Retour sur la casserolade que subissent les politiques français

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Transcript
00:00 8h45 sur Europe 1, le club de la presse avec Mathieu Bockcôté, sociologue et essayiste,
00:08 et Olivier D'Artigolle, chroniqueur politique.
00:10 Bonjour à tous les deux.
00:11 Bonjour messieurs.
00:12 Alors ils ne peuvent plus faire un pas sans se heurter à une casserolade.
00:15 Comme on dit maintenant, les ministres du gouvernement sont littéralement pistés
00:18 au jour le jour par les opposants à la réforme des retraites.
00:21 Papengae, le ministre de l'Education nationale, a même dû être exfiltré littéralement
00:25 de son TGV hier soir par la police à son retour d'un déplacement à Lyon.
00:29 Emmanuel Macron est en déplacement à Vendôme aujourd'hui.
00:32 Il va sans doute avoir un accueil bruyant, on va dire, au point que l'exécutif, messieurs,
00:40 sous ce bruit de casserole semble devenu complètement inaudible.
00:43 Alors la question que je me pose d'abord à vous Mathieu Bockcôté, est-ce que ça
00:47 à un moment ça ne pose pas un problème démocratique malgré tout ?
00:50 Ah mais bien évidemment.
00:51 C'est-à-dire, il y a deux éléments là-dedans.
00:53 D'un côté il y a un pouvoir qui est rejeté non pas par l'ensemble de la population,
00:57 mais par une minorité active qui exprime néanmoins un ras-le-bol qui est présent
01:01 dans l'ensemble de la population.
01:03 Donc le rejet ne va pas jusqu'à ces comportements qui sont une forme de... qui refusent les
01:07 codes élémentaires du civisme démocratique, mais c'est l'expression néanmoins d'un
01:11 refus d'adhésion en profondeur.
01:13 Presque le pouvoir est traité comme un corps étranger qu'il faut expulser.
01:16 De l'autre côté, c'est le problème d'une classe politique très technocratique qui
01:20 ne s'est pas renouée avec le peuple dans une situation de crise comme celle-là, quand
01:24 on n'a que des technos pour l'essentiel qui n'ont pas le métier politique, qui ne
01:28 savent pas jouer avec les passions populaires, qui ne savent pas toucher les fibres intimes
01:31 du peuple.
01:32 Cela dit, vous avez raison, c'est un problème démocratique.
01:34 On ne peut pas traiter ainsi durablement le gouvernement sans paralyser toute une société.
01:39 Ce climat, il vous inquiète, Olivier Dardigolle ?
01:40 En tout cas, il est inédit dans le sens où le pays continue très majoritairement à
01:47 ne pas accepter les 64 ans.
01:49 L'exécutif pensait qu'après la décision du Conseil constitutionnel, on pouvait pas
01:54 passer à autre chose, qu'en fait la séquence politique se terminait et qu'on pouvait à
01:59 l'horizon tout essayer.
02:00 Vous voyez cette question des irritants, ce qui abîme la vie quotidienne des Français,
02:04 les petits excès de vitesse, pouvoir avoir rapidement sa pièce d'identité, que sais-je.
02:08 Ça ne va pas suffire tout ça.
02:09 Mais rien n'imprime réellement.
02:12 Le pays est frontalement opposé à cette réforme et veut installer ce rapport de force,
02:22 de légitimité presque, dans la durée.
02:25 D'où les casseroles et certainement d'autres formes de contestation qu'on ne voit pas encore.
02:31 Mais c'est pas le pays qui veut instaurer ce climat, c'est quelques-uns.
02:32 Franchement, il n'était que quelques-uns.
02:33 Mais regardez les enquêtes d'opinion.
02:34 Vous avez raison, il y a ce que Mathieu appelle les minorités actives, mais il y a quand même
02:38 un climat général qui reste très hostile à la réforme.
