François Braun, ministre de la Santé, était l'invité du Grand entretien de la matinale de France Inter, ce mercredi, à l'occasion de la publication des conclusions du Conseil national de la refondation sur la santé.
Retrouvez tous les entretiens de 8h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien
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00:00 Bonjour François Braune, ministre de la santé et de la prévention, merci d'être avec nous ce matin.
00:05 J'attends les questions des auditeurs et des auditrices de France Inter.
00:08 Pour vous, 0145 24 7000 ou via l'application France Inter.
00:13 François Braune, vous dévoilez aujourd'hui les conclusions du CNR Santé,
00:16 CNR pour Conseil National de la Refondation.
00:19 Vous avez organisé 250 réunions dans tout le pays, 10 000 personnes y ont participé, dites-vous.
00:25 On va venir dans une minute à ce que vous voulez changer.
00:27 D'abord un mot du moment, de la période.
00:29 Est-ce que vous voulez montrer avec ces annonces que malgré les casserolades,
00:33 malgré l'opposition des Français à la réforme des retraites, le gouvernement peut encore agir ?
00:38 Bien sûr, le gouvernement peut et le gouvernement agit, continue à agir.
00:44 Tout en comprenant bien entendu qu'il y a une partie de la population qui se plaint de la situation,
00:51 qui souffre en ce qui concerne le domaine de la santé, de l'accès aux soins, j'en prends toute ma part.
00:57 Je comprends ces difficultés de nos concitoyens,
01:00 mais c'est justement parce qu'il y a des difficultés que nous ne devons pas nous arrêter
01:03 et que je continue à tracer mon chemin de réforme, de refondation de notre système de santé.
01:08 Votre prédécesseur Olivier Véran avait réuni, on s'en souvient, ça n'est pas si vieux, c'était en 2020,
01:14 le Ségur de la santé, consultation des acteurs du système de santé pour prendre des décisions.
01:18 Faut croire que ça n'a pas marché ou pas suffi, il fallait à nouveau revoir, consulter tout le monde ?
01:23 Ce CNR Santé voulu par le président de la République, c'est quoi ?
01:26 C'est une nouvelle méthode de travail avec un objectif, simplifier la vie de nos concitoyens,
01:31 simplifier la vie des Français.
01:33 Le Ségur de la santé était quelque chose de très centré sur l'hôpital, si on s'en souvient,
01:37 avec des moyens historiques qui ont été mis, que ce soit sur les rémunérations des soignants,
01:42 que ce soit aussi sur la reconstruction, la rénovation des hôpitaux.
01:47 Mais là, cette nouvelle méthode, elle fait partager les difficultés et partager les solutions
01:55 par les élus, les soignants, nos concitoyens, à l'échelle de chaque territoire.
01:59 C'est ça qui est nouveau, c'est cette nouvelle technique.
02:01 Et cette technique, elle fonctionne, elle marche.
02:04 Il y a plein d'innovations, plus de 100 projets qui sont en train d'être finalisés.
02:08 On avance, on avance pour mieux répondre, pour lutter contre les inégalités d'accès à la santé.
02:13 Alors François Braune, on avance, on rentre dans le concret.
02:16 Au cœur des préoccupations des Français, il y a les déserts médicaux.
02:19 30% de la population vit dans un désert médical, ça c'est un rapport sénatorial de mars 2022.
02:25 Vous voulez alléger la charge de travail des médecins pour qu'ils puissent prendre plus de patients.
02:31 Quelles sont les tâches qu'ils pourraient ne plus avoir à effectuer à l'avenir ?
02:34 Je crois qu'il y a une chose qui est importante à dire tout de suite aux Français,
02:38 c'est déjà de dire la vérité.
02:39 Et la vérité, c'est qu'on n'aura pas plus de médecins avant 10 ans.
02:43 Nous en formons plus, certes, mais toujours pas suffisamment, même si nous accélérons d'année en année.
02:49 Donc il faut bien que les médecins qui sont sur le terrain, déjà,
02:52 continuent à travailler pour les jeunes retraités.
02:55 J'ai facilité le travail de ces jeunes retraités et ensuite,
02:59 il y ait plus de temps disponible pour soigner.
03:02 Donc il faut passer cette période de 10 ans là ?
03:04 Oui, passer cette période de 10 ans et même changer la façon de travailler.
03:07 C'est ça qui est important.
03:08 Je ne demande pas aux médecins de travailler plus, je leur demande de travailler autrement.
03:12 Travailler autrement, c'est quoi ?
