriment des plus pauvres.
05:12 Est-ce que les inégalités, la question du peuple, sont des grands thèmes du cinéma
05:18 japonais depuis toujours, Rintaro ?
05:20 Oui absolument.
05:22 C'est vrai que les films récents c'est moins fréquent, mais avant au Japon c'était
05:31 quelque chose de très fréquent et c'était un thème qui revenait fréquemment.
05:34 Et donc c'est absolument ce que vous dites.
05:36 Qu'est-ce que c'est l'avant ?
05:38 Avant, c'est quand ?
05:40 Quand j'étais enfant, quand j'avais 12 ans, 13 ans à peu près, les films japonais
05:49 à l'époque c'était vraiment l'âge d'or.
05:50 Et petit à petit le film japonais s'est modifié avec l'apparition de la télé japonaise.
06:00 Les héros jusqu'ici étaient tous des outsiders.
06:06 Ils étaient anti-système.
06:09 Donc ça serait un peu comme des Killer Lemon par exemple.
06:14 Des rôles qui finalement faisaient sortir de la société on va dire.
06:22 Ça veut dire que vous, Rintaro, vous n'êtes pas un enfant de la télé, vous êtes un
06:26 enfant du cinéma.
06:27 Oui, quand j'avais 8 ans, j'ai vu la première fois "La fleur de pierre" qui est un film
06:39 russe.
06:40 Et c'est à ce moment-là que je crois que le démon du cinéma s'est empris de moi.
06:46 Et pour moi, au niveau du travail, j'ai fait avec Tezuka Osamu tout ce qui était "Astro
06:53 Boy" par exemple.
06:54 C'était ça mon premier travail.
06:55 Mais j'ai toujours pensé que je voudrais faire du cinéma un jour.
06:59 Et quand j'ai pu avoir cette occasion, je m'en suis saisie et j'ai continué dans
07:05 le cinéma jusqu'ici.
07:06 Du cinéma en prise de vue réelle et du cinéma d'animation aussi ?
07:10 Moi, à la base, c'est vrai que je voulais devenir un réalisateur de cinéma.
07:20 Quand j'étais petit, pour moi, tout ce qui était animation, finalement, ce n'était
07:25 que les courts-métrages de Disney avec Mickey Mouse, Donald Duck.
07:30 Mais au fond de moi, ce que j'aimais vraiment, c'était les films français, les films
07:36 italiens.
07:37 C'était ça qui moi m'attirait.
07:39 Et c'est pour ça que je voulais devenir réalisateur.
07:41 Mais c'est assez compliqué de devenir finalement réalisateur de cinéma.
07:47 Et quand je gripouillais et que je dessinais des mangas, et ça c'était à peu près
07:55 quand j'avais 10-12 ans, bon vraiment je n'étudiais absolument pas et j'étais
08:00 en train de dessiner.
08:02 Et autour de moi, tout le monde me disait que j'étais un voyou puisque je n'étudiais
08:07 pas.
08:08 Aujourd'hui, le cinéma d'animation japonais est largement aussi populaire que Disney et
08:14 Pixar.
08:15 Il fait la part belle aux grands studios d'animation américains avec des hommes et
08:21 des femmes comme vous, avec aussi les productions du studio Ghibli, de Miyazaki et de Takahata.
08:28 Comment avez-vous réussi à défier les studios américains sur leur propre terrain ?
08:35 Quelle est la force de l'animation japonaise pour vous ?
08:40 L'américain style ?
08:44 Je ne sais pas si nous avons défié les studios américains.
08:51 Mais pour ma part, il y avait Disney qui est vraiment le grand classique.
08:58 Mais pour moi, ce qui m'occupe n'est pas Disney.
09:02 Ce n'est pas ce qu'il y a au sein de moi.
09:04 Pour moi, c'est les films noirs français, les films italiens.
09:10 Et donc, je voulais vraiment faire de l'animation avec ce genre de vision.
09:18 Mais c'était difficile d'avoir une fusion de ces deux-là.
09:24 Ce n'était pas évident pour moi.
09:26 Et donc, avec Osamu Tezuka, Astro Boy, en faisant des animations pour la télé, petit
09:33 à petit, ça m'a permis de bâtir cette confiance.
09:36 Oui, parce que vous savez que nous, on est des enfants de la télé.
09:39 Vous savez Rintaro.
09:40 Et nous, on a grandi avec vous, avec Astro Boy.
