L’interview de Pap Ndiaye en intégralité

  • l’année dernière
Pap Ndiaye, ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, était l’invité de BFMTV pour évoquer le thème du harcèlement scolaire, après un nouveau suicide tragique. Celui de Lindsay, une collégienne de 13 ans, scolarisée à Vendin-le-Vieil dans le Pas-de-Calais, qui s'est suicidée le 12 mai dernier après avoir été victime de harcèlement au collège et sur les réseaux sociaux. La famille de l’adolescente a déposé trois plaintes contre la direction du collège, l’académie de Lille et les policiers en charge de l’enquête pour “non assistance à personne en péril”. Une autre plainte a été déposée contre Facebook, “complètement défaillant” dans la modération des contenus haineux, selon l’avocat de la famille. Le 25 mai, le procureur de Béthune avait annoncé que quatre mineurs avaient été mis en examen du chef de "harcèlement scolaire ayant conduit au suicide" et un majeur pour “menaces de mort”.

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Transcript
00:00 - Bonsoir, M. le ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, Pape Ndiaye.
00:02 - Bonsoir.
00:03 - L'école a été incapable de protéger l'INSEE ?
00:06 - Alors, l'école, à l'évidence, il s'agit d'un échec collectif.
00:11 La mort de l'INSEE, son suicide, c'est une tragédie.
00:15 C'est une tragédie pour ses proches, c'est une tragédie pour l'Éducation nationale
00:19 et pour le pays, comme le suicide de n'importe quel jeune.
00:24 Alors, ce qui s'est passé, c'est une chaîne d'événements.
00:27 Vous savez que la principale instigatrice des violences ou des situations de harcèlement
00:33 a d'abord été exclue temporairement le 14 novembre dernier.
00:37 Donc, la situation de violence a été reconnue par l'institution.
00:42 Puis, elle a été exclue définitivement le 27 février dernier.
00:47 Et puis, on a abouti finalement donc à la tragédie du 12 mai.
00:53 Et donc, en séparant les auteurs de violence des victimes,
00:58 on ne résout pas les situations de harcèlement.
01:01 - Parce que le harcèlement a continué ?
01:02 - Parce que le harcèlement, entre l'exclusion et le déplacement
01:07 de la principale instigatrice dans un autre collège, dans une autre ville,
01:11 le harcèlement a continué.
01:14 Ça signifie une chose, ça signifie qu'il a continué,
01:17 notamment sous la forme du cyberharcèlement.
01:19 Le problème du cyberharcèlement, c'est que vous pouvez séparer les élèves,
01:24 mais ça ne résout pas le problème puisqu'il continue sur les réseaux sociaux.
01:28 - Mais la famille est particulièrement sévère contre le principal du collège
01:32 qui semble-t-il minimisait les appels à l'aide de l'INSEE.
01:38 Est-ce qu'une enquête est nécessaire ?
01:40 - C'est exactement le cas.
01:42 Il y a une enquête judiciaire qui a été lancée, bien entendu.
01:45 J'ai demandé au corps d'inspection le plus élevé de l'éducation nationale,
01:50 l'inspection générale de l'éducation nationale du sport et de la recherche,
01:53 de lancer une enquête administrative.
01:56 Je l'ai fait il y a quelques jours, donc cela va prendre quelques semaines.
02:00 - Il pourrait être sanctionné ?
02:01 Si d'aventure ce rapport montrait qu'il y avait eu des dysfonctionnements,
02:05 précisément de la part du provisoire ?
02:07 - À l'issue de cette enquête administrative,
02:10 qui sera menée par des inspecteurs généraux,
02:13 j'en tirerai toutes les conclusions.
02:16 Les conclusions à l'égard des personnels, le cas échéant,
02:19 mais je ne veux pas m'avancer sur le cas échéant,
02:23 mais surtout les conclusions générales sur la manière dont on peut avancer.
02:28 Nous avons beaucoup avancé en matière de harcèlement,
02:30 et nous avons encore du chemin à parcourir,
02:33 et donc j'en tirerai les leçons.
02:35 - Est-ce que dans cette Académie de Lille,
02:37 on prend véritablement à bras le corps ce combat contre le harcèlement
02:41 que vous avez déclaré ?
02:42 Est-ce qu'il n'y a pas un problème en fonction de chaque Académie ?