03:13 C'est déjà ne plus faire toutes ces tâches bureaucratiques inutiles,
03:17 des certificats qui ne servent à rien, des échanges...
03:20 Lesquels ? On a beaucoup parlé des certificats médicaux en effet.
03:23 Très bon exemple.
03:24 Quand vous avez un enfant à la crèche, il est malade,
03:28 vous demandez à votre médecin un certificat médical pour ne pas payer les jours de crèche.
03:31 C'est tout à fait normal.
03:32 Mais beaucoup trop de crèches redemandent un certificat pour dire que l'enfant est guéri,
03:36 pour qu'il puisse revenir à la crèche.
03:37 C'est totalement absurde.
03:38 Donc ça, c'est terminé ?
03:40 Les crèches ne pourront plus demander ou n'auront plus l'obligation de demander un certificat médical aux parents.
03:44 Elles ne l'ont jamais eu.
03:45 Simplement, ce que je dis suite à une mission que j'ai demandée à un médecin généraliste,
03:49 c'est que ces certificats ne doivent plus être faits.
03:52 Les médecins pourront dire non, les médecins diront non.
03:54 Et les crèches seront tenues d'accueillir les enfants qui reviendront de maladie sans certificat ?
03:58 Il y a une dérive sur des certificats.
04:00 On demande un certificat à un médecin pour tout et n'importe quoi maintenant.
04:03 Autre sujet, les certificats de décès.
04:05 Est-ce que les infirmières vont pouvoir les signer ?
04:07 On sait que dans certains territoires, c'est compliqué d'avoir un certificat de décès.
04:11 Et quand ? Si ça se passe, quand ?
04:13 Vous voyez, typiquement, c'est un des résultats des réunions du CNR Santé.
04:18 Ça a été demandé la première fois sur l'île de la Réunion.
04:20 C'est eux qui ont soulevé le problème.
04:22 Et puis, on s'est rendu compte que dans plein de territoires, il y avait cette difficulté.
04:26 Cette difficulté qui est dramatique pour les familles quand vous avez une personne décédée à domicile
04:30 et que vous n'arrivez pas à avoir un certificat de décès,
04:32 parfois au bout de plusieurs heures, voire dizaines d'heures.
04:35 Eh bien, nous lançons, je démarre, une expérimentation dans les prochaines semaines
04:40 sur quatre régions françaises, dont bien sûr l'île de la Réunion,
04:45 qui va permettre, après une formation, puisqu'il faut une formation complémentaire pour ces infirmières,
04:50 de signer des certificats de décès.
04:52 On va gagner du temps.
04:53 Les familles vont être, là aussi, libérées de cette charge.
04:56 On simplifie.
04:57 Les médecins n'ont pas l'air, tous les médecins n'ont pas l'air très convaincus
05:00 par le fait que les infirmières soient habilitées.
05:03 Qu'est-ce que c'est cette formation ?
05:04 C'est pour les rassurer, les médecins ?
05:06 Non, c'est une formation aussi pour bien expliquer aux infirmières
05:10 comment on fait un diagnostic de décès.
05:12 Vous savez, ça a l'air tout bête de dire que quelqu'un est mort, que quelqu'un est décédé.
05:16 De par mon métier, d'avant, oserais-je dire, c'est pas toujours si simple.
05:21 Anesthésiste réanimateur, oui.
05:23 Donc, il faut bien préciser les éléments de diagnostic d'une mort.
05:29 Quand c'est un patient qu'un infirmier suit de façon chronique, qui a une maladie très grave,
05:33 on comprend bien qu'il va facilement pouvoir dire que cette personne est décédée.
05:37 Quand c'est une personne qu'il ne connaît pas, c'est un petit peu plus délicat.
05:40 Appel aux infirmiers et infirmières qui en ce moment montent des collectifs un peu partout en France,
05:44 qui demandent une meilleure rémunération des actes médicaux et des frais kilométriques
05:47 qui n'ont pas été réévalués depuis plus de dix ans, est-ce que ça va changer ?
05:51 Ça change, ça change déjà.
05:53 Les infirmiers, les infirmières sont un des éléments clés de notre système de santé, bien entendu.
05:58 Et tous les Français ont leur infirmier ou leur infirmière, quasiment.
06:01 Alors, ça change dans trois axes principaux par rapport à ces infirmiers et ces infirmières.
06:05 Le premier, c'est leur formation.
06:08 Je rénove à partir de septembre les trois ans de formation des infirmiers
06:12 pour que ça réponde plus aux besoins,
06:13 qu'on n'ait pas ce décalage entre la formation et les besoins et le métier réel.
