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Michel Onfray, philosophe, répond aux questions de Sonia Mabrouk au sujet de la tentative à gauche de se structurer en dehors de l’emprise de Jean-Luc Mélenchon, fracture entre le Président et sa Premier ministre au sujet du Rassemblement National et de Pétain.

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Transcription
00:00 Heure à 5.
00:02 Il est 8h13 sur Europe 1. Votre invité ce matin, Sonia Mabrouk et philosophe.
00:06 - Et auteur d'animat chez Albain Michel. Bienvenue sur Europe 1 et bonjour Michel Onfray.
00:12 - Bonjour.
00:13 - On va bien sûr en parler de cet ouvrage mais tout d'abord une gauche est en train d'essayer de se construire en dehors de Jean-Luc Mélenchon
00:18 et de l'emprise de la NUPES avec notamment Carole Delga et Bernard Cazeneuve. Une gauche qui se décrit comme étant une gauche de
00:25 responsabilité. Est-ce que vous croyez en cette gauche là ?
00:28 - Non pas tellement. Moi j'aspire à cette gauche là. Ma gauche elle est girondine, elle n'est pas jacobine,
00:33 elle n'est pas néo-marxiste ou post-marxiste, ça n'a rien à voir. Elle est proudhonienne donc je crois aux provinces, je crois aux régions
00:39 et je pense qu'il y a une différence de degré, pas de nature entre
00:43 ces deux gauches là. C'est-à-dire qu'il ne touche pas au logiciel islamo-gauchiste, il ne touche pas au logiciel européiste
00:48 et puis il ne reparle pas du peuple ces gens là. Il ne parle pas du peuple, il ne parle pas de
00:54 ce que la gauche a fait. Il y a un droit d'inventaire. Moi j'aime bien le Joseph Pain qui nous avait dit à une époque "droit d'inventaire"
00:59 quoi. Il faudrait que la gauche finisse par faire un droit d'inventaire en disant "on a mis le peuple dans le mur"
01:03 et ça ne va pas. L'idée qu'il y ait aujourd'hui des
01:06 antivols sur de la viande dans les supermarchés,
01:09 on dit "mais ça fait 30 ans que vous êtes au pouvoir". Une fois c'est la droite mastrichienne, une autre fois c'est la gauche mastrichienne,
01:14 on ne veut plus de cette gauche là. Et quand Truffin commence à avoir des idées, qu'il nous dit
01:18 "le sociétal c'est bien mais le social c'est mieux", il faut
01:22 priorité peut-être aux gens qui souffrent, aux petits peuples, aux gens modestes, etc.
01:26 Immédiatement on claque des doigts, on lui dit "tu rentres à la maison" et il dit "oh j'ai pas assez pensé, j'ai pas assez réfléchi".
01:30 - Et c'est ce qu'il a fait, il a dû faire acte de contrition, de quoi est-ce le révélateur en quelques mots. Il a dû
01:35 rétropédaler, comme vous l'avez dit, sur le sujet du genre et du changement de sexe après avoir dit que cela risquait de creuser les fractures
01:41 de notre pays. Hop, changement total en quelques heures sur les réseaux sociaux pour s'excuser.
01:44 - Oui, c'est la preuve que c'est Mélenchon qui fait la loi partout à gauche
01:48 et que Mélenchon décide et que les autres là, quand ils ont l'impression d'avoir
01:52 deux grammes d'autonomie et qu'ils cessaient à l'autonomie, on l'a bien vu avec machin, avec bidule, avec un tel, je vais pas donner les noms,
01:58 tout le monde les connaît, tout le monde rentre dans le rang. Et c'est exactement la même chose avec
02:03 le socialisme
02:05 hollandais, je sais pas comment on dit, mais enfin il ne manquait que François Hollande, là on sent bien que François Hollande il fait travailler les copains
02:11 pour revenir, c'est le fantasme du général de Gaulle en 46 quoi.
02:14 Entre 46 et 58, de Gaulle dit "qu'est-ce que je peux faire pour revenir ?" et bah là Hollande dit "qu'est-ce que je peux faire pour revenir ?"
02:18 il envoie Cazeneuve, il envoie les copains. - Donc la gauche Cazeneuve contre la gauche Mélenchon, vous n'y croyez pas, c'est une illusion ?
