Céline Alonzo et André Bercoff reçoivent Fabrice Grenard, auteur de "Jean Moulin, le héros oublié" aux éditions Plon
Retrouvez La culture dans tous ses états tous les vendredis avec Céline Alonzo et André Bercoff à partir de 13h.
---
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/
Nous suivre sur les réseaux sociaux
▪️ Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100063607629498
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
———————————————————————
☀️ Et pour plus de vidéos de La culture dans tous ses états : https://youtube.com/playlist?list=PLa...
https://www.youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDTe09kK1slhxHoVwjdwngkr
##LA_CULTURE_DANS_TOUS_SES_ETATS-2023-05-26##
Retrouvez La culture dans tous ses états tous les vendredis avec Céline Alonzo et André Bercoff à partir de 13h.
---
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/
Nous suivre sur les réseaux sociaux
▪️ Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100063607629498
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
———————————————————————
☀️ Et pour plus de vidéos de La culture dans tous ses états : https://youtube.com/playlist?list=PLa...
https://www.youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDTe09kK1slhxHoVwjdwngkr
##LA_CULTURE_DANS_TOUS_SES_ETATS-2023-05-26##
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 - Sud Radio, la culture dans tous ses états, André Bercoff, Céline Alonso. - Et oui, Yves Montand qui célèbre le chant des partisans, la résistance, et la dernière grande page héroïque. Oui ?
00:14 - Je suis auditeur que ce chant des partisans a été écrit à Londres pendant l'occupation par Joseph Kessel et Maurice Rouillon. - Exactement. Et on rappelle que la résistance, c'est la dernière grande page héroïque de notre histoire.
00:27 - Fabrice Grenard, bonjour à vous et merci d'être avec nous sur Sud Radio. Alors vous publiez chez Plon un livre remarquable que j'ai beaucoup apprécié à la lecture, Jean Moulin, le héros oublié.
00:38 Vous lui rendez hommage à ce très grand résistant. Mais en quoi a-t-il été oublié ? Parce qu'il est quand même célébré, enfin, on dirait, par certains.
00:47 - Oui, la formule peut surprendre. Effectivement, tout le monde connaît le nom de Jean Moulin. Tout le monde sait que Jean Moulin a été un résistant. Jean Moulin a donné son nom à de très nombreux établissements scolaires, de nombreuses rues dans toutes les villes de France.
01:01 Mais pourtant, il me semble oublié parce que très peu de gens savent ce qu'il a fait exactement, en réalité, dans la résistance. Et d'ailleurs, lorsque l'on pense à Jean Moulin, très vite, les images qui nous viennent à l'esprit, on l'a entendu tout à l'heure,
01:13 c'est le transfert des Cendres aux Panthéons en 1964, c'est le discours d'André Malraux, mais quelque part, c'est le Jean Moulin post-mortem. Et le Jean Moulin de son vivant est beaucoup moins connu.
01:26 Et très peu de gens savent, en fait, ce qu'il a réellement fait dans la résistance. Il a vraiment été une pièce essentielle, puisqu'il a été le trait d'union, la passerelle entre deux résistances.
01:37 La résistance extérieure qui s'était développée à Londres avec le général de Gaulle, et la résistance intérieure. Et c'est lui qui va permettre que ces deux résistances, à un moment donné, elles se rencontrent.
01:46 - C'est vraiment lui qui a fait cette jonction, je dirais. - Ah oui, bien sûr, bien sûr, puisqu'on en reparlera. Mais c'est lui qui va à Londres le premier pour dire au général de Gaulle,
01:57 "Mon général, il existe en France des mouvements de résistance, de Gaulle ne les connaissait pas ou peu, et vous devez travailler avec eux."
02:05 - Eh oui, effectivement, on va revenir sur ça, parce qu'on peut dire qu'il a remis en selle de Gaulle. Mais qu'est-ce qui fait qu'il a été mis de côté ? De quoi il a pâti après la guerre ? Expliquez-nous.
02:17 - Après la guerre, d'abord, il pâtit d'un contexte particulier, qui est celui de la 4ème République et du retour des partis traditionnels, des partis de la 3ème République, et aussi de la démission du général de Gaulle.
02:31 Le général de Gaulle démissionne en 1946, quitte le pouvoir, et il connaît ce qu'on appelle sa traversée du désert jusqu'en 1958. Et Jean Moulin, qui était considéré un peu comme l'homme du général de Gaulle,
02:41 il avait été son délégué, mais finalement, sa mémoire connaît aussi une forme de traversée du désert. - De purgatoire, je dirais. - Voilà. Et les grands partis traditionnels de la 4ème République,
02:52 la SFIO, le parti socialiste, le parti communiste, le parti radical, vont davantage valoriser leurs propres héros. Pierre Brossolette, par exemple, Jean Cavallès pour les socialistes, voyez,
03:04 Daniel Casanova, Guy Moquet, Paul Hitzer pour les communistes. Et Jean Moulin, lui, passe un petit peu à côté. - Et oui, parce qu'il n'appartenait à aucune formation politique, il faut le rappeler.
03:15 - Non, il avait été haut fonctionnaire, il avait été préfet, donc comme tout haut fonctionnaire, normalement, il y a une forme de neutralité à l'égard du politique, même s'il était quand même très proche du parti radical,
03:27 et d'une des figures de ce parti radical, Pierre Cotte, dont il a été à plusieurs reprises membre de son cabinet. - Alors justement... - Et puis, il n'était pas haut parti radical, enfin, où il est aussi voté, donc...
03:38 - Il n'était pas militant, il n'a jamais adhéré à un parti politique, mais il était proche de la mouvance radicale. Le père de Jean Moulin était une figure locale dans l'héros du parti radical, et c'est vrai qu'à chaque fois que Pierre Cotte a exercé des fonctions ministérielles,
03:55 il a toujours fait appel à Jean Moulin pour travailler à ses côtés dans son cabinet, donc là, sur des fonctions quand même un peu plus politiques. - Et oui, parce qu'effectivement, il a appartenu à plusieurs cabinets ministériels, Jean Moulin.
04:07 - Ceux de Pierre Cotte. - Pas d'autres ? - Non, non, à chaque fois de Pierre Cotte. Jean Moulin a rencontré Pierre Cotte lorsqu'il est devenu sous-préfet d'Alberville en 1925, très jeune, à 26 ans, le plus jeune sous-préfet de l'époque, tout à fait.
04:22 Et Pierre Cotte était la figure locale du parti radical, il était l'élu de l'arrondissement, et voilà, tout de suite, il y a quelque chose qui s'est passé entre les deux hommes, qui partageaient les mêmes idées, mais aussi les mêmes passions, ils faisaient du ski ensemble, par exemple.
04:36 - Et juste un mot, dit Fabrice Grenard, c'était pas un rebelle à l'époque, il était... - C'est tout le contraire d'un rebelle, puisque c'est un serviteur de l'État. Donc c'est quelqu'un qui, voilà, sous-préfet en 1925 à Alberville, il va occuper plusieurs postes de sous-préfet, et puis ensuite il deviendra, à partir de 1937, préfet. Les préfets ne sont pas des rebelles.
04:55 - Plus jeune préfet de Rayloir, effectivement. - Exactement. - Et en 1936, un an avant, il faut dire qu'il a joué un rôle très important dans la guerre d'Espagne. Racontez-nous, quelle est cette mission secrète qui lui a été confiée ?