06:19 Nous modifions aussi le décret d'acte des infirmiers.
06:22 Ça peut sembler anodin, mais aujourd'hui, les infirmiers ont une liste d'actes qu'ils ont le droit de faire.
06:26 Moi, je veux qu'ils aient des missions.
06:28 On leur confie des missions et au sein de ces missions, ils feront les actes nécessaires.
06:32 Ça, c'est la formation.
06:34 Leur exercice professionnel, il est complètement modifié.
06:37 Un exercice pluriprofessionnel en coordination avec les médecins,
06:41 des accès directs possibles pour la prise en charge des plaies chroniques.
06:44 On modifie leur exercice professionnel pour le rendre plus attractif, plus responsabilisant.
06:48 Et enfin, la rémunération.
06:50 On a changé le mode de rémunération avec ce bilan de soins infirmiers.
06:54 Je double le financement.
06:56 Plus de 200 millions d'euros sont mis sur la table entre 2020 et 2024.
07:01 Et les frais kilométriques dont vous parlez, pour être tout à fait précis,
07:04 eh bien, il y a la possibilité de les aménager territoire par territoire
07:07 en fonction des difficultés.
07:08 Un dernier mot sur les certificats.
07:10 Est-ce que vous allez changer la règle concernant les certificats sportifs ?
07:13 Alors, les certificats sportifs, là aussi, et je travaille avec Amélie Oudéa Castera,
07:18 la ministre des Sports, pour arrêter de demander des certificats pour tout.
07:22 Lorsqu'on fait de la compétition, c'est tout à fait logique.
07:25 Lorsqu'on fait du sport plaisir, qu'on a 15 ans, qu'on n'a pas de problèmes de santé,
07:29 je crois qu'il faut être la raisonnable.
07:31 Je donne un exemple.
07:32 Donc, ça continue pour la compétition, ça s'arrête quand il n'y a pas de compétition ?
07:35 Oui, je pense que c'est beaucoup plus raisonnable.
07:37 Il faut un certificat médical aujourd'hui pour faire de la pétanque.
07:41 Alors, ça peut sembler absurde, donc j'ai cherché pourquoi.
07:45 Pourquoi ? C'est parce que dans la pétanque, il y a la boule lyonnaise, et la boule lyonnaise,
07:49 il faut prendre quelques pas d'élan.
07:51 Donc voilà, revenons un peu dans quelque chose de raisonnable, de simple.
07:55 Simplifions la vie des médecins.
07:56 Et ça, ce sera pour la rentrée de septembre, François Braune.
07:59 François Braune, une autre piste, puisque vous voulez libérer le temps des médecins.
08:02 Elle vient de votre confrère, Gabriel Attal, le ministre des Comptes publics.
08:06 Il dit qu'il y a trop de consultations perdues, les gens ne viennent pas.
08:10 Alors, on estime qu'il y en aurait 27 millions de consultations perdues chaque année.
08:14 Le ministre des Comptes publics dit qu'on pourrait faire une taxe à ceux qui posent
08:18 des lapins.
08:19 Si vous ne vous présentez pas, le remboursement du rendez-vous suivant serait minoré d'une
08:24 somme qui pourrait être 10 euros.
08:25 Il y aurait 5 euros qui iraient aux professionnels de santé et 5 euros à l'assurance maladie.
08:30 Est-ce que la taxe lapin, François Braune, ça vous paraît, vous y êtes favorable ?
08:33 Je dis sur ce sujet, attention.
08:36 Attention de ne pas entraîner un renoncement aux soins.
08:40 Ça peut sembler rien, 5 euros, mais pour bon nombre de nos co-citoyens, c'est important.
08:47 Alors, de quoi parle-t-on ? Je crois que c'est ça qu'il faut remettre un petit peu sur
08:51 la table.
08:52 On parle de 27 millions.
08:53 27 millions est un chiffre ancien qui part sur une évaluation, sur quelques départements
08:58 d'Alsace.
08:59 Vous pensez que c'est combien, vous ?
09:00 C'est 3,5% des consultations.
09:02 Ça nous aide pas.
09:04 9 millions.
09:05 Ce ne sont pas moi qui le dis.
09:06 Ce sont les plateformes de prise de rendez-vous.
09:08 Vous savez, c'est Gaïa, Keldogg, Doctolib.
09:11 Eux ont des chiffres très précis.
09:12 Les chiffres qu'ils me donnent, c'est 1, c'est 7%.
09:15 Donc c'est beaucoup.
09:16 Chez les médecins qui n'ont pas ce type de plateforme, c'est 3,5% chez ceux qui ont
09:20 ces plateformes.
