L'invité du jour : Le journal d'un maire de campagne

  • l’année dernière
Retrouvez William Leymergie entouré d’experts, du lundi au vendredi en direct dès 12h45, pour une émission dédiée aux problématiques de notre quotidien.

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00:00 [Musique]
00:05 - Bonjour Christian Branclard.
00:07 Vous êtes maire honoraire, c'est comme ça qu'on dit quand on est plus mûr.
00:10 Maire honoraire de Varangeville-sur-Mer, c'est une petite commune de Normandie.
00:14 Alors pourquoi c'était important pour vous, aussi important que ça,
00:17 pour partager votre ancien quotidien de maire ?
00:19 - Parce que je trouve qu'on attaque beaucoup les maires,
00:23 on dit qu'il y a une sorte d'agressivité très forte
00:28 et j'ai pensé qu'il était nécessaire et même utile éventuellement
00:33 de raconter ma vie de maire telle qu'elle est, le quotidien du maire.
00:37 - Ok, mais qu'est-ce qui est différent quand on est maire d'une petite commune
00:40 par rapport à des agglomérations plus importantes ?
00:43 - Il y a une énorme différence, c'est qu'on est seul.
00:45 On a juste une secrétaire de mairie et on n'a pas de collaborateur.
00:49 - Ah oui, c'est pas comme le Conseil de Paris où ils sont des délisaines.
00:51 - Non, c'est le contraire du Conseil de Paris.
00:53 - C'est ça, on se débrouille.
00:55 - On se débrouille tout seul et c'est très difficile
00:57 parce qu'il y a des lois, des textes qui s'empilent,
00:59 des complexités que vous ne connaissez pas nécessairement.
01:02 Donc c'est un travail énorme en fait.
01:04 - Oui, par exemple il faut venir en aide aux autres
01:07 et quand il n'y a plus de pharmacie ou quand il n'y a plus de boulangerie, etc.
01:10 qu'est-ce qu'il faut faire ?
01:11 Eh bien le maire négocie pour obtenir une pharmacie et alors ça marche ?
01:14 - Ça marche mais il faut se donner du mal parce que dans mon cas,
01:17 il n'y avait pas assez d'habitants,
01:19 donc il a fallu mélanger les habitants et rajouter des touristes.
01:23 C'est difficile mais le préfet a finalement été convaincu.
01:26 - C'est d'abord lui qu'on doit convaincre mais pas seulement.
01:29 - Ah oui, il faut convaincre le préfet, absolument.
01:31 - D'accord. Parmi les bons souvenirs, il y en a quelques-uns je suppose.
01:34 Il y a une visite surprise, figurez-vous,
01:36 n'est pas de n'importe qui, une star, Michèle Platini.
01:39 Vous nous racontez ça.
01:41 - Écoutez, oui c'est une visite surprise.
01:43 Il y a beaucoup de choses joyeuses quand on est maire.
01:45 Il n'y a pas que des problèmes.
01:47 L'une des conseillères municipales,
01:49 elle est mariée avec un journaliste,
01:51 qui s'appelle Hervé Dutu, qui est journaliste sportif.
01:53 - Oui, très bien.
01:54 - Et elle me dit, mon mari va faire une fête pour son jubilé.
01:59 Et elle me dit, il y aura des amis à lui.
02:02 Alors je lui dis, très bien, c'est parfait.
02:04 Et les amis à lui, c'était Platini, c'était Giresse.
02:07 C'est comme si Mbappé se pointait à Marangéville.
02:10 Ça a fait de l'effet, je peux vous dire.
02:12 - Il faut comprendre pour ceux qui n'ont jamais vu un maire au travail,
02:15 moi, le maire de mon village, quand je me promène avec lui,
02:18 on fait 100 mètres, il y a déjà 10 personnes qui lui tombent dessus.
02:21 On lui dit, non, pour la poubelle, vous y pensez ?
02:23 Parce que ça gêne.
02:24 Ou alors, pourquoi vous éteignez la rue à 11h ?
02:27 Parce que mon fils, il travaille, il rentre à 11h15.
02:29 Ainsi de suite, non ? Ça n'arrête pas.
02:31 - Ça n'arrête pas.
02:32 D'un autre côté, c'est intéressant aussi.
02:34 Parce que quand on est maire, on peut faire des choses.
02:36 On voit ce qu'on fait, ce qui n'est pas mal.
02:38 - On voit ce qu'on fait, vous avez raison.
02:39 - Dans la vie, voir ce qu'on fait, c'est pas évident.
02:41 Donc moi, j'ai été très heureux d'être maire,
02:43 malgré les difficultés, malgré les obstacles.
02:45 Et en plus, évidemment, j'avais une vie professionnelle.
02:48 - Oui, c'est ça.
02:49 J'allais vous demander si vous étiez maire à plein temps.
02:51 - Mais non, on peut être maire.