02:42 Quand vous avez plus d'un Français sur deux qui dit qu'on peut insulter le président
02:47 de la République, ça veut dire qu'on a basculé réellement dans un climat qui est
02:51 véritablement volcanique.
02:54 Et surtout au moment de tourner la page, la volonté de tourner la page était tellement
02:57 explicite, tellement grossière.
02:59 C'était marqué au Stabilo.
03:00 Pour tourner la page véritablement, il ne faut pas dire à tout le monde avec un micro
03:05 "Nous tournons la page, soyez conscients que nous tournons la page".
03:09 Il faut donner une véritable nouvelle orientation.
03:11 La nouvelle orientation qui serait capable de mordre.
03:14 On dit souvent, je reviens là-dessus souvent sur ces news, si vous me permettez, on dit
03:18 que les Français sont ingouvernables.
03:19 En l'instant, il existe des majorités fortes dans le pays sur plusieurs questions.
03:22 Majorité forte sur l'immigration, majorité forte sur l'école, majorité forte sur le
03:26 soutien à la police contre les voyous, majorité forte sur la reconquête de quartiers qui
03:31 se dérobe quelquefois aux lois et aux mœurs françaises.
03:33 Il y a une majorité, mais c'est une majorité dont le gouvernement ne veut pas.
03:36 Et le fait est qu'il gouverne quelquefois avec des obsessions idéologiques qui ne sont
03:40 pas celles de la majorité de la population.
03:41 - Et majorité forte Mathieu sur le fait qu'entre deux élections présidentielles, le peuple
03:46 veut pouvoir sur certains moments être pris en considération.
03:50 C'est-à-dire que cette respiration démocratique qu'on n'aura certainement pas avec le référendum
03:55 d'initiative partagée, y compris Emmanuel Macron avait annoncé le fait qu'il fallait
04:01 peut-être entre deux élections présidentielles une respiration démocratique sans qu'il n'ait
04:05 pu dire plus précisément ce qu'il entendait en la matière.
04:09 Mais il y a véritablement aujourd'hui dans le pays, ce récit qui est fait par l'exécutif
04:14 "on passe à autre chose" et un pays qui fait un refus d'obstacle parce que tout simplement
04:20 la question "vers où va-t-on" n'est pas réglée.
04:24 Car il y a aussi cette histoire insensée des 100 jours, quand même.
04:29 Laisser entendre qu'on pouvait en 100 jours répondre à ce qui s'exprime dans le pays.
04:35 - Justement Olivier Dardigolle, est-ce que pendant 100 jours, ce climat délétère ne
04:38 va-t-il pas s'installer durablement jusqu'à peut-être un dérapage qui pourrait être
04:44 grave ? On a vu ce député, la débouche du Rhône, courser littéralement sur un marché.
04:49 - Il n'est pas coursé, les chats.
04:51 - Il y a un bris quand même.
04:54 Non, je pense qu'il ne faut pas relativiser.
04:55 Il y a un bris dans le rapport, ce que j'appelle le civisme démocratique élémentaire.
04:59 Ensuite, pour renouer avec la population, parce que manifestement il ne suffit pas de
05:04 faire quelques annonces touchant la vie quotidienne pour renouer avec la population.
05:07 Olivier fait référence au fait qu'il y a un souffle démocratique nécessaire.
05:11 Quand j'entends le gouvernement envisager une convention citoyenne machin truc chose
05:16 sur l'immigration, je suis terrifié.
05:17 Parce qu'il n'y a rien de plus antidémocratique de mon point de vue que ces conventions citoyennes
05:22 qui relèvent sur une espèce de triomphe de pouvoir de la technocratie, de l'expertocratie.
05:27 - Et des anonymes.
05:28 - Oui, et des anonymes.
05:29 Dans les faits, c'est toute volonté de prendre un peuple anonyme qui sera chapeauté par
05:34 une expertocratie dont on connaît déjà les orientations et qui veut se substituer
05:38 au vrai débat démocratique.