09:21 Pourquoi ? Parce que la plupart du temps, on ne fait pas exprès de ne pas venir à
09:24 un rendez-vous médical.
09:25 On peut oublier, ça existe.
09:27 C'est pour ça que ces plateformes vous renvoient un SMS.
09:30 Un jour avant, quelques heures avant.
09:32 Donc il faut passer davantage par les plateformes à l'avenir ?
09:34 Je dis simplement qu'avec les plateformes, c'est 3,5%.
09:37 9 millions de rendez-vous, c'est encore trop.
09:39 C'est encore trop.
09:40 C'est pour ça que je travaille avec elles.
09:41 Pour qu'on arrive à diminuer encore ce chiffre.
09:43 Mais vous ne vous étiez pas parlé avec Gabriel Attal avant qu'il fasse cette proposition-là.
09:47 Vous ne vous semblez pas d'accord.
09:48 Non, mais c'est une proposition qui est sur la table depuis pas mal de temps.
09:51 Moi, mon rôle de médecin, mon rôle d'ancien médecin, mon rôle de ministre de la santé
09:57 et de la prévention, c'est de dire "attention à ce que le remède ne soit pas pire que le
10:02 mal".
10:03 C'est-à-dire qu'on n'entraîne pas du renoncement aux soins qui seraient dramatiques.
10:06 La question des malades chroniques, François Braun, 700 000 dans notre pays, n'ont pas
10:10 de médecin traitant.
10:11 Il y a un mois, le gouvernement a promis à ces malades qu'on leur proposerait une solution
10:16 avant la fin de l'année.
10:18 Les caisses d'assurance maladie devaient contacter avant l'été chaque patient en
10:21 affection longue durée sans médecin traitant.
10:24 Où en est-on ?
10:25 C'est un engagement du président de la République.
10:28 J'ai confié cette mission à la Sécurité sociale.
10:31 Tous les patients chroniques, on parle d'affection longue durée, mais aussi des patients qui
10:37 peuvent être en situation de handicap, ont été contactés par courrier, par courriel,
10:42 par SMS, par les caisses d'assurance maladie, pour leur dire déjà "est-ce que vous êtes
10:46 d'accord pour qu'on vous cherche un médecin traitant ?"
10:47 Et ils vous répondent ?
10:48 S'ils ne répondent pas, c'est qu'ils sont d'accord.
10:51 C'est un peu le principe, si vous voulez.
10:52 C'est la même chose qu'on a fait pour ce carnet de santé numérique, MonEspaceSanté.
10:56 Il y a très peu de refus.
10:58 Et ensuite, les gens sont contactés un par un.
11:00 On leur demande déjà s'ils voient un médecin régulièrement.
11:03 On leur demande s'ils ont un médecin spécialiste qui les suit régulièrement.
11:05 Donc ça sera la deuxième étape ?
11:06 C'est déjà en route.
11:07 C'est déjà en route.
11:08 Je peux vous dire par exemple qu'en Seine-Saint-Denis, où j'étais la semaine dernière, 25% des
11:13 patients concernés, on leur a déjà trouvé un médecin traitant.
11:15 Donc c'est en route.
11:18 Ça avance.
11:19 Ça fonctionne.
11:20 Ça, c'est l'esprit du CNR Santé.
11:22 François Braun, en vous écoutant, on se dit que vous n'êtes décidément pas pour
11:29 réguler l'installation des médecins sur les territoires.
11:31 Pourtant plusieurs députés, certains de la majorité, vous l'ont demandé en décembre
11:34 dernier, il y a toujours des médecins qui vont s'installer en Côte d'Azur où il y
11:38 a déjà beaucoup trop de médecins.
11:39 Donc ça, finalement, pas de régulation.
11:42 On ne les contraindra pas.
11:43 Pourquoi est-ce que vous êtes contre ?
11:44 Je ne suis pas contre pour des raisons de protection d'une profession ou d'une autre.
11:49 Je suis contre parce que ça ne marche pas.
11:52 Et ça a même un effet contre-productif.
11:54 Je vous donne un exemple.
11:56 Moi, ce qui m'importe, c'est que les gens soient en bonne santé.
11:58 Ça semble logique.
12:00 C'est mon devoir.
12:01 Pour qu'ils soient en bonne santé, il faut qu'ils puissent avoir accès à un médecin
12:05 en fonction bien sûr de leur état de santé, d'où ils sont, etc.
12:08 Vous dites qu'on a trop de médecins sur la Côte d'Azur.
12:10 Je ne sais pas ce que ça veut dire, trop de médecins.