02:24 - C'est la même, la gauche Mélenchon... - C'est la même sur l'école, sur l'immigration, sur la laïcité, c'est la même.
02:30 - C'est ce qu'a dit tout à l'heure Vincent Trémolet du Lair, j'ai écouté, j'ai trouvé formidable son papier dans le Figaro aujourd'hui.
02:36 Il a raison de reciter en plus de ça Jean-Claude Le Goff, que je trouve...
02:40 Jean-Pierre Le Goff, Jean-Claude d'un seul coup de nom Jean-Pierre, c'est un autre que je connais.
02:44 - Qui parle du gauchisme culturel. - Du gauchisme culturel et c'est un concept extrêmement intéressant de
02:48 Le Goff qui est un normand, en plus j'ajoute qu'il a été... - Vous êtes pour lui, c'est ça ?
02:53 - ...brandé par l'université de Caen.
02:54 Mais oui on en est là, c'est-à-dire qu'ils ont le même logiciel. Le logiciel d'une gauche qui serait vraiment
03:00 alternative ce serait vraiment un logiciel proudhonien, en disant "mais laissez faire les gens là où ils sont dans les villages,
03:05 dans les campagnes, dans les provinces, redonnez de l'initiative aux gens, arrêtez avec la bureaucratie,
03:09 arrêtez avec cette fiscalité qui est parfois confiscatoire, oui aux impôts mais quid de la répartition ?"
03:15 Et puis tous ces gens qui nous disent que la préférence internationale c'est très bien, je dis "mais la préférence internationale
03:21 c'est quoi si ça se fait au détriment des
03:25 nationaux ?" je dirais. Donc il faut retrouver le sens de la nation, c'est à gauche, c'est la gauche qui invente la nation, il faut retrouver
03:31 le sens du peuple. - Donc vous ne la voyez pas encore incarnée cette gauche-là ? - Non, sûrement pas chez ces gens-là, non.
03:35 - Et pourtant quand on voit ce qui s'est passé en Espagne, il y aurait des leçons à retenir pour la France, Podemos a payé au prix
03:41 fort justement dans les yeux de cette obsession sur les sujets sociétaux, mais pas de leçons retenues pour la gauche en France, comment vous l'expliquez ?
03:48 - Ils manquent tous d'idées, c'est à dire ils manquent tous de plombées, c'est à dire qu'on pourrait faire la même chose avec Syriza en Grèce,
03:53 avec Podemos en Espagne, avec Begrillo par exemple en Italie,
03:58 avec Meloni même qui arrive au pouvoir et une fois qu'ils sont au pouvoir ils n'ont pas de plombées.
04:03 C'est à dire qu'à un moment donné on sait bien que si on arrive au pouvoir et qu'on est critique à l'endroit de l'Europe, l'Europe va spéculer
04:09 contre le pays, l'Europe veut la destruction des nations. Si une nation dit "non, on a recouvré notre pouvoir et on veut donner le pouvoir au peuple",
04:16 l'Europe dit "vous allez
04:17 revenir sur votre position" et donc on fait quoi quand on s'entend dire qu'on n'a plus d'argent puisque tout a été donné par là-bas
04:24 et que c'est par là que ça se passe ? Il faut s'appuyer sur d'autres pays, il faut un plan B qui permette de dire "mais c'est pas bien grave,
04:30 si vous ne voulez pas de nous, nous ne voulons pas de vous et nous allons construire ailleurs et autrement,
04:33 ce sont les peuples qui décident". - Donc pas de plan B, c'est quand même assez inquiétant dans des pays démocratiques qui n'aient pas de plan B,
04:39 et pas d'alternative. - Bien sûr, bien sûr, Syriza, souvenez-vous, le type il est arrivé sans cravate en disant
04:44 "je ne prête pas serment sur la Bible, je ne suis pas croyant etc." et puis on dit "alala, formidable"
04:50 et puis il ne fait rien, c'est à dire le lendemain il faut dire "eh bien moi je vais faire le nécessaire", c'est à dire on va récupérer de l'argent
04:55 et
04:56 l'idée qu'il n'y ait pas de cadastre par exemple en Grèce, c'est à dire qu'on sait très bien que c'est le clergé grec et ce sont
05:02 les propriétaires de bateaux, les armateurs qui sont propriétaires,
05:06 si on ne touche pas à ces gens-là, on ne ramène pas d'argent, si on ne ramène pas d'argent, on ne paie pas les gens simples et les gens modestes,
05:10 on ne paie pas les fonctionnaires, on n'a pas de politique possible.
