À l’occasion de l’exposition Paris Animal et de l’ouvrage éponyme auquel il a contribué, le jardinier Gilles Clément questionne notre relation au vivant, sa place dans notre société, la possible liberté des animaux dans nos villes.
« Partout dans le monde, on peut voir les habitants d’une ville se rencontrer sur la base d’un jeu. Les écureuils gris de Central Park à New York attendent les habitués du sous-bois qui distribuent les graines ; les merles et les migrateurs de passage se posent sur le jardin perché de l’île Derborence au parc Matisse, à Lille, espace libre au coeur de la ville où aucun humain ne peut se rendre, paradis pour les animaux qui peuvent nous regarder d’en haut sans craindre d’être chassés pour occupation illégale de territoire urbain. Les oiseaux n’ont pas de pass sanitaire ; les cafards, les mites, les souris et les renards ne sont pas encore pucés. Par le seul fait de leur existence, ils expriment le principe de liberté. »
Conférence datant du mercredi 31 mai 2023
« Partout dans le monde, on peut voir les habitants d’une ville se rencontrer sur la base d’un jeu. Les écureuils gris de Central Park à New York attendent les habitués du sous-bois qui distribuent les graines ; les merles et les migrateurs de passage se posent sur le jardin perché de l’île Derborence au parc Matisse, à Lille, espace libre au coeur de la ville où aucun humain ne peut se rendre, paradis pour les animaux qui peuvent nous regarder d’en haut sans craindre d’être chassés pour occupation illégale de territoire urbain. Les oiseaux n’ont pas de pass sanitaire ; les cafards, les mites, les souris et les renards ne sont pas encore pucés. Par le seul fait de leur existence, ils expriment le principe de liberté. »
Conférence datant du mercredi 31 mai 2023
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00:00:00 Bonsoir, bienvenue au pavillon de l'Arsenal. Je suis Marion Valère, directrice du pavillon
00:00:13 de l'Arsenal et très heureuse de vous accueillir et très honorée d'accueillir Gilles Clément
00:00:19 ce soir. On est très heureux au pavillon de vous avoir ce soir pour de multiples raisons.
00:00:27 Vous savez qu'on a actuellement une exposition qui s'appelle Paris Animal au premier étage,
00:00:34 qui parle de l'histoire animale de Paris et qui parle du vivant. Alors aujourd'hui, on
00:00:38 parle beaucoup du vivant, c'est un terme qui revient, mais je crois que vous avez été
00:00:43 évidemment un pionnier sur ce thème et donc c'était essentiel pour nous de vous entendre,
00:00:50 d'entendre aussi comment ça a été un fil rouge dans votre travail. La deuxième raison,
00:00:56 c'est qu'évidemment vous avez aussi inspiré et travaillé à Paris. Vous avez travaillé
00:01:03 sur notamment le parc André Citroën, le jardin du Quai Branly. Et puis ce soir, je
00:01:09 crois que vous allez nous parler de la liberté des animaux. Donc c'est bien sûr en écho
00:01:14 direct avec cette exposition et aussi avec le livre Paris Animal dans lequel vous avez
00:01:19 écrit un article et on vous remercie également pour cela. Et vous l'expliquerez bien mieux
00:01:26 que moi, mais je crois que tout au long de votre carrière, de vos projets en tant que
00:01:32 paysagiste, jardinier et au travers de vos écrits, vous nous avez montré, vous nous
00:01:39 avez enseigné comment justement on doit laisser peut-être plus de liberté aux vivants, aux
00:01:46 animaux, comment on doit apprendre d'eux, comment on doit laisser plus de liberté aux
00:01:51 paysages, peut-être ne pas tout maîtriser. C'est ce que vous avez montré très tôt
00:01:54 au travers de multiples projets. Et donc voilà, merci beaucoup. Merci encore. Et je vous
00:02:01 laisse la parole pour cette conférence.
00:02:04 Bonsoir. Merci de m'avoir invité. De m'avoir invité à écrire aussi pour ce thème de
00:02:16 Paris Animal. Je ne m'attendais pas du tout à ça, le pavillon de l'Arsenal, mais je
00:02:21 trouve que c'est un très très beau sujet et extrêmement important. Mais il se trouve
00:02:25 effectivement, vous l'avez suggéré, que le vivant revient de plus en plus dans les
00:02:29 consciences comme étant quelque chose d'important, avec lequel on doit travailler autrement plutôt
00:02:37 que de se contenter de vouloir le maîtriser. Je parle du vivant non humain, maîtrisé par
00:02:42 les humains prétendument et finalement le détruire. Alors, je commence par juste une
00:02:51 définition. L'animal, qu'est-ce que c'est ? En deuxième point, ce sont les lieux d'accueil
00:02:58 pour les animaux. Troisièmement, comment approcher le vivant dans son ensemble, le monde
00:03:03 animal ? Quatrièmement, le monde, alors là, plus particulier, celui des oiseaux. Cinquièmement,
00:03:10 les mammifères. Sixièmement, nature à lire, qui est une manière de nous montrer la nature
00:03:18 travers les mots. Et puis, je finirai par "et nous", notre dialogue avec le monde animal.
00:03:26 Alors, définition d'abord du mot "animal". En gros, les animaux sont des prédateurs,
00:03:42 tous. Ils sont hétérotrophes, c'est-à-dire qu'ils ont l'obligation d'aller attraper
00:03:53 pour manger. Les plantes, elles, sont autotrophes. Elles fabriquent leur nourriture. C'est quelque
00:04:03 chose d'extrêmement différent. Il leur faut un peu d'eau et un peu de sel minéraux,
00:04:09 c'est sûr. Mais en gros, avec le phénomène, le mécanisme de la photosynthèse, elles
00:04:17 règlent la question. Elles ont une puissance de survie sur la planète qui est sans doute
00:04:23 bien supérieure à celle du monde animal, qui est dans l'obligation d'aller prendre.
00:04:28 Et quand il n'y a plus rien à prendre, il n'y a plus rien, on ne peut pas manger, c'est
00:04:33 fini. C'est la fragilité du monde animal que j'évoque à travers cette question de
00:04:40 l'hétérotrophie et l'autotrophie. Il se trouve que nous, nous sommes des hétérotrophes,
00:04:52 prédateurs. Nous sommes des animaux avec un cerveau un peu différent de la plupart
00:04:58 des autres animaux, un peu trop gros. Comme vous savez, on est tous des prématurés.
00:05:02 En tant que mammifères, on sort du ventre de la maman bien trop tôt parce que le cerveau
00:05:08 est trop gros, la tête est trop grosse, il ne pourrait pas se passer comme il faut au
00:05:11 moment voulu. Alors que tous les autres animaux, vous pouvez le voir, le petit veau, il sort
00:05:17 du ventre de la maman, il commence à trotter, il a presque son indépendance. Nous, pas
00:05:22 du tout. Nous, il nous faut du temps. Donc on a ce problème là, qui est celui d'un
00:05:27 cerveau particulier, qui probablement nous donne une illusion fantastique de la maîtrise.
00:05:34 Parce que c'est vrai que c'est une singularité d'arriver par l'intelligence, le génie
00:05:40 de l'esprit à fabriquer des choses que les autres animaux ne fabriquent pas. Mais ils
00:05:44 n'en ont pas besoin peut-être non plus. Donc par l'artifice, nous sommes arrivés
00:05:50 et allient cette illusion de la maîtrise qui est quelque chose, à mon avis, compliqué
00:05:57 et probablement pas ce qu'il y a de plus intéressant, malgré la fascination qu'on
00:06:02 peut avoir pour la technologie, par exemple. Paris est une ville qui comprend 2 145 906
00:06:12 animaux humains. Parce qu'on les a comptés, donc on sait combien il y en a. On n'a pas
00:06:23 compté les autres animaux, les non-humains. Quelquefois on fait des petits relevés, mais
00:06:29 pas grand chose. Et donc ça vous donne pour une ville qui n'est pas si étendue que ça,
00:06:36 si on le rapporte au nombre d'habitants animaux, une quantité énorme. D'ailleurs,
00:06:44 une des villes les plus denses de la planète. Donc quand on parle de Paris animal, il faudrait
00:06:51 qu'on ait dans l'esprit, je sais qu'on pense aux animaux, évidemment aux non-humains,
00:06:58 mais l'humain forcément aussi. Donc je commence par ça, parce que vous ne voyez pas ici l'animal.
00:07:06 C'est une plante. C'est une plante, mais elle est carnivore, celle-ci. C'est très
00:07:12 très rare dans le monde végétal qu'il y ait besoin de passer par le phénomène de
00:07:19 la prédation. Il se trouve que la plupart des plantes qui vivent dans des milieux asphyxiés,
00:07:25 c'est le cas des tourbières, des endroits comme ça où il manque certains éléments
00:07:30 nécessaires pour la nourriture. C'est le monde animal capturé qui permet de résoudre
00:07:36 le problème. Et ici, le Saracenia, cette plante-là, attire dans son espèce de fuseau
00:07:44 comme ça les insectes et surtout, c'est une plante américaine mais qui vit maintenant
00:07:50 en Europe un peu partout, surtout le frelon asiatique. On ne s'y attendait pas. Comment
00:08:01 une plante américaine vient réguler la population d'un insecte chinois en Europe, ce n'était
00:08:07 pas prévu. Mais ça, ça fait partie du brassage planétaire, des interactions qui
00:08:11 existent à tout moment, absolument tout le temps. Le côté positif du brassage planétaire
00:08:18 n'est pas suffisamment souvent évoqué. Ça s'en est un. Donc là, on a un rapport
00:08:23 assez rare. On voit des plantes qui ont effectivement du vert. Ce sont des plantes relativement
00:08:29 autotrophes et d'autres pas du tout. Elles se combinent. Elles peuvent vivre avec des
00:08:34 animaux. Paris est une ville dense. Je viens de voir l'exposition là, très intéressante,
00:08:47 où vous retrouverez plusieurs fois cette vision aérienne où l'espace qui est réservé
00:08:55 a priori majoritairement au monde animal et moins au monde animal-humain, c'est ce qui
00:09:03 apparaît en ce qui semble être du vert, les parcs. Ce sont des surfaces petites. Mais
00:09:11 ça n'empêche pas pour autant qu'il y ait des animaux, insectes, oiseaux, mais parfois
00:09:19 aussi mammifères qui vivent, y compris dans l'espace le plus minéral. C'est à partir
00:09:26 du moment où il y a pour ces animaux-là la possibilité de se nourrir. Là, la question
00:09:32 ne se pose plus. Ils peuvent, ils acceptent. Et ça se fait très bien, ça vous le savez.