05:08 - Ça c'est vraiment important pour la suite, et c'est l'une des pages les plus méconnues de l'histoire de Jean Moulin. C'est même un paradoxe, puisque voilà, on disait, voilà, un haut fonctionnaire, normalement c'est pas un rebelle, et pourtant qui, dans le cadre de fonction au sein du cabinet du ministre Pierre Cotte, va se livrer à une action clandestine.
05:25 Alors on est en 1936, c'est le gouvernement du Front Populaire en France, Léon Blum, Pierre Cotte est ministre de l'air, et en Espagne éclate la guerre civile entre les partisans de la République espagnole et Franco.
05:36 - Et Franco, les Francoistes. - Et le général Franco, voilà. Et le gouvernement de Léon Blum, pour en gros s'aligner un petit peu sur la Grande-Bretagne, adopte une politique dite de non-intervention, de neutralité.
05:47 Et refuse du coup, officiellement, de livrer des armes au camp des Républicains espagnols.
05:53 - Un des grands entainements d'étonnement de notre histoire, il faut le rappeler quand même.
05:57 - Mais voilà, mais c'est là que, malgré tout, eh bien Pierre Cotte et un certain nombre de gens de l'entourage de Léon Blum vont développer une aide clandestine, malgré tout, à l'égard des Républicains espagnols.
06:11 Un petit peu d'ailleurs encouragé par l'écrivain André Malraux, qui s'est rendu en Espagne, qui a pu établir un petit peu la situation, et qui est revenu très alarmiste en fait.
06:22 Il explique à Pierre Cotte que les Républicains espagnols ont un gros problème, ils n'ont pas d'aviation.
06:28 Là où Franco, lui, bénéficie d'une aide de l'Italie fasciste, la Légion Condor allemande, etc.
06:34 Et donc Pierre Cotte, qui ne peut pas le faire officiellement, il est ministre, mais il va demander à son chef de cabinet Jean Moulin de développer des filières clandestines pour faire passer des avions et des pilotes en faveur des Républicains espagnols.
06:47 - Et c'est Jean Moulin qui organise ça ?
06:49 - Exactement, il organise ça, il y a un petit comité secret qui se met en place avec Gaston Cuzin, Vincent Auriol, Jules Mocq, mais c'est véritablement Jean Moulin qui est à la manœuvre.
06:58 Et alors en fait, c'est une page d'histoire oubliée, mais elle est essentielle pour la suite.
07:04 Parce qu'on le sait, d'abord parce qu'il acquiert déjà là une petite pratique de la clandestinité.
07:10 - Oui, c'est-à-dire quelles leçons il va en tirer ?
07:13 - Alors d'abord une petite pratique de la clandestinité, ce sera utile dans la résistance.
07:17 Et puis surtout, on le sait, les Républicains espagnols vont perdre cette guerre civile face au troupe du général Franco.
07:24 Et donc Jean Moulin qui était un acteur indirect finalement de ce conflit, il va en retenir deux leçons.
07:31 Pour lui, les Républicains espagnols ont perdu parce qu'ils étaient trop divisés idéologiquement, entre communistes, socialistes, pourris, etc.
07:40 Trop divisés et pas assez unis, première raison de leur échec.
07:44 Et deuxième raison, eh bien ils n'ont pas eu assez d'aide de l'extérieur, notamment des grandes puissances.
07:50 Et on voit bien là qu'il y a un fil directeur qui va guider toute son action plus tard dans la résistance,
07:56 puisque le grand combat de Jean Moulin, ça a été d'unir la résistance, donc éviter les divisions,
08:00 comme l'avaient connues les Républicains espagnols, et de tout faire en sorte pour que cette résistance soit reconnue des alliés
08:05 et puisse bénéficier du coup d'une aide alliée indispensable pour avoir de l'argent, des armes, etc.
08:10 - Et vous racontez qu'effectivement cette action clandestine a déclenché une campagne quand même haineuse à l'égard de Pierre Cotte.
08:17 - Alors le nom de Jean Moulin n'est quasiment jamais cité parce que voilà, c'est un peu l'homme de long,
08:21 mais effectivement la droite anticommuniste fait un petit peu de Pierre Cotte sa tête de Turc.
08:30 Il est très vilipordé, on l'accuse de ne pas respecter la ligne officielle du gouvernement Blum,
08:35 on l'accuse d'être un ami des Rouges, des communistes, et tout ça pèsera aussi lourd pour la suite,
08:41 puisque Pierre Cotte, après 1940, sera l'un des accusés du procès de Rion, ce procès de Vichy,
08:47 organisé par le régime de Vichy pour juger certains anciens responsables de la Troisième République
08:52 qui auraient eu, bien sûr c'était faux, mais qui auraient eu une forme de responsabilité dans la défaite.
08:57 - Alors au début de l'occupation, Jean Moulin fait le choix de rester à Chartres,
09:03 où il était donc préfet depuis février 1939 de mémoire.
09:06 Il a vécu des moments tragiques, notamment le 17 juin 1940.
09:13 Racontez-nous exactement ce qui s'est passé avec les Allemands.
09:16 - Tout à fait. D'abord, en tant que préfet à Chartres, il va assister à l'effondrement de la France.
09:20 Dans le contexte des journées de mai-juin 1940, puisqu'il y a la défaite militaire,
09:28 mais vous avez aussi ce grand chaos qui se développe partout dans le pays avec l'Exode.
09:34 - Il a quel âge à ce moment-là ? 40 ? - Il a 37 ? 40 ans.
09:39 - L'Exode, donc des millions de gens qui partent sur les routes pour fuir l'avancée allemande.
09:45 Et Jean Moulin qui est à son poste préfet de Chartres, qu'est-ce qui se passe ?
09:48 Chartres se vide de ses habitants, de ses forces vives, tout le monde part.
09:52 Donc il n'y a plus de médecins, il n'y a plus de pompiers, il n'y a plus de fonctionnaires.
09:55 Et en même temps, vous avez tous les réfugiés qui arrivent depuis le nord,
09:58 depuis la région parisienne pour fuir vers le sud.
10:00 Et là, le préfet Moulin, il doit faire feu de tout bois, il faut accueillir les réfugiés,
10:03 leur trouver du ravitaillement, un hébergement, soigner les blessés, les malades, etc.
10:08 C'est très très compliqué. Donc là, déjà, il remplit un rôle important.
10:12 Et c'est pour ça d'ailleurs qu'à Chartres, il reste une figure locale très forte.
10:16 Et puis, effectivement, les Allemands arrivent le 16 juin 1940.
10:20 Donc il accueille les Allemands en uniforme de préfet, il est le plus haut responsable local.
10:24 Et là, il va immédiatement être confronté à la brutalité, à la violence de l'occupation.
10:29 C'est le premier jour de l'occupation pour Chartres.
10:32 Puisque les Allemands vont lui demander de signer un document
10:36 déclarant que des femmes et des enfants ont été massacrés
10:40 par ce qu'on appelait à l'époque des tirailleurs sénégalais,
10:43 c'est-à-dire des soldats africains de l'armée française.
10:46 - Les Allemands lui demandent ça pour dénoncer ces salauds de...
10:50 - Alors, à la fois pour dénoncer... Voilà, parce qu'on est dans une vision raciste totalement du monde.
10:55 On sait que les Allemands, par exemple, ne respectaient pas les lois de la guerre
10:58 et que des soldats africains, plus de 3000 d'entre eux, ont été exécutés.