12:12 On fait une moyenne nationale, on dit que ceux qui sont au-dessus c'est trop, ceux
12:15 qui sont en dessous, c'est pas assez.
12:16 Je ne sais pas.
12:17 Je pense que globalement, nous manquons de médecins partout.
12:19 Ce qui m'intéresse par exemple, c'est de voir la durée de vie.
12:23 A quelle heure ? Pardon.
12:26 Quel est l'âge de durée de vie, par exemple dans un département qui est identifié comme
12:31 un désert médical et par exemple sur la Côte d'Azur ?
12:33 Eh bien, on vit moins longtemps sur la Côte d'Azur que dans des départements du centre
12:38 de la France.
12:39 Pourtant, on a moins de médecins.
12:40 Alors, je fais ce raccourci.
12:42 Ce n'est pas dire « moins on voit le médecin », mais on se porte, comme dit la sagesse
12:45 populaire.
12:46 C'est simplement pour vous dire que l'indicateur, c'est-à-dire l'élément qu'on va prendre,
12:50 il est déterminant et nous n'avons pas d'élément précis.
12:52 En plus, vouloir imposer l'installation des médecins dans un désert médical, il
12:56 y en a partout des déserts médicaux.
12:58 Donc, on va choisir comment ? Qui va choisir ? Selon quels critères ? La première chose
13:03 que l'on va faire avec ça, c'est réussir à dégoûter les jeunes de vouloir faire
13:08 de la médecine générale et de la médecine libérale.
13:10 C'est ça l'effet contre-productif.
13:11 Alors, les jeunes justement, parlons-en François Braune, les internes, ces médecins qui sont
13:16 en cours de formation, ils sont 30 000 en France, qui soignent, diagnostiquent, opèrent
13:21 dans nos hôpitaux.
13:22 Ils n'en peuvent plus, une partie d'entre eux était en grève vendredi dernier, les
13:26 nuits blanches qui s'enchaînent, les semaines à rallonge jusqu'à 100 heures, les burn-out,
13:31 beaucoup tiennent, dit-il, à coup d'antidresseurs.
13:34 Vous avez dit, François Braune, que leurs revendications étaient justes.
13:38 Qu'allez-vous faire ?
13:39 Alors, j'ai dit effectivement qu'il n'est pas normal qu'on ne respecte pas le cycle
13:44 de travail, le temps de travail pour ces médecins qui sont des médecins en formation.
13:48 C'est essentiel, c'est essentiel parce qu'ils doivent être bien sûr dans de bonnes
13:52 conditions pour apprendre et pour prendre en charge les patients.
13:55 C'est déjà quelque chose qui est demandé, qui est imposé, c'est les règles du travail,
14:03 aux établissements de santé.
14:04 Et j'ai dit très clairement que je ferais la chasse à ces établissements qui ne respectent
14:08 pas les règles.
14:09 Vous avez commencé ?
14:10 Oui, j'ai commencé, j'ai demandé qu'on me fasse remonter les informations.
14:14 Vous savez, ce n'est pas des informations, quand je demande à un établissement, vous
14:17 faites travailler les internes correctement, ils me disent tous oui, bien entendu.
14:20 Donc c'est pour ça que j'ai demandé aux internes, je leur ai dit faites-moi remonter
14:23 les situations, les cas.
14:24 Ça concerne principalement les internes de chirurgie, par exemple, il faut être précis,
14:29 qui peuvent opérer tard le soir, à qui on demande d'être de nouveau dans le service
14:31 le lendemain matin, de nouveau tenir les...
14:33 Vous voulez dire qu'ils ont d'autres solutions que celles...
14:36 C'est-à-dire que la charge de travail est mal répartie, en fait, c'est ça ?
14:38 La charge de travail est mal répartie, bien entendu.
14:40 Certains médecins ne travaillent pas assez et font travailler les internes à leur place ?
14:43 Non, il ne faut pas dire les choses comme ça.
14:45 Je veux dire que certains médecins s'appuient beaucoup, beaucoup trop, sur des internes
14:49 qui, je le rappelle, sont des médecins en formation, à qui on doit donner des responsabilités,
14:53 bien entendu, mais des responsabilités qui sont raisonnables par rapport à leur niveau
14:58 de formation.
14:59 Donc ce n'est pas un problème de manque de médecins global, c'est un problème de répartition
15:01 de la charge de travail, si je vous comprends bien ?
15:02 C'est un problème malheureusement ancien de fonctionnement de nos hôpitaux, de formation,
15:10 où les internes étaient, il y a plusieurs dizaines d'années, souvent identifiés comme
15:14 taillables et corvéables à Merci parce qu'entre guillemets, ils étaient là pour apprendre
15:18 leur métier.