00:09:36 J'ai eu l'occasion de travailler sur le grand axe à Paris, au-delà de l'Arche de
00:09:42 Spreckelsen, jusque vers l'ouest, jusqu'au jardin du chemin de Lille, tout à fait au
00:09:51 bout. Puis au départ, au début, le jardin de l'Arche. Et vous voyez là les deux cimetières
00:09:57 de Nanterre et Putot, qui sont les rares lieux qui ont été un petit peu, qui ont été
00:10:06 protégés de l'urbanisme. Pas tellement de l'artificialisation. Vous voyez comment
00:10:10 ils sont régulés, taillés, tout bien comme il faut. Mais malgré tout, c'est pas vraiment
00:10:18 un couloir écologique. Mais enfin, disons qu'il y a des oiseaux et des animaux qui
00:10:22 peuvent s'y réfugier. Mais c'est pas le meilleur refuge. Le meilleur, c'est le cimetière
00:10:29 du Père Lachaise. C'est le plus grand jardin de Paris. Et là, vous avez tout. Et il paraît
00:10:35 que pendant le confinement, il y a des petits renards qui sont arrivés, tout ça. Mais
00:10:41 dans un espace comme celui-ci, les niches écologiques existent. Ce jardin est très
00:10:45 abîmé maintenant parce qu'on a préféré faire, vous savez, un machin, comment ça
00:10:52 s'appelle, pour jouer au foot ou au rugby. Vous voyez ce que je veux dire ? Un stade,
00:10:59 un truc, qui a mangé la moitié du jardin. Mais là, il y avait une distribution en diversité
00:11:05 et dans l'espace qui permettait quand même de faire venir pas mal d'animaux, les insectes
00:11:11 et les oiseaux. Et dans le plan général qu'on avait d'ailleurs établi avec Paul
00:11:16 Schemethoff, il y avait beaucoup d'espaces comme ça incertains le long de cet axe. C'est
00:11:21 pas du tout comme ça que ça s'est fini. Mais qui permettaient un accueil de diversité
00:11:26 en général. Plus il y a quelque chose qui tend vers, je ne dis pas l'Afrique, mais vers
00:11:32 un lieu d'accueil à une diversité qu'on chasse de partout ailleurs, mieux ça vaut.
00:11:36 Il les faut, ces espaces-là. On n'en a pas suffisamment. Il y a aussi dans Paris
00:11:43 des espaces qui ont été récupérés intelligemment, cela dit, par des gestionnaires en bio sur
00:11:50 des fermes anciennes qui allaient être urbanisées, qui finalement ne l'ont pas été. C'est
00:12:00 au nord de Saint-Denis, comment ça s'appelle ? Là où il y a Olivier, j'ai trop de noms
00:12:07 en tête, Olivier Darnay qui fait le miel béton. Ça vous dit quelque chose le miel béton ?
00:12:13 La question des habitats est très importante et les abeilles, elles, elles savent où
00:12:20 aller bien sûr. Elles ne vont pas forcément aller butiner dans des espaces qui sont trop
00:12:28 près de l'endroit où vous avez les pots d'échappement qui polluent d'une manière
00:12:33 ou d'une autre les inflorescences et toutes les plantes. Elles s'en vont là où il y
00:12:37 a des plantes qui sont un petit peu plus haut en niveau. Elles finissent par faire un miel
00:12:41 qui est plutôt de qualité. Mais elles existent surtout. Les abeilles existent en ville, même
00:12:46 si elles ne sont pas des millions. Elles existent, ce qui n'est pas toujours le cas dans la couronne
00:12:52 agricole qui est périphérique à la ville de Paris, par exemple. Là, vous n'avez
00:12:56 absolument pas d'abeilles parce que ce n'est pas possible. Tous les produits sont faits
00:13:00 pour tuer tous les insectes. Enfin, pas tous parce que je ne pense pas du tout que les
00:13:05 exploitants agricoles aient l'intention de tout détruire. Mais ils utilisent un produit
00:13:10 pour une plante ou pour un champignon, n'importe quelque chose. Et malheureusement, ça tue
00:13:16 tout. Dans une ville, on a beaucoup moins ça, surtout depuis la première, une ville
00:13:21 comme Paris, la première mandature de Delanoë, où il y a eu des prises de position sur la
00:13:26 gestion écologique, la suppression des produits toxiques. Et à ce moment-là, sont arrivées
00:13:33 quelques, malgré tout, quelques plantes qu'on appelle des mauvaises herbes. Ça, ça ne
00:13:37 veut rien dire. Ça n'existe pas. Mais aussi, forcément, puisque c'est un lieu d'habitat
00:13:41 pour les animaux, des insectes. Et ça, c'est intéressant. Ça, ça s'appelle, j'oublie
00:13:47 le nom, je vous dirai, Olivier Darnay, c'est lui qui fait le miel. Les grilles existent
00:13:53 toujours, pas toujours, partout, mais encore au pied des arbres. Mais comme il n'y a plus
00:13:58 les produits, on commence à voir des choses qui poussent. Vous avez vu ça partout. Ça
00:14:03 s'est transformé petit à petit en minuscules jardins, très discutés parce que ce n'est
00:14:07 pas toujours très bien entretenu. Et puis, on trouve les grottes de chiens. Voilà quoi.
00:14:13 Mais finalement, ça commence à prendre un peu d'importance. Et je montre ça parce
00:14:19 que bon, d'accord, ce ne sont pas des animaux, mais enfin, ce sont les habitats. Et c'est
00:14:23 très important. Et il y en a de plus en plus à toutes sortes d'échelles. Alors, c'est
00:14:27 modeste apparemment, mais avec la répétition, on finit par avoir quelque chose qui a une
00:14:33 présence en biomasse et une diversité. Ça, c'est une image de Bucharest. J'y retourne
00:14:42 dans quelques temps pour faire une étude sur une école du jardin planétaire à Brezoil,
00:14:49 qui est dans les Carpathes. Mais dans la ville même de Bucharest, il y a une manière de
00:14:54 gérer qui est très intéressante parce qu'on a accepté l'idée que le lierre n'était
00:15:02 pas une plante à détruire. Elle n'est pas du tout dangereuse. Et elle arrive à grimper
00:15:09 et à habiller les immeubles sans qu'on ait besoin de l'aider. Ça, ça ne demande rien.
00:15:18 Or, la flore de lierre, elle est très, très attractive pour les abeilles, pour le miel.
00:15:24 Ça fait un miel de bonne qualité, tardif. C'est très intéressant. Encore faut-il
00:15:30 accepter ça. Donc, quel est notre rapport? Pas seulement aux animaux, mais aux habitats
00:15:35 qui permettent aux animaux de venir. Si on décide que le lierre n'est pas acceptable,
00:15:40 on se prive de quelque chose qui est important. Ça, c'est Bucharest. On n'a pas ça encore
00:15:45 à Paris. On pourrait, dans des endroits où ça serait pas mal, cacher des trucs moches.
00:15:51 Ça, c'est dans l'esprit de quelque chose qui est la recolonisation du monde végétal
00:15:59 sur des constructions qui sont abandonnées. C'est à Saarbrück. On est en Allemagne.
00:16:05 On n'est pas loin de la France. Ces bâtiments industriels ont été totalement abandonnés,
00:16:10 mais ça ne fait pas longtemps. Ça fait un peu plus de 20 ans, mais rien. Et c'est devenu
00:16:15 un incroyable écosystème à tel point que c'est visité en tant que tel. Il y a des
00:16:21 arbres qui poussent en même temps, traversant l'architecture métallique. Et évidemment,
00:16:26 ça donne un paysage unique. Je ne dis pas qu'il faut faire ça systématiquement partout,
00:16:31 mais quand on peut accepter, en tout cas, l'idée que ces milieux-là peuvent se croiser
00:16:37 et enrichir pas que le paysage, mais la diversité, c'est pas mal. Alors, Europasie, c'est juste
00:16:48 le mot qui est au-dessus. Mais ce que je veux montrer, c'est ce qui est en dessous, qui
00:16:53 est un habitat récent de grèves qui a accueilli, je ne les ai pas, les sobolanes. Sobolane,
00:17:03 c'est le nom, ça veut dire un rat en roumain. Mais c'est joli le mot sobolane. Moi, je voudrais
00:17:10 faire un jardin des sobolanes, mais c'est mal perçu parce que les rats ne sont pas aimés.
00:17:15 Et puis en plus, ils transmettent des maladies, paraît-il, etc. Alors là, évidemment, ça
00:17:19 a développé un petit peu la population des rats pendant tout ce temps. Maintenant, il
00:17:23 n'y en a plus, ils les ont enlevés, mais c'est tout près, c'est dans le 12e, à côté
00:17:25 de chez moi. Ça donnait un paysage assez étrange. Je ne dis pas qu'il faut qu'on ait ça. Il
00:17:31 faudrait avoir une tolérance sur le rat avec un habitat différent, pas les poubelles. Et
00:17:38 là, vous avez ici dans l'exposition, j'ai bu d'ici de ce côté-là ou là, des taupes
00:17:45 gigantesques. Magnifique. Moi, j'en ai beaucoup dans mon jardin. Ça, c'était un jour où
00:17:52 il y avait de la gelée qui restait un tout petit peu sur les taupes pinières. Vous les
00:17:55 voyez. C'est un animal qui est combattu systématiquement. Mais si la taupe est là, ça veut dire qu'elle
00:18:04 peut vivre. Elle est carnivore, elle ne mange pas les plantes. Et donc, elle a tout ce qu'il
00:18:09 lui faut dans le sol. C'est un habitat remarquable, un sol. C'est profond. C'est là où il y
00:18:15 a une diversité très supérieure à celle que l'on voit qui est sur le sol. On ne le
00:18:19 sait pas. La biomasse comprise dans le sol est supérieure à celle qu'il y a au-dessus.
00:18:23 On ne nous le dit pas suffisamment. Donc, si le sol a une qualité biotique forte, il
00:18:30 accueille toute une diversité dont la taupe, évidemment, fait partie. Et ça, c'est très,
00:18:35 très précieux. Pour le coup, quand on cultive quelque chose là dedans, on n'a pas besoin
00:18:39 de faire un apport quel qu'il soit. J'ai essayé de faire un jardin de taupe à Lausanne.
00:18:46 Une exposition, toujours la vie invente, s'est déplacée jusqu'en Suisse. Elle était itinérante.
00:18:53 Mais ça n'a pas très bien marché parce que quand j'ai dit ça et ils m'ont dit parce
00:19:00 que le sujet, c'était le sol. Je dis oui, ça, c'est une très bonne idée. Moi, je
00:19:06 fais un jardin de taupe. Là, ils ont dit oui, on en a déjà. Manifestement, ça ne
00:19:13 les intéressait pas. J'ai fini par faire quand même quelque chose qui était une petite
00:19:19 installation. Je ne vous la montre pas parce qu'elle n'était pas très jolie, qui est
00:19:22 un gnomon, une sorte de montre. La montre, c'est suisse. Ça va très bien. Qui donne
00:19:30 les heures ? Les heures où la taupe arrive, où la terre se fabrique la petite taupinière.
00:19:36 Il y en a trois. 7h, midi, 5h l'après-midi. Et ça, je l'avais appris lorsque j'avais
00:19:43 encore des clients privés, il y a très longtemps. J'arrive chez l'un d'eux, il avait son fusil.
00:19:48 Il avait ouvert la fenêtre. Il me dit de toute façon, elle arrive à 7h le matin, à 5h
00:19:54 l'après-midi. C'était très inquiétant. Il était presque midi. Et effectivement,
00:19:59 la taupinière se forme et il tire. Il tire. J'ai encore le bruit dans la pièce. Il
00:20:05 me dit, elle est peut-être pas morte. Ça, c'était une drôle d'idée quand même.
00:20:12 Quand j'ai commencé à avoir mon propre jardin, je me suis dit comment je fais pour
00:20:16 vivre avec les taupes. Ils avaient fait aussi dans plein de jardins ailleurs des choses
00:20:24 que je ne vous recommande pas qui consistent à empoisonner des verres de terre avec la
00:20:28 taupiscine qui est un terrible poison qui est devenu tellement dangereux à force de
00:20:33 tuer des chiens, des belles-mères et tout que finalement, on a interdit complètement.