09:43 On a grandi aussi avec Albator, avec tous ces personnages que vous avez mis en mouvement.
09:50 Mais si on en revient au cinéma, à ce cinéma qui vous a marqué, c'est peut-être là
09:57 la force du cinéma d'animation japonais et la force de votre cinéma à vous Rintaro.
10:03 C'est d'avoir réussi à décaler le point de vue, à faire des films qui sont pour les petits,
10:07 mais aussi pour les grands, qui nous rapportent et qui nous racontent quelque chose.
10:11 Et qui nous parle à la fois de la culture japonaise, de l'histoire de ce pays, de l'histoire
10:16 de ce peuple, avec un message souvent universel.
10:20 Alors à la fin de ce court-métrage, on découvre qu'il s'agit d'un rêve, d'un rêve de
10:24 Sadao Yamanaka sur le point de tourner un film.
10:27 Vous le représentez à la fin de ce film, le vôtre, dans sa chaise de réalisateur.
10:31 Assoupi, l'équipe l'attend, elle est prête à tourner.
10:34 Lui, il vient de rêver le film que vous, vous nous montrez Rintaro.
10:38 Il y a sur son visage ce long menton qui le caractérise et une serviette blanche qui entoure ses cheveux.
10:44 Et vous le réincarnez réellement, ce cinéaste du début du XXe siècle.
10:49 On le présente comme le Jean Vigo japonais ici, mais qu'est-ce qu'il a représenté
10:54 pour le cinéma japonais ? Racontez-nous, et pour vous.
10:57 Pour moi, Sadao Yamanaka, c'est...
11:06 J'ai en fait entendu parler de lui pour la première fois quand je faisais ma propre série télévisée.
11:18 Il était vraiment quelque part dans le coin de ma tête, puisque j'étais très occupée par cette série télévisée.
11:23 Et à un moment donné, dans un petit cinéma de Ginza, j'ai vu un film de Sadao Yamanaka,
11:30 et c'est comme ça que j'ai vraiment découvert son vœu.
11:33 Et donc, c'est "Pauvres peuples" et "Ballons de papier".
11:41 Et c'était justement lorsque le Japon venait de commencer à être en guerre,
11:47 et c'était reflété dans l'œuvre, et donc le thème était assez lourd aussi.
11:52 Et pour moi, ce qui était vraiment le plus frappant, c'était la dernière scène.
12:00 Il y a dans ce canal, en fait, un ballon de papier qui est en train de flotter.
12:05 Et ça m'a extrêmement touchée.
12:09 Et vraiment, c'était les moments où on était parlé du silencieux,
12:15 et j'étais vraiment submergée par le fait que des réalisateurs pouvaient faire ce genre de film.
12:21 Et c'était une grande rencontre, vraiment.
12:24 Et je l'ai constamment gardé dans mon cœur.
12:29 Et bien sûr, ce n'est pas un long métrage, c'est un court métrage, cette fois-ci,
12:34 mais ce sentiment que j'avais gardé dans mon cœur, c'était ça que je voulais exprimer.
12:41 Ce petit ballon qui se promène dans le petit canal de la ruelle,
12:49 on le retrouve à la fin de votre court métrage, "Nezumi Kozo, Jiru Kishi",
12:55 ainsi est-il intitulé, et ainsi a-t-il été présenté ce week-end au Festival d'Annecy.
13:00 Ce petit ballon, on le retrouve, et il évoque effectivement le ballon de papier
13:04 qui s'éloigne dans ce film, "Pauvres humains", qui vous a tant marqué,
13:09 et que vous avez choisi d'honorer à travers la figure de son cinéaste.
13:13 Mais qu'est-ce qui symbolise ce petit ballon, de manière si poétique ?
13:16 Un espoir ? Une liberté retrouvée ?
13:19 Oui, il y a l'espoir, en effet.
13:25 Mais vraiment, c'est un espoir très très léger, finalement.
13:30 C'est comme ce ballon de papier qui pourrait vraiment disparaître en quelques secondes.
13:36 Dans cette image, il était sur le canal, et il y avait vraiment cet espoir de...
13:41 On a envie d'aller au bout du trajet de ce ballon,
13:46 mais en même temps, il y a cette fragilité qui existe en même temps.
13:49 Et cette fragilité, et ce que tout le monde a finalement, c'est un peu comme un rêve.
13:55 Et c'était ça que je voulais mettre en scène ici.