15:19 Ce n'est plus vrai, ce n'est plus le cas, on n'apprend pas son métier en travaillant
15:22 80-100 heures par semaine.
15:23 Concernant les services d'urgence, Emmanuel Macron a redit dans son allocution, il y a
15:28 deux semaines, qu'il fallait désengorger les services d'urgence.
15:31 Il a même fixé une date limite, c'est d'ici la fin de l'année prochaine.
15:34 Il faut des résultats concrets à court terme.
15:37 Vous qui êtes un ancien urgentiste, un ancien président du syndicat Samu Urgence de France,
15:41 est-ce que vous croyez que c'est possible ?
15:43 Non seulement je le crois, mais j'en suis absolument certain.
15:48 Vous savez, quand je suis arrivé dans ce ministère, c'est peut-être parce que je
15:53 suis issu, comme on dit, de la société civile.
15:55 On a commencé à me dire "ah non, ça c'est pas possible, ça on n'y arrivera pas".
15:59 Je parle de la crise de l'été par exemple, la crise du monkeypox qu'on a un petit peu
16:04 oubliée, notre triple épidémie.
16:06 La variole.
16:07 Voilà, donc moi plus on me dit que c'est impossible, plus je suis certain qu'on va
16:11 y arriver.
16:12 Oui mais désengorger les urgences, François Braune, vous comprenez bien que pour les gens
16:15 qui ont passé des nuits là sur des fauteuils ou dans les couloirs, ça fait des années
16:19 qu'on en parle.
16:20 Oui, le diagnostic est connu, le traitement aussi.
16:23 Alors le traitement c'est quoi pour désengorger les urgences ? D'abord c'est travailler en
16:27 amont des urgences, avant que les gens aillent aux urgences.
16:29 Et ça c'est le service d'accès aux soins.
16:31 Ce service d'accès aux soins, je le généralise sur tout le territoire avant la fin de l'année.
16:35 Ça veut dire on appelle le 15, avant la fin de l'année tout le monde appelle le 15 et
16:39 qu'est-ce qu'il se passe ?
16:40 Ça veut dire votre médecin traitant n'est pas disponible, vous avez un problème que
16:43 vous considérez urgent, vous appelez le 15.
16:45 Au 15, vous avez ce que l'on appelle la personne qui va décrocher en premier, c'est un assistant
16:49 de régulation médicale.
16:50 C'est un métier extraordinaire et je vous annonce qu'on va lancer une grande campagne
16:55 de recrutement pour ces assistants de régulation médicale à partir de ce mois.
16:59 Parce qu'il n'y en a pas assez.
17:00 Il n'y en a pas assez.
17:01 Donc ils évaluent en 30 secondes la situation et ils vous passent un médecin.
17:05 C'est grave, ils vous passent un médecin urgentiste, c'est moins grave, ils vous passent
17:09 un médecin généraliste, voire même maintenant certains ont mis la possibilité d'avoir
17:12 accès à un gériatre, un pédiatre, un psychiatre.
17:15 Mais est-ce que, alors là ce sont des médecins de ville dont on parle, est-ce que les médecins
17:18 de ville ils adhèrent ? Parce que vous avez tenté déjà des expérimentations de ce
17:22 type, ils sont assez nombreux à participer au système ?
17:26 Les médecins de ville adhèrent parce qu'ils ont bien compris que c'était une solution
17:31 aussi pour faciliter leur travail au quotidien.
17:33 Et puis le fameux règlement arbitral, c'est-à-dire ces décisions qui ont été prises après
17:39 l'échec de la première partie de discussion de la Convention avec la Sécurité Sociale
17:42 et les médecins, réintègrent des mesures que j'avais prises cet été en arrivant,
17:46 qui est de rémunérer mieux les médecins qui acceptent de faire cette régulation médicale
17:51 et les médecins qui acceptent de réaliser les actes sur la demande de cette régulation
17:55 médicale.
17:56 Cela fonctionne, cela diminue la fréquentation des services d'urgence, cela entraîne une
18:00 meilleure prise en charge des patients.
18:02 Vous parlez de la médecine de ville, François Braune, beaucoup d'appels de médecins au
18:06 01 45 24 7000, c'est le cas notamment de Yannick qui nous appelle d'Alsace.
18:11 Bonjour Yannick.
18:12 Oui bonjour Yannick Freiman, je suis médecin généraliste dans le Barin et j'avais une
18:18 question, plutôt deux questions, une par rapport au CNR Santé.
