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Séminaire Santé-environnement : quinze ans de politiques publiques - Discours d’ouverture par Mme Agnès-Firmin Le Bodo
Transcription
00:00 Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les élus,
00:03 Mesdames et Messieurs,
00:05 c'est un honneur, Monsieur le Président,
00:06 d'ouvrir ce séminaire du Haut Conseil de la Santé publique
00:10 ici, dans cette salle La Roque, dans ce ministère, à vos côtés.
00:14 Avant tout, je vous souhaite à toutes et tous
00:17 une excellente année 2023
00:20 et surtout une bonne santé.
00:22 Si la santé environnement, One Health,
00:25 une seule santé, santé planétaire
00:27 ou encore Global Health,
00:29 je les dis tous,
00:31 prend une place centrale dans mon action en tant que ministre,
00:34 c'est parce que j'y suis profondément attachée
00:36 depuis de nombreuses années.
00:38 En tant que députée, bien sûr,
00:39 où j'ai eu l'occasion de voter des textes sur ce sujet,
00:42 mais surtout en tant qu'élu de terrain
00:44 où quotidiennement, les liens entre l'environnement et la santé
00:48 nous montrent à quel point ce sujet est un sujet de territoire.
00:52 Aujourd'hui, c'est en tant que ministre que je m'y intéresse.
00:56 Mon intention est claire.
00:57 Tirer profit de cette expérience
00:59 et de celle de toutes les personnes
01:01 que j'ai eu l'occasion de rencontrer sur ce sujet
01:03 pour d'abord faire le constat
01:05 de l'état de la politique publique de santé-environnement
01:07 dans notre pays,
01:08 mais surtout pour construire avec l'aide de tous
01:12 la santé-environnement de demain.
01:15 Monsieur le Président,
01:16 vous avez fait le choix de nommer ce congrès
01:18 "15 ans de politique publique en santé-environnement".
01:22 Pourtant, l'action sur la santé et sur l'environnement
01:25 existe déjà depuis plusieurs dizaines,
01:28 voire centaines d'années.
01:30 Le 15 février 1902,
01:32 les bureaux communaux d'hygiène,
01:36 comme le 1er a été créé au Havre...
01:39 Il y a beaucoup de choses qui se passent au Havre.
01:41 Pour ceux qui ne le savent pas encore, vous allez l'apprendre.
01:43 Je suis à Brest.
01:44 En 1879, sont rendus obligatoires par la loi.
01:49 En 1872, au Havre, arrivait le foot aussi.
01:52 Je le dis comme ça.
01:54 C'est la 1re fois que la liaison étroite
01:56 entre environnement et santé apparaît dans la loi.
02:00 Bien évidemment, les grandes épidémies historiques
02:03 avaient déjà donné lieu à des mesures environnementales
02:05 pour protéger la santé humaine.
02:07 Ainsi, la santé et l'environnement,
02:09 que certains décrivent comme une symbiose,
02:12 forment une association réciproquement profitable.
02:15 Ce sont les scandales environnementaux
02:17 responsables de pollutions chroniques ou accidentelles,
02:20 ces vaisseaux, l'amiante, la chlordécone,
02:22 ou encore plus près de nous, l'ubrizole,
02:24 qui nous font prendre conscience de cette interaction
02:27 où l'action de l'homme sur son environnement
02:29 a un impact sur sa santé.
02:32 Je pense évidemment que le titre de ce séminaire
02:34 fait référence avant tout
02:36 aux 15 années des plans nationaux santé-environnement.
02:39 Il me semblait utile,
02:40 là où bien souvent, nous entendons dire
02:42 que la santé-environnement est un nouvel enjeu de la santé,
02:46 de rappeler à quel point notre pays a fait le lien
02:48 depuis longtemps entre la santé et l'environnement.
02:52 Si la France n'a pas eu en Europe
02:54 la 1re implant nationale santé-environnement,
02:57 notre démarche interministérielle constante et quotidienne
03:01 sur ce sujet montre notre engagement profond.
03:05 Ces 15 années du PNSE sont ainsi l'occasion,
03:08 et c'est ce que vous faites à juste titre aujourd'hui,
03:10 d'un bilan et d'un état des lieux
03:12 de l'action du gouvernement sur le sujet.
03:14 C'est l'occasion également de définir collectivement
03:17 de nouvelles priorités pour l'avenir
03:19 de la santé-environnement.
03:21 Depuis 2016, la préoccupation environnementale,
03:24 et plus particulièrement le dérèglement climatique,
03:26 apparaît comme la 2e préoccupation des Français.
