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Denis Digel, producteur de légumes à Sélestat, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Face au manque de saisonniers, certains producteurs sont contraints de détruire une partie de leurs récoltes.
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NewsTranscription
00:00 - Il est 7h12 sur Ropin, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin l'agriculteur Denis Dijel.
00:05 - Oui, bonjour Denis Dijel.
00:06 - Bonjour.
00:07 - Alors agriculteur, on va préciser, vous êtes maraîcher et producteur de légumes du côté de Célesta en Alsace.
00:13 Vous gérez aussi trois magasins de producteurs en vente directe partout dans le pays.
00:19 En ce moment, c'est la même galère dans les champs.
00:22 On n'arrive pas à trouver suffisamment de main-d'œuvre pour les récoltes de printemps.
00:26 On l'entendait dans le journal de 7h.
00:27 Et c'est votre cas Denis Dijel.
00:29 Vous en témoignez ce matin sur Ropin.
00:31 Alors racontez-nous, vous en êtes arrivé au point où vous êtes obligé de laisser une partie de votre récolte dans les champs,
00:38 de la laisser mourir tout simplement ?
00:40 - Oui, tout à fait.
00:42 En début d'année, au printemps, en hiver, on prépare nos semis, nos plants et on plante tout ça.
00:46 Et finalement, quand vient l'heure de la récolte, souvent il nous manque des bois.
00:52 Et donc on priorise les haches.
00:55 Et puis finalement, on laisse ici un peu de salade, ici un peu de radis, ici un peu de poireau.
01:00 Parce qu'on n'a pas les bras, les petites mains, ce qu'il nous faut sur les exploitations.
01:04 Même si on est mécanisé, il nous faut quand même ces petites mains.
01:07 - Mais ça représente quoi en termes de perte pour votre exploitation, Denis Dijel ?
01:11 Le fait de ne pas pouvoir récolter une partie de votre travail ?
01:14 - Il y a quelques années, on avait de la mévente.
01:17 Nos clients n'achetaient pas.
01:18 La grande distribution n'achetait pas parce que le marché était saturé.
01:21 Aujourd'hui, on a de la mévente parce qu'on n'arrive pas à récolter.
01:24 Donc au début, ça ne représentait rien, cette mévente liée à ce qu'on ne peut pas récolter.
01:29 Aujourd'hui, ça commence à monter sur certains produits, à 5 à 10 % de produits, de nourriture,
01:34 qu'on laisse au champs, faute de bras.
01:36 Et c'est bien dommage.
01:37 - Et comment vous expliquez cette difficulté ?
01:40 Parce que le problème étant que les saisonniers aujourd'hui se font rares.
01:44 On donnait ce chiffre tout à l'heure, le taux de chômage dans l'agriculture,
01:46 aujourd'hui c'est moins de 3 %.
01:48 C'est-à-dire vraiment, on est en tension.
01:50 Où sont passés les saisonniers, Denis Dijel ? Est-ce que vous le savez ?
01:54 - Aucune idée.
01:55 Je pense qu'on suivit le même phénomène que dans d'autres métiers,
01:58 comme la restauration par exemple, je pense à eux.
02:02 Finalement, ces bras et ces gens qui voulaient revenir vers la terre,
02:07 il y a encore deux ans, pendant le Covid ou juste après le Covid,
02:09 finalement, je pense qu'aujourd'hui, il y a un changement d'attitude.
02:14 Dans notre société, les gens veulent peut-être moins se fatiguer,
02:17 ont peut-être moins le goût à l'effort, et donc se tournent vers d'autres métiers.
02:22 Ils sont peut-être un peu plus faciles, certes.
02:24 Mais je dis, on a quand même un métier essentiel, un métier très noble.
02:27 Et donc on se pose des questions.
02:29 - Et qu'en est-il des saisonniers étrangers ?
02:31 On fait fréquemment appel en France à la main-d'oeuvre étrangère au moment des récoltes,
02:36 qu'elles viennent du sud de l'Europe, de l'est de l'Europe ou du Maghreb.
02:40 Ils ne sont pas venus cette année, les étrangers ?
02:42 - C'est vrai qu'on avait souvent l'habitude de prendre des saisonniers,
02:44 notamment en Algiès, ça faisait longtemps des Polonais.
02:47 Mais cette "source" de main-d'oeuvre, c'est tari,
02:51 parce qu'en Pologne, le niveau de vie a augmenté.
02:53 Et parce qu'il y a aussi du boulot maintenant en Pologne.
02:55 Il y a aussi beaucoup de boulot dans des pays émergents au sein de l'Europe,
02:59 qui étaient plutôt à la traîne.
03:02 Et ces gens-là cherchaient du travail.
03:04 Aujourd'hui, c'est moins le cas.
03:06 Donc forcément, sur une nation comme la France,
03:08 ça fait quand même beaucoup de saisonniers en moins.
03:10 Et puis ensuite, il y a aussi eu des charlatans de main-d'oeuvre
03:14 qui vous ont vendu des saisonniers à prix complètement cassés,
03:20 qui étaient complètement en la loi.