02:45 Peut-être qu'il y a des Académies qui sont plus impliquées que d'autres ?
02:48 - Parce que le directeur a répondu "tu nous fatigues, on a autre chose à faire",
02:51 donc peut-être que parfois on minimise.
02:53 - Nous avons généralisé le dispositif,
02:55 qu'on appelle le dispositif phare de lutte contre le harcèlement,
02:59 à tous les collèges à la rentrée.
03:01 Donc le dispositif s'est mis en place,
03:04 et de fait il existait...
03:05 - C'est une équipe qui est dédiée ?
03:06 - Une équipe dédiée, des élèves ambassadeurs,
03:09 le lien avec la direction académique en cas de difficulté,
03:13 et donc le repérage de la situation de violence et de harcèlement
03:18 a été fait dans ce collège.
03:19 Mais à l'évidence, on n'a pas été jusqu'au bout,
03:21 puisqu'on a abouti à une tragédie.
03:23 Ça, l'enquête administrative va le dire à l'évidence,
03:28 et puis encore une fois, nous en tirerons les conclusions.
03:31 Le dispositif lui-même donne de bons résultats
03:34 en matière de repérage et de prise en charge,
03:37 mais nous nous heurtons à des difficultés,
03:39 en particulier la difficulté du cyberharcèlement dont je parlais à l'instant.
03:43 - Vous nous expliquez que la principale instigatrice a été exclue,
03:49 mais que le harcèlement a continué.
03:51 Mais le harcèlement c'est un phénomène de groupe.
03:53 On le sait très bien.
03:54 Qu'est-ce qui s'est passé pour le reste du groupe
03:58 qui est resté dans le collège ?
04:00 Parce qu'il ne suffit pas de punir une personne.
04:03 On le sait.
04:04 - Les deux enquêtes conjointes vont préciser les faits,
04:08 les responsabilités de chacun.
04:10 À l'heure actuelle, quatre mineurs sont mis en examen,
04:15 plus une mère d'élève.
04:18 Donc on est dans une procédure judiciaire.
04:20 Attendons les conclusions de l'enquête.
04:23 Mais du côté de l'Éducation nationale,
04:25 je tirerai moi-même les conclusions de ce qui s'est passé.
04:28 - Donc vous suivez le dossier personnellement ?
04:29 - Je suis le dossier personnellement,
04:30 et je peux vous dire d'ailleurs qu'au sein du ministère
04:34 de l'Éducation nationale, nous allons renforcer
04:36 la cellule qui travaille sur le harcèlement
04:39 et faire du haut fonctionnaire qui est responsable
04:43 à l'échelle du pays des questions de lutte contre le harcèlement,
04:47 établir un lien direct entre moi et ce haut fonctionnaire.
04:50 - Vous suivez le dossier personnellement,
04:51 vous avez pris contact avec la famille de l'initié ?
04:53 - Oui, pour l'instant, tout à fait.
04:55 - Parce qu'on vous a reproché juste un tweet
04:57 de ne pas avoir eu le géant.
04:59 - Le géant a dit voilà, un tweet, un tweet, c'est pas suffisant.
05:03 Le ministre aurait dû prendre le soin, je cite,
05:05 d'aller à la rencontre de la famille
05:07 et partager quelques mots de compassion.
05:09 - Ça n'est pas tout à fait exact.
05:11 - Pour être très précis, monsieur le ministre,
05:12 à quel moment est-ce que vous avez pris contact avec les parents de l'initié ?
05:15 - J'ai fait plusieurs choses.
05:16 D'abord, j'ai effectivement utilisé Twitter
05:20 pour signaler à la fois évidemment...
05:23 - Le 24 mai et le 31 mai.
05:26 - Voilà, je suis intervenu également à l'Assemblée nationale
05:30 mardi après-midi devant les parlementaires
05:33 pour évoquer le cas de l'Insei.
05:36 - Mais à quel moment est-ce que vous rentrez en contact ?
05:37 Parce que pour comprendre la question que vous pose Alain et Olivier,
05:39 les parents ce matin disent,
05:41 non seulement il y a eu les dysfonctionnements avant,
05:43 mais on s'est senti abandonné parce qu'on n'a pas vu le ministre,
05:46 on ne l'a pas entendu.