11:02 - Pour les nazis, les noirs, c'était la lie de l'humanité.
11:05 - Exactement. Et puis c'est aussi pour couvrir leurs propres exactions.
11:09 Puisque lorsque Jean Moulin va voir les corps de ces femmes et de ces enfants,
11:13 il comprend bien qu'en fait ils ont été les victimes d'un bombardement allemand.
11:16 Ce n'est pas des corps qui ont été fusillés, ce sont des corps qui ont été...
11:19 - Donc il rencontre l'occupation allemande tout de suite.
11:21 - Et il refuse de signer ce document.
11:23 - Et il refuse parce que pour lui, signer ce document, c'est un acte de déshonneur.
11:27 Donc il refuse, mais les Allemands le tabassent, le violentent, le torturent
11:31 parce qu'ils veulent absolument sa signature.
11:33 Et là, il se retrouve enfermé dans une pièce,
11:36 effectivement, dans la nuit du 16 au 17 juin.
11:39 - À la préfecture. - À l'hôpital.
11:41 - À l'hôpital, c'est ça.
11:43 - Les Allemands l'emmènent à la conciergerie de l'hôpital.
11:46 - À peu près à la place, plus ou moins tabassée.
11:48 - Et puis il sait que le lendemain, les Allemands vont recommencer.
11:50 Ils vont à nouveau le tabasser pour avoir sa signature.
11:52 Et là, il prend quelques bris de verre qui se trouvent par terre
11:56 et il se tranche la gorge parce qu'il préfère tenter de se suicider
12:00 plutôt qu'avoir signé cet acte déshonorant.
12:04 - Donc Fabrice Grenard, c'est un rebelle.
12:07 - Oui. - Parce que quelqu'un qui aurait été soumis...
12:09 - C'est son sens de l'honneur, surtout, qu'aurait fait de ce geste.
12:12 - C'est très compliqué. - Et du sacrifice.
12:14 - Quelqu'un qui aurait été soumis,
12:16 je veux dire, non mais soumis au sens mental du terme,
12:19 on dit "bon, ben, j'ai fait ce que j'ai pu, voilà".
12:22 - Vous avez raison, mais en même temps, vous savez que le régime de Vichy
12:25 va le féliciter pour cet acte-là.
12:27 En réalité, c'est pas un rebelle, c'est juste un préfet
12:31 qui est conforme à sa fonction. - Oui, c'est le bon sens du terme.
12:34 - Voilà. - Il s'occupe de son pays.
12:36 - Pour lui, le préfet doit rester digne, doit rester dans l'honneur
12:39 face à cette puissance occupante étrangère,
12:42 et il est à ce moment-là dans sa fonction.
12:44 C'est pas, selon moi, encore un acte de résistance.
12:47 D'ailleurs, Jean Moulin écrira un témoignage sur cette expérience,
12:51 il appelle ça "premier combat".
12:53 Mais il parle pas de résistance. - Donc il se taillade, il a...
12:56 - C'est pour ça qu'il a porté pratiquement toute sa vie cette fadmeuge écharpe
13:00 pour cacher la cicatrice. - Pour cacher la blessure.
13:03 - Et là, le gouvernement de Vichy l'a félicité. - Oui, pour cet acte-là.
13:06 Et non seulement l'a félicité, mais va le maintenir en place,
13:09 puisque Jean Moulin va rester préfet au début de la période du régime de Vichy.
13:13 - Non, vous savez pourquoi je réagis comme ça ?
13:15 Parce que Vichy au Rémuné, c'est un bon acte de collaboration,
13:18 signé, mon cher préfet.
13:20 Pour Vichy, je parle.
13:22 - D'abord, on est à la mi-juin 40, donc il n'y a pas encore eu Montoir,
13:26 tout n'est pas encore joué, l'armistice n'est même pas signé à ce moment-là.
13:30 Donc vous voyez, on est encore dans un contexte tout à fait particulier.
13:33 - Donc il reste préfet. - Il reste, oui.
13:35 Alors de quelle façon il a appliqué la législation de Vichy en Heure-et-Loire ?
13:39 - Eh oui, alors ça c'est une autre page totalement méconnue de la vie de Jean Moulin,
13:43 parce que Jean Moulin donc reste préfet.
13:45 Donc il se remet de ses blessures.
13:47 On lui propose même, le directeur de l'hôpital de Chartres lui propose de le cacher,
13:51 mais lui dit "non, non, moi je retourne à mon poste,
13:53 c'est là que je pense que je vais être le plus utile".
13:55 Mais il va rester préfet jusqu'au début novembre 1940.
13:59 Et donc pendant plusieurs mois, il va servir le régime de Vichy,
14:03 puisque le préfet c'est celui qui incarne localement l'État
14:07 et qui va donc appliquer sa législation.
14:09 Or, on voit bien que l'histoire est complexe et ambivalente,
14:13 parce que celui qui deviendra une des figures majeures de la résistance,
14:17 eh bien là, au début de l'automne 1940, c'est un préfet
14:21 qui doit appliquer ce qu'on appelle la révolution nationale,
14:24 c'est-à-dire la politique autoritaire et actionnaire du régime de Vichy.
14:28 Et il reçoit sur son bureau de la préfecture de Chartres
14:32 un certain nombre de textes législatifs
14:34 qui demandent par exemple de réprimer les sociétés secrètes,
14:37 c'est-à-dire la franc-maçonnerie,
14:39 de réprimer les menées anti-nationales, c'est-à-dire...
14:41 - Mais déjà les lois anti-juives, ou pas encore ?
14:43 - Eh bien sûr ! Le statut des Juifs, début octobre 1940...
14:46 - Alors justement, quelle a été son attitude à l'égard de la législation antisémite ?
14:50 - Eh bien, il l'applique !
14:51 - Il l'applique, hein !
14:52 - Il l'applique, puisque le statut des Juifs
14:55 empêche les Juifs d'exercer un certain nombre de métiers,
14:59 et il l'applique, et il demande à son administration
15:02 de l'appliquer localement, tout en, effectivement,
15:04 ne faisant pas non plus preuve d'un zèle démesuré,
15:07 et tout de suite, mais comme le permet la loi en fait,
15:10 tout de suite, il demande un certain nombre de dérogations
15:12 pour quelques personnalités locales,
15:14 des enseignants, des médecins,
15:17 dont il considère que ce sont des gens utiles,
15:19 localement, à la société, et qu'on ne peut pas les exclure comme ça.
15:22 - Alors, la rupture, 1940...
15:24 - Alors, Moulin, on ne peut pas dire qu'il ait été un pionnier de la résistance, en fait...
15:29 - Eh non, voilà, parce que la résistance, en France,
15:32 elle apparaît dès la fin de l'été, au cours de l'automne 1940,
15:36 on a les premiers tracts clandestins,
15:38 les premiers journaux clandestins...
15:40 - L'école normale supérieure, certains étudiants...
15:42 - La manifestation du 11 novembre, voilà.
15:44 Et à ce moment-là, Moulin, lui, il s'est aviché,
15:46 il est préfet de Vichy.
15:48 Et quelque part, c'est en le révoquant,
15:50 donc il est révoqué, début novembre 1940,
15:53 du fait, en fait, de ses relations avec Pierre Cotte,
15:56 de sa proximité... - C'est à cause de ça qu'il a été...