05:12 Donc évidemment, il refait un référendum pour demander si c'est vraiment lui qu'on veut, les gens lui disent "mais oui, on a voté pour vous"
05:18 et là encore le peuple est trompé, il est trahi.
05:21 - Est-ce que c'est bonnet blanc, blanc bonnet ? Parce que Michel Loffrey c'est un peu loin, pour la NUPES, cette gauche là,
05:26 en laquelle vous ne croyez pas, elle est de droite selon la NUPES.
05:31 D'ailleurs c'est cette même NUPES qui vous qualifie, vous, d'extrême droite, pour qu'on voit un petit peu l'évolution de chacun sur les fiquiers.
05:38 - Oui, j'ai entendu l'autre jour Geoffrin qui expliquait que l'extrême droite c'était tout ce qu'il avait décidé qu'il appellerait "extrême droite".
05:44 Marine Le Pen donnait une définition historique qui me semblait assez juste où elle disait "ils ne sont pas démocrates les gens d'extrême droite,
05:49 ils ne respectent pas le parlement, ils préfèrent la violence des rues etc etc".
05:53 Enfin il lui du mot, c'est une définition datée.
05:56 C'est à dire que ces gens là, Geoffrin en tête, décident que le dictionnaire a tort et que
06:00 ils ont raison et qu'ils peuvent donner une nouvelle définition des mots et puis que voilà ils ont envie d'appeler "radiateur" une baignoire et "baignoire" un radiateur.
06:06 Et si on n'a pas la folie qui permet d'épouser leur sottise, eh bien on est un type d'extrême droite.
06:12 Donc il faut laisser tomber ces gens là. Juste dire que le problème c'est pas...
06:16 Enfin je rappelle quand même que Macron qui nous dit qu'il faut arrêter de renvoyer à Pétain,
06:21 c'est quand même lui qui entre les deux tours, alors qu'il avait été élu la première fois,
06:24 est allé à Horadour-sur-Glane et puis ensuite comme si ça ne suffisait pas au musée de la Shoah à Paris quoi.
06:30 - Mais alors qu'est-ce qui s'est passé pour que cette phrase de la première ministre provoque autant de remous
06:34 au sein de l'exécutif ? La première ministre qui affirme que le RN est l'héritier de Pétain et
06:39 le président qui estime que ce n'est plus avec ses arguments moraux aujourd'hui qu'on combat ou qu'on fait reculer le Rassemblement National.
06:44 - Faisons un peu de sémantique, vous avez vu, il a dit "les gens ne croient plus".
06:47 Donc il fallait faire croire. - Lucide. - Il fallait faire croire, c'est ça.
06:50 Mais il y a un moment donné où ça marche plus quoi, vous savez quand vous criez au loup, vous l'avez fait cent fois et puis
06:54 à un moment donné
06:56 le loup arrive véritablement puis le berger se fait manger, bien là c'est exactement la même chose, il voit bien que ça ne marche plus.
07:00 On peut pas continuer à dire que Marine Le Pen est un danger pour la démocratie quand le danger pour la démocratie il est visible
07:05 partout dans les rues, avec les Black Blocs, avec la violence soutenue par Mélenchon.
07:10 Les gens sont lucides, faut pas les prendre pour des imbéciles, donc il y a un moment donné où on peut
07:14 faire de la sémantique en leur disant qu'ils sont d'extrême droite, moi j'y ai droit depuis très longtemps, les unes du monde et les unes de
07:19 libération, je sais ce que c'est.