05:39 - Mais ça c'était mal terminé sur la convention citoyenne climat.
05:42 Et vous avez vu cette convention citoyenne sur la fin de vie qui peut nourrir un débat
05:46 sérieux sur une question très sérieuse, qui malgré la conclusion, le rapport remis
05:52 par les citoyens, semble être sorti des radars des futures annonces sur les 100 jours.
05:56 - Alors, j'ai l'impression qu'on aura encore l'occasion d'en reparler, notamment je le
06:00 disais, enfin on verra bien ce qui va se passer dans le courant de la journée à propos du
06:03 déplacement d'Emmanuel Macron sur les questions de santé aujourd'hui.
06:08 Je ne sais pas si mes informations sont exactes et si mes souvenirs sont bons plus exactement.
06:11 Alors, l'autre sujet sur lequel je voulais avoir votre avis messieurs, c'est l'opération
06:15 Ouam-Bouchou à Mayotte.
06:16 Les Comores refusent de prendre en charge leurs ressortissants illégaux qui doivent
06:20 être expulsés du département français.
06:22 Beaucoup de moyens sécuritaires ont été déployés sur place, mais on a l'impression
06:26 à l'arrivée qu'on est dans une espèce d'impasse, que les clandestins finalement vont rester
06:33 sur place et que cette opération est vouée à l'échec.
06:35 - Mathieu Boccotti, c'est votre sentiment ou alors est-ce qu'on préjuge là?
06:38 - L'action du gouvernement vient d'être entravée, je ne me rappelle pas le nom du
06:41 tribunal qui a dit "vous ne pouvez pas poursuivre l'opération de démantèlement du bidonville
06:45 et ainsi de suite".
06:46 Donc là, un instant, l'action politique, l'action de l'État, la souveraineté de
06:48 l'État est encore une fois sur une opération qui est plutôt mineure en dernière instance,
06:53 qui est entravée encore une fois par ce qu'on appelle communément le gouvernement des juges.
06:56 Donc si, si dans la volonté de s'en prendre, une question aussi centrale que l'immigration
07:00 clandestine à Mayotte, qui est dénoncée par des gens de la place qui disent "on n'en
07:04 peut plus, c'est étonnable".
07:05 Et encore une fois, qui va faire la politique d'immigration de la France?
07:09 Des juges et des clandestins qui eux-mêmes décident d'imposer leur présence.
07:13 Donc ça je pense que c'est l'élément central, l'État est paralysé dès lors qu'il veut
07:16 faire une action minimale.
07:17 - Mais il y a aussi l'aspect diplomatique, c'est-à-dire que l'écomort pour l'instant
07:20 c'est une fin de non-recevoir.
07:22 Je ne sais plus qui a utilisé tout à l'heure, Rachida Dati disait tout à l'heure qu'on
07:26 est proche de l'humiliation diplomatique.
07:28 - J'ai entendu d'abord exprimer une vive inquiétude ce matin avec un peu de gravité
07:32 parce que les informations qui nous viennent de Mayotte sont extrêmement préoccupantes.
07:36 On peut aller au chaos, je lisais qu'un élu local disait qu'il fallait peut-être tirer
07:41 sur de gènes comoriens, voilà où nous en sommes.
07:44 La question de l'immigration est un sujet sérieux, mais il y a d'autres sujets qui
07:49 ne sont pas périphériques.
07:51 80% de la population à Mayotte vit sous le seuil de pauvreté.
07:55 Il y a en effet une influence française sur l'archipel des comores qui s'est réduite
08:02 au fil des années.
08:03 Il y a aujourd'hui des influences d'Arabie Saoudite, de Chine, de Russie aux comores
08:08 que l'exécutif aurait dû prendre en considération.