15:58 - Oui, oui, de sa proximité avec le Parti radical,
16:01 peut-être aussi parce que, localement,
16:03 il ne s'est pas livré à une assez grande épuration
16:06 des élites municipales,
16:08 alors que Vichy voulait voir disparaître
16:11 tous les maires élus lors des élections de 1936,
16:14 pour les remplacer... - Il n'a pas fait assez de zèle, là.
16:17 - Voilà, pour les remplacer, parce qu'on appelait des délégations spéciales,
16:20 avec des notables locaux favorables au régime.
16:22 - Donc il est révoqué. - Oui, une révocation brutale.
16:25 - Il est révoqué, du jour au lendemain, du coup,
16:27 il perd toute fonction,
16:29 et en même temps, quelque part, c'est Vichy
16:31 qui va le jeter dans les bras de la Résistance,
16:33 puisque c'est à partir du moment où il est révoqué,
16:35 qu'il se pose concrètement la question de quoi faire.
16:38 Et il profite de ces derniers jours à Chartres,
16:41 comme il est préfet, comme il a accès, vous savez,
16:43 aux tampons administratifs, etc.,
16:45 pour se confectionner des faux papiers.
16:47 - Une nouvelle identité, effectivement.
16:49 - Des faux papiers au nom de Joseph Mercier.
16:51 Joseph, c'était le nom de son frère, son frère aîné,
16:53 qui est décédé dans sa jeunesse.
16:56 Et puis, vous voyez, Joseph Mercier, JM...
16:58 - JM, eh oui, les fameux initiales.
17:00 - Très important. Il y a les mêmes initiales,
17:02 parce qu'à l'époque, on marque son linge.
17:04 - Ah oui. - Si vous avez une fausse identité,
17:06 et que les initiales sur votre veste ne sont pas les mêmes,
17:09 tout de suite, on voit que, certainement, vous...
17:11 - Comme en l'histoire. - Vous avez des faux papiers.
17:13 - Et il écrira dans une circulaire adressée aux 426 maires d'Eure et Loire,
17:17 "Après 23 années au service de la République,
17:20 je pars sans amertume, conscient d'avoir rempli ma dernière tâche,
17:24 sans défaillance."
17:26 Et dix mois après, il part à Londres, voire de Gaulle.
17:28 Alors, pourquoi il a fait ce choix ?
17:30 On va tout vous raconter dans un instant sur Sud Radio.
17:33 Alors, restez avec nous.
17:35 - Sud Radio, la culture dans tous ses états.
17:40 André Bercoff, Céline Alonso.
17:42 - Fabrice Grenard, pourquoi Jean Moulin quitte la France
17:46 le 9 septembre 1941, pour aller rencontrer de Gaulle à Londres ?
17:50 A l'époque, il faut le dire, rares sont ceux de son envergure
17:53 à rejoindre l'Angleterre.
17:55 - C'est vrai, mais vous voyez qu'il s'est passé beaucoup de temps,
17:57 puisqu'il est révoqué par le régime de Vichy début novembre 1940,
18:00 et il se rend en Angleterre,
18:02 au début de l'automne 1941,
18:04 donc il y a quasiment une année.
18:06 Et cela montre bien que Moulin n'a pas fait tout de suite le choix
18:10 de se rendre à Londres, parce qu'en réalité,
18:12 plusieurs possibilités s'offraient à lui.
18:15 La plus évidente, peut-être, c'était tout simplement
18:17 de rejoindre son ancien mentor, Pierre Cotte,
18:19 qui, lui, était à New York,
18:21 et qui tentait, à New York, de développer
18:23 des réseaux antifascistes, antinazis,
18:26 pour convaincre un petit peu l'opinion américaine
18:29 d'entrer en guerre contre les forces de l'Axe.
18:33 Et d'ailleurs, un des premiers gestes que va faire Jean Moulin,
18:36 c'est d'essayer d'avoir un visa pour les Etats-Unis.
18:38 Donc on voit bien que son intention première...
18:40 - Rejoindre Pierre Cotte.
18:41 - Voilà, son intention première aurait été certainement
18:43 de rejoindre Pierre Cotte.
18:45 Il y avait une deuxième possibilité,
18:47 c'était celle de rejoindre les premiers noyaux
18:50 de résistance qui commencent à se développer,
18:52 notamment en zone sud.
18:54 Puisqu'une fois révoqué, Jean Moulin rejoint sa famille
18:57 dans le sud de la France, donc en zone dite libre.
19:00 Et là, il voit bien qu'il se passe des choses,
19:03 qu'il y a ce qu'on appelle des mouvements
19:05 qui commencent à apparaître.
19:07 Et d'ailleurs, il va rencontrer, au cours du printemps 1941,
19:10 l'une des principales figures de cette résistance pionnière
19:13 dans le sud, le capitaine Henri Freinet,
19:16 le chef du futur mouvement combat.
19:18 Et les deux hommes se rencontrent à Marseille.
19:20 Et donc là, Jean Moulin prend conscience
19:22 que des choses se passent en zone sud,
19:24 que des organisations apparaissent.
19:26 Et finalement, c'est là que lui vient l'idée
19:28 d'aller à Londres, pour non pas rejoindre la France libre,
19:31 s'engager auprès de De Gaulle,
19:34 comme l'ont fait un certain nombre de gens
19:36 depuis juin 1940,
19:38 mais pour informer le général De Gaulle
19:40 dès début de la résistance en zone sud,
19:42 et pour lui demander d'envoyer une aide
19:46 à ces premières organisations palestiniennes.
19:48 - Il avait entendu l'appel du 18 juin,
19:50 ou il avait entendu même après, je ne dis pas que le jour même.
19:52 - Il n'a pas entendu le jour même,
19:54 c'était le lendemain du jour où la tante est se suicidée.
19:58 Donc on est sûr qu'il n'a pas entendu le jour même.
20:00 Mais au cours des mois qui suivent, évidemment.
20:04 - Mais comment il a fait pour rejoindre Londres ?
20:07 Parce qu'il était surveillé quand même à l'époque.
20:09 - Alors il était surveillé,
20:11 mais il a une couverture,
20:13 c'est-à-dire qu'il y a deux Jean Moulin.
20:15 Il y a le Jean Moulin qui officiellement est devenu agriculteur
20:18 près de Saint-Andiole,
20:20 dans la maison familiale qu'il s'était.
20:22 - Ah oui, c'était son job.
20:24 - C'était sa couverture.
20:26 Ancien préfet devenu reconverti, on va dire.
20:28 Et puis il y a Joseph Mercier,
20:30 avec ses faux papiers,
20:32 qui lui, cherche à avoir un visa pour les Etats-Unis,
20:34 et cherche à quitter le territoire.
20:37 Mais ce sera difficile,
20:39 puisqu'il va quitter effectivement Marseille le 9 septembre.
20:42 Il devra passer par l'Espagne,
20:44 puis le Portugal.
20:46 Il va se retrouver bloqué à Lisbonne,
20:48 parce qu'il rencontre là des agents du SOI,
20:50 les services secrets britanniques.
20:52 Mais il faut attendre un peu,
20:54 pour qu'il puisse être pris en charge.
20:56 - Et c'est du Portugal qu'il est parti ?
20:58 - Du Portugal, il va rejoindre ensuite Londres.
21:00 - Et sa première entrevue avec De Gaulle,
21:02 a lieu le 25 octobre 1941.
21:04 Comment elle s'est déroulée ?
21:06 Vous racontez que pour se convaincre mutuellement,
21:09 ils se sont livrés en quelque sorte,
21:11 chacun une part de bluff.