00:20:39 Mais ça a été remplacé par des machins explosifs, par des choses qui font saigner
00:20:43 les taupes parce que par la télé elles sont hémophiles, n'importe quoi. Mais quoi, le
00:20:46 monde animal, on en fait quoi si on essayait de comprendre comment ça marche ? C'est
00:20:51 très beau une taupe. C'est très doux. Ceux qui sont là géants ne sont pas dans
00:20:56 la peau qu'il faudrait, mais c'est un bel animal. Le rôle très important de la petite
00:21:08 taupinière est de faire lever la dormance de graines qui sont enfouies, d'espèces
00:21:14 que peut-être on ne verra jamais si on n'y a pas ce mouvement de terre. On voyait autrefois
00:21:19 dans les, ce qu'on appelle les mésicoles, dans les sols retournés agricoles, des tas
00:21:24 de plantes qui poussaient. Les coquelicots en font partie, mais les bleuets, vous n'en
00:21:27 avez plus de bleuets. Vous ne les voyez plus. Ça n'existe plus. Ça fait partie des
00:21:31 mésicoles. Les niels, les nigels, etc. Et chez moi, c'est plutôt des euphorbes qui
00:21:37 poussent, peu importe. Mais en tout cas, ce sont des plantes qu'on ne verrait pas s'il
00:21:41 n'y avait pas la taupinière. Donc, elle maintient visuellement, en tout cas, la diversité
00:21:46 enfouie. Et ça, c'est quand même quelque chose qui est du côté positif de l'animal.
00:21:52 Donc, dans les habitats, on a toutes sortes de diversités. Mais pour comprendre là où
00:21:58 on est et comment ça fonctionne, il faudrait qu'il y ait une pédagogie très vite sur,
00:22:03 y compris des tout petits animaux. Et quelques fois qu'on écrase sans prêter attention
00:22:08 parce que ce n'est pas beau, parce qu'on a peur, parce qu'on ne sait pas à quoi ça
00:22:13 sert en fait. Là, vous voyez un cuculia verbaci sur un verbascum. Si je vous dis ça tout
00:22:20 de suite, vous me dites ça veut dire quoi? C'est la chenille d'un papillon qui vit sur
00:22:25 une molène. Et moi, je les garde toutes les molènes qui sont des plantes qu'autrefois,
00:22:30 quand j'étais petit, d'ailleurs, on me disait il faut les enlever. Ça, c'est des plantes
00:22:35 qui viennent toutes seules par elles-mêmes. Elles n'ont pas le droit, etc. Et tout est
00:22:38 comme ça. Donc, je les garde. J'en ai vu d'ailleurs hier. J'étais assez content parce
00:22:45 qu'il y a une telle diminution de la diversité animale. C'est énorme qu'on commence à avoir
00:22:55 peur et c'est pour ça qu'on en parle de plus en plus, bien sûr. Mais on a raison, il faut
00:22:59 en parler. Lorsque l'on retrouve des espèces comme ça encore vivantes, on est content.
00:23:04 Alors, effectivement, ça fait un peu des dégâts. Ça fait un tissu pas très joli
00:23:08 sur les feuilles de la molène, mais ce n'est pas grave. On peut enlever les feuilles un
00:23:14 peu trouées. Après, les autres, ça poussera, ça fleurira. Tout va bien. Et puis, savoir
00:23:19 que tous les insectes qu'on voit sont issus d'une mue et que leur larve ne vit pas forcément
00:23:26 sur la plante sur laquelle ils se trouvent. Là, il faut de l'ortie pour celui-ci. Non,
00:23:32 pas pour celui-là. Celui-là, j'ai oublié, mais ce n'est pas l'ortie. Ça, c'est le
00:23:41 chenil du Tyria jacobé, la chenille du Tyria qui vit sur un sennçon de Jacob. Alors là,
00:23:47 il est très atteint, on ne voit plus sa fleur. Le papillon, il est là. S'il n'y a pas ces
00:23:52 chenilles, le sennçon se développe démesurément. Ce n'est pas très intéressant. Ça, c'est
00:23:59 attractif. Vous voyez ces plantes qu'on trouve quelquefois dans les fossés un peu humides
00:24:07 et les papillons qui viennent en masse, ce sont des pyrrhides. Aucune de ces pyrrhides
00:24:12 n'a des chenilles qui vivent là-dessus, sur ce litrome, cette plante-là. Elles vivent
00:24:16 sur des choux, sur des plantes de brassie cassée, rien à voir. Et celle-ci qui donne
00:24:21 le macaon, qui est un papillon bien connu, il vit subitement, ça c'est à Paris, sur
00:24:26 la rue. Ruta graveolens, ce n'était pas prévu du tout parce que ce n'est normalement
00:24:31 pas là-dessus qu'il vit. Mais finalement, il s'est accoutumé et on le voit même sur
00:24:36 l'oranger du Mexique. Enfin bon, là, l'oranger du Mexique, c'est une plante qui arrive d'ailleurs
00:24:43 et qui sort de nourriture à un animal qu'on a chez nous. Et c'est comme ça. De plus
00:24:49 en plus, les croisements qui existent. Donc, on ne doit pas forcément rejeter ce qui n'est
00:24:55 pas originaire local. On appelle ça, on dit local, mais il n'y a rien de local parce
00:25:02 que ce n'était pas local avant. Je ne vais pas revenir là-dessus, mais en gros, le brassage
00:25:09 planétaire a toujours existé. Les plantes voyagent depuis toujours, les animaux évidemment.
00:25:13 Les animaux aident les plantes à voyager puisqu'il y en a qui les transportent. Les graines
00:25:18 sont beaucoup, beaucoup véhiculées par les animaux. Donc, on a un rôle énorme de la
00:25:22 part des animaux sur ça. Les oiseaux, je ne vous dis pas. Pour qu'un meurisier se
00:25:28 resème quelque part, il faut qu'il soit mangé par un oiseau, quelquefois par un mammifère
00:25:33 aussi, digéré. La pulpe, ils font comme nous, on mange la cerise, on ne mange pas
00:25:39 le noyau qui est la graine et ensuite, ils rejettent le noyau. Mais entre le moment où
00:25:45 il a attrapé la cerise et puis là où il va larguer la graine, c'est passé quelques
00:25:52 kilomètres. Donc, ça voyage absolument tout le temps. Et ça, c'est depuis toujours.
00:25:58 Ça, c'est une plante qui est détestée parce qu'elle vient d'ailleurs. Elle n'a
00:26:01 pas le droit. La grande berce du Caucase, qui est quand même magnifique. Vous la voyez
00:26:06 là. C'est merveilleux. C'est immense. C'est une ombélifère géante. Mais elle
00:26:12 est photosensibilisante. Elle se développe beaucoup. Elle est un peu envahissante. Elle
00:26:17 attire énormément d'insectes. Et puis, voilà ce panneau que je n'en ai jamais
00:26:21 vu ailleurs dans le jardin botanique de Montréal. On vous dit attention, il y a des abeilles.
00:26:27 Nous, on est plutôt content quand on voit les abeilles, mais on ne se dit pas il faut
00:26:30 faire attention. Et puis ça, c'est quelque chose, évidemment, que vous voyez de quel
00:26:36 animal il s'agit. Non ? Oui, une limace ou un escargot. Je ne sais pas. Le matin,
00:26:50 alors le pollen, c'est le printemps. Le Vélux, c'est chez moi. Et puis, je vois ça le
00:26:55 matin. Je dis, wow, il y a un urbaniste qui a fait un projet génial. Parce que quand
00:27:00 même, là, on ne va pas d'un point A à un point B avec une ligne droite. Ça tricote
00:27:05 là. C'est pas mal. Manifestement, l'escargot ou la limace, il a hésité. Il a dit je vais
00:27:11 passer par là. Ah ben non, je vais passer par là, etc. Il a fabriqué un plan de communication
00:27:17 dans la ville. Je ne suis pas sûr qu'on fasse les choses comme ça maintenant. Mais
00:27:20 dans la préséance du vivant, justement, peut-être qu'il faudrait tourner à certains
00:27:25 endroits en disant non, je ne fais pas ça parce que là, je vais détruire quelque chose
00:27:28 où ça ne me convient pas. Je vais tourner, etc. C'est plus la ligne droite qui est la
00:27:32 ligne efficace, parait-il. Pas sûr. Alors, les asertiliens, bon, ça, c'est une sculpture
00:27:39 faite par un voisin qui fait des trucs en béton. Mais il y a le petit lézard des murailles
00:27:45 qui s'est installé. Je ne sais pas s'il y en a à Paris. Vous en avez vu ? Je ne suis
00:27:51 pas sûr qu'il y en ait. Il faut peut-être un peu plus de calme et plus de roches aussi.
00:27:57 Moi, ce qui m'avait amusé, c'est qu'il y ait un lézard sur un coconil. C'était assez
00:28:02 drôle quand même. Il y a des endroits où on vous indique qu'il faut faire attention
00:28:07 à des animaux auxquels on ne fait pas du tout attention chez nous, comme la tortue.
00:28:11 Ici, on est sur la ligne des jardins en Afrique du Sud, au bord de la mer, un endroit très
00:28:21 étonnant avec des paysages brûlés. Il y a des incendies tout le temps. Et la tortue,
00:28:25 qui elle, est peut-être l'animal le plus fragile quand il y a des incendies, parce
00:28:28 que le temps qu'elles arrivent à se retrouver un abri, elles peuvent y passer. D'ailleurs,
00:28:35 j'avais utilisé le symbole de la tortue pour d'autres raisons, mais au jardin du
00:28:38 musée du Quai Branly, parce que c'est quelque chose qui est tellement fascinant dans l'histoire
00:28:43 humaine qu'on la retrouve dans toutes sortes de cultures. Et la forme ovale revient dans
00:28:48 ce jardin-là tout le temps. Vous le voyez ici. Alors en Asie, elle est cosmophore.
00:28:54 Dans l'Afrique, ça interroge les dogons. Ils en font là un siège pour faire parler
00:29:01 les coupables. En Amérique du Sud, c'est autre chose. Il y a des Amérindiens qui
00:29:08 font le campement en forme de tortue et la queue indique la direction de la rivière.
00:29:14 Là, on a une grande terrasse ovale en tortue. Ici, une pergola, un carapace de tortue.
00:29:23 Donc ça, c'est l'évocation. Mais l'animal, lui, il est très important.
00:29:28 Alors, le monde des oiseaux. On est dominé par les pigeons, quelques fois aussi d'autres
00:29:37 espèces, les merles, les corneilles. Ils jouent un rôle extrêmement important. Ce
00:29:45 sont nos commençaux. Nous vivons avec eux depuis toujours, mais eux vivent avec nous
00:29:50 surtout parce qu'ils savent très bien comment faire pour récupérer les miettes. Là, il
00:29:54 n'y a pas de problème. C'est ça qui leur permet de manger, de vivre. Vous voyez comment
00:30:00 ils font. Ils font le ménage. Plus ou moins. Ils sont attractifs. Toujours. Ils interrogent
00:30:14 toujours. Il y en a qui sont plus séduisants que d'autres. Les canards, là, jouent un
00:30:19 rôle extrêmement important. C'est un peu mon animal emblématique. Parce que là, on
00:30:24 me dit, si je devais être réincarné, je dirais, ouais, un canard, c'est super. Ils
00:30:29 vont me rendre compte. Ils marchent, ils nagent, ils flottent, ils plongent, ils volent. Pour
00:30:38 un paysagiste, vous avez tout là. Nous, on ne sait pas faire ça. Bon, juste la voix.
00:30:44 Peut-être que je changerais un peu. Dans un pays où il n'y aurait pas de magrets,
00:30:50 de trucs comme ça, de chasseurs. Cette photo-là, elle est là, non ? Elle est presque là.