03:30 L'accélération récente des impacts du changement climatique,
03:33 annoncé il y a plus de 30 ans,
03:35 ont désormais des impacts visibles pour tous nos concitoyens.
03:38 Ce sont les vagues de chaleur successives,
03:40 les ruptures d'approvisionnement en eau potable,
03:42 ou encore l'augmentation du risque infectieux
03:45 dû à la modification des écosystèmes.
03:48 En réponse à cela, le président de la République
03:51 et la Première ministre ont mis en place, dès mai 2022,
03:55 le comité d'anticipation et de veille des risques sanitaires,
03:58 mais également, en juillet 2022,
04:00 le Secrétariat général à la plignification écologique,
04:03 le SGPE.
04:05 Le ministère de la Santé doit apporter sa contribution
04:08 à cette ambition nationale.
04:11 Les liens entre la santé et les politiques publiques
04:14 de lutte contre les changements climatiques
04:15 doivent ainsi être travaillés en complémentarité.
04:19 A ce titre, le système de santé tout entier doit travailler,
04:23 et travaille déjà, à sa transition écologique
04:26 et environnementale,
04:27 comme tous les autres secteurs d'activité.
04:30 Dans ce sens, je tiendrai très prochainement
04:32 un comité stratégique sur la transition écologique
04:35 du système de santé,
04:36 regroupant tous les acteurs institutionnels,
04:38 les établissements et les professionnels de santé
04:41 pour définir ensemble nos priorités sur ce chantier majeur.
04:46 Le contexte sanitaire que nous connaissons
04:48 nous amène à nous interroger sur l'anticipation
04:50 des risques sanitaires émergents.
04:52 La Covid-19 a porté à la connaissance du grand public
04:56 la problématique de la relation
04:57 entre dégradation de la biodiversité et santé humaine.
05:01 C'est en fait un des trop nombreux exemples
05:03 qui nous démontrent cette relation.
05:05 L'objectif doit donc être celui de contribuer
05:09 à créer des interconnections entre les dispositifs de veille
05:11 et de surveillance sanitaire et environnementale.
05:15 Nous devons nous donner les moyens
05:17 de passer du principe de précaution
05:18 au principe de prévention
05:20 et ainsi de mieux anticiper les risques
05:22 pour permettre la mise en place
05:24 de mesures proportionnées et réalistes.
05:27 C'est cela qui doit guider notre action
05:29 tant sur les questions d'utilisation
05:30 de produits phytosanitaires
05:32 que sur les perturbateurs endocriniens.
05:35 Ainsi, nous devons mieux anticiper les risques liés à l'exposome
05:38 et donc mieux maîtriser les milieux.
05:41 Sur cela, 2 d'entre eux retiennent toute mon attention
05:44 et l'attention du gouvernement,
05:45 tant leur nécessité nous est vitale.
05:47 L'eau et l'air.
05:49 L'eau représente un enjeu de santé majeur à plus d'un titre.
05:53 Préserver une ressource de plus en plus précieuse
05:55 tout en garantissant sa qualité
05:57 est un des objectifs prioritaires du ministère de la Santé.
06:00 En France, environ 33 200 captages
06:04 d'eau souterraine ou d'eau superficielle
06:06 sont utilisés pour produire de l'eau
06:07 destinée à la consommation humaine.
06:10 Le ministère de la Santé,
06:11 co-chef de file des travaux européens
06:13 pour l'accès à l'eau et à l'assainissement,
06:15 doit veiller à la mise à disposition
06:17 sur l'ensemble de son territoire d'une eau potable de qualité.
06:22 Aujourd'hui, 20 000 à 30 000 personnes en métropole
06:24 et probablement 10 fois plus dans les territoires ultramarins
06:28 sont confrontées à des difficultés,
06:30 voire à des impossibilités d'accéder à l'eau
06:33 compte tenu de leurs conditions de vie.
06:36 Les épisodes de sécheresse qui se multiplient,
06:38 nous l'avons encore vu cet été,
06:40 contribuent quant à eux à fragiliser l'accès à l'eau
06:43 dans certains territoires,
06:44 voire à généraliser les épisodes de pénuries
06:47 qui impactent la population générale,
06:49 comme le fonctionnement de différentes structures,
06:51 établissements sanitaires et autres services
06:54 pour le bon fonctionnement de la société.
06:56 Plus que jamais, pour des raisons vitales,
06:58 comme pour répondre à des besoins d'hygiène et de santé,
07:01 l'ensemble de la population est confronté à la nécessité
07:04 de disposer en permanence d'un accès à l'eau,
07:07 mais aussi et surtout à une eau de qualité.