05:47 À quel moment est-ce que vous êtes rentré en contact avec eux ?
05:49 - J'ai essayé, je n'ai pas encore réussi
05:52 à entrer en contact téléphonique.
05:54 J'ai essayé plusieurs fois.
05:55 - Mais quand ça ?
05:56 - Avec la maire ces jours-ci, y compris cet après-midi
05:58 avec la maire de l'Insei.
06:01 Comme je suis entré...
06:02 - Donc ce matin, quand ils disent qu'ils n'ont pas entendu parler de vous...
06:06 - Pour l'instant, on va finir par se parler tout de même.
06:09 - Sur vos équipes, c'est votre cabine qui entre en contact avec eux.
06:11 - Moi-même, j'ai appelé moi-même.
06:12 - Et vous, vous allez finir par en parler.
06:14 - Nous allons nous parler.
06:15 D'ailleurs, je souhaite inviter les parents,
06:18 la maire de l'Insei au ministère de l'Éducation nationale.
06:21 C'est pour cela que je l'ai jointe,
06:25 pour pouvoir parler de la situation, évoquer ce que nous allons faire
06:29 et puis dire à la fois mon émotion,
06:32 mais aussi ma détermination à agir contre le harcèlement.
06:35 - Vous comprenez que dans leur tristesse,
06:37 ils se disent deux tweets de la part d'un ministre de l'Éducation nationale
06:40 qui, effectivement, quand ces drames se répètent, réagit.
06:43 Mais ils font l'impression que c'est un peu de communication
06:46 et que sur le fond, malheureusement, ces drames se reproduisent.
06:48 C'est ça aussi le cri du cœur des parents de l'Insei de ce matin ?
06:51 - Je comprends les cris du cœur des parents.
06:54 Je comprends l'émotion.
06:56 Elle est aussi la mienne.
06:58 Vous pouvez peut-être vous souvenir du suicide de Lucas.
07:03 J'étais intervenu devant le Sénat pour dire mon émotion
07:08 et elle est intacte aujourd'hui.
07:10 Ce que je dis, c'est d'une part que lorsque de tels drames surviennent,
07:15 y compris des morts accidentelles,
07:18 cela arrive malheureusement dans l'Éducation nationale,
07:21 j'appelle les parents.
07:23 Je l'ai fait à plusieurs reprises, malheureusement depuis un an.
07:29 Je me déplace lorsque c'est possible
07:33 ou j'invite, c'est ce que je vais faire,
07:35 pour ceux qui concernent la mère de l'Insei,
07:38 si elle le souhaite naturellement,
07:40 je l'invite à venir au ministère de l'Éducation nationale.
07:44 Quelles sont les leçons à tirer de cette tragique histoire ?
07:49 Est-ce qu'il faut renforcer les dispositifs ?
07:51 Qu'est-ce que vous allez faire ?
07:53 Il y a des mesures à prendre qui s'inscrivent
07:56 dans cette mobilisation accrue de l'Éducation nationale
08:00 depuis plusieurs années.
08:02 Nous avons encore du chemin à faire,
08:04 mais nous sommes en mouvement et nous sommes mobilisés.
08:07 La première chose, vous savez,
08:11 c'est deux numéros qui rencontrent un très vif succès,
08:14 le 3018 pour le harcèlement scolaire,
08:17 le 3020 pour le cyberharcèlement.
08:21 Ces deux numéros sont des numéros qui sont connus
08:25 des élèves et de leur famille.
08:28 Nous renforçons les moyens mis à disposition
08:31 des deux associations qui gèrent les plateaux d'appel.
08:34 Il y a des psychologues, des spécialistes, des réseaux sociaux.
08:36 Vous renforcez les moyens, c'est-à-dire combien ?
08:38 Financiers.
08:39 Vous avez une idée de leurs moyens ?
08:42 Nous sommes en train d'évaluer cela.
08:44 Ce sont des sommes conséquentes puisque l'Éducation nationale,
08:47 de fait, pour le 3020 surtout, mais aussi le 3018,
08:51 participe massivement au financement actuel.
08:54 Nous allons renforcer le financement
08:56 pour avoir plus d'écoutants.
08:58 Ce sont des numéros qui comptent.
09:00 On regarde ce qui s'est passé dans ce collège du Nord,
09:03 du Pas-de-Calais.