00:30:57 Ah oui, c'est celle-là. Voilà, d'accord. Il y a eu aussi un héron. J'ai quelque part
00:31:08 la photo, parce qu'on me l'a envoyée, ce n'est pas moi qui l'avais prise, du héron
00:31:11 qui arrive là. Et je l'ai perdue. Je ne sais pas où elle est. Mais il y en a d'autres
00:31:15 qui viennent dans Paris. Là où il y a un peu d'eau, vous pouvez voir arriver un héron
00:31:20 en plénité. En tout cas, il y a les canards et les canards attirent l'attention d'une
00:31:25 façon absolue. Les grilles que vous voyez métalliques, c'est la limite normalement
00:31:31 du jardin du côté de la rue de l'université. Mais ça n'empêche pas de voir. On voit à
00:31:35 travers. Et les canards sont bien là. Mais quelquefois, ils se demandent, ils se disent
00:31:40 alors il n'y a pas d'eau ? Comment ça se fait ? Ils se posent la question, les canards.
00:31:47 Et puis ça, je l'ai trouvé aussi en Afrique du Sud. J'ai trouvé ça assez rare. On n'a
00:31:53 pas beaucoup de panneaux signalétiques sur le canard. Mais dans des endroits où c'est
00:31:57 précieux et bien considéré. Alors, il est à gauche, conduit à gauche. Alors, on ne
00:32:08 voit pas que ces oiseaux là, dans la ville. Là, on est sur le pont d'Austerlitz. Il y
00:32:14 a une crue. Tout ce qui se passe au bord de mer est tellement désagréable pour les oiseaux
00:32:20 qui n'arrivent plus à habiter, qu'ils viennent sur les rivières et passent à l'intérieur
00:32:23 du pays. Et vous voyez arriver des mouettes, des goélands. C'est absolument fantastique.
00:32:27 Sauf que ce spectacle fascine. Là, vous avez des gens qui, normalement, vont à la gare
00:32:33 d'Austerlitz. Pas du tout. Ils prennent le temps parce que ça les étonne. Et c'est
00:32:39 vrai que c'est particulier. Donc, on n'a pas que des pigeons. Ça, c'est pas mal, ça.
00:32:52 Heureusement, ils ne savent pas lire. Ils communiquent autrement. Ça, c'est une photo
00:33:01 que j'avais prise au Maroc. À côté d'un souk, il y avait des pans partout. Il y en
00:33:12 a ici aussi, à la ferme du Bonheur, dans l'axe de Nanterre. Vous avez des pans, vous
00:33:18 avez des animaux, parfois en liberté. C'est beaucoup plus rare. Ça, c'est une perruche.
00:33:27 Maintenant, vous savez qu'il y a des perruches également partout en Europe, dans toutes
00:33:31 les forêts. Là, on n'est pas en Europe. On est à Shiraz, on est en Iran. Devant le
00:33:38 tombeau de Hafez, qui est un poète important, là-bas, on sort et vous avez des... Là,
00:33:44 il y en a deux, des mecs qui ont une perruche dans une main avec une boîte et des petits
00:33:49 papiers. Alors quand même, vous vous arrêtez. Je vais aller voir. La voilà. Elle n'est
00:33:56 pas attachée. Elle est vraiment apprivoisée. Mais elle vous regarde. Et puis, moi, j'avais
00:34:03 une chemise bleue. Alors elle a dit bon, je prends un truc bleu. Et elle m'a tendu ça.
00:34:10 C'est un poème d'Hafez. Donc l'oiseau vous offre un poème. J'avoue que là, j'étais
00:34:18 un peu... Il paraît que c'est banal, là-bas, de faire ça. On n'a pas mis ça au point
00:34:22 chez nous. On pourrait. Je ne sais pas quel serait le poète. Il faudrait choisir. Et
00:34:28 quel oiseau aussi. Je ne sais pas. En tout cas, les perruches sont arrivées. Alors oui,
00:34:33 ça, c'est un dessin que j'ai fait il y a longtemps. Mais bon, c'était quand on a
00:34:38 des réunions qui sont trop longues. On s'ennuie. On ne sait pas quoi faire, etc. Les gens
00:34:41 parlent et tout. Et puis, il est arrivé comme ça. Un peu celui qui conduit quelque
00:34:45 chose. Il imagine qu'il conduit un truc génial. En fait, il vole. Il rêve qu'il vole. Les
00:34:50 oiseaux nous font rêver. Lui, il est un peu lourd pour ça. Mais bon. Alors, après les
00:34:56 oiseaux, les mammifères. Là où j'ai vu des mammifères relativement apprivoisés
00:35:01 pour la première fois, c'était dans le Central Park de New York, où il y a toujours des
00:35:05 gens pour les attirer. Les petits écureuils gris. Nous n'avons que des roues. Enfin non,
00:35:10 maintenant, il y a des roues et des gris aussi en Europe. Mais il n'était pas question
00:35:15 qu'ils ne viennent pas tous les jours nourrir. Ça, c'est à Turin, où dans un espace complètement
00:35:21 abandonné, un ancien stade qui est devenu une friche, les gens apportent de la nourriture
00:35:27 aux chats. La question des chats, mammifères séduisants, est une question très importante.
00:35:36 C'est quand même eux qui font un dégât énorme sur la diversité globale, que ce
00:35:42 soit des oiseaux, des mammifères ou autres. Et c'est bien dommage parce que les chats
00:35:48 harailles, ceux qui sont sauvages, ils s'en nourrissent. Mais les chats domestiqués,
00:35:54 ils s'amusent. C'est un jeu. Bon, on ne cesse pas d'être séduit par eux, mais
00:36:00 ils ont une action de prédation qui est énorme par le jeu. C'est un peu comme nos chasseurs,
00:36:05 si vous voulez, qui jouent parce qu'ils ne sont pas pour se nourrir. Donc, ça donne
00:36:11 des drôles de petits paysages comme ça, cachés, et ils sont nourris. Nous, on n'a
00:36:18 pas ça encore chez nous. On a d'autres animaux qu'on utilise, là je vous en montre,
00:36:22 ils sont classiques, pour venir aider la gestion. On est dans le parc à Lyon, nous l'ONS
00:36:37 peut-être, où dans l'espace central, il y a deux espaces assez importants autour
00:36:43 de l'axe vert qui sont tondus pour donner à manger à ces animaux-là. Alors ça, c'est
00:36:51 devenu maintenant quelque chose d'accepté. On a des moutons dans les villes, eux c'est
00:36:56 des moutons de Chauvet qui sont issus d'une île au nord de l'Angleterre où ils ont
00:37:01 été indépendants, complètement autonomes pendant tellement longtemps qu'on n'a plus
00:37:05 besoin de s'en occuper. Donc c'est très intéressant, dans la gestion. Sinon, il
00:37:10 y a des éleveurs, ça c'est le jardin autour, en gestion écologique. Et ça, c'est les
00:37:15 milliers d'étudiants qui vivent dans cet espace-là. Donc, ils ont l'habitude de
00:37:20 voir les moutons. Ça, c'est même mode de gestion, mais avec des moutons différents
00:37:25 à la roche Guyon, près, au bord de la Seine, un jardin public aussi. Ça, ça m'avait
00:37:34 surpris, c'est au domaine du Rayol où les moutons pâturent, bon d'accord, sauf qu'ils
00:37:38 prenaient des photos parce qu'il y avait des moutons, comme s'ils découvraient les
00:37:42 moutons. C'était il y a bien une vingtaine d'années, ça a changé maintenant. Là,
00:37:46 on est dans l'axe historique de Paris à Nanterre où les moutons du Roger Després
00:37:52 et de la Ferme du Bonheur viennent pâturer les espaces autour. Ça, c'est Olivier Marcouillou
00:37:57 qui a son équipe de moutons et qui fait le tour de toutes les propriétés où on lui
00:38:02 demande de venir. Il n'y a plus de tondeuses, il y a des moutons. Pourquoi pas ? Lui, il
00:38:11 les transporte. Donc, on peut les avoir dans Paris même. D'autres mammifères plus imposants,
00:38:20 c'est plus rare. Là, c'est une expo à Avignon où ils vendent des ânes, des chevaux,
00:38:27 etc. une fois par an. Mais sinon, avant, c'était banal. Vous avez d'ailleurs des
00:38:31 images ici qui illustrent très bien comment il y a des crottes de cheval partout. C'est
00:38:35 normal. Et ça, moi, j'ai vu les derniers. Ça a disparu. Il y avait même des fermes
00:38:40 à l'intérieur de Paris. Il y a un livre qui a été fait par les Anglais il y a très
00:38:44 longtemps qui expliquait que sur la couronne de Paris, tous les habitants étaient en autonomie
00:38:50 complète de la ville de Paris il y a 50, peut-être plus que ça maintenant, 70 ans
00:38:56 ou quelque chose comme ça. On a trois jours d'autonomie. Donc, bon, ça, ils sont familiers.
00:39:06 On peut parler avec eux. Là, c'est au Maroc, mais peu importe. Il y a des animaux avec
00:39:13 qui on n'a pas l'habitude de parler, comme les cerfs, les chevreuils, les dindes. Mais
00:39:19 dans la ville de Nara, au Japon, ils traversent la route au feu vert. Ils sont complètement
00:39:25 habitués. C'est très touchant. Là, le pauvre, on lui a enlevé ses cornes, mais on aurait
00:39:31 pu s'en passer. Ils habitent dans la nature à côté, mais ils viennent dans la ville.
00:39:37 Et donc, c'est pas exclu, ça. Bon, il se trouve que dans la façon de voir le monde
00:39:41 au Japon, vous avez toute une partie qui est réservée aux esprits, mais aussi aux
00:39:44 plantes et aux animaux. Et on n'y va pas. Et une autre, au contraire, où les humains
00:39:49 s'agitent beaucoup plus. C'est pas pareil. On n'a pas ça chez nous. Donc, il y a des
00:39:52 réserves. Mais il y a des possibilités. Ça, c'est chez nous. On est dans la Creuse.
00:39:57 Quelqu'un qui vient m'aider souvent et qui a un comportement tel que c'était pas impossible
00:40:05 de s'approcher d'un fan et même de lui parler. Finalement, de dire "mais elle est où ta
00:40:10 maman ?". "Je sais pas". Alors, il l'a pris dans ses bras. Il est venu me le montrer.
00:40:14 J'étais complètement sidéré. Et puis après, il est allé le reposer. Et j'ai vu peut-être
00:40:22 le fait de l'avoir pris, les parfums, l'odeur et tout. La maman va pas le reconnaître.
00:40:26 Pas du tout. Ça s'est rien passé. Donc, peut-être que cet individu est un animal.
00:40:32 C'est un animal humain. Mais enfin, suffisamment proche des autres animaux pour ne pas leur
00:40:40 faire peur. Moi, ça m'a convaincu dans l'idée qu'on pouvait dialoguer autrement. Bon, là,
00:40:48 je passe des animaux de plus en plus gros. Là, c'est très banal à New Delhi. En Inde,
00:40:54 vous voyez ça. Chez nous, on n'a pas encore. Je pense pas que ça arrivera. La façon de
00:41:05 nous expliquer. Alors, la cytien léthique, très intéressante, parce que quelquefois,
00:41:13 elle dit des choses auxquelles on ne s'attend absolument pas. Qu'est ce que c'est qui s'appelle
00:41:16 le tauron ? Est-ce que c'est l'animal ou la rivière ? Là, on est dans... Là aussi,
00:41:28 c'est pas moi qui ai fait ça. J'ai vu, j'ai pris la photo. J'ai pas pu m'empêcher. Comme
00:41:34 je vous montrais les dents de Nara, il y a un rêve historique à partir de tous ces
00:41:38 animaux depuis toujours. Mais on sait qu'on peut se rapprocher des cervidés. Il suffit
00:41:44 de leur parler encore une fois. Là, il a des ailes, celui-là. Là, on se demande comment
00:41:52 le tauron va faire pour tourner. Et ici, il pèse 19 tonnes. Ça, c'est quand même pas
00:42:00 rien. Maintenant, quelque chose comme ça, il paraît que c'est très rare. Moi, je l'ai
00:42:07 vu en Australie, au nord de Cairns. On s'en va vers le nord-est de l'Australie. Et vous
00:42:12 voyez que l'animal, il est beaucoup plus fort que l'humain. Il abîme la voiture. C'est
00:42:19 pas l'inverse. Donc, il faut faire attention. Ils le disent. Bon, ça, c'est autre chose.
