• l’année dernière
Coiffeuse, chauffeure VTC, ou encore barman, ils sont devenus psychologues malgré eux. C’est souvent à eux que les gens se confient parce qu’il est toujours « plus facile de se confier à quelqu’un qu’on ne reverra pas forcément, que de franchir la porte d’un cabinet de psychologue ».
Transcription
00:00 quasiment tous mes clients se confient.
00:02 Je suis sûre que 98% des gens se confient.
00:04 Il y a des personnes qui sont déjà suivies par des profs
00:07 qui veulent aussi l'écoute simple.
00:10 C'est plus facile de se confier à quelqu'un qu'on ne verra pas forcément
00:13 que de franchir la porte d'un cabinet de psychologue
00:16 ou même de prendre le téléphone pour pouvoir prendre un rendez-vous.
00:19 Et je suis sûre que même vous, vous avez déjà raconté des trucs hyper deep
00:23 alors qu'on vous coupait les cheveux ou qu'on vous servait une pinte.
00:25 Alors je suis allée voir une coiffeuse, un barman et une chauffeuse Uber
00:29 pour essayer de comprendre comment ils sont devenus des psys malgré eux.
00:33 Je sens que c'est des personnes qui attendent avec impatience ce rendez-vous
00:36 parce qu'elles ont besoin de parler avec moi.
00:38 J'ai même des clientes pour te dire que des prestations d'une heure,
00:41 comme dans une heure, comme je t'ai dit, c'est très cadré et que je parle moins du coup,
00:44 vu qu'il n'y a pas de temps de pause,
00:45 eh bien elles prennent des soins d'une heure et demie.
00:47 - Comment pour voir parler ? - Je te jure.
00:49 Parce qu'elles ne sont pas bien,
00:50 parce qu'elles n'ont pas eu la conversation qu'elles voulaient avoir avec moi.
00:53 Des fois, on me demande même mon avis sur certaines situations personnelles.
00:58 Donc tout le monde se confie.
01:00 Mais pourquoi est-ce qu'on a envie de se livrer autant
01:02 quand on prend une pointe ou quand on prend un taxi ?
01:04 Pourquoi ? Parce qu'ils savent très bien qu'on est des personnes
01:07 qui vont voir une fois dans leur vie.
01:10 On ne fait pas partie de la famille, on n'est pas des amis,
01:14 on est une personne neutre.
01:16 Ils s'ouvrent, mais pas forcément ils attendent une thérapie, c'est pas ça.
01:20 C'est juste partager sa douleur ou son problème peut-être.
01:23 T'imagines de 20h à minuit,
01:26 à discuter ou à boire des coups, après l'alcool il fait son effet,
01:29 à changement, il rencontre plein de personnes différentes.
01:32 C'est des commerces où tu arrives, tu ne sors pas tout de suite,
01:34 t'es obligé de rester.
01:35 C'est le fait d'être confiné dans un petit espace.
01:38 Je pense qu'on se lie facilement à la personne qui est en face de vous.
01:42 Et on a envie de parler, on a envie de dire des choses.
01:45 Le fait qu'on soit proche, qu'on touche les cheveux du client,
01:49 c'est assez intime finalement.
01:51 Du coup, c'est quoi la différence avec un vrai psy ?
01:54 Pour le savoir, je suis allée à la rencontre de Chloé Ponce,
01:56 une psychologue clinicienne qui travaille à l'époque
01:59 une association qui vient en aide aux personnes en souffrance psychique et sociale.
02:03 C'est plus facile de se confier à quelqu'un qu'on ne verra pas forcément
02:06 ou qu'on côtoie de temps en temps dans un cadre précis
02:10 que de franchir la porte d'un cabinet de psychologue.
02:14 OK, c'est plus facile pour nous, mais est-ce que c'est facile pour eux ?
02:17 J'ai des clientes qui me confient des choses terribles, des viols...
02:21 Oui, c'est déjà arrivé.
02:22 Je connaissais quelqu'un, un jour il m'appelle et me dit "Saïd,
02:26 tu sais, j'ai quelqu'un dans ma tête qui me dit "Allez, saute"
02:29 et l'autre qui me dit "Allez, calme-toi, ramas".
02:31 Ça, c'est le pire qui puisse m'arriver,
02:33 de quelqu'un que je connais qui me dit "Je vais me suicider, gars".
