Sophie, 31 ans, infirmière en soins palliatifs Raconte moi ton métier
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00:00 Je m'appelle Sophie, j'ai 31 ans, infirmière à la maison médicale Jeanne-Mériez depuis
00:07 un peu plus de 4 ans.
00:10 J'ai des dessins palliatifs, je me travaille déjà depuis un moment parce que j'avais
00:15 pu observer que dans ce genre de service, le côté relationnel a une grande part, une
00:20 grande importance.
00:21 Je me souviens que les fois où je pouvais avoir un peu plus de temps pour laver les
00:26 dessins de patients, pour les nettoyer, les dessins dentiers, je sentais comme un accomplissement
00:32 ou en tout cas quelque chose de beaucoup plus complet dans la prise en charge.
00:36 On est en soins palliatifs, donc on a la chance d'avoir 2 à 4 patients par binôme infirmière
00:42 et soignante, ce qui nous octroie quand même beaucoup de temps, une demi-heure, trois quarts
00:48 d'heure en moyenne, parfois plus quand c'est nécessaire, parfois moins quand le patient
00:54 a besoin de notre temps.
00:55 En soins palliatifs justement, on sait qu'on arrive à la fin importante de la maladie
01:01 et donc on est là pour les accompagner dans ce dernier moment.
01:05 Pour l'avoir vécu, je trouve que c'est plus frustrant de vivre un décès dans un
01:09 service où on attend la guérison que de vivre un décès dans un service où on a préparé
01:13 ce décès.
01:14 Quand on sait qu'un patient arrive vers la fin de sa maladie, il y a tellement à
01:19 arriver en soins palliatifs pour être dans cette démarche de préparation, en tout cas
01:24 d'accompagner dans ces derniers moments.
01:26 C'est pour ça qu'on parle de ton temps de la mort, plus loin de là, mais au contraire
01:30 beaucoup dans la vie.
01:31 Du coup, il y a des choses qu'on fait en soins palliatifs qu'on ne fait pas ailleurs.
01:35 Raison de dire aux patients, mais évidemment, venez avec votre poste de soins d'urgence
01:39 logique, évidemment, quand on dit au fumoir, parce que c'est important pour vous, un diabétique,
01:44 on va lui proposer un gâteau avec plein de sucre parce qu'il n'y a plus l'enjeu de
01:50 la guérison, de l'amélioration de l'état parce qu'on sait bien qu'on est arrivé
01:55 au bout.
01:56 Et donc, tous les moments de bien-être prennent toute la place.
01:59 On est très content de la petite collaboration qu'on a, qui nous aide beaucoup à mettre
02:02 des mots sur ce qu'on vit, à pouvoir simplement se partager en équipe, pouvoir être entendus
02:06 sur nos émotions, pouvoir dire "Maman, je suis lasse, je suis lasse parce qu'à
02:11 mille d'années, c'est peut-être éprouvant de nous être toutes ces prises en charge
02:17 et de nous confronter régulièrement à la douleur, à la mort.
02:20 Dur, c'est de confronter la douleur.
02:22 Les réactions d'entourage sont souvent "Ah, ça doit être dur de confronter son frère
02:26 à la mort et tout", mais il n'y a pas que ça.
02:28 C'est la première à laquelle je pense que j'ai vécu ce matin, même patiente.
02:34 Elle a ce profil de la personne âgée, toute menue dans son lit, qui, voilà, tout ce
02:40 qu'elle a à offrir, c'est simplement dans son lit.
02:43 On me l'a présentée ce matin comme étant très fatiguée, saounellante.
02:49 Mais en fait, on a eu quand même une bonne communication.
02:52 On a pu avoir le moment, on nous a dit "J'ai de la qualité pour prendre en soie la toilette,
02:55 on me l'a daté les cheveux, ça fait beaucoup de bien".
02:57 Elle a été très reconnaissante.
02:59 Enfin, toilette à musique.
03:00 Permettez-moi de remercier vos parents de vous avoir mis au nom d'un cadeau gratuit.
03:10 Voilà, c'est un peu comme un résort que j'emmène, parce que c'est ce genre de
03:14 phrase qui nous aide aussi à continuer.
03:16 Ça arrive souvent, les patients nous disent "J'ai envie de mourir", ce qui est tout
03:20 à fait compréhensible quand on vit une grande souffrance.
03:22 De vivre une douleur intense, ça donne envie de mourir.
03:27 C'est tout à fait compréhensible et entendable.
03:29 Il y a des situations où apaiser la douleur et la douleur disparaît.
03:36 Et ça a déjà arrivé plusieurs fois, que des patients arrivent avec une demande de
03:40 mourir, même exprimant une demande d'euthanasie.
03:43 Finalement, quelques jours plus tard, avec les soins proposés, toutes les choses autres
03:49 que la médecine.
03:50 Cet ensemble prise en charge peut parfois redonner un certain goût à la vie à certains
03:56 patients.
03:57 Des patients qui ont aussi l'occasion de redonner un certain contact avec leur famille.
04:01 Ça, c'est les situations où les soins qu'on apporte ici, ou en tout cas, l'apaisement
04:07 des souffrances disparaît à la demande.
04:09 Et il y a évidemment aussi des patients qui demandent de mourir.
04:14 Souvent, je caricature, je résume.
04:17 Une souffrance sociale, une souffrance morale, là, tout ce qu'on peut proposer ne va pas
04:22 forcément suffire à apaiser cette souffrance morale et la demande d'euthanasie pour persister.
04:30 Dans ce cas, encore une fois, c'est cette présence qu'on offre.
04:35 On ne peut offrir que nous notre qualité professionnelle et notre qualité humaine.
04:40 Et moi, je trouve que c'est essentiel, c'est primordial, c'est un pouvoir à connaître.
04:45 On n'a pas forcément de réponse à apporter à la souffrance de patients, mais que malgré
04:49 tout, on reste là.
04:50 [Musique]