07:10 Dans ce cadre, un travail conséquent
07:13 vient d'aboutir par la transposition
07:14 de la directive européenne "Eau potable".
07:17 Au-delà de la réaffirmation de l'accès à l'eau potable
07:19 pour tous dans tous les territoires,
07:21 y compris ultramarins,
07:23 cette directive prévoit la révision des paramètres
07:26 à surveiller dans l'eau,
07:27 la mise en place de plans de gestion
07:28 de sécurité sanitaire des eaux,
07:30 la meilleure information sur la qualité de l'eau potable
07:33 pour tous les usagers.
07:35 A cela, et ce, dès la fin du mois,
07:37 s'ajoute un plan d'action pour une gestion résiliente
07:40 et concertée de l'eau qui sera concrétisée
07:42 par le ministère de la Santé et de la Prévention
07:44 en appui du ministère de la Transition écologique
07:46 et de la Cohésion des territoires.
07:49 2e risque majeur, la pollution de l'air,
07:51 qui contribue au développement de maladies
07:53 telles que le diabète et les maladies neurodégénératives
07:56 et qui affectent la santé de l'enfant
07:58 dès son plus jeune âge.
08:00 L'exposition aux particules fines
08:01 est responsable de 40 000 décès par an,
08:04 soit 7 % des décès annuels.
08:06 Le coût annuel de la pollution atmosphérique
08:09 peut atteindre 100 milliards d'euros,
08:11 dont 20 à 30 milliards liés aux dommages sanitaires
08:13 causés par les particules.
08:15 Ces constats forts et démontrés depuis plusieurs années
08:18 nous imposent d'agir.
08:20 Nous connaissons depuis les années 1960,
08:22 avec la mise en place d'Atmo France,
08:24 de mieux en mieux la qualité de notre air.
08:27 Différents plans nationaux et dispositifs territoriaux
08:30 ont cherché à lutter contre la pollution de l'air,
08:33 mais surtout à permettre à chacun de respirer un air
08:37 qui ne puisse pas, qui ne nuise pas à sa santé.
08:40 Sur la qualité de l'air,
08:41 les PNSE n'auront pas été précurseurs de l'action publique,
08:44 mais les auront permis une transversalité
08:47 entre les différents plans, et surtout,
08:49 un cadre de discussion entre l'environnement et la santé.
08:54 Aujourd'hui, la baisse des émissions françaises
08:56 est indéniable,
08:58 et nous tenons globalement nos objectifs nationaux.
09:01 Pour les particules fines, en valeur indiciaire,
09:03 une baisse de 60 sur une baisse de 100 est observée.
09:06 Pour autant, les concentrations de poids loin respiré
09:09 sont encore trop élevées,
09:10 et notamment dans les zones fortement urbanisées,
09:13 à proximité d'un trafic routier.
09:16 Nous devons continuer nos efforts.
09:18 Le renouvellement du parc automobile,
09:20 l'amélioration des performances,
09:21 des installations de combustion industrielle et résidentielle,
09:24 la mise en place des zones à faible émission
09:26 sont autant d'actions
09:28 que nous devons continuer à porter collectivement.
09:31 Bien que mon ministère ne soit pas le pilote de ces sujets,
09:34 ces enjeux environnementaux nous obligent tous,
09:36 et leur impact sur la santé sont tels que nous devons agir.
09:41 C'est à ce titre que j'avais répondu présente
09:43 à l'invitation de Christophe Béchut
09:45 pour le lancement du comité de suivi
09:46 de la mise en place des zones à faible émission,
09:49 les ZF,
09:50 en lien avec les 43 présidents
09:53 des plus grandes agglomérations françaises.
09:55 Autre dossier crucial,
09:57 celui de l'environnement intérieur
09:59 qui nous expose à de trop nombreuses pollutions.
10:02 Notre action jusqu'à présent
10:04 s'est portée avant tout sur les écoles,
10:06 mais nous devons aller plus loin.
10:08 Nous passons 80 % de notre temps dans des lieux clos,
10:11 qui sont le plus souvent mal aérés
10:13 ou qui enferment des substances nocives à notre santé.
10:16 En tant que député, j'avais soutenu le rôle
10:18 des conseillers médicaux en environnement intérieur.
10:22 Je suis convaincue de l'utilité de sensibiliser
10:24 et d'accompagner nos concitoyens
10:26 par des actions spécifiques de promotion et de prévention
10:30 pour l'amélioration de l'air intérieur.
10:33 Mesdames et messieurs, je profite de ce moment
10:35 pour saluer votre engagement collectif
10:37 à alerter, débattre, construire,
10:40 appliquer les politiques publiques de santé et environnement.