02:36 Comment est-ce que toi tu gères quand quelqu'un te dit un truc aussi fort ?
02:41 Qu'est-ce que tu fais en fait ?
02:42 Je l'écoute.
02:43 Et là, il n'y a pas grand-chose à faire en fait, à part écouter,
02:45 parce que qu'est-ce que tu veux que je lui dise, moi ?
02:48 Alors je lui ai posé deux, trois questions, mais c'est un peu délicat.
02:51 Après, je ne vais pas trop loin dans les relations,
02:53 parce que je ne suis pas capable de gérer ça.
02:55 Je garde toujours cette distance.
02:57 C'est mes filtres.
02:58 C'est compliqué d'être psy malgré soi.
03:00 Le barman ou le coiffeur, ils peuvent entendre des choses très difficiles
03:05 de la part de leur client.
03:07 Il faut pouvoir encaisser ça, il faut savoir quoi en faire aussi
03:09 de cette parole qui parfois est...
03:11 de gens qui sont en très grande souffrance.
03:14 Il y a des moments aussi où je suis obligée de couper,
03:16 parce que là, je t'ai parlé de viol,
03:17 mais c'est d'autres choses aussi des fois qu'on me raconte.
03:19 Et là, je me demande, là, par contre, psy, ce n'est pas mon métier.
03:23 Par contre, moi, je peux te recommander des clientes qui sont psy ?
03:25 Oui, c'est vrai, j'ai dit à des gens d'y aller voir
03:28 quelqu'un qui est objectif, qui ne te connaît pas,
03:30 qui va te conseiller, qui va t'aider, un professionnel.
03:34 Alors le psy, c'est vraiment un cadre précis.
03:35 C'est dans une pièce, un horaire défini, avec quelqu'un de défini.
03:39 Voilà, il y a vraiment un cadre.
03:41 C'est vraiment une démarche active.
03:43 Mais cette démarche d'aller chercher un psy,
03:45 est-ce qu'elle est vraiment accessible à tout le monde ?
03:47 Selon la tête de beaucoup de gens,
03:49 aller voir des psychologues, c'est réservé à une certaine classe sociale.
03:53 Mais en fait, ce n'est pas le cas du tout.
03:55 En tout cas, ça ne devrait pas l'être.
03:56 Il faut savoir qu'il y a plein d'associations qui reçoivent des personnes
04:02 qui n'ont pas forcément des ressources, en tout cas financières,
04:05 pour leur un psychologue.
04:06 Et ici, à l'époque, on reçoit tout le monde.
04:09 Des dispositifs d'aide psychologique, il y en a beaucoup.
04:12 On les connaît peu, mais il ne faut pas hésiter à s'en servir.
04:15 Je vous mets quelques ressources ici.
04:16 N'hésitez pas à faire un screenshot pour aller regarder plus tard.
04:19 Mais ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas se confier
04:21 quand on en a vraiment besoin.
04:22 C'est l'échange qui est important.
04:24 On en a tous besoin.
04:25 Puis c'est valorisant aussi de se dire qu'on a aidé quelqu'un d'une autre façon.
04:29 Ce n'est pas juste couper les cheveux.
04:31 On a apporté quelque chose d'autre.
04:32 Des clients qui ont besoin un peu de me parler,
04:34 ça leur fait du bien et je suis là pour elles.
04:36 Moi, j'ai beaucoup de gens qui me disent "mais votre voiture,
04:38 on a l'impression d'être dans un cocon".
04:40 Je fais tout pour qu'ils se rencontrent,
04:42 de réunir les gens qui peuvent s'entendre en fait.
04:44 C'est un équilibre, voilà.
04:46 Ils peuvent apporter du lien social.
04:48 Et ça, le lien social, c'est quelque chose de primordial.
04:51 C'est aussi exister, pouvoir échanger avec l'autre.
04:53 C'est la fin de cette vidéo.
04:55 Lâchez un gros big up au psy malgré lui qui vous a le plus aidé dans votre vie.
05:00 Moi, je voudrais remercier le Uber qui m'a consolée
05:02 quand je pleurais toutes les larmes de mon corps
05:05 après mon premier chagrin d'amour.
05:07 Comédie !
05:09 [SILENCE]

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