14:02 Je crois aussi que Sadao Yamanaka voulait aller au-delà de cette fragilité dans ses autres films,
14:09 et que finalement, malheureusement, c'est là où sa vie s'est terminée.
14:13 Il est mort très jeune ?
14:15 Oui, il avait 28 ans.
14:18 Mais il a eu le temps de tourner quand même ce film qu'il a rêvé,
14:23 où est-ce que cette histoire de bandit de grand chemin est restée à l'état de scénario ?
14:27 Oui, absolument, il n'a pas pu terminer, ça reste au niveau de scénario.
14:31 Et donc aujourd'hui, vous avez concrétisé son rêve.
14:34 Oui, absolument. Pour moi, Sadao Yamanaka, finalement,
14:40 il n'y avait donc Nezumi Kozo Jirokichi où il n'y avait que le scénario qui est resté.
14:44 Et en court métrage, je voulais faire, finalement, rendre hommage à cette œuvre.
14:50 Et donc, je voulais faire un film qui serait un peu plus long,
14:54 plus long que la suite de cette œuvre.
14:57 Et donc vraiment, fin époque Edo,
15:00 c'était vraiment un seul segment du scénario de Sadao Yamanaka.
15:05 Et dans ce scénario, normalement, ça aurait dû être un film d'une heure et demie.
15:12 Et c'est pour ça que moi, j'ai fait des coupures, disons,
15:17 pour pouvoir vraiment avoir que l'essence de l'histoire.
15:23 Si on s'arrête là, je me suis dit que l'histoire, le message ne passerait pas,
15:27 finalement, à notre jeune génération.
15:29 Et c'est pour ça qu'on s'est dit qu'à l'intro et à la conclusion,
15:33 on a mis le personnage de Sadao Yamanaka même dans notre court métrage.
15:37 Et vous, Rintaro, à 81 ans, alors que vous commencez à envisager la retraite, je crois,
15:42 est-ce que vous avez concrétisé, réalisé tous vos rêves en 60 ans d'animation ?
15:47 Oui, en 60 ans, oui, c'est bon, j'ai réalisé.
15:51 Le fait d'avoir fait ce court métrage de Sadao Yamanaka, ce rêve que j'avais,
16:03 j'y suis parvenue.
16:06 Et pourquoi ? Pourquoi il fallait le faire pour vous ?
16:09 Quel cycle vous vouliez boucler ?
16:11 Pourquoi c'était important d'en revenir, on imagine aussi, à votre âge ?
16:14 À ce qui vous a donné des envies de cinéma ?
16:17 Moi, j'ai commencé par les mangas de Osamu Tezuka.
16:25 Et au Japon, c'est vrai que c'est un peu particulier,
16:28 dans le sens que la plupart des animations viennent d'oeuvres originales de mangas.
16:33 Donc l'animation et les mangas, c'est quelque chose qui est une équipe, qui est indissociable.
16:39 Et pour moi, c'est dans ce genre de contexte que j'ai fait beaucoup de travail aussi.
16:44 Et un jour, j'arrive au point de Metropolis, qui est toujours une oeuvre aussi d'Osamu Tezuka.
16:52 J'ai vu à 8 ans le film qui m'a frappée,
16:58 et j'avais toujours cette image de film dans ma tête.
17:02 Et une de mes réponses à cette image que j'avais, c'était vraiment le Metropolis que j'ai pu faire.
17:09 Et j'ai l'impression d'avoir commencé à attraper ce démon du cinéma que je continuais à courir après.
17:16 Et avant le film de Fritz Lang, c'était effectivement un roman graphique d'Osamu Tezuka,
17:22 votre grand maître, celui qui vous a permis d'avoir une idée de ce qu'il y avait dans le cinéma.
17:28 En 2001, Rintaro, vous avez adapté Metropolis en film d'animation,
17:34 manga en un seul volume, publié en 1949 de Tezuka.
17:38 Qualifié de génie, le mangaka Osamu Tezuka, décédé en 1989 à l'âge de 61 ans,
17:44 a marqué l'histoire du manga, et de la bande dessinée.
17:50 Et il a marqué son temps. On l'écoute.
17:53 J'ai peur que les Japonais, surtout depuis qu'ils vivent dans une société relativement contrôlée et très établie,
18:05 ils ont cette habitude de vivre en groupe.
18:09 Et dès qu'il y a une direction à prendre, tout le monde va prendre cette même direction.