21:13 - Oui, on n'a aucun procès verbal,
21:15 aucun témoignage direct de cette première entrevue.
21:17 - On ne sait pas.
21:19 - Pour les deux, il n'y avait pas de témoin.
21:21 - Non, pas de témoin.
21:23 Par contre, Jean Moulin, on a parlé un peu à sa soeur Laure,
21:25 donc on a des choses qui sont ressorties.
21:27 Mais surtout, ce qu'on sait,
21:29 c'est que lors de cette première entrevue,
21:31 les choses n'étaient pas du tout jouées d'avance.
21:33 Parce qu'on a quand même deux hommes très différents.
21:35 Jean Moulin, le haut fonctionnaire,
21:37 plutôt proche de la gauche,
21:39 qui a participé au Front Populaire.
21:41 Et puis De Gaulle, le militaire,
21:43 l'officier supérieur, le rebelle mourassien.
21:45 Et on se souvient que De Gaulle
21:47 avait refusé quand même
21:49 de rencontrer Pierre Cotte en juin 1940,
21:51 l'ancien mentor de Jean Moulin.
21:53 Il aurait pu faire pareil avec Jean Moulin.
21:55 Mais là, les deux hommes comprennent tout de suite
21:57 qu'ils ont besoin l'un de l'autre.
21:59 Jean Moulin comprend que De Gaulle,
22:01 c'est celui qui est le plus à même
22:03 d'incarner la France qui continue la lutte aux côtés des alliés.
22:05 Donc de maintenir le pays, de maintenir la France
22:07 dans la guerre.
22:09 Et puis De Gaulle comprend que
22:11 effectivement, il n'y a pas beaucoup de cadres,
22:13 de hauts fonctionnaires qui l'ont rejoint à Londres.
22:15 Il comprend que là, il a
22:17 quelqu'un qui peut lui être très utile.
22:19 Surtout s'il peut faire cette passerelle,
22:21 ce trait d'union entre les deux résistances.
22:23 Et c'est pour ça qu'il décide
22:25 d'en faire son délégué personnel
22:27 en zone sud, avec une mission
22:29 particulière, qui est celle d'unir
22:31 les résistants, les mouvements
22:33 de résistance de zone sud.
22:35 D'abord, dans un premier temps, de zone sud.
22:37 - Oui, ça, ce sera sa première mission en 1942.
22:39 - Exactement. Voilà.
22:41 Jean Moulin revient en France,
22:43 parachuté dans le sud de la France
22:45 le 2 janvier 1942.
22:47 Il a un ordre de mission très précis
22:49 du général De Gaulle. C'est à la fois d'unir
22:51 en zone sud
22:53 l'ensemble des formations paramilitaires
22:55 et d'unir aussi
22:57 les grands mouvements
22:59 qui ont commencé à se développer.
23:01 Il y en a trois. Il y a le mouvement
23:03 "Combat" d'Henri Freinet, dont on a déjà parlé.
23:05 Le mouvement "Libération"
23:07 d'Emmanuel Dastier de la Vigerie.
23:09 Et le mouvement "Front-Tireur"
23:11 de Jean-Pierre Lévy.
23:13 - Et oui. Quelles sont les principales difficultés
23:15 qu'il a rencontrées sur le terrain ?
23:17 - Ah ben, d'abord,
23:19 il agit dans la clandestinité.
23:21 Évidemment. Donc, il ne peut pas
23:23 travailler à ciel ouvert.
23:25 Et il n'a aucun moyen, au départ. Le général De Gaulle
23:27 lui a simplement donné quelques fonds
23:29 financiers. Mais il est tout seul pour
23:31 s'acquitter de cette mission. Et là, il y a quelqu'un
23:33 qui va lui apporter une aide considérable.
23:35 C'est Daniel Cordier.
23:37 Un jeune
23:39 ancien militant de l'Action française
23:41 mais qui, déçu par Maurras en juin 1940,
23:43 a rejoint De Gaulle à Londres. C'est engagé
23:45 dans les services secrets
23:47 de la France Libre, le BCRA.
23:49 Et Cordier est parachuté
23:51 en France en août 1942,
23:53 dans un premier temps pour devenir l'agent de liaison
23:55 de Georges Bidault, un des cadres de combat.
23:57 Et puis, il rencontre Jean Moulin.
23:59 Et là, Jean Moulin va demander à Cordier de devenir
24:01 son secrétaire personnel.
24:03 Et c'est une rencontre déterminante parce que Cordier va
24:05 permettre de doter Jean Moulin
24:07 de moyens, ce qu'on va appeler la délégation
24:09 générale, une forme de secrétariat
24:11 parce que jusque-là, Jean Moulin devait faire tout
24:13 tout seul. - C'est un bon gestionnaire aussi Cordier.
24:15 - Oui, tout à fait. Mais Jean Moulin devait faire
24:17 tout tout seul, organiser lui-même ses rendez-vous,
24:19 écrire ses correspondances, envoyer les
24:21 télégrammes à Londres. Et tout ça était en plus très
24:23 risqué. Chaque action était...
24:25 - Télégrammes codés et tout ça, risqué.
24:27 - Eh oui, parce que les autorités de Vichy, vous le racontez,
24:29 gardaient constamment un oeil sur lui.
24:31 Mais toutes ces activités sont restées inaperçues.
24:33 - Il y a même un événement
24:35 extraordinaire, c'est ce qui se passe à Vichy
24:37 en mai 1942.
24:39 Pierre Laval est de retour au pouvoir,
24:41 il avait été renvoyé par Pétain le 13 décembre
24:43 1940, et Pierre Laval est de retour
24:45 au pouvoir en avril 1942.
24:47 Et Pierre Laval, qui est
24:49 avant tout un pragmatique, même si
24:51 il va prôner la politique de la
24:53 collaboration, il veut s'entourer
24:55 d'anciens hauts fonctionnaires très efficaces.
24:57 Il fera appel, par exemple, à René Bousquet
24:59 pour en faire son secrétaire général à la police.
25:01 Or, René Bousquet, avant la guerre, c'est
25:03 plutôt quelqu'un qui est proche du Parti Radical.
25:05 - Bien sûr.
25:07 - Il pense à Jean Moulin, alors.
25:09 - Peu importe l'engagement d'avant-guerre,
25:11 si la personne est
25:13 efficace et a une bonne expérience
25:15 de haut fonctionnaire, ça l'intéresse.
25:17 Et Pierre Laval va essayer de recruter
25:19 en mai 1942 Jean Moulin,
25:21 qui va être convoqué à Vichy, on va lui proposer
25:23 de réintégrer le corps
25:25 préfectoral, et là on a cette scène
25:27 incroyable de Moulin
25:29 qui se rend à Vichy pour pas évidemment
25:31 se dévoiler, et à ce moment-là,
25:33 Jean Moulin est le délégué du général de Gaulle,
25:35 l'une des figures majeures de la Résistance,
25:37 et pourtant il se rend à Vichy,
25:39 et le cabinet de Pierre Laval lui
25:41 propose un poste de préfet,
25:43 qu'il refuse bien sûr, puisqu'il est trop engagé
25:45 désormais dans la Résistance. - Il est reçu, mais il n'est pas reçu
25:47 par Laval. - Non, par son chef de cabinet.
25:49 - Et oui, et à l'époque,
25:51 il agissait sous le nom
25:53 de Charles Martel, c'est ça ?
