Jacques BIZOLLON a donné son nom au tout premier studio d’enregistrement en Côte d’Ivoire JBZ, il nous raconte son parcours et évoque ses projets.
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00:00 Madame, Monsieur, amis internautes, bonjour.
00:02 Bienvenue à ce nouveau numéro de votre magazine,
00:04 l'invité de la rédaction sur l'infodrome.
00:07 Aujourd'hui, nous avons l'honneur de recevoir pour vous
00:09 une icône de la musique en général, qui a contribué en particulier
00:13 à faire naître la musique ivoirienne moderne.
00:16 Il est avec nous pour parler de son parcours,
00:19 de ses moments marquants justement de cette carrière,
00:22 mais également de ses projets.
00:28 Alors, vous débarquez en Afrique, à Abidjan plus précisément en 1947.
00:33 Qu'est-ce qui vous emmène en Afrique ?
00:35 Mon père a vu une publicité dans un journal de Lyon
00:38 en disant qu'il y avait un Européen qui vendait une plantation en Côte d'Ivoire,
00:44 une plantation noël-calédonienne, Nouméa.
00:48 Il a réfléchi, il s'est dit, Nouméa, il y a un mois de bateau,
00:53 ça fait un peu beaucoup.
00:56 Mais si je vais en Côte d'Ivoire, il y a 11 jours de bateau,
00:59 Marseille-Abidjan.
01:01 Donc, il a pris contact avec la personne qui vendait ces plantations,
01:08 qui était à Zuenula, dans le pays gourou.
01:12 Alors, comment ça se passe justement, votre intégration à Zuenula ?
01:15 J'étais élève au petit collège,
01:20 et puis après, vu les écoles, il fallait redescendre sur Abidjan.
01:24 En 1958, j'étais disque-jockey avec un ami.
01:29 Et donc, on faisait des soirées comme ça, à Rotary,
01:32 les mariages, même on a fait des sonorisations pour des artistes.
01:37 Après tout ce parcours, ce bagage, comment on devient disque-jockey ?
01:42 J'étais disque-jockey parce que j'aimais la musique.
01:45 Comme j'étais toujours dans la musique, j'ai appris que le magasin de disques,
01:50 Disco Club, qui était à l'Hôtel d'Ivoire, était à vendre.
01:54 Donc, ça s'est fait.
01:55 Et en 1975, je suis propriétaire du Disco Club.
01:59 Alors là, c'était la belle époque, parce que là, ça marchait très, très bien.
02:03 Le vinyle marchait bien.
02:04 À ce moment-là, les gens écoutaient de la musique.
02:07 On n'était pas sollicité par des images, par la vidéo, par les écrans de télévision.
02:13 Et cette aventure se poursuit jusqu'en 1980 avec l'ouverture des studios d'enregistrement.
02:18 Donc, après, je me suis aperçu qu'en Afrique occidentale,
02:24 et en particulier en Côte d'Ivoire, il manquait de structures.
02:27 Les gens ne savaient pas où aller.
02:28 Ils ne savaient pas où aller pour enregistrer.
02:31 C'était l'un des premiers studios d'enregistrement ?
02:33 Le premier studio d'enregistrement.
02:34 Parce que les gens enregistraient à la radio, en monopiste ou en deux pistes.
02:41 Et puis, voilà quoi.
02:43 JBZ, ça voulait dire Jacques Bisolon, deux genoux là.
02:48 Au début, j'avais un ingénieur français, Balogne.
02:52 Et puis après, j'ai eu comme ingénieur du son Wampi, le père de Didier Rafat,
02:57 qui est resté au moins 20 ans avec moi.
02:58 C'est lui qui était vraiment le gars qui était derrière la console,
03:03 qui a enregistré tout le monde.
03:04 Aujourd'hui, avec du recul,
03:06 est-ce qu'on peut dire que JBZ était à l'origine de la musique ivoirienne ?
03:10 Oui, parce qu'on a enregistré beaucoup de traduits modernes,
03:14 beaucoup de variétés.
03:16 Moi-même, j'avais un studio mobile.
03:19 Et il m'est arrivé d'aller à Mans,
03:23 aller enregistrer les villageois qui avaient des orchestres dans les villages autour de Mans.
03:28 Par exemple, le titre "Bonsoir, ça va ? Bonne arrivée."
03:32 Vous avez tous entendu à la télévision.
03:34 Mais moi, ils ne m'ont jamais donné un sou.