00:42:27 C'est un gag. C'était sur le dos d'un étudiant. Et là, j'ai dit ouais, OK, c'est un peu embêtant
00:42:34 pour les animaux, mais bon. Alors, comment on a une sorte de pédagogie sur la question
00:42:42 de la pédagogie ? Depuis longtemps, le loup est mal vu. Et là, vous voyez que grâce
00:42:46 au tracteur, le petit chaperon rouge, il s'en fiche complètement du loup. OK. Là, le loup
00:42:53 est resté un peu méchant. C'est récent. C'est un tag tout près d'une carrière Meuse
00:42:58 Misérie. On est à Nantes. Mais en fait, il est méchant et peut-être pas complètement
00:43:02 puisque lui, il va attaquer une grosse machine. On ne sait pas trop ce que c'est, mécanique.
00:43:08 C'est un animal qui s'en prend à notre technologie. Là, on est au Jardin des plantes. Il y a
00:43:17 quelques années, il y a 2, 3 ans, 4 ans, je ne sais plus, où on nous montre les animaux,
00:43:22 mais de façon telle que ça fait peur. Bizarrement, j'ai trouvé ça étrange d'un point de vue
00:43:27 de la pédagogie. Bon, ça peut être traduit autrement avec quelques mots. Là, on n'a
00:43:33 pas peur. Ne fermez pas vos volets. Les chauves-souris sont revenus, etc. Il y a quand même une
00:43:38 communication qui est acceptable. Et puis, il y a des livres qui viennent d'être très
00:43:43 récents, qui viennent d'être édités et qui sont, je trouve, remarquables pédagogiquement.
00:43:51 C'est un livre où vous avez les animaux et les plantes qui parlent entre elles. Ce
00:43:56 dont on rêve, c'est ce vers quoi on devrait se diriger. Comment on peut arriver à avoir
00:44:00 un dialogue autrement qu'avec la force de la gestion en disant c'est bon, c'est pas
00:44:05 bon, on tue, etc. Donc, il fait parler tout, tout le monde. Aussi bien le ver de terre
00:44:13 que la plante elle-même. Et c'est à la fois drôle et très pédagogique. Celui de
00:44:19 Simon Huro, qui est un autre livre où il parle de comment il fait avec un jardin qui
00:44:23 était moche, une espèce de truc trop géré pour en faire un lieu d'accueil à la diversité.
00:44:29 Et là aussi, il fait un commentaire. Il ne fait pas parler les plantes et les animaux,
00:44:34 il fait un commentaire. Une très belle histoire. Ça s'appelle l'Oasis. Et un autre livre
00:44:40 qui vient de mettre données, qui est extraordinairement important. Là, vous voyez que le panneau
00:44:48 vous dit corneille méchante. Ce n'est pas du tout évidemment le cas. C'est corneille,
00:44:53 il faudrait mettre plutôt intelligente. Et là, vous avez les deux auteurs, Camille
00:44:58 Giroyer et Geoffrey Le Guilcher. C'est Geoffrey qui m'a donné le livre. Et c'est exceptionnel.
00:45:05 Ça se passe dans le Jardin des plantes à Paris. Vous avez cette femme corneille qui
00:45:12 discute avec une corneille ou deux ou trois, plusieurs, et qui finit par leur donner des
00:45:17 noms d'ailleurs et les reconnaître. Et qui au bout d'un moment permet d'établir,
00:45:22 comprendre comment vivent ces animaux. Comment ils se repèrent. Quel est leur niveau d'intelligence.
00:45:28 C'est stupéfiant. On savait bien que les corvidés avaient un cerveau particulier,
00:45:36 très développé, très intelligent, qui donne un comportement remarquable. Mais là,
00:45:43 c'est expliqué jusqu'au bout. Et surtout, c'est très touchant parce qu'on voit qu'il
00:45:48 y a la possibilité du dialogue. Ça n'est pas partout possible. Mais il y a cette possibilité
00:45:54 là, y compris avec des animaux aussi lointains de nous que des dinosaures. C'est des dinosaures.
00:45:59 Ils sont quand même assez loin de nous. Eh ben non, on peut communiquer avec eux.
00:46:04 Ah oui, je finis avec les chiens. Nous, en fait. Nous, les chiens dans la ville, peut-on
00:46:13 les avoir sans laisse ? Là, vous le voyez, il se pose une question. Il ne fait pas de
00:46:19 vélo. Il a le droit. Mais enfin bon. Ça, ce sont des jeunes que j'ai vus dans les
00:46:25 endroits où il y a des... C'était dans un espace de ferme agricole, mais pédagogique.
00:46:33 Et les petits se nichaient exactement comme le faisaient les chiens à côté. Ça m'avait
00:46:40 bien plu. Là, on a le chat sur celui qui m'a d'ailleurs envoyé la photo, qui est
00:46:44 un jardinier. Donc, bon, il y a un contact. Il y a plus qu'un dialogue. Il y a une vie
00:46:50 avec. Là, vous avez le chien sur la moto, le scooter de celui qui l'a conduit. Alors
00:47:00 comme il est parti, je ne sais pas où, le chien se met dessus. Ça, c'est probablement
00:47:06 pas sûr qu'il soit le copain de celui qui conduit la bagnole. Mais il se met là. Donc,
00:47:13 il y a une espèce de proximité sans problème avec l'outillage humain. Là, il nous regarde.
00:47:20 Ils n'ont pas de collier. Ils n'ont pas de laisse. J'appelle ça les chiens jaunes en
00:47:26 général. On les trouve partout, mais on n'en a pas chez nous. On les trouve partout
00:47:33 dans le monde. Ici, on est à Sarajevo. Il y a des groupes de chiens comme ça. Il y
00:47:37 a aussi les mêmes groupes, mais ils sont noirs. Ils ne se mettent pas ensemble. Bon,
00:47:42 c'est un peu inquiétant toujours, mais bon. En tout cas, ils sont libres, eux aussi.
00:47:47 Pas de puce, pas de numéro, rien. Comment ça se passe quand on vit comme ça dans une
00:48:00 ville où les animaux sont en liberté avec une liberté équivalente à la nôtre presque.
00:48:10 En fait, supérieure vraisemblablement. Il se trouve que ces chiens, là on est à Santiago
00:48:18 du Chili, appartiennent non pas aux gens que vous voyez à côté, mais à tout le monde.
00:48:24 Ni au monsieur, ni à la dame assise là. Les chiens sont là. Ils ne peuvent pas se
00:48:32 passer de la proximité des humains. Et les humains, si par hasard on dit les chiens,
00:48:40 ça ne va pas, il faut les enlever, ils se rebellent. Quand j'ai pris ces photos, un
00:48:46 mois avant, il y avait eu une révolte de la population de tous les habitants de Santiago
00:48:52 du Chili, parce que le maire avait voulu éliminer les chiens, pour des raisons sanitaires,
00:48:57 évidemment. Et là, ça n'a pas marché. Ils ont été obligés de les remettre comme
00:49:02 ils étaient en liberté. Et à Sarajevo, il s'est passé la même chose. Sauf que
00:49:07 là, les habitants ont caché les chiens dans les immeubles, dans les escaliers, pour qu'ils
00:49:14 ne soient pas éliminés la nuit par ceux qui faisaient la chasse aux animaux. Et donc,
00:49:19 ils sont revenus, ils sont là. Donc il y a là quelque chose de très particulier,
00:49:24 mais je trouve très touchant, et qui va quand même dans un sens que nous avons un peu perdu
00:49:29 nous. Parce que, encore une fois, nous sommes dans la maîtrise. Là, vous avez à Santiago
00:49:35 du Chili, ce chien-là, il joue avec le motard qui est derrière lui. Il va retourner en
00:49:41 courant. Lui, il va repartir. Je ne sais pas quoi. Ils se connaissent. Moi, je n'avais
00:49:48 jamais vu ça. Et puis, toujours à Santiago, cette photo qui était la dernière que j'ai
00:49:53 pu prendre, d'ailleurs, vous voyez un chien qui lui, manifestement, appartient à quelqu'un
00:49:59 et qui regarde, mais lui, il est en prison. Et il regarde celui qui n'appartient à personne.
00:50:04 Dans quelle direction faut-il aller ? Pour moi, la réponse, elle est donnée. Il faut
00:50:13 que les chiens soient en liberté. On ne trouve pas les crottes de ces chiens en liberté.
00:50:17 Comment ils font ? Où est-ce qu'ils vont ? C'est un peu surprenant. Ils se débrouillent.
00:50:22 Personne ne leur donne à manger, mais ils ont toujours à trouver des trucs à manger
00:50:25 parce que finalement, il y a toujours trop de nourriture et les déchets, ils les prennent.
00:50:29 Ils savent où, parce qu'il y a des restaurants, des machins. Donc, ils ont quand même leurs
00:50:32 adresses. Je suis allé dans plein de jardins. Quand les jardins, s'il n'y avait pas d'humains,
00:50:40 il n'y avait pas de chiens. Les jardins ouverts. Il faut qu'il y ait un humain près du chien.
00:50:47 Et c'est emblématique, alors c'est la dernière image, c'est emblématique de quelque chose
00:50:56 qui représente pour moi l'impossibilité de vivre sans le regard de l'autre. C'est
00:51:02 ce que j'appelle le syndrome de la queue du chien. Vous êtes là, vous travaillez.
00:51:05 Puis vous avez le chien qui est par terre. Il dort. Enfin, fait semblant, parce que bon,
00:51:12 d'un oeil quoi. Et puis, au bout d'un moment, vous le regardez. Vous regardez. Et là, vous
00:51:17 entendez. Il est content, il a remis la queue. D'accord ? Mais vous ne l'avez pas parlé.
00:51:25 Vous ne lui avez pas donné à manger, vous ne l'avez pas caressé, rien. Vous l'avez
00:51:28 regardé. C'est tout. Alors on dit bon, ok, ça veut dire que ce mammifère-là, il est
00:51:36 vraiment proche de nous au point qu'il ne peut pas se passer de notre regard. Mais inversement.
00:51:40 Et est-ce que nous ne serions pas tous finalement dans ce genre de situation ? C'est juste
00:51:45 plus difficile de regarder le renard parce qu'il se méfie. Beaucoup plus. Et le chevreuil
00:51:50 aussi, mais pas toujours. Vous avez vu l'autre avec son fin dans les bras. Et on peut aller
00:51:57 comme ça jusqu'au bout. Quelle est notre possibilité d'avoir un dialogue avec les
00:52:04 animaux, quels qu'ils soient, à toutes les échelles, accroître la diversité, les accueillir
00:52:08 à cette diversité et apprendre à parler entre guillemets, c'est-à-dire juste à communiquer
00:52:16 sans s'asservir à toutes les règles des interdits, les bienséances culturelles et
00:52:22 l'espèce de névrose sanitaire. Tout a d'intérêt. Il faut parfois faire attention. Bien entendu,
00:52:31 un rat, comme je vous le disais, il peut transmettre une maladie. Mais n'importe qui, n'importe
00:52:36 quoi, tout le temps. Vous le savez, on a vécu quelques pandémies, n'est-ce pas ? Ce n'était
00:52:43 pas les chiens. Donc voilà ce que moi, je voulais dire là-dessus sur Paris Animal.