18:15 Et j'ai peur que cette façon de se comporter soit très similaire à celle des robots.
18:22 On dit souvent que les Japonais n'ont pas de créativité et qu'ils imitent tout.
18:29 Et peut-être que jusqu'ici, c'était le cas, en effet.
18:34 Je pense que pour que les Japonais s'adaptent aux cultures étrangères,
18:39 ils devaient s'en nourrir et les copier tel quel pour pouvoir mieux s'en accaparer.
18:47 C'était presque devenu une vérité générale.
18:51 Mais je crois que dorénavant, c'est maintenant que la société japonaise va pouvoir faire plus preuve de créativité.
18:59 Et je crois que c'est là aussi que l'intelligence artificielle va pouvoir peut-être venir faire une différence.
19:07 Venir faire un changement de paradigme avec cet apport que les Japonais pourraient avoir,
19:14 en tout cas dans ce contexte du XXIe siècle.
19:17 Il avait prévu pas mal de choses, Tezuka.
19:21 Il est particulièrement visionnaire dans cet extrait qu'on vient d'entendre.
19:26 L'importance pour le Japon d'imposer, de raconter sa propre histoire et sa propre culture.
19:33 Mais aussi cette idée que la créativité japonaise serait très respectée à l'avenir.
19:38 Et ça y est, elle l'est.
19:40 Est-ce qu'on le doit à la force, à la créativité des hommes et des femmes japonais ?
19:46 Ou aussi un peu à cette intelligence, pas simplement humaine, virtuelle,
19:50 qui est en train de s'imposer aujourd'hui dans notre XXIe siècle ?
20:01 J'étais en train d'écouter moi aussi cet extrait de Osamu Tezuka.
20:04 Et c'est vrai que c'était un discours qu'il avait de manière générale dans la vie de tous les jours.
20:08 Et quand on parle de créativité japonaise, je crois que finalement elle découle même de l'époque Edo au Japon.
20:15 Par exemple les ukiyo-e, qui étaient les estampes japonaises.
20:18 Et ce genre de choses, je crois que vivaient aussi dans Osamu Tezuka.
20:23 Donc il a à la fois tort et à la fois raison.
20:26 C'est-à-dire que ça vient du passé, cette créativité.
20:29 Et elle continuera cette force à s'exprimer.
20:32 Par la suite, on l'entendait là, Tezuka, en 1978, nous parler de l'avenir.
20:37 On va écouter un autre maître du dessin animé japonais.
20:41 Les Français vous ont découvert, je le disais tout à l'heure, en dessin animé avec Albator,
20:44 pirate de l'espace, imaginé par Leiji Matsumoto, décédé cette année, le 13 février dernier.
20:51 On l'écoute à propos du succès d'Albator.
20:53 Je ne crois pas qu'il y ait de racisme, ni envers les terriens, ni envers les autres races.
21:05 Les pirates vivent librement.
21:08 Et vraiment, ce drapeau avec la tête de mort signifie qu'ils sont libres,
21:14 et que les pirates se battront toujours, même après être devenus des os.
21:18 Ce n'est pas pour faire peur.
21:21 Même les chevaliers en Europe ou les samouraïs au Japon, ils utilisaient ce symbole.
21:25 C'est quelque chose de commun dans le monde entier.
21:28 C'est pour ça qu'en voyant ça, je me suis pris d'admiration pour le drapeau à tête de mort,
21:32 et le sens de ce drapeau, où même en devenant des os, je m'abattrais, je continuerais à m'abattre.
21:38 C'est pour ça que j'ai écrit Albator avec ça en tête.
21:43 Comme c'est une idée universelle, je pense que c'est finalement ça qui a également résonné chez les Français.
21:50 Voilà le mangaka Matsumoto qui a imaginé le personnage d'Albator,
21:54 que vous, Rintaro, vous avez adapté.
21:57 D'abord en série télé, vous êtes devenu le réalisateur attitré de cette série à la fin des années 1970,
22:05 que les Français ont grandement découvert, savouré, apprécié dans les années 1980.
22:10 Et puis, il y a deux de vos longs métrages qui ont découlé aussi de cette histoire-là,
22:15 donc Galaxy Express 999, qui vient d'être restaurée.
22:20 Pourquoi Albator ? Pourquoi cet attachement ? Quelle est l'histoire dans l'histoire ?
