Kim Chapiron a réalisé de nombreux films. Il revient au cinéma avec "Le Jeune Imam", un film tiré d'une histoire vraie sur une arnaque au pèlrinage. Il nous dit tout sur sa vision du cinéma et son process d'écriture
Le film "Le Jeune Imam" est actuellement au cinéma.
Le film "Le Jeune Imam" est actuellement au cinéma.
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00:00 Lui c'est Kim Chapiron, il a réalisé Shetan, Dog Pound et La crème de la crème.
00:03 Aujourd'hui il revient au cinéma avec Le jeune imam, un film tiré d'une histoire
00:06 vraie sur une arnaque au pèlerinage.
00:08 "Je pourrais certainement faire un bon imam."
00:10 "Imam c'est pas un métier."
00:11 Il nous dit tout sur son process d'écriture et sa vision du cinéma.
00:14 Clap !
00:15 Cette histoire vraie nous a interpellé avec Lajli, donc avec qui j'ai co-écrit Le jeune
00:20 imam.
00:21 On a tout de suite vu un très beau personnage de cinéma.
00:24 Ça, ça a été le point de départ.
00:26 Après ce qui nous a intéressé c'était aussi de se réaccaparer ce type de personnage
00:31 qui généralement appartiennent plus à la scène médiatique et moins à la scène de
00:35 la fiction.
00:36 Faire rentrer des personnages qu'on n'a pas l'habitude de voir au cinéma, les incarner
00:40 en pure fiction.
00:42 Je dirais que c'est une histoire extrêmement complexe à résoudre dans le réel et dans
00:45 le cinéma aussi.
00:46 Donc c'est pour ça qu'on a choisi petit à petit plutôt de s'intéresser à la genèse.
00:51 Comment on passe du personnage le plus aimé au personnage le plus haï en l'espace de
00:56 quelques secondes ? Comment nous on a imaginé en fait que ce personnage allait commettre
01:02 une telle imprudence pour se retrouver dans une situation quasiment impossible à résoudre.
01:06 Ce qui est la base du cinéma, trouver des situations impossibles à résoudre pour en
01:10 extraire les plus belles émotions.
01:12 Quand je regarde un film, j'adore juger hâtivement les personnages et la séquence
01:25 d'après-pensée est le contraire.
01:27 Je pourrais raconter par exemple la scène d'ouverture de notre film où on voit une
01:31 sorte presque de prise d'otage des assaillants qui arrivent dans une mosquée.
01:35 Donc une scène assez violente.
01:36 Je dirais qu'à partir de cette première scène, le spectateur va tout de suite s'interroger,
01:40 va même avoir envie de juger ces personnages qui bien évidemment tout au fil du film va
01:46 être obligé aussi à son tour de s'interroger, de se poser des questions justement sur ces
01:50 personnages qu'on aura jugés.
01:51 Petit à petit, on va arriver au rôle principal interprété par Abdullah Sissoko qui joue
01:56 le jeune imam.
01:57 Lui aussi, tour à tour, va revêtir plein de costumes jusqu'à revêtir le costume
02:02 trop grand, je ne vais pas spoiler le film, d'imam, de chef spirituel de sa communauté.
02:08 Et petit à petit, nous aussi spectateurs, on va passer par plein de couleurs comme lui.
02:13 Je dirais qu'il n'y a pas un seul moment dans le film où on ressent la même chose
02:17 pour ce personnage, comme dans la vie.
02:18 Moi, juste avec les réseaux, je te ramène 300 fidèles à la mer.
02:21 Donc là, toi maintenant, tu veux faire agence de voyage ?
02:24 Cette question de la réalité dans la fiction, moi, est centrale dans mon cinéma.
02:30 Ce que j'aime, moi, quand on mélange réalité-fiction, c'est qu'en tant que spectateur, on ne se
02:36 méfie pas.
02:37 C'est pour ça aussi que dans mes premiers films, que ce soit Chez Tan, La crème de
02:41 la crème ou Dog Pound, dans les prisons juvéniles, c'était essentiellement des acteurs amateurs
02:46 qu'on n'avait jamais vus.
02:47 Quand on voit un acteur connu, reconnu, qui interprète, qui devrait par exemple, dans
02:52 mon film, interpréter un imam, dans notre tête, on aurait le bagage de l'avoir vu
02:56 dans d'autres personnages.
02:58 Quand c'est un personnage qu'on n'a jamais vu, on se dit qu'il est imam, instantanément.
03:02 Il faut savoir, nous, dans le film, quasiment qu'il n'y a que des décors réels, que des
03:07 personnages qui, dans la vraie vie, sont, qui jouent leur personnage aussi dans la vraie
03:10 vie.
03:11 Il n'y a aucune lumière artificielle dans le film, tout est tourné en lumière naturelle.
03:15 Donc ça, je dirais que ça fait partie un peu des ingrédients, nous, de notre cuisine,
03:20 pour plonger le spectateur dans une émotion très réelle.
03:24 Nous, notre but avec ce film était bien évidemment de faire un film absolument pas clivant, absolument
03:28 pas polémique, vu la fragilité et les débats que ce sujet engendre dans l'espace médiatique.
03:35 Le but, nous, était avant tout de raconter comment l'immense majorité des musulmans
03:42 vivent leur religion de façon totalement apaisée.
03:46 La religion est un décor, c'est surtout un film qui raconte l'amour, donc ce lien
03:51 invisible, le lien de filiation entre cette maman et ce fils.
03:55 Moi, en tant que non-croyant, j'ai voulu aussi raconter la transcendance que peut vivre
04:01 un croyant, moi, à ma manière, avec la relation entre ce fils et cette maman.
04:07 J'aime bien l'idée de se dire que l'amour qu'on a pour ses enfants, ou l'amour qu'on
04:12 a pour sa maman, existe et pourtant c'est invisible.
04:16 Donc c'est parler d'une certaine manière de la transcendance.
04:20 Ce film parle du lien au sacré, de cet amour qu'on a tous en nous, mais qui est invisible.
04:27 Donc parler de l'invisible à travers ce film, parler de l'invisible, parler du sacré,
04:32 reste central et d'une manière extrêmement douce.
04:35 Soma, imam, c'est pas un métier.
04:37 Regarde ta soeur, elle se débrouille elle très bien.
04:40 Les films précédents traitaient plutôt de la famille qu'on choisit, c'est-à-dire
04:48 les amis, et ce film traite de la famille qu'on choisit pas.
04:52 Avec la famille qu'on choisit pas, généralement, on peut pas tricher, la vérité des cœurs
04:57 s'exprime.
04:58 Donc en termes de cinéma, moi, ça me donne un champ d'expression très très fort.
05:03 Il y a deux types de films.
05:04 Il y a les films qui disent et les films qui racontent.
05:07 Les films qui vont dire par exemple que la guerre c'est pas bien et les films qui vont
05:11 raconter que la guerre c'est compliqué.
05:12 Donc mon personnage essaye de raconter à sa manière sa trajectoire de guérison.
05:17 Donc à la fin, on va poser cette question.
05:20 J'ai toujours préféré les jolies questions aux jolies réponses.
05:25 Comini !
05:26 [Musique]