00:52:47 On a la chance d'avoir accru les surfaces d'accueil à la diversité par la suppression
00:52:54 des produits qui tuent ce qui peut donner à manger, notamment aux insectes. On accroît
00:52:59 par conséquent, ça c'est théorique et j'espère que c'est vrai quand même, la possibilité
00:53:04 d'avoir plus d'espèces d'animaux dans une ville aussi dense que Paris. Merci de votre
00:53:10 écoute. Pascal Lalix, je suis architecte. J'ai construit l'école de Boulogne, notamment
00:53:19 qui est une école qui accueille la biodiversité, qui avait été exposée aussi à la préséance
00:53:27 du vivant à Versailles. Et c'est une école qui accueille aujourd'hui 345 espèces faunes
00:53:33 et flores d'après le dernier diagnostic d'il y a un an et demi. Et donc on est là vraiment
00:53:37 à la rencontre encore plus intime, j'ai envie de dire, entre les enfants, les humains qui
00:53:44 habitent, qui utilisent ce bâtiment, la faune et la flore, et le végétal, puisqu'il y
00:53:51 a tout cette île au boisé. Et du coup, je voulais un peu avoir votre sentiment sur,
00:53:55 finalement, on est dans une espèce de paroxysme un peu, où on construit des bâtiments en
00:54:02 se disant qu'il n'y a pas de raison qu'ils n'accueillent que les vivants humains, ce
00:54:06 qui est ma conviction, mais finalement, est-ce qu'on n'arrive pas à quelque chose de très
00:54:10 antagoniste où on entropise littéralement l'espace pour y accueillir aussi des vivants,
00:54:18 et donc finalement, qu'est-ce que c'est que cette nouvelle vie aussi proche des urbains
00:54:25 en fait ? Jusqu'où peut-on aller pour accueillir vraiment des espèces qui sont sauvages ? Et
00:54:33 est-ce que finalement, on n'est pas là en train de fabriquer ? Qu'est-ce qu'on fabrique
00:54:36 en faisant ça ? Et quel est votre sentiment là-dessus ? L'important est d'avoir un écosystème
00:54:40 complexe. Nous dépendons, nous, prédateurs d'une chaîne ultime de prédation. Nous sommes
00:54:50 les plus prédateurs de tous. Nous dépendons de toute la diversité. Nous ne nous en rendons
00:54:55 pas compte parce que nous ne considérons pas qu'une plante dépend de, parfois, un
00:55:01 insecte, un animal, etc. Ou l'inversement, un animal qu'on consomme. Mais si, tout est
00:55:08 très très très lié. On ne nous met pas dans la compréhension de l'écosystème.
00:55:12 Donc plus cet écosystème est diversifié, plus on a la chance de maintenir cette diversité
00:55:17 dont nous dépendons. Malheureusement, avec l'exploitation industrielle, on a sélectionné,
00:55:22 on cultive et on élève seulement quelques espèces, c'est au détriment de beaucoup
00:55:26 d'autres. Ça c'est vraiment mettre tous ses oeufs dans le même panier, c'est stupide.
00:55:31 C'est difficile de faire plus bête. Vous avez une petite maladie sur une espèce, ça
00:55:35 détruit l'espèce et vous n'avez plus rien si vous avez cultivé ça sur la totalité
00:55:40 de votre surface. Donc il faut qu'on change de manière de faire et accueillir le plus
00:55:44 possible d'espèces. Après, il faut qu'elles se débrouillent entre elles. Ce n'est pas
00:55:47 à nous de gérer tout ça. Et elles arrivent à le faire s'il y a les plantes, les milieux,
00:55:54 l'eau, tout ce qu'il faut pour que ça puisse vivre. Moi, je ne suis pas contre
00:55:58 ça. C'est juste qu'on apprend, on est en train de découvrir. Ce que vous évoquez
00:56:05 là, pour moi, n'est pas une inquiétude. C'est juste une expérimentation. On peut
00:56:09 se tromper. Il y a aussi des voies où il faut changer. Il n'y a peut-être pas des
00:56:14 animaux qui s'entendent entre eux comme il faut. Mais il faut essayer.
00:56:18 Moi, ce qui m'intéressait, c'est tout le dialogue avec le vivant. Et en fait, ce que
00:56:22 je trouve très compliqué, c'est qu'on peut avoir assez facilement, avec une certaine
00:56:26 culture, une contemplation avec le vivant. Et ce qui bloque souvent, c'est comment on
00:56:30 peut initier un dialogue, comme vous parlez, par exemple, dans ce livre "Corneille avec
00:56:33 la fille" dans le parc Jardin des plantes. Mais pour beaucoup de choses comme souvent
00:56:37 les plantes ou des insectes qu'on ne connaît pas, c'est assez difficile, d'autant plus
00:56:41 qu'on n'apprend pas à l'école petit tous ces noms latins. Mais derrière ça, toute
00:56:45 la magie ou les merveillements, comme pourrait parler Bruno David. Et du coup, est ce que
00:56:48 vous auriez des histoires ou des conseils à donner pour initier ce dialogue, aussi
00:56:52 bien pour des gens comme nous perdus, adultes ou des enfants ?
00:56:56 Alors, pour l'instant, on en est à des assistances qui ne viennent pas de l'institution. Je vous
00:57:05 ai montré des livres, là, c'est pas ça qui se trouve dans l'enseignement aujourd'hui.
00:57:10 Mais petit à petit, il y a une prise de conscience qui se fait quand même dans les lycées,
00:57:15 dans les écoles. On a arrêté d'asphalter systématiquement les cours des écoles. Moi,
00:57:23 j'ai eu comme ça une discussion souterraine. On m'avait dit de faire un projet là. Je
00:57:27 dis oui, OK, c'est une bonne idée. C'était très intéressant. On partait d'une école
00:57:30 maternelle et j'ai dit on va commencer par désasphalter l'école maternelle. Il en a
00:57:34 été hors de question. C'était il y a une vingtaine d'années. Et il n'y a pas très
00:57:39 longtemps, on interdisait aux professeurs de SVT de cultiver des haricots pour montrer
00:57:48 comment une graine germe dans un petit pot parce que la terre, c'est dangereux. Ça,
00:57:54 c'est quand même terrible. Et puis, c'est allé comme ça dans beaucoup de professions.
00:57:59 Abandon total de la connaissance du vivant, y compris dans le métier de paysagiste.
00:58:04 Là, c'est terrible de savoir qu'on a copié le contrat des architectes, on est payé au
00:58:15 pourcentage du montant des travaux. Les plantes, ça vaut pas cher. 10, 15% du coût d'un
00:58:23 chantier. On ne peut pas gagner sa vie, faire travailler, payer une agence, vivre une agence
00:58:29 avec ça. Donc, on fait du béton. Et de toute façon, en même temps, dans l'enseignement,
00:58:34 tout s'est effondré de ce point de vue. C'est en train de repartir, mais tout petit à petit.
00:58:39 Parce qu'on n'arrête pas d'en parler, que l'institution se dit oui, il faudrait peut-être
00:58:43 changer. On n'est pas obligé de faire l'ENA. Vous voyez, on peut faire autre chose. Et
00:58:53 ça, c'est quelque chose de nouveau. Alors, heureusement, il y a des substitutions, il
00:58:57 y a des ateliers, il y a des gens qui font des prises de terrain. On va, avec des étudiants,
00:59:03 faire reconnaître des espèces. Mais ça n'est pas inscrit dans l'enseignement de façon
00:59:07 correcte. Je suis désolé de ne pas vous donner la réponse, mais c'est en train de
00:59:13 changer quand même. Ce n'est pas hasardeux si les étudiants d'Agro Paris Tech sont sortis
00:59:19 en disant on a compris ce que vous nous avez dit, on ne veut pas suivre, on fait autrement.
00:59:22 La bifurcation, il faut la faire, sérieuse, notamment par rapport à ça. Surtout quand
00:59:27 on a compris qu'on dépend de ça. Il y a une autre forme aussi, je pense, d'inquiétude
00:59:31 qui se transforme peut-être en méfiance. Comment on fait pour ne pas avoir peur de
00:59:36 l'animal qui est autre que le chat, autre que le chien ? Comment on fait pour ne pas
00:59:40 avoir peur de se faire attaquer, soit, mais aussi les cultures, l'agriculture ? Alors
00:59:45 là, vraiment, ce n'est pas compliqué. Il suffit de dialoguer, de discuter avec, mais
00:59:51 tout petit. Quand les petits, ils ne se posent pas de questions, ils peuvent arriver à caresser
00:59:58 un serpent. Il faut qu'on leur explique, qu'il faut qu'ils regardent la pupille et que si
01:00:05 elle est ronde, il n'y a pas de problème, si c'est une couleur, il n'y a pas de danger,
01:00:07 si elle est fendue, c'est peut-être un peu plus dangereux, arrête d'agacer le serpent.
01:00:12 Mais tout est envisageable comme ça, depuis tout petit, petit. C'est vraiment là qu'il
01:00:21 faut commencer. Parce qu'après, quand il commence à y avoir une série de bienveillance
01:00:28 comme ça, de règles, d'interdiction, le bien et le mal, la vision manichéenne du
01:00:33 monde qui est complètement absurde, qui n'a aucun sens, aucun, ça ne veut rien dire.
01:00:38 C'est ce qui m'avait beaucoup plu, moi, dans le polythéisme indo-bouddhiste à Bali, c'est
01:00:43 quand vous rentrez dans une maison, vous avez une petite niche à offrandes à droite et
01:00:47 une petite niche à offrandes à gauche, les esprits du bien et les esprits du mal. C'est
01:00:51 pareil. Donc de toute façon, on rentre dans la maison. Parce qu'on est à cette complexité
01:00:57 là et on abandonne la vision qui sépare. Et effectivement, un animal dont on a toujours
01:01:03 dit qu'il était insupportable comme un serpent, on finit par trouver que si on le regarde
01:01:07 comme il faut, il n'est pas du tout ni dangereux ni rien. On peut vivre avec. J'ai ça chez
01:01:15 moi, elle s'appelle Eduarda, c'est une couleuvre qui fait presque deux mètres. C'est la couleuvre
01:01:20 de Zamenis, elle est très belle. Elle a le ventre jaune et tout. Bon ben, elle arrive,
01:01:25 elle passe là, à deux centimètres de la chaussure. Il ne faut pas trop cogner, il
01:01:30 ne faut pas la faire vibrer le sol parce que là, elle s'enfuit. Mais sinon, elle passe,
01:01:34 elle ne vous embête pas. On peut vivre comme ça. Ça ne pose aucun problème. Mais ça
01:01:41 n'est pas rentré dans toutes les cultures.