07:20 Parce qu'il faut ça lire, parce qu'il faut ça loper les gens plutôt que de dire "ah tiens réfléchissons un petit peu pourquoi
07:25 pourquoi il y a une adhésion je dirais à cette gauche là, je vais pas dire la gauche Michel Longfray,
07:32 Vincent Trémolet de Villers a parlé en ce sens, mais je veux dire il y a plein de gens que je rencontre dans la rue et qui
07:37 me disent "mais allez-y faites de la politique" et les gens aiment la politique, s'ils ne vont plus voter c'est parce que la politique ne les aime plus.
07:44 - Et alors est-ce que des phrases comme celles de la première ministre
07:46 historiquement sont fausses selon vous quand elle dit "l'héritier de Pétain défichit le Rassemblement National", est-ce que historiquement c'est faux ?
07:54 - Oui bien sûr, là je suis en train de lire les mémoires de Jean-Marie Le Pen, c'est 800 pages, je les ai lues pour faire un
08:00 texte particulier.
08:02 Alors lui il est d'extrême droite, lui il fait l'éloge de Pétain, lui il fait l'éloge de ses copains qui sont des anciens de
08:08 la LVF, enfin la Légion des volontaires français, lui il trouve que Brasiliac est un personnage formidable etc.
08:13 Et les dernières pages sont consacrées à Marine Le Pen de la part de son propre père où il dit
08:17 "bon elle m'a viré, elle m'a détesté, c'est plus rien, ça n'a plus rien à voir etc etc."
08:22 Il y a un moment donné si on veut faire de l'histoire
08:25 à ce moment là oui parlons de la Francisque de Mitterrand.
08:27 - Donc l'assignation historique ne vaut pas selon vous que pour le Rassemblement National ?
08:31 - C'est ça le problème, c'est-à-dire qu'on oublie que le Parti Communiste Français a collaboré pendant deux ans avec les nazis
08:35 et même pas avec Pétain, avec les nazis.
08:37 - Et pourquoi on ne le rappelle pas selon vous ?
08:39 - Ah ben ça c'est le fameux gauchisme culturel, c'est-à-dire que la gauche a tous les droits et la droite n'en a aucun.
08:43 C'est-à-dire que vous avez le droit d'avoir un Mitterrand pétiniste jusqu'à la fin.
08:46 Mitterrand il est resté ami avec tous ses copains pétinistes.
08:49 Il y a un bouquin de Le Fol qui est excellent, qui raconte les amitiés de Mitterrand
08:54 avec des anciens de la Cagoule, enfin ça ça ne gêne pas du tout la gauche.
08:58 À aucun moment on a dit "voilà on va débaptiser la bibliothèque François Mitterrand".
09:01 Sartre et Beauvoir ont collaboré, ils ont écrit dans des journaux collabos.
09:05 Beauvoir a travaillé dans une radiocollabo, personne n'a dit "on va débaptiser la place Jean-Paul Sartre" etc.
09:11 Mais le pauvre Henri Dutilleux qui fait une musique pour une boîte de cinéma sous l'occupation,
09:17 on dit qu'il est nazi et on ne veut pas donc...
09:19 - Mais les socialistes aujourd'hui ont tous rompu et le disent clairement.
09:22 Est-ce que Marine Le Pen est aussi claire selon vous aujourd'hui par rapport justement à cet héritage de son père assumé ?
09:27 - Le père reprend tout ce qu'il a à dire à sa fille en disant
09:32 "mais sur le détail elle ne m'a pas suivi, sur l'occupation allemande qui était finalement pas si dure que ça elle ne m'a pas suivi,
09:37 sur la question etc."
09:39 Enfin il dit "voilà, elle m'a trahi, elle m'a trompé, elle a détruit mon parti, elle a même changé le nom, elle m'a exclu".
09:44 - Donc ça vaut rupture avec l'héritage ?
09:46 - Moi je regarde le réel, je ne fais pas d'idéologie.
09:49 Je ne reprocherai pas par exemple à Fabien Roussel aujourd'hui d'être un nazi
09:53 parce que son parti a été nazi pendant deux ans.
09:55 L'histoire c'est l'histoire, donc si on veut faire de l'histoire à ce moment-là
09:59 on pourrait imaginer que Giscard a défendu l'OS et qu'il était pour l'Algérie française
10:04 et que quiconque aujourd'hui se réclame de l'UDI par exemple est un défenseur de l'Algérie française.