25:55 Sa couverture, c'était quoi ? Marchand d'art,
25:57 sur Nice ? - Tout à fait.
25:59 Jean Moulin était aussi un artiste,
26:01 on le sait, outre aux fonctionnaires,
26:03 c'est quelqu'un qui a publié aussi
26:05 beaucoup de dessins,
26:07 sous le pseudonyme de Romanin,
26:09 et effectivement, comme couverture, il se fait passer pour
26:11 marchand d'art. - Ce que deviendra
26:13 Daniel Cordier, avec quel succès !
26:15 - Tout à fait, et ça lui permet de justifier
26:17 en cas de contrôle, ses déplacements
26:19 un peu dans toute la France.
26:21 - Alors en 43, il effectue sa deuxième mission
26:23 pour De Gaulle,
26:25 en quoi consiste-t-elle
26:27 celle-ci ? - Alors Jean Moulin,
26:29 va réussir... - Pardon,
26:31 j'ai juste une question,
26:33 comment il a été reçu ?
26:35 Vous en parlez dans votre livre.
26:37 Jean Moulin, vous le connaissez,
26:39 comment les gens de la Résistance, sur les trois réseaux,
26:41 comment ils l'ont reçu ? Comment ils le considéraient ?
26:43 Il dit "quittez-toi Jean Moulin".
26:45 - Il y a eu des tensions fortes avec les chefs de mouvement.
26:47 - Il y a deux choses,
26:49 d'abord, il l'accueille quand même
26:51 plutôt bien, parce que c'est celui
26:53 qui leur permet d'avoir de l'argent.
26:55 C'est la liaison avec Londres.
26:57 Et là, même Freinet,
26:59 qui idéologiquement n'est pas sur la même position que Jean Moulin,
27:01 Freinet est quand même content d'avoir cette liaison
27:03 avec Londres. Mais très vite, effectivement, des tensions
27:05 se développent, parce que
27:07 les chefs de mouvement voient bien que
27:09 Jean Moulin risque peut-être de confisquer un peu
27:11 la Résistance intérieure au profit
27:13 de De Gaulle et de la France Libre.
27:15 Et il y a des tensions qui se développent,
27:17 et puis en plus, on le sait aussi, quand vous avez
27:19 différents mouvements avec plusieurs chefs,
27:21 que vous voulez fusionner ces mouvements, à la fin,
27:23 il n'y a plus qu'un seul chef. - C'est le tout à l'école.
27:25 - Et voilà. - Et oui, il a rencontré
27:27 beaucoup d'obstacles pour
27:29 la création du Conseil de Résistance,
27:31 c'est ça. - Alors voilà, on arrive donc à sa
27:33 deuxième mission. Jean Moulin a
27:35 réussi la première, puisque en janvier
27:37 1943, les trois mouvements de zone sud
27:39 fusionnent au sein des MUR,
27:41 Mouvement Uni de la Résistance, donc c'est l'unité
27:43 de la Résistance en zone sud. Il retourne
27:45 à Londres pour rendre compte de sa mission
27:47 et pour prendre de nouvelles instructions.
27:49 Et là, on a une nouvelle page complètement
27:51 oubliée, c'est le dernier dîner
27:53 de Jean Moulin et du général de Gaulle.
27:55 On est à Londres, le 17
27:57 mars 1943.
27:59 Jean Moulin va
28:01 repartir trois jours plus tard en France.
28:03 Et face à lui, Jean Moulin a un homme
28:05 totalement dépité, fragilisé.
28:07 Ça surprend, quand on parle du général de Gaulle.
28:09 De Gaulle, c'est quelqu'un qui renvoie
28:11 toujours l'image... - Et alors,
28:13 on peut dire qu'il y a remonté le moral, en quelque sorte.
28:15 - Alors, pourquoi de Gaulle est dans cet état-là ?
28:17 Puisque depuis novembre 1942,
28:19 et puis le débarquement en Afrique du Nord,
28:21 les alliés lui préfèrent le général Giraud.
28:23 Ils sont en train de le mettre complètement sur la touche.
28:25 Et de Gaulle se dit que tout le travail
28:27 accompli... - Les américanisés, "notre homme c'est Giraud, de Gaulle..."
28:29 - Exactement. Tout le travail accompli depuis
28:31 le 18 juin s'effondre comme un château de cartes.
28:33 Et là, de Gaulle est sur le point de jeter
28:35 l'éponge, en fait. Il voit bien qu'il n'a plus
28:37 les moyens de s'imposer face aux
28:39 alliés. Et Jean Moulin lui dit "non, parce que
28:41 vous, général de Gaulle,
28:43 vous avez une carte dans votre jeu que n'a pas
28:45 le général Giraud. C'est le soutien de la Résistance
28:47 intérieure. Pourquoi ? Parce que le général
28:49 Giraud, en Afrique du Nord, maintient
28:51 la législation de Vichy. Et ça,
28:53 les résistants ne le supportent pas.
28:55 Alors que de Gaulle, lui, a promis
28:57 dès 1942
28:59 de rétablir la démocratie
29:01 à la fin de la guerre. Et c'est pour ça que
29:03 effectivement, de Gaulle
29:05 et Jean Moulin vont décider de mettre en place
29:07 un Conseil de la Résistance,
29:09 qui permettent d'unir la Résistance
29:11 dans les deux zones, et pour lui donner
29:13 le plus de légitimité possible,
29:15 ils vont faire en sorte que soient représentés dans ce Conseil
29:17 les représentants des différents mouvements
29:19 de résistance, mais aussi ceux des
29:21 partis politiques et des syndicats
29:23 qui, sans être forcément dans la Résistance
29:25 dès 40-41, ont quand même
29:27 rejoint le mouvement depuis 42.
29:29 - Et c'est demain, ça fera 80 ans, jour pour
29:31 jour, qu'on célèbre cette réunion
29:33 du Conseil national de la Résistance.
29:35 - Le 8 mai 43.
29:37 - 27 mai 43.
29:39 - Pardon, oui, oui, pardon.
29:41 Seule l'extrême droite n'a pas figuré,
29:43 c'est ça ? - Exactement. On a tous les mouvements
29:45 de résistance, on a tous les partis
29:47 politiques de l'extrême gauche,
29:49 c'est-à-dire des communistes, jusqu'au parti
29:51 de la droite républicaine, l'Alliance
29:53 démocratique, la Fédération républicaine,
29:55 il n'y a que l'extrême droite, trop compromise par
29:57 Vichy, bien sûr, qui ne siège pas au sein
29:59 du Conseil national de la Résistance.
30:01 - Alors si Jean Moulin n'avait pas réussi
30:03 à unifier la Résistance derrière De Gaulle,
30:05 le sort de la France,
30:07 quel aurait été ? - On peut faire un peu
30:09 du chrony, mais il se serait certainement
30:11 passé ce qui s'est passé dans beaucoup d'autres
30:13 pays occupés. En fait, il y aurait eu
30:15 un conflit de légitimité entre
30:17 deux pouvoirs à la libération.
30:19 Le pouvoir des résistants de l'extérieur
30:21 avec le général De Gaulle, le pouvoir
30:23 des résistants de l'intérieur.
30:25 Et ces deux résistants se seraient dotés
30:27 de leurs propres institutions. Et donc
30:29 il y aurait eu un conflit à la libération.
30:31 - Presque une guerre civile, enfin, ou presque, oui. - Voilà. C'est ce qui s'est
30:33 passé en Yougoslavie ou en Grèce, là on a des guerres
30:35 civiles, mais même en Belgique.