03:22 Et la plupart des professionnels français refusent d'aller vers ce système-là.
03:25 - Ah oui, il y a cette peur aussi de se retrouver pointé du doigt,
03:27 comme ça, parce que dans l'illégalité,
03:29 à employer des gens qui sont dans des situations irrégulières aussi.
03:32 Vous vous méfiez, Denis Dijel, quand on vous approche
03:34 pour vous proposer des saisonniers étrangers ?
03:36 - Ah oui, on se méfie.
03:38 Parce qu'on a une responsabilité sociale et environnementale.
03:42 Et puis on n'a pas été élevé comme ça,
03:44 on n'a pas été grandi comme ça.
03:46 On va pas faire travailler, traverser des gens
03:48 qui n'ont rien, traverser toute l'Europe
03:50 pour pas les payer, ça n'existe pas.
03:52 Evidemment, les exceptions sont toujours là,
03:55 mais la grosse majorité de moi-même et des collègues,
03:59 on se refuse d'aller dans ce système-là.
04:01 Tout travail mérite des salaires,
04:03 et puis on est des gens respectueux,
04:05 donc on fait les choses comme il se doit.
04:07 Donc on est un peu prudent vis-à-vis de ces saisonniers
04:11 qui ne sont pas chers et qui sont disponibles à foison.
04:14 Ça, c'est une vieille chimère.
04:16 - Alors pardonnez la question, Denis Dijel,
04:18 parce que c'est vraiment celle d'un profane
04:20 en matière de maraîchage.
04:22 Chacun son métier, comme on dit,
04:24 mais est-ce qu'on ne pourrait pas mécaniser
04:26 ces tâches de ramassage là où on ne trouve pas
04:28 les hommes ou les femmes ?
04:30 Est-ce que des machines ne pourraient pas
04:32 accomplir ces tâches-là ?
04:34 - Si, on a beaucoup mécanisé,
04:36 le métier a beaucoup évolué
04:38 les dix dernières années.
04:40 Moi, ça fait 30 ans que je suis maraîcher,
04:42 ça a beaucoup évolué,
04:44 notamment dans la plantation, dans l'entretien des cultures.
04:46 Mais la récolte de beaucoup de produits,
04:48 c'est quand même la main de l'homme.
04:50 La préparation de commandes,
04:52 c'est la main de l'homme.
04:54 Évidemment aussi l'encadrement qui est important,
04:56 l'encadrement aussi qui fait défaut dans nos exploitations.
04:58 Tout passe par la main,
05:00 à un moment donné,
05:02 c'est cette petite main.
05:04 Et les mains des encadrants aussi,
05:06 qui nous manquent.
05:08 La mécanisation ne fait pas tout.
05:10 - C'est-à-dire qu'il n'y a pas que sur les saisonniers
05:12 que vous avez du mal à recruter,
05:14 ça devient difficile aujourd'hui dans l'agriculture
05:16 de trouver des bras et des cerveaux ?
05:18 - Ça devient difficile de trouver des bras et des cerveaux.
05:20 Pourtant, les écoles d'agriculture
05:22 sont pleines de monde,
05:24 qui ont plein de bonnes volontés, et on se demande où ils passent.
05:26 C'est pas la formation physique.
05:28 Donc nous, l'agriculture recrute.
05:30 Je vous l'ai dit tout à l'heure,
05:32 on a un métier noble, un métier essentiel.
05:34 Et rien de plus noble que de produire
05:36 à manger pour son congénère.
05:38 Et aujourd'hui,
05:40 que ce soit du végétal ou de l'animal d'ailleurs,
05:42 l'agriculture manque de bras
05:44 et on recrute.
05:46 Et je pense qu'on peut faire une belle carrière.
05:48 Moi, j'ai des salariés chez moi,
05:50 ils ont commencé en tant que saisonniers,
05:52 et maintenant ils se retrouvent chefs de culture.
05:54 Parce qu'ils ont croqué dans la pomme,
05:56 ils ont cru en eux, et ils ont cru en l'entreprise.
05:58 Souvent, on recrute des gens non qualifiés,
06:02 et puis on peut, l'ascenseur social,
06:04 comme le disait un président de la République,
06:06 l'impôt sur le social,
06:08 il peut aussi avoir lieu dans nos exploitations.
06:10 - Merci Denis Dijel pour votre témoignage ce matin
06:12 sur l'antenne d'Europe 1. Je rappelle, vous êtes maraîcher,
06:14 producteur de légumes en Alsace,
06:16 du côté de Celesta. Et je rappelle quand même ce chiffre,
06:18 la France importe en moyenne
06:20 un fruit, un légume, sur deux.
06:22 Alors que vous imaginez que tout ce que l'on ne ramasse pas
06:24 dans les champs en France, c'est d'autant plus
06:26 finalement qu'il faudra à terme
06:28 importer, parce que ce sont aussi autant de
06:30 pertes de chances pour l'économie française.