09:05 Est-ce qu'il ne faut pas mettre un petit coup de pression
09:07 sur les chefs d'établissement ?
09:09 La deuxième chose, c'est que nous allons avancer
09:15 dans la mise en œuvre de la loi Balanant.
09:17 Vous savez, cette loi qui a été votée en mars 2022,
09:21 qui fait du harcèlement un délit.
09:23 Ce que nous allons dire, et la circulaire est prête,
09:27 aux chefs d'établissement, c'est de transmettre
09:30 les situations avérées de harcèlement
09:32 à l'autorité judiciaire.
09:34 Je dis bien à l'autorité judiciaire.
09:36 - Monsieur le ministre, ce qu'on entend aussi
09:38 dans les témoignages des parents, c'est de dire qu'au fond,
09:40 le proviseur, il y a le CP aussi qui a été évoqué
09:42 par la maman d'Océane à la conférence de presse ce matin,
09:44 les policiers, des chamailleries.
09:46 Est-ce qu'il n'y a pas un problème culturel
09:50 de responsables de l'éducation
09:52 qui se disent que ça va passer,
09:54 qu'il suffit de confisquer un téléphone portable,
09:57 qu'au fond, c'est des enfants, des collégiens
10:00 et que ça va se régler ?
10:02 - C'est aussi la preuve que le programme de fin
10:04 n'est pas appliqué. Un principal qui répond
10:06 quelque chose comme ça, ça veut dire qu'il n'a pas été formé.
10:08 Vous dites, j'ai vu les chiffres du ministère,
10:10 on a 91 % des collèges, 64 % des écoles
10:14 qui sont inscrits dans le programme fin.
10:16 Mais en réalité, inscrit, ça veut dire quoi ?
10:19 Qui est formé ? Combien on a d'ambassadeurs ?
10:21 Est-ce que vous pensez vraiment que le programme,
10:23 là, actuellement, il est appliqué de manière satisfaisante
10:26 partout sur le territoire ?
10:28 - Si le programme fonctionnait de manière satisfaisante
10:31 partout, nous n'aurions plus ces drames.
10:33 Je ne suis pas ici pour vous expliquer
10:35 que tout va bien dans l'éducation nationale.
10:37 Ce serait ridicule. Ce que je veux dire,
10:39 c'est que nous avons généralisé ce programme
10:42 à la rentrée. Nous faisons des efforts
10:44 de formation, en effet.
10:46 Avec les élèves ambassadeurs, avec les personnels
10:48 de l'éducation nationale que nous formons,
10:50 avec les directions académiques et les recteurs
10:52 que j'ai mobilisés sur le sujet,
10:54 nous avons encore du chemin à parfourir.
10:56 - La police et les établissements se parlent
10:58 quand il y a des signalements ou pas ?
11:00 - Nous devons faire mieux en matière de liaison
11:02 entre l'école et les services judiciaires.
11:05 La loi Balanon va nous le permettre.
11:08 Et les services de police.
11:10 C'est pour ça que quand on parle de harcèlement,
11:12 on ne parle pas seulement de l'école,
11:14 on parle aussi d'un ensemble d'intervenants
11:17 bien au-delà des murs des établissements scolaires.
11:19 - Avec d'autres ministres qui peuvent être sensibilisés ?
11:21 - Avec d'autres ministres,
11:22 ministre de l'Intérieur, ministre de garde des Sceaux,
11:26 ministre de la Justice.
11:28 Nous prévoyons d'ailleurs de travailler ensemble,
11:31 en particulier sur les questions de harcèlement.
11:33 Je mentionnais le 30-20 et le 30-18,
11:36 je mentionnais la loi Balanon
11:38 avec la transmission à l'autorité judiciaire.
11:41 Le troisième élément très important,
11:43 c'est que nous allons mettre sous pression
11:46 de manière beaucoup plus accentuée,
11:48 je me suis déjà mobilisé à divers titres
11:51 sur cette question, les réseaux sociaux.
11:53 Parce que là, on a un énorme problème.
11:55 - Instagram, Facebook, qu'est-ce qu'on peut faire ?
11:58 - Avec ces réseaux sociaux.
12:00 - Vous avez une plainte à la famille de l'INSEE ?
12:02 - Je peux le comprendre.
12:04 - Ils ont leur part de responsabilité ?