10:43 C'est grâce à vous et avec vous
10:45 que se sont créés tous les plans et actions
10:47 en faveur de la santé et de l'environnement.
10:49 Et c'est à vous, et c'est avec vous,
10:51 que nous construirons les priorités
10:53 et les méthodes d'action de demain.
10:55 Dès ma prise de fonction en tant que ministre,
10:57 j'ai été frappée par le nombre de rapports,
10:59 notes, articles que l'on pouvait porter à ma connaissance
11:03 sur la gouvernance et le pilotage de la santé et environnement.
11:07 Malgré un travail conséquent,
11:08 force est de constater la complexité
11:10 et le manque de lisibilité de l'organisation
11:13 de l'action de l'Etat et des collectivités en la matière.
11:17 La santé et l'environnement mobilise aujourd'hui 7 ministères,
11:20 une dizaine de directions centrales
11:22 et s'articule autour d'une trentaine de plans globaux
11:25 ou thématiques.
11:26 Cela confirme bien le travail conséquent produit,
11:29 mais également sa complexité.
11:32 Le PNSE avait pour objectif de permettre un cadre général
11:35 à cette politique et devait ainsi englober
11:38 tout les autres plans thématiques.
11:41 15 ans après, cela n'est pas vraiment le cas.
11:44 Mais finalement, l'objectif de vouloir à tout prix
11:47 regrouper l'ensemble de l'action autour d'un seul plan
11:49 est-il vraiment réalisable et pertinent ?
11:53 Je n'en suis pas convaincue,
11:54 tant les sujets sont variés et spécifiques.
11:57 En revanche, mieux coordonner l'action
12:00 au sein des directions centrales et des ministères,
12:02 mais aussi entre les collectivités territoriales et l'Etat,
12:06 doit être l'un des objectifs de notre action.
12:09 En juillet dernier, un rapport de l'IGAS
12:12 a réalisé la synthèse des dépenses en France
12:14 pour la santé et l'environnement,
12:15 sous-entendu de toutes les politiques
12:17 et liant un lien avec ce sujet.
12:19 Ce sont ainsi 6 milliards d'euros dépensés chaque année,
12:23 dont 4,4 milliards abondés par les collectivités territoriales.
12:28 Ce rapport révèle 2 choses.
12:30 Il affirme le rôle fondamental des collectivités territoriales
12:32 sur la santé et l'environnement,
12:34 et il montre la nécessité d'un réel pilotage financier du sujet,
12:38 permettant une coordination concrète de l'action.
12:42 Afin de pouvoir mener à bien ces réflexions
12:43 autour de la gouvernance, du pilotage, du financement,
12:46 mais aussi des priorités d'action décrites précédemment,
12:49 Christophe Béchut et moi-même avons décidé
12:52 de relancer le groupe santé-environnement
12:54 d'ici la fin de ce 1er trimestre 2023.
12:58 Autour d'une feuille de route renouvelée,
13:00 dont je vous ai dressé les 1ers axes.
13:03 Le GSE, avec une présidence renouvelée,
13:06 sera au rendez-vous de notre ambition.
13:09 Enfin, et pour conclure,
13:11 la prise de conscience collective de l'impact de nos modes de vie
13:14 sur notre environnement et sur notre santé
13:17 guide à présent la planification écologique et environnementale
13:20 et exige de nous la sobriété au quotidien.
13:25 Ca se voit, il fait un peu froid dans cette salle.
13:28 L'Etat doit ainsi assumer un rôle de synthèse
13:31 entre contraintes acceptables, incitations appropriées
13:34 et acceptabilité sociale.
13:37 La clé de réussite réside dans la relation de confiance
13:40 que nous créerons entre l'Etat,
13:42 les collectivités territoriales et les citoyens.
13:45 Collectivement, nous devrons assumer de faire valoir
13:48 dans les arbitrages politiques
13:50 et dans la mise en place des politiques publiques
13:52 une approche globale et transversale
13:55 environnement, air, climat, énergie, santé,
13:59 et ainsi faire le choix entre le coût des impacts subis
14:03 ou le coût de la dépollution choisi.
14:05 Je vous souhaite à tous d'excellents débats
14:08 autour de ces enjeux à l'occasion de ce séminaire.
14:11 Et je remercie une nouvelle fois
14:12 le Haut conseil de la santé publique
14:14 pour l'organisation de cette journée
14:16 et sa contribution essentielle
14:18 à l'expertise en santé environnementale.
14:21 Je vous remercie et bons travaux.

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