30:37 Lorsque le gouvernement Pirlo, qui était
30:39 à Londres depuis 40 ans, revient
30:41 en Belgique, Pirlo l'a dit dans ses mémoires,
30:43 il n'était pas du tout populaire.
30:45 Il s'est heurté aux résistants de l'intérieur.
30:47 Alors que quand De Gaulle revient en France,
30:49 lui, on a cette descente
30:51 phénoménale des Champs-Elysées le 26 août
30:53 44, la marée humaine,
30:55 les gens l'acclament, il fait consensus.
30:57 Parce qu'il y a eu cette unité de la
30:59 résistance, et parce que...
31:01 - Et on la doit à Jean Moulin.
31:03 - Et on la doit à Jean Moulin. - Exactement. - Et à ce Conseil
31:05 national de la résistance. - Et oui, Jean Moulin,
31:07 qui a vraiment remis en scelle
31:09 De Gaulle. Alors, comment les Allemands
31:11 sont parvenus à l'arrêter ? Qui l'a trahi ?
31:13 Comment s'est déroulé son
31:15 face-à-face avec Claude Barbi ?
31:17 Comment, lui, il a réussi
31:19 à humilier son bourreau ?
31:21 Ça, c'est un épisode incroyable que vous racontez
31:23 dans votre livre. On vous le raconte dans un instant
31:25 sur Sud Radio. Alors, restez avec nous.
31:27 - Sud Radio, la culture dans tous
31:31 ses états. André Bercoff, Céline
31:33 Alonso. - Fabrice Grenard, pourquoi
31:35 l'arrestation de Jean Moulin
31:37 était-elle un enjeu pour les Allemands ?
31:39 Racontez-nous. - Eh bien, tout simplement
31:41 parce qu'après le débarquement
31:43 allié en Afrique du Nord,
31:45 tout le monde s'attend à ce que désormais les Alliés débarquent
31:47 sur les plages françaises.
31:49 Et à l'époque, on est même persuadés que ce débarquement
31:51 en France, qui aura lieu le 6 juin 1944,
31:53 interviendra dès l'année
31:55 1943. Et à ce moment-là,
31:57 les Allemands, évidemment, veulent décapiter la résistance
31:59 parce qu'ils ne veulent pas avoir à lutter sur
32:01 deux fronts, en fait. Contre les Alliés sur les plages
32:03 et contre un grand mouvement à l'intérieur
32:05 qui passerait
32:07 à l'action. Et ils ont connaissance
32:09 de la présence, en France,
32:11 d'un délégué du général de Gaulle. Ils ne savent pas
32:13 son identité, ils ne savent pas qui il est. - Ah, mais ils savent qu'il y a quelqu'un.
32:15 - Mais ils savent qu'il y a quelqu'un parce que
32:17 ils ont bien sûr procédé à différentes perquisitions,
32:19 à des arrestations, ils sont tombés sur des documents
32:21 qui révélaient la présence de
32:23 Max, donc le nom de couverture
32:25 de Jean Moulin. Et donc là,
32:27 Jean Moulin est devenu
32:29 la cible, la cible prioritaire
32:31 des Allemands. - Eh oui, on est au
32:33 printemps 43 et à l'époque, c'est
32:35 l'homme le plus recherché de France.
32:37 Alors les Allemands, comment ils ont réussi
32:39 à l'arrêter ? C'était à Calhuir
32:41 le 21 juin 43.
32:43 Qui a trahi Jean Moulin ?
32:45 - Alors c'est un enchaînement de faits, en fait, qui
32:47 commence avec une première trahison,
32:49 un dénommé Jean Moulton, résistant
32:51 du mouvement Combat à Marseille, qui est arrêté par les Allemands
32:53 et retourné. Il devient un agent allemand.
32:55 Et il va provoquer des ravages
32:57 dans la résistance.
32:59 Il a fait une centaine d'arrestations à Marseille,
33:01 très efficace pour les Allemands. - Ah oui, il a complétement livré...
33:03 - Et là, les Allemands vont le muter à Lyon,
33:05 qui est quand même la plaque tournante
33:07 de la résistance en zone sud.
33:09 Et grâce à Moulton,
33:11 les Allemands à Lyon vont avoir connaissance de ce qu'on appelle une boîte aux lettres.
33:13 C'est là où on dépose et on
33:15 prend le courrier dans la résistance.
33:17 Et ils ont connaissance d'un message
33:19 qui évoque une rencontre à Paris le 9 juin 43
33:21 entre le général de l'Estreint
33:23 et René Hardy, qui est le responsable
33:25 des sabotages de
33:27 chemin de fer au sein du mouvement Combat.
33:29 Et donc, c'est ça qui va entraîner
33:31 finalement l'arrestation de Jean Moulin. Pourquoi ?
33:33 Parce que les Allemands vont arrêter
33:35 à la fois de l'Estreint et René Hardy.
33:37 De l'Estreint,
33:39 il va falloir réorganiser
33:41 l'armée secrète. C'était le chef de l'armée secrète.
33:43 Donc Jean Moulin décide
33:45 d'organiser à Calouir une réunion
33:47 avec plusieurs hauts responsables de la résistance
33:49 pour réorganiser l'armée secrète
33:51 après l'arrestation de de l'Estreint.
33:53 Et Hardy, lui, qui a été arrêté,
33:55 il se retrouve dans les mains de Barbie à Lyon.
33:57 Il a arrêté le 9 juin. Mais Barbie
33:59 le libère quelques jours plus tard.
34:01 - C'est ça, oui. - Là,
34:03 est-ce qu'il le libère parce qu'en fait
34:05 il a réussi à le retourner et Hardy est devenu
34:07 un agent allemand ?
34:09 Ou est-ce que simplement Barbie se dit
34:11 "En fait, lui ne m'intéresse pas tant que ça, je voudrais
34:13 des poissons un peu plus gros et je vais le libérer
34:15 pour le faire filer." - On n'a pas de réponse à ça.
34:17 Enfin, tout
34:19 conduit quand même, on ne va pas dire
34:21 qu'il... - On n'a pas de réponse parce que la justice
34:23 a innocenté deux fois René Hardy, mais ce qui est sûr
34:25 c'est que c'est bien René Hardy qui va conduire...
34:27 - Il ne l'a pas libéré comme ça pour rien. Enfin, bon.
34:29 - Et c'est René Hardy qui va conduire les Allemands
34:31 à cette réunion de Caluire. - Cette réunion.
34:33 - Pourquoi ? Parce qu'au départ René Hardy n'était pas invité à cette réunion
34:35 de Caluire, le 21 juin 1943.
34:37 Mais les membres du mouvement Combat
34:39 veulent reprendre la main, en fait, sur l'armée secrète
34:41 après l'arrestation du général de l'Estreint
34:43 et la direction de Combat,
34:45 Freinet, à ce moment-là, est parti. Il n'est plus
34:47 sur place. Mais l'état-major
34:49 de Combat va demander à René Hardy
34:51 d'accompagner un autre membre
34:53 Henri Aubry
34:55 pour peser lors de cette réunion.
34:57 Mais là, il y a une anomalie
34:59 puisqu'il n'était pas dans la liste des invités
35:01 initiaux de René Hardy. Or,
35:03 normalement, dans la Résistance, quelqu'un qui n'est pas
35:05 invité à une réunion clandestine... - Ne vient pas.