02:53 On est maire à plein temps, en réalité, mais pas vraiment.
02:56 Parce que maire n'est pas un métier, c'est une mission.
02:58 - Et vous aviez un métier ?
02:59 - J'avais des métiers, tout au long des 31 ans, oui.
03:02 J'avais des métiers dans les entreprises françaises, oui.
03:04 Absolument.
03:05 - Alors, les choses qui font sourire,
03:07 mais M. le maire avait aussi dû gérer une affaire de nudiste.
03:11 On n'est pas à Saint-Tropez, mais enfin, quand même.
03:13 - On n'est pas à Saint-Tropez, et puis comme il fait froid,
03:15 c'est une affaire relativement facile à résoudre.
03:17 - Oui, la pluie vous aide.
03:20 - La pluie nous aide, le vent aussi, et le climat, surtout.
03:23 - D'accord.
03:24 Et est-ce que vous attendiez, dans ce quotidien-là,
03:28 quand vous vous êtes présenté, à la difficulté de la tâche ?
03:32 - Non. Franchement, non.
03:33 Quand on est maire, je crois qu'on découvre la difficulté,
03:35 on découvre l'intérêt de la tâche, et surtout, on apprend.
03:38 On apprend à recevoir les gens, à les comprendre, à les aider.
03:42 C'est du bénévolat, mais c'est évidemment
03:45 un véritable engagement.
03:47 - Alors, au-delà de la difficulté du métier dont nous venons de parler,
03:51 vous êtes confronté, vos collègues sont confrontés, vous, je ne sais pas,
03:56 vous aussi, vous avez été confronté à des violences.
03:59 Alors, est-ce que vous comprenez qu'il y a de moins en moins de personnes
04:01 attirées par la fonction de maire ?
04:03 Vous le savez bien, ça.
04:04 Et certains sont découragés, du coup.
04:06 - Il y a de moins en moins de candidats pour trois raisons.
04:08 D'abord, les violences que l'on voit sont épouvantables.
04:11 Les réseaux sociaux sont d'une calamité.
04:14 Et aussi, cette espèce de vocabulaire que l'on perçoit,
04:19 par exemple, à l'Assemblée nationale,
04:21 qui est un vocabulaire d'agressivité,
04:23 de manque absolu de courtoisie.
04:26 On traite les gens en ennemis et non pas en adversaires politiques.
04:29 Toutes choses qui sont de nature à décourager les vocations politiques
04:33 et à décourager tous ceux et celles qui veulent être maire.
04:37 Je répète, c'est du bénévolat.
04:39 Mais s'engager dans un contexte comme celui-là,
04:41 je dois avouer que c'est très difficile.
04:43 Et vous avez raison, il y a pénurie de candidats.
04:47 On ne se précipite pas à la porte des mairies.
04:50 - Mais alors quoi ?
04:51 Qui peut résoudre ce genre de problème-là ?
04:53 C'est l'Assemblée ? C'est une loi ?
04:55 C'est un nouveau statut pour le maire ? Je ne sais pas.
04:58 - Je crois que la première chose qu'on peut espérer,
05:01 c'est que les gens qui sont en haut,
05:03 c'est-à-dire à l'Assemblée nationale en particulier,
05:06 se comportent d'une autre manière.
05:07 Ce serait quand même une aide fantastique
05:10 pour mieux comprendre que le rôle des élus est absolument indispensable.
05:14 - Ils sont élus aussi.
05:15 - Ils sont élus mais ils ne se comportent pas bien.
05:17 Ils se traitent très mal, vous avez vu.
05:19 La deuxième chose que l'on peut imaginer,
05:21 c'est un statut des maires très protecteur.
05:23 C'est-à-dire que franchement, toute personne
05:25 qui agresse verbalement ou physiquement un maire
05:29 ou un élu d'une manière générale,
05:31 devrait être sanctionnée de la manière la plus radicale
05:34 car c'est tout à fait inadmissible.
05:36 - Vous l'avez subi ?
05:37 - Non, moi je n'ai pas subi d'agression physique,
05:40 je n'ai pas subi d'agression épouvantable
05:42 sur le plan du vocabulaire verbal
05:45 et quand les gens se comportaient de manière un peu désagréable,
05:48 je les mettais dehors.
05:50 Mais si vous voulez, franchement, d'une manière générale,
05:53 en ce qui me concerne, je n'ai pas eu à me plaindre du tout,
05:56 j'ai plutôt eu à considérer que les gens se comportaient bien avec moi.
05:59 - Journal d'un maire de Campagne, Christian Blacquart,
06:03 c'est publié chez Plon.
06:04 Merci de votre visite.
06:05 - Merci monsieur.
06:06 - On passe maintenant aux questions.
06:08 [Musique]

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