08:11 Je ne veux pas dire faire le procès sur l'amateurisme, mais comme d'habitude on sent qu'il y a eu
08:17 une volonté de communication sur le régalien, sur la lutte contre l'immigration clandestine,
08:21 mais sans que d'autres considérants, sans que d'autres sujets n'aient été pris véritablement
08:26 en considération, dont la question des inégalités.
08:31 Mayotte est un territoire français, c'est une souffrance aujourd'hui, sous France, dans
08:37 le sens où il n'y a quasiment plus rien à l'échelle de ce département.
08:40 - Justement, l'exemple de Mayotte, Mathieu Boquecôté, est-ce que ce n'est pas finalement
08:45 l'histoire de toutes les politiques d'immigration menées en France ? C'est-à-dire qu'on affiche
08:48 une certaine fermeté, on envoie 1800 policiers, et puis finalement, sur le terrain, résultat,
08:53 pas grand-chose.
08:54 En tout cas pour l'instant, encore une fois, ne préjugeons pas de ce qui peut se passer
08:56 dans les articles.
08:57 - Mais qui croit à la fermeté en matière d'immigration ? Il faut être sérieux, on
08:59 regarde ce qui s'est passé en France et en Europe plus largement depuis 50 ans, et malgré
09:03 tous les discours de fermeté, rappelez-vous dans les années 90, la droite la plus mainstream,
09:07 comme on dit, Séguin et tout ça, disait "immigration zéro".
09:10 Alors c'était la fermeté.
09:11 Des discours de fermeté, en fait depuis 50 ans, il y a deux courbes en fait, deux droites.
09:17 D'un côté, le discours de grande fermeté, et de l'autre côté, une impuissance totale
09:20 pour maîtriser véritablement les flux migratoires, ce n'est pas un aveuil de changer.
09:23 - Est-ce que ça préfigure de ce que pourrait être la loi immigration, en tout cas la politique
09:29 d'immigration que le gouvernement veut enclencher dans les mois qui viennent ?
09:33 - Encore, ce texte a été enlevé, puis on nous avait promis le fait qu'il serait saucissonné,
09:41 puis il revient, il semblerait, dans son intégralité.
09:44 On évoque souvent les conséquences quand on évoque les sujets de l'immigration, et
09:49 je pense qu'il faut parler de l'immigration, que ce n'est pas un sujet tabou à mettre
09:52 sur le tapis.
09:53 Mais il faudrait aussi évoquer les causes.
09:55 Qu'est-ce qui fait qu'un être humain, quels que soient les murs ou les barbelés que vous
09:59 pouvez mettre partout, aura toujours le désir, l'envie de vie, et d'améliorer ses conditions
10:04 de vie ? Ce qui nous amènerait à pouvoir discuter et agir sur les causes, sur ce qui
10:10 génère ces flux migratoires à l'échelle du monde et dans certaines parties du monde,
10:15 comme aux Comores, parce que nous évoquons là que les gens viennent de Mayotte ou des
10:18 Comores, du même peuple, c'est la même histoire, c'est la même géographie.
10:22 - À l'échelle de l'histoire, je vous dirais que la planète entière rêve de s'installer
10:26 en Europe pour l'essentiel.
10:27 C'est un désir que l'on peut comprendre personne par personne.
10:30 Si l'Europe consente cela, l'Europe n'existe plus.
10:33 - L'essentiel de l'immigration se fait sur des zones africaines, par exemple 80% se fait
10:39 sur les pays de l'Himitrof.
10:40 Il n'y a pas encore de croissant entre l'île-Dieu et Normandie ou entre Porto-Alteira.
10:46 - Mais vous comprenez, le mouvement historique que nous connaissons, c'est le Sud qui remonte
10:48 vers le Nord et le Nord ne sait trop comment réagir.
10:51 - Merci messieurs, merci Mathieu Bocoté, sociologue essayiste, et merci Olivier Dartigold
10:57 d'avoir participé à ce Club de la Presse ce matin.

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