12:06 - Les réseaux sociaux ont leur part de responsabilité,
12:08 il faut le dire clairement.
12:10 - Qu'est-ce que vous pouvez faire ?
12:12 - Je l'ai vu pour d'autres situations,
12:14 notamment des situations liées aux atteintes à la laïcité,
12:18 qui nous motivent et qui nous mobilisent également.
12:22 Nous avons à faire de telle sorte
12:24 que les réseaux sociaux soient beaucoup plus réactifs
12:27 lorsque des situations de harcèlement,
12:30 des situations de violence verbale,
12:33 lorsque des photos intimes également, circulent.
12:37 - Et donc concrètement, qu'est-ce que vous pouvez faire ?
12:40 Est-ce que vous avez des marges de manœuvre
12:42 pour mettre la pression sur ces réseaux sociaux ?
12:44 - Il y a d'abord des règlements,
12:46 une réglementation européenne qui enjoint
12:48 aux réseaux sociaux d'être plus réactifs sur le sujet.
12:50 Ce que les réseaux sociaux pourraient faire, par exemple,
12:53 c'est, sous les messages, placer un petit bouton
12:56 sur lequel il suffirait de cliquer,
12:58 en cas, pour dénoncer, pour montrer une situation
13:01 de violence ou de harcèlement.
13:04 Aujourd'hui, c'est beaucoup trop long,
13:06 c'est une procédure compliquée,
13:08 donc il suffirait de cliquer pour instantanément
13:11 signaler la teneur du message.
13:13 Donc ce que nous allons faire, avec d'autres ministères,
13:17 c'est nous concerter et puis agir de façon extrêmement ferme
13:22 à l'égard des réseaux sociaux,
13:24 parce qu'au-delà de ce qu'ils peuvent dire,
13:26 nous savons que leur réaction est trop lente
13:29 et certainement pas à hauteur
13:32 de ce que nous attendons de leur part.
13:34 - Monsieur le ministre de l'Éducation nationale,
13:36 je sais que vous avez un emploi du temps chargé,
13:38 vous avez une réunion qui vous attend,
13:40 mais on a une faveur à vous demander.
13:42 Si vous pouviez nous accorder 5 minutes de plus
13:45 pour rencontrer un papa d'une enfant harcelée,
13:48 à qui vous avez répondu d'ailleurs,
13:50 et qui aimerait discuter,
13:52 et qui nous l'avait reçu sur le plateau de BFM TV,
13:54 et qui aimerait peut-être faire avancer les choses.
13:56 - Volontiers. - Merci monsieur le ministre.
13:58 On va accueillir Olivier Morin, père de Liliane, 12 ans,
14:02 harcelé au collège, il était avec nous lundi,
14:05 et voilà ce que vous nous disiez, Olivier Morin,
14:07 lundi, puis on reprend notre discussion.
14:09 - Oui, bonsoir, j'ai encore écrit, voyez,
14:12 le 4 avril, j'ai le ministère,
14:14 si vous permettez que je lise un extrait de la réponse.
14:17 Donc, monsieur le ministre de l'Éducation nationale,
14:20 en portant plainte, vous avez adopté la démarche
14:22 la plus appropriée à votre situation,
14:24 et contribué en pleine protection de votre fille.
14:26 Aussi, je tiens à saluer la détermination
14:29 et les courages dont vous avez fait preuve
14:31 en sollicitant les services de la police.
14:34 Par ailleurs, sachez que le harcèlement scolaire
14:36 est puni par la loi 2299 du 2 mars 2022,
14:40 qui crée le délit de harcèlement scolaire
14:42 dans le Code pénal français.
14:44 Il complète les mesures déjà mises en œuvre
14:46 par le gouvernement pour lutter contre le harcèlement.
14:49 C'est joliment dit.
14:50 Et entre-temps, je reçois un avis de classement
14:53 en me disant, donc je tairai les noms des enfants,
14:56 qu'a été reclassé en discrimination
14:58 ou exploitation de personnes vulnérables.
15:00 Les faits dénoncés ou révélés dans le cadre
15:02 de cette procédure ne sont pas punis
15:04 par le texte pénal.
15:06 – Donc, circuler, il n'y a rien à voir.
15:07 – Circuler, il n'y a rien à voir.