22:24 Nous, on ne la connaît pas. Comment vous avez rencontré Albator et pourquoi vous avez choisi de l'adapter ?
22:30 Comme vous l'avez dit tout à l'heure, moi, ça fait 60 ans que je travaille dans l'animation japonaise.
22:43 Dans ma vie, il y a eu plusieurs moments, des milestones, on va dire, des jalons.
22:47 Et le premier moment où ce jalon arrive, où mon destin aurait pu changer,
22:54 je n'ai pas rencontré Reiji Matsumoto, mais plutôt j'ai rencontré le personnage d'Albator.
23:08 C'est la rencontre avec ce personnage qu'il y a eu ce nouveau chemin pour moi qui s'est dégagé.
23:13 Peut-être que si je dis ce genre de choses, Reiji Matsumoto va me dire "mais qu'est-ce que tu racontes, c'est mon personnage".
23:21 Mais cette rencontre avec Reiji Matsumoto et Albator m'a permis d'avoir une nouvelle rencontre qui va venir plus tard.
23:35 Et à la différence d'Osamu Tezuka, il était vraiment quelqu'un de très romantique.
23:39 Bien sûr, il faisait beaucoup de commentaires, étant donné que c'était lui qui avait fait l'oeuvre originale,
23:47 mais il était très romantique dans sa façon de penser.
23:49 Et il disait toujours "j'ai envie de faire ci, j'ai envie de faire ça", et donc moi j'ai écouté ses requêtes.
24:02 Mon souhait était vraiment de pouvoir faire une oeuvre qui va dans la continuité de ce que Reiji Matsumoto souhaitait.
24:07 Mais quand vous l'avez regardé dans les yeux, Albator, qu'est-ce qu'il vous a dit ? Pourquoi ce personnage vous a parlé plus qu'un autre ?
24:13 Pour commencer, vraiment ce côté loup solitaire.
24:23 Il est vraiment comme un orphelin, il est tout seul en train de se battre.
24:29 Et donc voilà, j'ai été très attirée par ce type de personnage.
24:33 Au festival d'Angoulême, cette année, a été Rintaro consacré, honoré, une star, deux stars même, du manga japonais.
24:44 Deux mangaka, comme on dit, Ryoshi Ikegami, célèbre pour ses personnages aussi de gangster.
24:52 Et puis peut-être dans la plus jeune génération, il faut quand même citer aussi Hajime Isayama, qui est l'auteur de "L'attaque des titans".
25:01 Est-ce que vous allez passer, vous, le relais à cette jeune génération de dessinateurs, que ce soit pour le manga, que ce soit pour le cinéma d'animation ?
25:11 Est-ce que vous voyez le futur grand ? Est-ce qu'il a déjà émergé ?
25:16 Oui, en effet, tout le travail que nous avons fait jusqu'ici, en 1980, je crois qu'on a eu une certaine apogée de notre technologie.
25:26 Il y avait Katsuhiro Otomo, Satoshi Kon, par exemple.
25:31 Et toute cette génération qui ont grandi, qui ont été des personnages, qui ont été des personnages,
25:38 ils vont avoir en fait une nouvelle façon de s'exprimer.
25:43 Et c'est là où je pense qu'il y a des nouvelles expressions qui naissent par rapport à l'époque et que nous voyons en fait naître en ce moment.
25:53 Et en même temps, il y a aussi bien sûr des animations qui sont plus à l'heure,
26:00 qui vont être des produits phares, plutôt, mais des produits.
26:04 Et actuellement, l'animation japonaise est notamment animée par ces produits phares.
26:12 Et c'est vrai que j'aimerais voir cette nouvelle génération, comment dorénavant elle va finir par s'exprimer ?
26:19 Avec ces nouveaux outils et ce nouveau paradigme qu'ils ont.
26:29 Voilà, vous resterez comme nous, Rintaro, curieux et attentif, surpris par ce qui va se passer à l'avenir dans le monde de l'animation japonais.
26:38 Merci mille fois à vous d'avoir été avec nous et merci à Miyu, Mitake, le roi, votre interprète, traductrice aujourd'hui.
26:45 Et à Henri Leblanc et le Radio-THPS qui ont programmé et préparé cette émission avec l'aide précieuse de Sacha Matéi.
26:51 A Félicie Fauger à la réalisation et à Ruben Karmézyn à la technique. Merci.
26:56 à la réalisation et à Ruben Carmésine à la technique.

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