01:01:43 Axelle Verdier de l'association Pépin Production. Je voulais intervenir à deux titres. J'entends
01:01:49 qu'il y a ici quelques architectes. Vous évoquez la présence de l'animal dans la ville. Je
01:01:56 voulais témoigner d'un travail qui est fait actuellement par une équipe de la LPO à
01:02:01 Paris, qui s'intéresse aux colonies de moineaux et qui s'intéresse à pourquoi les moineaux
01:02:08 disparaissent. En particulier, il y a un rôle très important que vous pouvez jouer en tant
01:02:13 qu'architecte dans la rénovation du bâti. Car en fait, c'est la rénovation du bâti
01:02:18 qui participe aussi à la disparition des moineaux, puisqu'on retire les fissures,
01:02:23 on retire les ouvertures. Et donc, il y a un travail un peu de fond que cette équipe
01:02:30 conduit en surveillant tous les permis de ravalement qui sont faits. Mais vous pouvez
01:02:37 vraiment réfléchir dans votre travail d'architecte à inventer non pas des maisons telles que
01:02:44 nous on se les imagine, des nichoirs, mais inventer dans le projet du bâti quelque chose,
01:02:51 une fissure, une bouche d'aération non bouchée. Mais maintenir ça, c'est vraiment très
01:02:57 important. Je voulais attirer votre attention là-dessus. Vous pouvez vous mettre en relation
01:03:01 avec Philippe Maintigneux de la LPO qui suit cela. C'est un travail expérimental. Et
01:03:08 d'autre part, je voulais témoigner aussi du travail que l'on fait dans notre association.
01:03:13 On développe des pépinières de quartier à Paris, d'une part, pour développer la
01:03:17 diversité végétale. Et dans le cadre de ce projet, on essaie de présenter, de développer
01:03:24 la pédagogie du végétal et de l'interaction du végétal avec le reste du vivant dans
01:03:31 un festival qui s'appelle Vivas, qui a lieu dans les jardins passagers de la Villette,
01:03:37 tous les ans depuis. Ce sera la 6e édition, le 7 octobre prochain. Et nous allons nous
01:03:44 intéresser au royaume des feuilles et justement à l'interaction aussi, à la place des insectes
01:03:51 et du reste des animaux, et la place de la feuille et l'interaction. Voilà. Je voulais
01:03:56 vraiment vous... Voilà, en réponse aussi à comment s'informer. C'est un festival qui
01:04:03 mobilise la curiosité des gens et aussi les équipes qui participent. Ce sont des personnes
01:04:08 motivées qui cherchent, qui essaient de comprendre comment ça fonctionne pour le transmettre.
01:04:15 Voilà, je vous invite le 7 octobre prochain.
01:04:19 Merci. Alors, sur ce qui a été dit, sur l'architecture, le lisse, le parfait, le
01:04:30 pur n'a rien à voir avec le vivant dans son ensemble. Il vaut mieux des aspérités,
01:04:36 des endroits qui sont finalement quelquefois des oublis, des trous, des choses comme ça,
01:04:42 où là, toutes les espèces peuvent s'installer. Elles profitent de dessous d'une gouttière,
01:04:49 un orifice quelque part. Enfin, voilà. Et on perd la diversité si on veut faire quelque
01:04:55 chose de géométriquement parfait. Donc l'imperfection a quelque chose d'intéressant par rapport
01:05:02 à l'accueil dans la construction, dans le bâti et les matériaux aussi, bien sûr.
01:05:06 Je suis étudiant en paysage à l'école de Bordeaux et vous avez parlé de diversifier
01:05:12 les écosystèmes. Aujourd'hui, de plus en plus d'espaces sont végétalisés en milieu
01:05:19 urbain et je voulais savoir si pour vous, il était plus pertinent de développer des
01:05:24 habitats précis en fonction des espèces animales ou de laisser les animaux prendre
01:05:31 possession des espaces qu'on développe ?
01:05:34 C'est eux qui trouvent. Oui, il faut leur donner la possibilité du choix. C'est à
01:05:41 dire toute une surface qu'on laisse se développer, comme elle l'entend sur le sol tel qu'il
01:05:51 est là. Quelquefois, c'est très différent si c'est sec, humide, si c'est en pente,
01:05:55 comment c'est orienté. Il y a des biotopes différents, mais on laisse venir. Et là,
01:06:00 en fonction de ces biotopes, il y a des animaux qui vont dire "je suis chez moi" et d'autres
01:06:04 non. Ils vont aller ailleurs. Mais imaginez qu'on peut fabriquer un biotope artificiellement,
01:06:11 bien sûr, mais c'est un travail de fou. On n'est pas sûr de réussir. Les animaux
01:06:15 savent très bien choisir l'endroit où ils veulent vivre, où ils peuvent vivre. C'est
01:06:20 l'opportunisme biologique. Donc, en fait, ne rien faire, c'est utile à tous dans notre
01:06:27 métier. Si on ne fait rien, on ne fait que des écosystèmes d'accueil à la diversité
01:06:35 et ça finit toujours par une forêt. Pas dans tous les toutous, quand on est dans l'eau,
01:06:40 on ne fait pas de forêt, mais tous les climats tempérés, ça finit comme ça. C'est ce
01:06:46 que je dis aux étudiants. Ça ne veut pas dire ne faites absolument rien. Mais si on
01:06:50 ne fait rien, ce n'est pas grave. Prévoir dans le projet une partie où on ne fait rien,
01:06:57 c'est très intéressant.
01:06:58 Pardon, je m'excuse pour mon mauvais français. J'aimerais savoir votre avis sur la façon
01:07:05 de gérer l'invasion des espèces exotiques dans notre ville. Qu'est-ce que vous pensez
01:07:11 sur le mélange des espèces dans la ville ? Est-ce qu'il faut laisser la terre devenir
01:07:17 un écosystème global et laisser les espèces exotiques s'impérer dans des espaces comme
01:07:23 les paroquets à Paris, les coulières grises sur les coulières roues ? Ou on doit nous
01:07:30 ériger comme des contrôleurs des écosystèmes ? Ou on doit laisser les espèces fortes prendre
01:07:37 le contrôle de la ville ? Je ne sais pas si c'était clair.
01:07:43 Mon avis, c'est qu'il n'est pas nécessaire d'apporter un contrôle quand il y a une
01:07:49 liberté qui est laissée aux espèces sur le lieu. On peut évidemment dire qu'on va
01:07:55 intervenir quand il y a quelquefois une espèce qui vient gêner notre vie à nous profondément,
01:08:02 mais c'est très rare. L'équilibre se fait tout seul.
01:08:06 Deux questions pour rebondir par rapport à ce que vous avez dit sur la présente question.
01:08:11 Tout d'abord, moi je viens de Haute-Savoie et dans une région où on a beaucoup de soucis
01:08:16 avec la renouée du Japon, qui est une plante classée invasive. On me dit ça depuis que
01:08:21 je suis tout petit, mais est-ce qu'elle est invasive et gênante pour la vie des animaux
01:08:26 humains ou pour les écosystèmes qu'on trouve là-bas ? Est-ce que ça nous gêne, nous,
01:08:30 pour l'entretien des fossés et des choses comme ça et de notre vie ? Ou est-ce que
01:08:37 vraiment elle perturbe beaucoup les écosystèmes ? Et j'avais une deuxième question. Je travaille
01:08:43 dans un cabinet de conseil qui s'appelle ARPA Strance et j'avais une question par rapport
01:08:47 aux préconisations qu'on peut faire sur un projet immobilier où on est obligé de
01:08:52 perturber les écosystèmes et créer des nouveaux espaces verts. Est-ce qu'il est préférable
01:08:57 de mettre en place des espaces verts et notamment des arbres assez jeunes qui vont plus facilement
01:09:03 s'intégrer dans le sol, mais peut-être représenter des habitats un peu plus tardifs ? Ou alors
01:09:08 mettre en place des éléments plus usagés ?
01:09:11 Je commence par la deuxième question. Oui, il faut des plantes qui sont plutôt capables
01:09:21 de s'installer progressivement. Donc il faut les prendre jeunes plutôt que d'aller faire
01:09:26 venir des espèces qui ont déjà une certaine maturité, une habitude à vivre dans l'endroit
01:09:32 où elles ont été élevées. On les change, là on les traumatise et elles vont prendre
01:09:36 beaucoup de temps à revivre. Ce n'est pas du tout une bonne idée. En fait, quelquefois,
01:09:41 il arrive qu'on ait des plantes qui ont été plantées très grandes, surtout des arbres
01:09:48 et qui finissent par avoir la même hauteur que ceux qu'on vient de planter tout petit
01:09:52 tout jeune et qui posent beaucoup plus vite parce qu'ils s'installent mieux. Donc je
01:09:56 préconiserais plutôt des plantes qui s'habituent depuis le début. L'autre question qui est
01:10:03 celle des plantes dont on dit qu'elles sont envahissantes, on dit invasives parce que
01:10:08 ça c'est péjoratif. Le polygonome, ça ne s'appelle plus comme ça, maintenant
01:10:13 c'est Renotria. Polygonome, c'était pas mal. C'était la renouée du Japon. Polygonome,
01:10:17 ça veut dire plusieurs genoux. Quand on regarde la tige, elle est faite avec des boules comme
01:10:21 ça. Ça fait des genoux, c'est parfait. On a changé le nom parce que M. Renot a trouvé
01:10:26 la plante avant, l'a nommée, je ne sais pas quoi. Les taxonomistes adorent changer
01:10:30 les noms, c'est très agaçant. La Renotria japonica, la renouée du Japon, est une plante
01:10:37 qui est effectivement envahissante. Le lierre est envahissant, mais il n'est pas dangereux
01:10:42 du tout. Les chênes sont très envahissants. Les chênes, vous voyez les arbres, sacralisés,
01:10:50 parfaits, merveilleux. Mais non, ils envahissent tout. Moi, je n'arrête pas d'en arracher
01:10:54 dans mon jardin, sinon je serai à l'ombre depuis longtemps. Donc, tout se multiplie
01:10:59 d'une façon ou d'une autre. Les renouées par opportunisme biologique, là aussi, elles
01:11:05 s'installent là où elles ont un peu d'humidité. Elles ne sont pas partout. Elles sont là
01:11:09 où elles peuvent pousser. Qu'est-ce qu'on fait avec ? Pour l'instant, on a trouvé
01:11:14 que ça pouvait nourrir des moutons, que ça pouvait donner aussi un miel. Mais la plupart
01:11:20 du temps, on s'acharne à lutter contre. Alors si c'est avec de la chimie, c'est tragique
01:11:24 parce que ça tue beaucoup d'autres choses. Et si c'est en déracinant, alors là, on
01:11:29 la multiplie parce qu'on casse les bouts de racines et elle se multiplie. Donc, il
01:11:34 vaudrait mieux la laisser tranquille avec une concurrence. Il y a d'autres espèces
01:11:40 qui sont suffisamment combatives pour pouvoir dire à la renouée, arrête ton char. En
01:11:48 gros, c'est cet équilibre-là qu'on appelle les écosystèmes émergents qui sont issus
01:11:53 de cette bataille entre une plante qui vient d'ailleurs et qui est combative et une autre
01:11:59 ou d'autres, plusieurs, bien sûr, et qui finissent par se réguler les unes les autres.
01:12:05 Mais intervenir, la plupart du temps, on fait ça très mal. Ça coûte très cher aussi.
01:12:09 En fait, je voulais vous demander, au départ, vous disiez que, il y a un moment où vous
01:12:14 nourrissiez les taupes avec des verres qui étaient empoisonnés. Et puis maintenant,
01:12:21 vous avez une pratique qui est justement plutôt respectueuse du vivant et qui encourage peut-être
01:12:25 toutes les espèces à proliférer. Donc, je voulais vous demander si vous aviez eu un
01:12:29 espèce de changement et à quoi il était dû dans votre pratique et dans votre fort
01:12:36 intérieur peut-être.
01:12:38 Le problème, si on parle des taupes, c'est que malheureusement, elles disparaissent parce
01:12:44 qu'elles ne peuvent vivre que dans des sols vivants. Il faut qu'elles puissent se nourrir.