15:08 – Mais, donc, vous avez encouragé et approuvé
15:10 la démarche de monsieur Morin.
15:12 Malheureusement, ça n'a pas été suivi dans les faits.
15:15 – Tout à fait.
15:16 – Alors, je crois que les choses ont avancé
15:18 depuis quelques jours, monsieur Morin.
15:20 – Alors, expliquez-nous, depuis lundi,
15:21 que s'est-il passé Olivier Morin ?
15:23 – Donc, mardi après-midi, je me suis permis
15:25 d'appeler l'Académie pour savoir s'il y avait eu
15:27 une avancée sur le dossier de Liliane.
15:29 On m'a fait part qu'effectivement, suite à mon passage à BFM,
15:32 le dossier avait été pris en charge
15:34 et j'ai eu un appel aujourd'hui à 16h
15:37 pour me dire que Liliane allait changer de collège
15:39 à compter de lundi.
15:41 Il n'en demeure pas moins…
15:42 – Parce que vous l'aviez déscolarisé.
15:44 – Je l'ai déscolarisé.
15:45 – Les valeurs sont toujours en place,
15:46 mais vous, vous aviez pris la décision,
15:47 pour le bien-être de votre fille, sa sécurité,
15:49 de la déscolariser.
15:50 – Tout à fait.
15:51 Donc, Liliane a reçu un certain nombre de messages
15:55 sur WhatsApp, alors certains messages chaleureux
15:59 puisque, bien que j'ai dû changer son prénom
16:02 pour des raisons de sécurité,
16:03 un certain nombre d'enfants l'ont reconnu.
16:06 Elle a reçu également certains messages
16:09 encore plein de venin que j'ai fait suivre à notre avocat.
16:12 Et dans le nouveau collège où elle va,
16:14 elle a été également reconnue,
16:15 donc j'ai fait part au nouveau principal
16:17 que certains enfants avaient encore quelques idées
16:20 néfastes à son égard.
16:22 Voilà, il n'en demeure pas moins que la principale
16:24 du collège où Liliane a eu les sévices
16:28 a, dès mardi matin, envoyé un message pronote
16:32 à l'ensemble des parents en disant
16:34 qu'il n'y avait pas de harcèlement dans son collège.
16:37 Il est entendu que je n'ai pas été destinataire
16:39 du message, que la maman de ma fille
16:42 n'a pas eu le message et que les parents
16:44 avec qui j'avais une certaine sympathie
16:46 n'ont pas été non plus destinataires du message.
16:48 Alors, c'est important, monsieur le ministre,
16:50 que je vous fasse part que la collaboratrice
16:53 qui est en charge de cet établissement,
16:54 pour ne pas le nommer, Jean Lursa à Villejuif,
16:57 trie les informations.
16:58 C'est quand même très grave, je pense.
17:01 Je tiens à rappeler que ma fille a eu,
17:03 depuis le 25 janvier, plein de harcèlement.
17:07 Le quatrième et le cinquième orteils écrasés.
17:11 Et donc, je lui ai adressé plein de mails,
17:16 dont un titre qui s'appelle "harcèlement scolaire",
17:20 qu'elle n'a pas souhaité répondre.
17:22 Et j'ai dû lui faire une signification
17:24 par voix du sier pour qu'elle me réponde.
17:27 Et cette proviseure n'a pas dénié me répondre.
17:30 Alors, monsieur le ministre,
17:32 j'ai un temps de j'explique.
17:34 Mais pas suffisamment, quand on est dans l'attente
17:36 et qu'on a un enfant en souffrance, bien sûr.
17:38 D'abord, je souhaite évidemment le meilleur à votre fille.
17:42 Et toute forme de violence qu'un élève peut subir
17:45 dans une enseigne scolaire ou en dehors
17:47 est absolument intolérable pour Liliane,
17:50 comme pour les autres.
17:52 Je crois comprendre que votre fille, maintenant,
17:54 est dans une situation meilleure.
17:56 Je l'espère.
17:57 Je l'espère.
17:58 Je suivrai d'ailleurs la situation
18:01 et veillerai à ce qu'elle soit dans de bonnes conditions
18:05 et que son bien-être soit préservé.
18:07 Je ne vais pas jeter l'opprobre sur telle ou telle personne
18:10 de l'éducation nationale,
18:12 parce qu'il faudrait pour cela une enquête.