35:07 - ... n'a rien à y faire. Et en plus,
35:09 mais ça, les Résistants ne le savaient pas forcément,
35:11 puisque lui-même ne l'a pas expliqué,
35:13 il avait été arrêté quelques jours
35:15 plus tôt par les Allemands. Et c'est pour cette raison
35:17 que lorsque Jean Moulin arrive
35:19 dans la maison du docteur
35:21 Dugoujon, donc le 21 juin
35:23 1943, après-midi, eh bien,
35:25 quelques minutes plus tard,
35:27 Barbie débarque avec
35:29 ses agents
35:31 et procède à une rafle
35:33 massive qui lui permet d'arrêter l'ensemble
35:35 des personnes présentes. - Eh oui. Et dans votre
35:37 livre, vous racontez le face-à-face
35:39 Barbie-Moulin. C'était en juin '43
35:41 dans les locaux de la
35:43 Gestapo lyonnaise. Ce
35:45 face-à-face est insoutenable.
35:47 - C'est terrible, parce que Barbie sait qu'il a là
35:49 un des plus hauts responsables de la Résistance,
35:51 il veut absolument le faire parler, parce que si
35:53 Moulin sait tout de la Résistance.
35:55 Donc s'il le fait parler, évidemment,
35:57 les Allemands pourront ensuite démanteler toute la Résistance.
35:59 Mais Moulin ne parle pas.
36:01 Et il y a même effectivement cette scène extraordinaire.
36:03 - Il est affreusement torturé. - Ah oui, il est...
36:05 C'est horrible. Il est tellement torturé, d'ailleurs,
36:07 qu'il est à moitié inconscient tout le temps.
36:09 Tous ceux qui l'ont vu à Montluc,
36:11 à ce moment-là, ont témoigné qu'il était dans un...
36:13 quasiment dans un coma second
36:15 tout le temps. Mais on a cette scène incroyable,
36:17 effectivement. À un moment donné,
36:19 il semble à bout de force,
36:21 Jean Moulin, et il demande à Barbie
36:23 un petit crayon et un petit carnet.
36:25 Et là Barbie se dit "Ah enfin, il va
36:27 parler. Comme il n'a pas la force de parler, il va
36:29 me mettre les renseignements par écrit."
36:31 Et puis les minutes passent, les minutes passent,
36:33 et finalement Jean Moulin tend le carnet
36:35 à Barbie, et en fait il n'a rien noté
36:37 du tout, aucun
36:39 renseignement, il a simplement caricaturé
36:41 son bourreau. Et c'est une scène
36:43 formidable parce que... - Il l'a complètement humilié,
36:45 en quelque sorte. - Puisque la victime
36:47 humilie son bourreau dans
36:49 une scène de torture, c'est quelque chose
36:51 d'incroyable. - Et ce qui est incroyable, c'est que
36:53 le silence de Moulin a jeté
36:55 un coup fatal, en fait,
36:57 à la carrière de Barbie. - Oui, Barbie
36:59 espérait être promue, en fait, s'il avait réussi
37:01 à faire parler Jean Moulin, mais non seulement il ne le fait pas
37:03 parler, mais en plus il va le rendre assez
37:05 supérieur dans un état totalement...
37:07 où il n'y a plus rien à tirer de lui.
37:09 Et du coup Barbie sera, à ce moment-là,
37:11 trop gradée, effectivement. - Alors quelles sont
37:13 les conditions de la mort
37:15 de Jean Moulin ? Parce qu'il a été transféré
37:17 à Paris avant qu'il
37:19 le transfère à Berlin, racontez-nous.
37:21 - Oui, donc Jean Moulin est d'abord
37:23 interrogé par Barbie à Lyon
37:25 une semaine, à peu près, et puis là les supérieurs
37:27 de Barbie vont ensuite lui demander, ils comprennent
37:29 que c'est une prise très importante, lui demander
37:31 de le transférer à Paris, dans la villa
37:33 du colonel Baumellebourg, qui dirige
37:35 la gestapo parisienne. Mais là Jean Moulin
37:37 est dans un état tel qu'il est totalement
37:39 défiguré, il ne peut plus parler, il est quasiment
37:41 inconscient. Et là les Allemands veulent le faire
37:43 hospitaliser pour essayer de le soigner
37:45 justement, parce qu'ils veulent continuer à lui faire parler.
37:47 Mais ils ne veulent pas l'interner
37:49 dans un hôpital parisien parce qu'ils ont peur que
37:51 la résistance organise un coup pour le
37:53 libérer. Donc ils décident de le transférer
37:55 à Berlin, en plus vu l'importance du personnage.
37:57 Et c'est lors de ce transfert à Berlin
37:59 qu'il décède le
38:01 8 juillet 1943.
38:03 Et que le décès est
38:05 constaté en gare de Metz. - Eh oui.
38:07 Aujourd'hui il y a un mystère autour de la
38:09 dépouille. - Il y a un mystère parce qu'en
38:11 réalité, le
38:13 décès est constaté le 8 juillet 1943
38:15 et puis le lendemain il y a un corps non identifié
38:17 qui arrive au père Lachaise.
38:19 Et là les Allemands demandent immédiatement
38:21 d'incinérer ce corps. - D'incinérer.
38:23 - D'incinérer le corps.
38:25 Et donc les cendres sont
38:27 mises dans une urne et on considère
38:29 que ce sont les cendres présumées de
38:31 Jean Moulin, mais il n'y a aucun acte administratif
38:33 qui le prouve. Et ce sont ces cendres qui sont
38:35 aujourd'hui au Panthéon. - Eh oui. Fabrice
38:37 Grenard, très rapidement parce qu'on arrive
38:39 en fin d'émission. Alors vous êtes président
38:41 scientifique de la Fondation de la Résistance.
38:43 En quelques mots, quels sont les objectifs
38:45 de cette fondation aujourd'hui ? - Oui, directeur
38:47 scientifique de la Fondation de la Résistance, c'est une fondation qui
38:49 a été créée en 1993 par
38:51 les derniers résistants qui étaient encore en vie, les Épaules
38:53 au Bras par exemple, Stéphane Essay, Jean-Louis Crémieux
38:55 Briac. Cette fondation elle a trois missions
38:57 tout simplement. Continuer à faire de l'histoire
38:59 autour de la Résistance pour mieux lutter
39:01 contre toute forme de révisionnisme.
39:03 Entretenir aussi la mémoire
39:05 de la Résistance, participer à des commémorations
39:07 comme demain donc, avec la journée
39:09 du 27 mai à Paris, il y aura différentes
39:11 manifestations organisées, notamment
39:13 aux 48 rue du Four
39:15 là où a lieu la première réunion.
39:17 Et puis une action pédagogique.
39:19 On travaille beaucoup notamment en lien
39:21 autour du concours national
39:23 de la Résistance et de la déportation. Nous avons même
39:25 une enseignante détachée qui est spécifiquement
39:27 qui travaille spécifiquement
39:29 sur ces questions.
39:31 Et ça nous permet d'être très présentes dans les établissements scolaires.
39:33 Merci Fabrice Girenard, c'est vraiment
39:35 un livre à lire, on vous le recommande vraiment.
39:37 Jean Moulin, le héros oublié, justement
39:39 ne jamais oublier
39:41 les Résistants, surtout de ce calibre.
39:43 Eh oui, tout de suite vous retrouvez
39:45 Brigitte Laé sur Sud Radio.