10:09 Ça n'a aucun sens. On est un défenseur de l'Algérie française si aujourd'hui on défend l'Algérie française.
10:14 - Mais alors quelles conséquences Michel Onfray sur notre débat public et politique ?
10:17 Interrogé à ce sujet, le garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti sur France 2 a lancé au sujet de Marine Le Pen
10:22 "Qui préférez-vous Madame Le Pen, Pétain ou Poutine ?"
10:24 - Écoutez, vu la personne qui pose la question, vu l'émission dans laquelle la question est posée,
10:28 je me demande si la question n'a pas été posée au préalable, si Monsieur le Ministre n'a pas lu les questions qu'on lui poserait
10:32 et s'il n'a pas mis des gens sur le coup pour savoir quels bons mots il pouvait sortir pour que ça puisse être repris le lendemain.
10:38 Il fait semblant de réfléchir puis nous balance ce truc.
10:43 Alors je veux bien qu'il ait même un talent pour l'improvisation, pourquoi pas ?
10:46 Mais c'est tellement grossier.
10:47 - Il a un talent oratoire quand même d'avocat dans les prêts de force.
10:50 - Écoutez, tous les gens que je connais qui sont des avocats ou autres, estiment que son succès a été fait de mensonges, de bluffs.
10:58 Ils disent "mais il n'y a pas ça dans le dossier, c'est totalement faux".
11:01 Le dossier dit très exactement l'inverse, ce qui est complètement faux.
11:04 Simplement quand vous êtes dans un prêtoir et que quelqu'un dit ça, vous dites "lui il a lu le dossier".
11:09 Donc c'est du bluff ce monsieur, c'est du bluff en permanence.
11:12 Alors il roule pour Macron et il roule pour une espèce de... justement la gauche qui est à la traîne de la nupes.
11:20 - Vous avez la dent dure ou alors vous estimez peut-être la lucidité envers le gouvernement et l'exécutif.
11:26 Certains aujourd'hui, à l'aune de ce qui se passe dans le pays, Michel Onfray, du climat politique et social,
11:30 d'une réforme des retraites sur laquelle il n'y a pas eu véritablement de vote, parlent même d'une forme de dérive.
11:36 Et hier c'est Emmanuel Bompard de la France Insoumise qui nous disait "braquage démocratique".
11:41 Le poids des mots, on en est là aujourd'hui dans notre pays.
11:43 - Oui je l'ai entendu en direct avec vous, mais je souscris à ça.
11:47 - Braquage démocratique en France ? - Oui depuis un petit moment, depuis 2008.
11:50 Depuis qu'en 2005 les français ont dit qu'ils ne voulaient pas de cette Europe
11:53 et qu'en 2008 on leur a dit "vous n'en avez pas voulu mais vous l'aurez quand même".
11:57 50% des gens ne vont plus voter, donc d'une certaine manière il n'y a plus de légitimité.
12:01 D'accord, on peut imaginer que d'un point de vue des statistiques, des chiffres, je ne sais quoi,
12:05 il y a une légitimité, mais quand la moitié des gens ne se déplacent pas,
12:09 elle est où votre légitimité ? Un chef de l'État digne de ce nom dirait
12:12 "50% des français se désintéressent de la politique, dont ceux qui votent très peu votent pour moi".
12:17 Il y a un moment donné où vous faites une espèce de révision totale,
12:21 où vous dites "je dois devenir le président de tous les français, et surtout des français qui ne votent pas pour moi".
12:25 - Mais ça ne se décrète pas, alors s'il y a un défaut de légitimité presque originelle par rapport à ce qui s'est passé,
12:30 aujourd'hui quelle politique trouve grâce à vos yeux ?
12:33 Et vous-même si vous avez pensé un temps à la politique, ce que vous dites est en train de refroidir tout le monde.
12:38 - Non pas du tout, parce que moi je suis un vrai démocrate, c'est-à-dire que j'en appelle au peuple.
12:42 - Et pas les autres ? Pourquoi vous auriez le monopole ?
12:45 - Je ne dis pas ça, je dis simplement regardez qui en appelle aujourd'hui au référendum,
12:49 et tous ceux qui sont au pouvoir depuis 30 ans, regardez leur rapport au référendum.