18:23 En fait on a été un petit peu surpris de ne pas avoir été convié à ces CNR.
18:30 En fait en discutant avec mes collègues du secteur, aucun médecin généraliste n'est
18:35 venu à ces CNR sauf une personne qui avait été conviée en tant que président d'un
18:41 syndicat.
18:42 Donc on a été un peu surpris que tous les acteurs de santé de terrain qui sont les
18:47 médecins généralistes n'aient pas été conviés.
18:48 Et juste une deuxième question par rapport aux certificats dont vous parliez, ces certificats
18:52 médicaux qui sont entre guillemets inutiles pour nous.
18:55 Moi j'ai fait des démarches pour contacter les mairies, les communautés de communes,
19:02 la communauté européenne d'Alsace, même la députée pour qu'on arrête de nous demander
19:07 ces certificats.
19:08 Mais le problème c'est que nos instances nous rétorquent que ces certificats sont
19:13 entre guillemets obligatoires et qu'on est les derniers garde-fous et que si on ne le
19:18 fait pas c'est la porte ouverte à tous les avis.
19:22 Merci à vous Yannick pour ces deux questions.
19:24 François Braune vous répond.
19:26 Oui bonjour Yannick.
19:27 Écoutez c'est bien dommage que vous n'ayez pas pu rejoindre les CNR territoriaux parce
19:32 qu'effectivement a été fait appel à tous les professionnels à l'échelle d'un secteur.
19:37 Alors probablement que l'information a été mal diffusée dans votre secteur, je ne sais
19:41 pas.
19:42 En tout cas ne vous inquiétez pas, nous avons la deuxième phase des CNR.
19:46 Sur les certificats, ce que je veux vous dire c'est que ces certificats ne sont pas obligatoires.
19:50 À partir du moment où ils ne sont pas obligatoires, vous ne les faites pas.
19:54 Là je suis en train de finaliser un courrier avec tous les ministres concernés en interministériel
20:00 à toutes les différentes communautés.
20:02 Donc la loi ne va pas changer, ce sont des consignes que vous envoyez c'est ça ?
20:05 La loi ne change pas.
20:07 Simplement des consignes de dire la loi c'est ça, voilà quelle est la loi et c'est des
20:11 informations qu'on donne aux professionnels, à toutes les personnes concernées, aux patients
20:15 également.
20:16 Et aux clubs sportifs aussi qui nous les demanderont peut-être la rentrée.
20:18 Aux clubs sportifs, aux prêches, aux collectivités.
20:20 Une question sur la loi Ritz-Rist.
20:22 Je reviens à l'hôpital François Braun.
20:24 C'est cette loi qui encadre la rémunération des médecins intérimaires à 1390 euros bruts
20:29 et pas plus pour une garde de 24 heures.
20:31 Cela aurait conduit des dizaines de petits hôpitaux à fermer partiellement ou totalement
20:38 certains de leurs services.
20:39 Il y a débat sur le chiffre.
20:40 Combien de services selon vos chiffres ministères sont fermés aujourd'hui à cause de cette
20:46 loi ?
20:47 Vous voyez la mise en application de cette loi.
20:50 C'est une loi qui date de 2016, que personne n'avait mise en application, qui est une
20:54 loi qui est essentielle pour sauver aussi notre hôpital public.
20:57 C'est d'abord ça qu'il faut dire.
20:58 Parce que ces dérives de l'intérim qui poussent des médecins à être payés 3000, 4000 euros
21:03 pour 24 heures de travail, cette dérive est en train de tuer notre hôpital public.
21:07 Mais maintenant vous avez des professeurs comme celui du patron des urgences du CHU de
21:10 Rennes qui disent que c'est désorganisé, l'impact a été atténué en avril, mais
21:14 là ça va se dégrader en mai et en juin et la presse quotidienne régionale est pleine
21:18 de ces exemples de services qui ferment sporadiquement même.
21:22 Là aussi on me disait que ce n'est pas possible, que vous n'y arriverez pas.
21:25 Et bien un, on y arrive.
21:26 Deux, il y a effectivement des fragilités, mais qui existaient avant la mise en application
21:31 de cette loi Rist.
21:32 Ça ne désorganise pas plus ?
21:33 Ça perturbe, ça identifie des fragilités, on parle des urgences.
21:38 Moi j'ai aussi une attention très particulière sur les maternités.
21:42 On voit bien qu'il y a des difficultés pour certaines maternités parce que ce sont les
21:46 trois professions les plus difficiles, l'anesthésiste, le gynéco-obstétricien et puis le pédiatre,
21:52 qui sont en difficulté dans certaines maternités.