03:39 Ils ne m'ont pas donné un sou, mais ça ne me fait rien, ce n'est pas grave.
03:41 Et après, j'ai été enregistré aussi à Congo.
03:45 Mais l'État ivoirien a reconnu quand même votre mérite après tout.
03:50 Oui, j'ai eu le mérite culturel.
03:53 Dans un mois ou deux,
03:55 Bamako fait une nuit de la musique mandingue
03:59 avec l'invité principal, Jacques Busseron.
04:03 Vous êtes toujours là, le studio a fermé.
04:06 Le studio a fermé en 2018.
04:08 Le studio, c'est difficile maintenant.
04:11 Et ceux qui montent des studios, je leur souhaite bien du plaisir.
04:15 Parce qu'en Europe, par exemple,
04:17 tous les artistes, ils ont un homme studio chez eux.
04:21 Ils font leur musique à leur goût.
04:24 Même la nuit, ils se lèvent, ils vont dans leur studio, ils travaillent.
04:28 - Ils ont des idées. - Ils ont forcément un orchestre.
04:30 Quand ils ont fini, ils vont dans un grand studio,
04:33 ils font leur mixage, ils font leur mastering et ils sortent leur album.
04:38 Au lieu de prendre un mois de studio,
04:41 ils vont vous prendre huit jours.
04:42 C'est pour ça qu'il y a des studios qui ferment.
04:44 Et vous ne perdez pas espoir ?
04:46 Parce que vous avez toujours...
04:46 Alors moi, je dis une chose,
04:48 c'est que le ministère de la Culture aurait dû garder ce studio
04:53 pour en faire une école pour les ingénieurs du son.
04:56 Et puis, parce que moi, je prends l'exemple de...
05:00 à Londres, le studio Abbey Road,
05:04 que vous devez connaître, c'est le studio qui a enregistré
05:08 les Beatles, qui a enregistré tous les grands groupes de rock
05:12 en Angleterre et tout ça.
05:14 Mais la ville de Londres a racheté ce studio
05:17 et en a fait un genre de musée.
05:21 Alors aujourd'hui, on va dire à 80 ans, vous avez toujours des projets.
05:25 - 83. - 83, pour être plus précis.
05:29 Alors, vous avez toujours des projets et toujours dans le domaine de la musique,
05:32 malgré...
05:33 Oui, je suis en train de monter une plateforme,
05:35 une plateforme digitale.
05:38 Elle s'appelle WAM.
05:40 Et c'est une plateforme destinée aux artistes
05:46 qui s'inscrivent dedans
05:48 et qui va être diffusée dans le monde entier.
05:52 C'est-à-dire que...
05:54 Parce que qu'est-ce qui manque ici ?
05:56 Il manque... Par exemple, je veux Aïcha Conné.
05:59 Si je n'ai pas son numéro, je ne peux pas la contacter.
06:01 Donc je suis à peu près à 1 200 artistes.
06:07 Qui sont inscrits sur le site.
06:08 À la fin du mois, on va lancer la plateforme
06:14 et ça sera diffusé partout.
06:16 Alors, on va terminer cette interview, on l'espère, sur une note d'espoir.
06:19 Votre message à l'endroit des pouvoirs publics,
06:23 des acteurs du showbiz des musiciens.
06:26 Quel est le vœu que vous souhaitez ?
06:28 Moi, je souhaite que l'État prenne en considération
06:33 que la musique, c'est comme une société,
06:37 c'est comme une usine.
06:38 Et ils doivent aider les gens, les artistes,
06:43 à vivre de leur art.
06:45 Parce qu'ils aiment ça.
06:46 Donc j'ai beaucoup d'espoir avec l'agence WAM
06:50 pour développer la carrière des artistes
06:54 et leur trouver des contrats.
06:56 Parce que c'est avec ça qu'ils gagnent de l'argent.
06:57 C'est avec ça qu'ils vivent.
07:00 La musique vit avec ça.
07:01 On souhaite bon vent à votre nouveau projet, WAM.
07:05 Et nous, en tout cas, nous avons eu beaucoup de plaisir
07:07 à recevoir pour vous Jacques Bizolon de Genoula,
07:10 avec qui nous avons justement parlé de son parcours impressionnant,
07:15 mais également de ses projets pour la musique africaine,
07:17 pour la musique ivoirienne.
07:19 On se retrouve très bientôt pour un nouveau numéro
07:21 de l'invité de la rédaction.
07:22 Sous-titrage ST' 501
07:24 [Musique]