01:12:49 Elles sont tout le temps sous la terre, dans la terre. Et là, s'il n'y a pas les animaux,
01:12:54 parce qu'elles sont carnivores, ce sont des larves, d'insectes, ce sont des verres de terre
01:12:57 aussi. Elles ne peuvent pas. Si la terre est morte, or les terres agricoles, sur la façon
01:13:05 dont elles sont exploitées partout, de façon industrielle, c'est mort. Il n'y a pas de
01:13:09 taupe. Donc, finalement, lorsque vous voyez une taupe inrière, vous dites, ah ben, il
01:13:14 y a des taupes. Ça, c'est plutôt un bon bio-indicateur. Et autant les garder. On n'a pas de raison
01:13:21 de vouloir absolument les supprimer. Mais encore faut-il qu'elles puissent vivre. Bon,
01:13:28 après, il faut se faire à l'idée qu'il y a des taupes inières. Ça, c'est le changement
01:13:31 de modèle culturel. Et là, pour ceux qui font du golf, ça ne marche pas. Enfin, ils
01:13:38 ont la chance de pouvoir arroser, parce que malgré tout, ils ont le droit, paraît-il.
01:13:43 Mais bon, on peut se faire aux taupes inières. Pas de problème. J'ai une question sur les
01:13:49 moustiques. Les moustiques ? Oui, les moustiques, oui. Généralement, ce que je remarque souvent,
01:13:57 c'est que lorsque ça vient de la nature, on peut l'accepter. Lorsqu'il y a parfois
01:14:02 une ville qui est bordée d'une rivière. Moi, je viens, par exemple, du Maroc. Et
01:14:06 la ville où j'ai habité pendant 20 ans, il y avait une rivière. Il y avait beaucoup
01:14:11 de moustiques, à peu près la grande majorité de l'année. C'est laquelle ? Je ne sais
01:14:15 pas le type, mais celui qui se sent. Non, mais la ville. C'est Kenitra. Il y a le Grand
01:14:20 de Oued, Oued de Cebo. Et pendant une année, puisqu'il y a une base militaire, il y avait
01:14:27 des avions qui ont essayé de faire des avions qui peuvent traiter, parce que ça vient surtout
01:14:32 de la rivière. Une année. C'était une année. Mais après, je pense qu'elle avait
01:14:36 causé des dégâts sur des abeilles, et du coup, ils ont arrêté. Mais là, ma question,
01:14:41 c'est surtout lorsque le paysagiste crée des étangs, et qu'ils sont dans le milieu
01:14:45 urbain, et c'est là où les moustiques, ils viennent du paysagiste, pas de la nature
01:14:51 à peu près. Et du coup, c'est le paysagiste qui cause à peu près ce problème de moustiques.
01:14:55 Donc comment il peut remédier ? Bon, nous, on peut accepter, on dit c'est la nature.
01:15:00 Mais comment on peut convaincre les gens qui habitent autour ? Voilà. Alors, si vous
01:15:05 faites... Bon, là, il faudrait passer tout votre désherbant sur les avions militaires.
01:15:12 Mais si vous voulez faire une retenue d'eau, si elle est stagnante, elle va effectivement
01:15:22 attirer tous les animaux, tous les insectes qui ont besoin d'eau stagnante. Il n'y a pas
01:15:27 que les moustiques. Il y a évidemment les libellules, dont les larves, qui sont carnivores,
01:15:34 vont manger les larves de moustiques. Et si vous avez ça, vous n'aurez pas de moustiques
01:15:39 ou très, très rarement, très peu. Donc, ce qu'il faut arriver, c'est à maintenir
01:15:43 une diversité qui fait que l'écosystème est en équilibre. Sinon, et ça, c'est possible
01:15:49 dans des endroits à peu près sains où il y a toutes ces diversités dont je parle.
01:15:54 Ce n'est pas forcément possible lorsque vous avez une gouttière qui est bouchée ou un
01:15:59 pneu qui est tombé et dont tout le monde se fout. Il pleut. Et là, pour le coup, vous
01:16:04 n'avez pas les prédateurs de la larve du moustique. Et donc, ils vont se développer
01:16:11 à ces endroits-là, dans des minuscules poches d'eau stagnante, mais pas dans les autres
01:16:16 où il y a un équilibre. Et la libellule est un animal extrêmement puissant de ce point
01:16:23 de vue. Et ça, c'était un jour comme ça, j'ai reçu, c'est anecdotique, mais un journaliste
01:16:35 chez moi. Il voulait faire une étude. Et il me dit, oh là là, maintenant, on est
01:16:41 tous prêts à faire de l'écologie. C'était il y a une vingtaine d'années. Je lui montre
01:16:46 la mue imaginale, la dernière mue de la larve, de la libellule qui, elle, va sortir de là
01:16:53 et les ailes vont grindre, etc. Et je dis ça, vous voyez, vous connaissez. Ah non,
01:16:59 non, on n'est pas prêts. Il nous manque quand même cette information-là. Quand on
01:17:05 trouve ça, c'est assez vilain en plus comme aspect, ça fait peur, mais c'est juste
01:17:08 génial. Cette mue imaginale, ça veut dire la libellule est là. Donc, les moustiques...
01:17:14 Voilà, c'est cet équilibre qui est très important. Mais au Maroc, il y a quand même
01:17:24 la montagne avec des extraordinaires manières de la gérer qui font que les... Moi, j'y
01:17:33 suis allé plusieurs fois, les écosystèmes que j'ai... Ce que j'ai vu fait que la présence
01:17:38 humaine n'avait pas détruit ça. Par contre, il y a des endroits dans les plaines fertiles
01:17:43 où là, on ne voyait plus que des arganiers et encore pas toujours. Et on est rentré
01:17:50 dans... Et les cerfs, les cerfs. Mais pas dans les reliefs-là, dans l'Atlas. J'ai été
01:17:58 vraiment surpris récemment. Je trouvais ça... Il n'y a pas beaucoup d'endroits équilibrés
01:18:03 comme ça par les humains eux-mêmes. Il faudrait le montrer aussi en exemple, ça. En parler.
01:18:09 En parler avec eux et leur dire "Est-ce que vous pouvez nous donner quelques conseils ? Comment
01:18:13 ils construisent leur maison en terre ? Comment ils savent vivre ? Sans dépenser d'énergie
01:18:19 inutile.
01:18:20 Bonsoir. J'ai une dernière question. Déjà, merci beaucoup pour votre conférence qui était
01:18:27 vraiment passionnante. Et il y a un projet que vous n'avez pas évoqué et qui me semble
01:18:33 être particulièrement intéressant pour une assemblée d'architectes. C'est celui du
01:18:37 parc Matisse à Lille. Et avec la capacité du changement de niveau et donc cette surélévation
01:18:43 d'une partie du jardin qui permet la cohabitation de deux mondes. Et finalement, qui permet
01:18:47 la coexistence dans la ville dense de ces deux mondes animaux, humains et non humains. Et
01:18:52 peut-être que vous pouvez nous en dire un peu plus sur ces différents dispositifs qu'on
01:18:56 peut mettre en place pour coexister dans la ville. Et encore merci.
01:18:59 Alors là, c'est une mise en situation de protection d'une série floristique. Mais
01:19:06 évidemment aussi entomologique, ornithologique, etc. à très peu de hauteur. On est à 7,50
01:19:14 mètres. Sauf que les parois sont verticales et le public qui est tout autour, il y a 8
01:19:18 hectares de parc, il ne monte pas là. Enfin, pas facile. Nous, quand on y va, c'est avec
01:19:24 une échelle, avec les jardiniers, de temps en temps. Mais on n'a pas besoin d'y aller
01:19:29 puisque le projet est né de la façon suivante. Il y avait une colline, des gravats de la
01:19:35 construction de la gare TGV Lille Europe. Et ils pensaient l'enlever. D'ailleurs, dans
01:19:44 l'esquisse qui avait été faite par Rem Koolhaas à l'époque, qui donnait le projet, lui
01:19:49 gérait tout l'espace autour. La colline avait disparu. Moi, j'ai trouvé que ce volume
01:19:54 était intéressant si on en faisait quelque chose qui était un accueil à une diversité
01:19:58 dont on ne s'occupe pas. Donc scénographiquement, j'avais fait d'abord un carré. Et à la
01:20:04 hauteur, là, voilà. Et là, on m'a interdit. Les architectes des monuments historiques
01:20:10 ont dit ça, c'est interdit. On ne peut pas faire un carré parce que sur les ruines de
01:20:16 Vauban, militaires, anciens, on ne voit plus rien. Il y a des gares de train, des habitants.
01:20:24 Mais ça ne fait rien. On est historiquement sur un lieu où il y avait des forces, des
01:20:31 constructions militaires et carrés, donc interdit. On a mis un an et c'est grâce à
01:20:37 Claude Courtecuisse, artiste qui a travaillé avec nous, à trouver la forme. C'est la
01:20:44 forme d'une île, cette colline. Elle a la forme d'une île qui existe aux antipodes
01:20:50 de la ville de l'île et qui appartient à la Nouvelle-Zélande. Elle s'appelle l'île
01:20:54 Antipode. Elle est assez bizarre dans son contour. On a repris ça. On a fait les parois
01:20:59 moulées en béton dans la colline et c'est resté à cette hauteur que je vous disais,
01:21:04 7,58 mètres. Au début, on avait l'idée de faire, c'était ma proposition, comme
01:21:09 chose qui serait à l'époque idéale de forêt climatique future, mélangée, issue
01:21:15 du brassage planétaire avec les trois continents, mais plutôt de l'hémisphère du Nord.
01:21:20 Puis finalement, ça ne s'est pas fait. Il n'y avait pas d'argent. C'est la nature
01:21:23 qui a fait. C'était le premier jardin de tiers paysage créé, si on peut dire, involontairement.
01:21:31 Et depuis, on observe. J'y suis allé il y a deux ans, un an, demi-deux ans. Invité
01:21:39 par eux. C'est très intéressant, bien sûr. Sauf qu'il y a quand même un foisonnement
01:21:46 des arbres et il finit par y avoir une baisse de la diversité héliophile. Il faudrait
01:21:52 un peu de lumière, couper un peu, deux, trois arbres. Il faudrait surtout couper, pour
01:21:59 ceux qui connaissent, les arbres. Mais je te vois là-bas, toi. Il y a quelqu'un que
01:22:05 je connais, excusez-moi. Les arbres qui ont été plantés au pied pour cacher ça, parce
01:22:12 que ça faisait honte au départ, parce que c'était une friche. Il s'était trop cher
01:22:18 de la détruire, les murs qui faisaient la forme de l'île. Et la ville de l'île avait
01:22:22 dit, bon, on va planter des arbres pour cacher le truc. De toute façon, à faire plaisir
01:22:25 aux habitants qui disaient c'est une friche. Maintenant, ça y est, ça a changé. Mais
01:22:28 il faudrait quand même arriver un jour avec une tronçonneuse pour les couper, ceux-là.
01:22:32 Merci beaucoup. Merci.
01:22:36 [Applaudissements]
01:22:40 Merci infiniment de nous inspirer comme ceux-là.
01:22:52 Juste un mot pour saluer les commissaires de notre exposition, donc Léa Mosconi, Henri
01:22:58 Bonny, de l'exposition Paris Animal. Je veux dire que cette exposition est ouverte jusqu'en
01:23:03 septembre et que vous pouvez trouver également le livre dans lequel a écrit Gilles Clément
01:23:08 à la librairie du pavillon de l'Arsenal. Merci beaucoup. Merci encore Gilles Clément
01:23:12 et bonne soirée.
01:23:13 [Applaudissements]
01:23:13 [Musique]
01:23:18 [SILENCE]