21:55 Donc il faut que nous revoyons nos modèles et je peux vous annoncer que je lance là
21:58 une mission parlementaire et avec des professionnels pour réfléchir à ces nouveaux modèles
22:04 de maternité territoriale.
22:05 Vous n'avez pas donné de chiffres ?
22:06 Aucune maternité ne fermera dans les prochains mois François Braun ?
22:10 Ce n'est pas une volonté de fermer les maternités, ni celle du gouvernement ni la
22:13 mienne.
22:14 Simplement ma responsabilité comme ministre c'est que toutes les femmes puissent accoucher
22:19 dans des conditions de sécurité et de qualité satisfaisantes.
22:22 Donc vous n'excluez pas des fermetures de maternité ce matin ?
22:25 Comme pour les services, puisque vous me réclamez un chiffre sur les différents services.
22:29 Je n'ai pas de chiffre parce que ça change tous les jours.
22:31 Donc on suit ça d'extrême presse.
22:32 Vous avez des indicateurs ?
22:33 On a des indicateurs, on a quelques indicateurs, mais ça change en permanence.
22:38 Il y a pour l'instant deux maternités, par exemple si je prends l'exemple des maternités,
22:42 qui sont en plus grande difficulté.
22:44 La maternité de Sarla, la maternité de Sedan, elles étaient déjà en difficulté avant.
22:48 Mais partout où il y a ces difficultés, avec les ARS, nous mettons en place des solutions
22:52 alternatives pour ne pas rompre les parcours de soins.
22:55 Deux questions sur la pénurie de médicaments.
22:58 Léa à Marseille qui nous dit « comment est-ce que vous vous positionnez sur la production
23:02 française ? » Ce sujet est souvent oublié.
23:04 Corinne, quid du scandale de la pénurie de médicaments en France ?
23:08 Cette pénurie de médicaments, déjà elle n'est pas que française, ça ne résout
23:13 pas tout, mais en tout cas elle n'est pas que française.
23:15 Elle est liée à différents phénomènes.
23:18 On l'a connu cet hiver avec le paracétamol, avec la moxiciline.
23:21 C'est lié d'une part à une augmentation de la consommation et d'autre part à des
23:25 difficultés de production.
23:27 On le sait, trop de médicaments sont produits à l'étranger, pas assez en France, pas
23:30 assez en Europe.
23:31 Le président de la République s'est engagé à ce que nous ayons notre souveraineté française
23:35 et européenne sur la production des médicaments essentiels.
23:37 Trois actions que j'ai mises en place.
23:40 La première, l'établissement d'une liste d'à peu près 200 médicaments essentiels.
23:44 Je l'aurai à la fin de ce mois-ci.
23:46 Deux, un plan pour préparer l'hiver, parce que l'hiver c'est tous les ans à la même
23:50 époque et on a toujours besoin des mêmes médicaments, il nous faut des stocks.
23:53 Et troisièmement, ce qu'on appelle un plan blanc du médicament, qui nous permet en cas
23:57 de situation de crise non prévue, de pouvoir maintenir la production et maintenir la distribution.
24:03 Une dernière question, on veut absolument vous la poser avec Jérôme.
24:06 Sur les PEF, de plus en plus de jeunes français consomment ces cigarettes électroniques jetables.
24:12 Les PEF, plusieurs médecins, tabacologues, défenseurs de l'environnement demandent
24:16 leur interdiction.
24:17 Est-ce que vous y êtes favorables ? Est-ce que ces PEF doivent être interdites ?
24:20 Et quand, si vous y êtes favorables ?
24:22 Oui, je suis favorable à l'interdiction des PEF, parce que les PEF amènent une partie
24:28 jeune de notre population vers le tabagisme.
24:30 Le tabagisme c'est un fléau, c'est 75 000 morts par an, je le rappelle.
24:35 Donc oui, je suis favorable pour travailler avec les parlementaires sur l'interdiction
24:39 de ces PEF.
24:40 Ça peut entrer dans le cadre de notre nouveau plan tabac, par exemple, qui se met en place
24:44 2023-2028.
24:45 Donc, applicable cette année et l'année prochaine ?
24:49 Nous avons un cadre de lois qui arrive, le projet de loi de financement de la sécurité
24:54 sociale, d'autres lois avant la fin de l'année qui vont nous permettre avec les parlementaires
24:58 de travailler ce sujet.
24:59 Merci à vous François Braune, ministre de la Santé et de la Prévention, invité de
25:03 France Inter ce matin.