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Transcription
00:00 Quand on devient mère, on est censé être heureuse.
00:02 Et quand on devient mère et qu'en fait, on est malheureuse,
00:05 et en plus, quand on sait pas vraiment pourquoi,
00:07 bah, ça va pas ensemble.
00:08 -Pour mon aîné, j'ai connu une dépression,
00:25 donc dépression périnatale,
00:26 puisque moi, j'ai la commencé pendant la grossesse.
00:29 Elle s'est amplifiée pendant la grossesse
00:32 et elle a explosé, en fait, au moment de la naissance de ma fille.
00:34 Quand elle est née, j'étais plus en capacité
00:36 et de m'occuper de moi et donc de m'occuper de mon bébé.
00:39 Je sors de la maternité et je me retrouve aux urgences psychiatriques.
00:42 Je vais rester deux mois en psychiatrie,
00:44 sans ma fille, seule.
00:46 Ce jour-là, si personne faisait quelque chose, j'allais...
00:50 J'allais... En fait, j'allais pas mourir de me faire quelque chose,
00:55 j'allais mourir de trop souffrir.
00:56 -Moi, quand ma fille est née,
00:59 je l'ai aimée tout de suite très intensément.
01:02 Je l'ai aimée si fort qu'en fait, y a plein de choses qui se sont remontées.
01:05 Aimer un enfant, c'est ça, et à ce point-là,
01:08 on peut pas lui faire de mal et ça veut dire que j'ai pas été aimée.
01:11 J'étais très en colère, j'avais énormément de tristesse
01:14 et je savais pas d'où cette tristesse venait.
01:16 Et j'ai commencé à avoir une hypervigilance dès la maternité.
01:20 Je surveillais pas ma fille, je la veillais.
01:22 J'ai pas dormi pendant trois jours et j'avais des hallucinations visuelles.
01:26 Quand ma fille pleurait, parfois j'allais vomir.
01:29 J'avais plus d'intérêt pour rien ni pour personne, mis à part elle.
01:32 Et puis...
01:33 Et puis j'avais des phobies d'impulsion aussi.
01:36 Je me voyais, quand je passais dans l'escalier...
01:38 Là, j'étais dans l'escalier.
01:40 J'ai eu aussi des idées suicidaires par moment.
01:43 Je mettais mon petit masque de "tout va bien"
01:45 et en fait, à l'intérieur, j'étais morte.
01:47 Ça a duré presque deux ans.
01:49 -Le fait de savoir que je faisais une dépression en postpartum,
01:52 ça mettait enfin un terme sur ce que j'étais en train de vivre depuis des mois.
01:56 Y avait quelqu'un qui légitimait et qui disait
01:58 qu'il faut qu'elle ait un prix dans la charge.
02:00 -Une fois que ça allait mieux, j'ai découvert ce mot-là.
02:03 Je saurais pas exactement où, en tout cas sur Internet, ça, c'est sûr.
02:06 Je comprenais pas pourquoi on m'en avait pas parlé,
02:08 pourquoi on avait pas décelé que quelque chose n'allait pas.
02:11 Dans cette errance où j'avais pas de diagnostic,
02:15 je me disais "t'es nulle, t'es pas faite pour être mère, Chloé,
02:17 accroche-toi et peut-être que ça ira".
02:20 De pouvoir comprendre qu'en fait, ça venait vraiment de traumatismes,
02:24 ça m'a ôté quand même une grosse forme de culpabilité
02:26 et ça m'a permis d'expliquer aussi à mon entourage ce qui s'était passé
02:30 et que c'était pas de ma faute, en fait.
02:31 -Donc la société ne favorise pas du tout la question du village autour de la femme.
02:37 On est vraiment dans quelque chose où elle rentre de la mater
02:40 et elle est quand même énormément livrée à elle-même
02:43 avec un bébé qu'elle découvre.
02:44 -Il faut allaiter un peu, mais pas trop,
02:47 il faut reprendre le travail au bout de trois mois,
02:50 il faut être aussi une bonne épouse, il faut être une bonne amie,
02:52 il faut faire du sport, il faut perdre ses kilos de grossesse,
02:54 il faut faire des bons petits plats à la maison pour que tout le monde mange équilibré...
02:58 Et puis il y a toujours cette pression à être une bonne mère, en fait.
03:01 Mais qu'est-ce qu'une bonne mère ?
03:03 En fait, une bonne mère, c'est propre à chacune,
03:05 puisque ça dépend de son milieu social, ça dépend de sa culture,
03:09 ça dépend des moyens qu'on va avoir,
03:11 autant en termes de temps qu'en termes aussi de soutien, de relais, d'entourage,
03:15 de ce qu'on va pouvoir apporter ou pas, de ce que nous fait la maternité.
03:19 -Je pense qu'il y aurait de l'information à donner dès la grossesse.
03:23 On se rend bien compte qu'il y a beaucoup d'informations données sur le plan médical,
03:26 et le plan psychique est quand même assez peu abordé.
03:29 -On passe à côté, en fait, parce que c'est encore trop méconnu, en fait.
03:33 Par exemple, à l'école d'infirmière,
03:35 j'ai repris mes cours et on nous a jamais parlé de la dépression de l'aspartame.
03:38 -C'est quelque chose que j'ai toujours en tête alors qu'elle a 13 ans,
03:42 en me disant que, potentiellement,
03:44 elle pourrait encore souffrir de ce qu'on a traversé,
03:46 donc j'ai quand même...
03:48 Je veille à comment elle va psychiquement,
03:51 comment ça se passe à l'école, au collège, tout ça.
03:54 On en sort du dur,
03:56 mais on garde quand même des séquelles.
03:59 Moi, j'avais la sensation d'être...
04:02 Pas une "wonder woman" avant,
04:04 mais en tout cas, j'avais pas la sensation
04:05 que quelque chose comme ça pouvait m'atteindre,
04:07 et j'ai accepté de ne pas être juste forte,
04:11 mais d'être un tout.
04:12 *musique*

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