12:52 La dernière fois qu'il y en a eu un, ils l'ont mis à la poubelle.
12:55 Donc il y a un moment donné où vous dites "non, le peuple est souverain, en démocratie le peuple est souverain".
13:00 Alors on fait des débats, on a la possibilité, il y a des chaînes d'infocontinu,
13:04 il y a des chaînes qui peuvent éventuellement organiser des débats dignes de ce nom avec des gens honnêtes.
13:08 Je ne parle pas du service public pour le coup, mais dans lesquels vous pouvez vraiment débattre,
13:12 et où on invite tout le monde, et où après on fait de l'éducation.
13:15 - Vous estimez encore que vous êtes persona non grata aujourd'hui ?
13:18 - Ce n'est pas que j'estime, c'est que c'est la réalité, je ne suis pas invité dans le service public.
13:22 Ou éventuellement pour aller parler des huîtres de Normandie dans une émission culinaire sur France Inter,
13:27 ce qui leur permettra de dire qu'ils m'invitent encore.
13:29 Mais il y a un moment donné où on doit pouvoir dire, on va réfléchir sur des sujets,
13:34 et puis on va en faire des débats, et puis on va demander au peuple qui tranchera.
13:37 - Surtout Michel Onfray, quand vous réfléchissez sur ces sujets comme anima, comme l'âme,
13:42 justement on a du mal à comprendre pourquoi dans ce cas-là vous n'êtes pas invité sur des sujets aussi importants,
13:47 consensuels je ne sais pas, mais par exemple, est-ce que philosopher c'est sauver son âme comme disait Platon ?
13:52 Est-ce que c'est la construire, la structurer justement ?
13:55 - Ça dépend comment on philosophe, parce que vous avez des philosophes du pouvoir,
13:58 vous avez des gens qui aujourd'hui défendent Macron et qui sont philosophes de formation,
14:02 donc on peut tout trouver, c'est un marché la philosophie, vous pouvez trouver,
14:05 si vous êtes vegan, trouvez votre compte, si vous adorez la viande rouge, trouvez votre compte aussi,
14:09 donc il y a tout et le contraire de tout.
14:11 C'est un livre qui m'a obligé, il m'a fait plus que je ne l'ai fait ce livre,
14:16 je voulais faire un livre sur la nature humaine au départ, et c'est l'âme qui s'est imposée.
14:20 Mais oui, là par exemple, c'est un livre pour lequel on peut m'inviter,
14:23 si on ne me parle pas de Macron, il n'y a aucune raison que je parle de Macron dans ce livre-là.
14:27 C'est une histoire de l'âme, de Lascaux jusqu'à Elon Musk,
14:30 donc effectivement c'est un débat de philosophie, je parle du transhumanisme,
14:34 on peut parler du transhumanisme.
14:36 Non, c'est l'idéologie qui fait la loi, mais ce n'est pas le peuple qui fait la loi.
14:40 Or le peuple doit faire la loi, on doit lui demander son avis,
14:43 et on doit prendre avis du peuple, c'est comme ça que fonctionnait le général de Gaulle.
14:47 Le jour où on fait savoir au général de Gaulle qu'on ne veut plus de lui par un référendum, il s'en va.
14:51 Le jour où Mitterrand perd les élections, il reste,
14:53 le jour où Chirac perd les élections, il reste,
14:55 et Giscard qui a failli perdre les législatives avait dit "de toute façon je resterai",
15:00 il avait même dit "d'ailleurs je me replierai à Versailles", c'est tout dire.
15:02 Et puis quand il y a des référendums et qu'ils sont perdus, on les jette à la boubelle,
15:05 ça veut dire qu'effectivement on est dans une démocratie illibérale.
15:08 - Donc l'âme de la démocratie, c'est le référendum ?
15:11 - C'est le peuple. - Le peuple.
15:13 - La volonté du peuple, la souveraineté du peuple, c'est le peuple qu'on sollicite,
15:16 qui nous donne son avis, et le chef de l'État est l'obligé du peuple.
15:19 Il ne force pas le peuple, il doit être forcé par le peuple dont la voix fait la loi.
15:24 - Merci Michel Onfray d'avoir répondu à nos questions. Très bonne journée à vous et à bientôt.

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