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Transcription
00:00 La fille cauchemar, c'était une fille grosse, trop grande,
00:02 qui est trop noire, qui prend trop de place,
00:05 une fille qui est trop.
00:06 Pour moi, c'était ça, la fille cauchemar.
00:07 En fait, la fille cauchemar, c'est la fille dont on a peur.
00:11 J'ai la volonté que la fille cauchemar,
00:19 ce soit la fille cauchemar des gens qui veulent asseoir leur domination
00:23 en imposant des codes de beauté extrêmement restrictifs.
00:26 Et cette fille cauchemar-là, je suis ravie de l'incarner.
00:30 En fait, être gros, c'est quelque chose de mauvais,
00:33 c'est quelque chose d'immoral.
00:34 Et comme c'est quelque chose d'immoral, comme c'est quelque chose d'anormal,
00:38 toutes les violences, toutes les humiliations,
00:44 la honte est légitime.
00:47 Quand je dis qu'il y a une origine raciste,
00:50 c'est parce que je m'inspire des travaux
00:52 de la chercheuse et sociologue Sabrina Strings,
00:54 sociologue nord-américaine qui a étudié la question de la grossophobie
00:58 et qui a étudié comment la grossophobie émerge
01:02 au même moment que se construisent les empires coloniaux.
01:07 Il faut asseoir ce que c'est l'humanité,
01:09 il faut exclure des corps de l'humanité
01:12 puisqu'il faut bien justifier qu'ils ne sont pas humains
01:14 puisqu'ils sont des biens meubles.
01:16 Et la grossophobie fait aussi partie de cette exclusion,
01:20 en tout cas, la grossophobie portée sur les corps de femmes noires.
01:23 Les femmes noires seraient trop volumineuses,
01:27 cela démontrerait leur voracité,
01:32 leur fainéantise,
01:34 leur appétit sexuel démesuré.
01:37 Encore une fois, les empires coloniaux
01:40 qui s'impriment comme ça,
01:42 qui nous lèguent encore des représentations et des imaginaires
01:46 qui sont extrêmement oppressifs,
01:47 pas seulement pour les femmes noires grosses,
01:50 pas seulement pour les femmes blanches grosses,
01:52 puisqu'elles sont aussi victimes de grossophobie, évidemment,
01:54 et de sexisme,
01:55 mais pour nous tous, en fait, nous toutes.
01:57 Parce que je suis une femme noire,
01:59 la question, évidemment, des codes de beauté
02:03 et du rapport au corps,
02:04 elle s'inscrit de manière tellement différente.
02:07 Ce qui est accepté, c'est les cheveux très lisses.
02:09 Aujourd'hui, j'ai les cheveux lisses,
02:11 mais c'est un certain type de nez,
02:13 c'est un certain type de peau.
02:15 Et ça, il y a plein de militantes,
02:18 militants et militantes noires
02:20 qui ont théorisé ces questions
02:23 et qui les ont déjà déconstruites un petit peu.
02:25 Quand j'ai entendu parler de body positive,
02:27 c'était au même moment que j'ai entendu parler du mouvement nappie,
02:30 le mouvement du retour aux cheveux naturels.
02:33 Moi, je suis en chemin, comme vous pouvez le constater.
02:35 Je suis en chemin de tout. Tout est perfectible.
02:37 Il y a des industries qui sont construites sur le fait qu'on sente mal.
02:41 Il faut bien s'en rendre compte.
02:42 Donc il y a des gens qui en tirent des fortunes.
02:45 Il y a de la richesse qui nous est spoliée
02:48 en plus de notre estime de nous.
02:49 On passe beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps
02:52 à essayer de ressembler à cette norme-là.
02:55 On passe pas notre temps à réfléchir
02:57 à comment la société, elle est organisée.
02:59 Est-ce que c'est normal qu'on soit dans cette situation ?
03:02 Est-ce que c'est normal qu'il y ait des gens qui soient autant discriminés ?
03:05 Quand on repense les questions,
03:07 que ce soit de grossophobie, que ce soit de racisme,
03:10 que ce soit de sexisme, de colorisme,
03:12 c'est pas normal de se détester autant.
03:14 Et en se détestant autant, rester à notre place,
03:17 comme dirait Rocane, ne reste pas à ta place.
03:19 On a le droit d'avoir un beau monde.
03:21 On a tous et toutes le droit à la douceur et à la joie.
03:25 Et dire ça, c'est révolutionner le monde.
03:27 Certaines d'entre nous auront toujours peur de la marge.
03:31 C'est normal.
03:33 C'est pas pour rien que les gens rentrent dans la norme.
03:36 Parce que ça a l'air plus sécurisant.
03:39 Mais c'est là qu'elle est, la vie à la marge.
03:41 C'est là qu'on vit.
03:43 Sous-titrage Société Radio-Canada
03:45 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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