18:14 J'entends que vous...
18:15 - Et que vous ayez tous les éléments.
18:16 - Et que j'ai tous les éléments.
18:17 Ce que je retiens, c'est d'une part
18:19 qu'il ne faut plus que ce soit les harcelés
18:24 qui soient obligés de quitter l'établissement.
18:27 Et vous savez que...
18:28 - Je vous l'implore, monsieur le ministre.
18:29 - J'ai décidé il y a quelques semaines
18:31 que dans le primaire,
18:33 où il n'y a pas de conseil de discipline,
18:35 en cas de situation inextricable et difficile
18:39 et mettant en jeu la sécurité et la santé des enfants,
18:42 ce soit l'élève harceleur,
18:45 y compris contre la volonté de sa famille...
18:47 - Mais l'exemple de monsieur Morin prouve
18:49 qu'il est plus rapide d'agir pour sortir l'enfant harcelé
18:51 que pour punir les harceleurs.
18:53 - Alors il y a une procédure,
18:54 il y a un conseil de discipline qui doit se réunir.
18:57 Nous allons regarder de près ce qu'il en est pour votre fille.
19:00 Et puis la deuxième chose, si vous me permettez,
19:02 c'est que comme après la mort de Lindsay,
19:06 les réseaux sociaux continuent leur venin.
19:09 C'est le mot que vous avez utilisé avec parfois
19:11 des choses absolument abjectes,
19:13 des personnes qui littéralement se réjouissent
19:16 des souffrances ou de la mort des personnes.
19:19 C'est évidemment absolument intolérable,
19:21 de même que les menaces de mort
19:24 que des personnels de l'éducation nationale
19:26 reçoivent actuellement sur les réseaux sociaux.
19:30 Je rappelle que des menaces de mort, c'est un délit.
19:32 - Mais monsieur le ministre, il y a aussi la responsabilité
19:35 des parents des harceleurs.
19:38 - Tout à fait.
19:39 - Comment justement le dire et dire à ses parents
19:43 "Vous avez une responsabilité, vos enfants sont mineurs,
19:45 ce qu'ils font, c'est aussi de votre responsabilité."
19:48 - D'autant que vous, vous n'avez pu les rencontrer
19:50 ou dialoguer avec les parents des harceleurs.
19:51 - Oui, moi j'avais reçu la maman au mois de décembre,
19:54 fin décembre, pour essayer de comprendre.
19:56 Et elle m'a expliqué que l'éducation de ses filles
19:59 était irréprochable.
20:00 - Les parents peuvent être mis en cause
20:02 d'un point de vue judiciaire.
20:04 - Mais ce sera le cas, monsieur le ministre,
20:05 puisque j'ai intenté une procédure.
20:07 - Je ne sais pas ce qu'il en est exactement pour ce cas,
20:10 mais en ce qui concerne l'affaire Lincey, si je puis dire,
20:14 quatre mineurs sont mis en examen,
20:16 ainsi qu'une mère d'élèves.
20:18 - Est-ce qu'il ne faut pas aller plus loin
20:19 avec pourquoi pas des mesures ?
20:21 On sait que par exemple dans le débat,
20:22 il y avait la question des allocations familiales.
20:24 Est-ce qu'il faudrait aller plus loin
20:25 pour mettre la pression sur les parents
20:27 des enfants harceleurs ?
20:29 Est-ce que vous dites qu'il n'y a pas de tabou ?
20:31 - Non, moi je suis pour que le droit s'exerce,
20:35 en l'occurrence la possibilité effectivement
20:38 de se tourner vers les parents,
20:40 parce que les parents ont une responsabilité
20:42 vis-à-vis de leurs enfants.
20:44 Ils ont une responsabilité, je dirais, juridique,
20:48 qui est tout à fait essentielle.
20:50 Cela me semble être un cadre
20:55 qui respecte l'état de droit.
20:58 Je ne suis pas favorable à ce que des mesures
21:01 viennent sociales, en quelque sorte,
21:03 viennent mettre sous pression les parents.
21:06 La question de la parentalité,
21:08 la question du cyberharcèlement,
21:10 la manière dont les enfants peuvent,
21:13 par les réseaux sociaux,
21:14 échapper aussi à la surveillance des parents,
21:17 il faut aussi reconnaître tout de même
21:19 qu'aujourd'hui être parent d'adolescent,
21:21 ce n'est pas facile.
21:23 - Il y a des jours, nous t'en louons,
21:25 donc moi je suis d'abord pour aider les parents,
21:28 c'est ce qu'on appelle la parentalité,
21:30 nous avons à renforcer les liens avec les parents,
21:33 éventuellement sanctionner des comportements
21:36 qui seraient manifestement inadmissibles,
21:38 cela me paraît être du ressort de l'expression.
21:40 - Moi je pense à la grande solitude
21:42 de cette petite fille.
21:44 Tous ces élèves qui partent, qui lâchent,
21:46 qui veulent partir, qui préfèrent partir
21:48 de leur établissement plutôt que de rester,
21:50 ils vont transporter ce mal-être
21:52 dans d'autres établissements.
21:54 Qu'est-ce qu'on peut faire pour les accompagner
21:56 sur le plan psychologique ?
21:58 On a un énorme déficit d'accompagnement,
22:00 ça coûte cher, on a du mal à trouver des gens,
22:02 on a les maisons de Marion qui fonctionnent,
22:04 mais difficilement.
22:06 Est-ce qu'il ne faut pas des maisons de Marion ?
22:08 Des endroits où on peut accueillir,
22:10 protéger, remonter ces enfants,
22:12 parce qu'ils ont une image d'eux-mêmes
22:14 extrêmement dégradée, qui va souvent
22:16 les amener à se retrouver aussi
22:18 dans des situations similaires.
22:20 Séparer physiquement les harcelés
22:22 des harceleurs ne résout pas la situation,
22:24 on l'a dit à propos du harcèlement,
22:26 du cyberharcèlement. Nous devons aussi,
22:28 et c'est ce qui se fait, mais sans doute
22:30 de manière inégale, suivre
22:32 la situation des harceleurs
22:34 pour que ceux-ci ne répètent pas
22:36 dans leur nouvel établissement
22:38 les actes qu'ils ont commis
22:40 dans le précédent, et suivre
22:42 également les élèves qui ont
22:44 subi des situations de harcèlement
22:46 de manière à ce que ces élèves
22:48 puissent retrouver des conditions normales.
22:50 Vous pouvez dire ce soir
22:52 l'école protège vraiment les enfants,
22:54 parce que l'impression de certains parents d'élèves
22:56 qui nous regardent, c'est de dire
22:58 il y a de l'émotion, il y a un ministre
23:00 qui vient sur les plateaux de télévision quand il y a ce type de drame,
23:02 mais ça recommence. Est-ce que vraiment vous dites
23:04 ce soir, l'école est un sanctuaire,
23:06 on protège les enfants qui étudient
23:08 dans ces institutions ?
23:10 Ce n'est pas que de l'émotion. Je vous ai
23:12 annoncé un certain nombre de mesures importantes.
23:14 Nous sommes sur un chemin.
23:16 L'école les protège ?
23:18 La mission de l'école,
23:22 c'est de faire de telle sorte
23:24 que les élèves soient en sécurité
23:26 dans les écoles et les établissements
23:28 scolaires, que leur bien-être soit...
23:30 Ce n'est pas toujours le cas.
23:32 Malheureusement, ce n'est pas toujours le cas. Nous progressons,
23:34 nous progressons,
23:36 mais comme je l'indiquais, nous sommes sur un chemin,
23:38 c'est un chemin escarpé,
23:40 il n'y a pas de baguette magique,
23:42 nous avançons progressivement.
23:44 Vous dites qu'il n'y a pas de baguette magique, donc il n'y a pas de protection
23:46 absolue des enfants aujourd'hui à l'école,
23:48 au sein de l'établissement.
23:50 Si je pouvais vous garantir
23:52 que la semaine prochaine,
23:54 les situations de harcèlement
23:56 disparaîtront dans les 60 000
23:58 écoles et établissements scolaires,
24:00 j'aurais tort et je me moquerais de vous.
24:02 Est-ce qu'il ne faudrait pas évaluer
24:04 les établissements ?
24:06 Nous avons du chemin à faire. Je suis déterminé,
24:08 et je reviendrai
24:10 très volontiers sur votre plateau
24:12 pour faire état des bilans
24:14 et des progrès que nous enregistrons.

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