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Alain Bauer, professeur de criminologie au conservatoire national des Arts et Métiers, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Il est l'auteur du l'ouvrage "Au commencement était la guerre - L’enfer qui nous attend?" publié chez Fayard.

Retrouvez "L'entretien - Dimitri Pavlenko" sur : http://www.europe1.fr/emissions/linterview-politique-dimitri-pavlenko

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Transcription
00:00 Il est 8h13 sur Europe 1, bonjour Alain Bauer.
00:02 - Bonjour.
00:03 - Bienvenue sur Europe 1, vous êtes entre autres un professeur de criminologie au CNAM,
00:07 le Conservatoire National des Arts et Métiers.
00:09 Bon, je ne vais pas donner l'entièreté de votre CV, on y passerait 5 minutes.
00:13 Votre dernier livre, il vient de paraître, au commencement, était « La guerre » chez Fayard,
00:17 sous-titré « Est-ce l'enfer qui nous attend ? ».
00:20 Je vous poserai la question dans quelques minutes Alain Bauer,
00:22 mais d'abord l'actualité, la crise des retraites en phase aiguë,
00:26 record de manifestants dans plusieurs grandes villes hier et déchaînement de violences.
00:30 Alors la casse, généralement, c'est le moment où l'opinion se retourne en faveur de l'ordre
00:35 dans les grands mouvements sociaux, là ça n'est absolument pas le cas.
00:38 Je citerai en témoin le sondage Odoxa pour le Figaro ce matin,
00:41 qui montre que plus de 2 Français sur 3 souhaitent que le mouvement se poursuive,
00:45 c'est en hausse de 6 points sur une semaine.
00:48 Vivons-nous la crise la plus grave depuis les Gilets jaunes, pensez-vous Alain Bauer ?
00:52 - Non, c'est la même crise que les Gilets jaunes, elle se poursuit,
00:55 c'est la même, elle ne s'est jamais terminée.
00:57 Une crise qui dure 52 semaines de manifestation en week-end
00:59 par des gens qui travaillent la semaine, des travailleurs pauvres,
01:02 ce qu'on appelait les petits blancs aux États-Unis,
01:05 est une crise qui dure et cette crise ne s'est jamais terminée,
01:08 il n'y a jamais eu de fin de la crise.
01:10 Mais la crise a permis à des gens qui n'avaient jamais manifesté,
01:12 qui n'ont jamais eu la culture de la manifestation,
01:15 mais qui avaient la culture de la violence parfois.
01:17 Les paysans ont la culture de la violence, la jacquerie existe dans ce pays depuis un millier d'années,
01:21 au moins depuis la dernière fois où on l'a recensé.
01:24 Gustave Lebon écrivait sur la psychologie des foules,
01:28 des textes fondateurs, le dernier date de 1895
01:32 et nous vivons toujours la même chose.
01:33 Mais cette crise-là, c'est la même, elle n'en finit pas,
01:36 non pas de se terminer, mais de perdurer.
01:40 C'est un bouillon lent avec des petites poussées de température,
01:45 des réductions, mais pas de finition.
01:47 Il n'y a pas eu de fin de crise.
01:49 - Oui, ça c'est votre grande thèse, vous dites le niveau d'homicidité,
01:53 c'est-à-dire que vous prenez toutes les tentatives,
01:55 tous les meurtres, la montée en général de la violence de personne à personne.
02:00 - Depuis 20 ans.
02:00 - Depuis 20 ans, ne cesse de grimper, on s'habitue progressivement
02:04 et on est parfois surpris quand il y a des pics,
02:06 mais finalement, tout ça, le niveau moyen ne fait que grimper.
02:09 - Oui, c'est-à-dire que même quand le pic redescend,
02:11 le niveau de stabilisation est plus élevé que le niveau de stabilisation précédent.
02:16 C'est-à-dire qu'on regarde les pointes, mais on ne regarde pas le niveau moyen.
02:20 Le niveau moyen n'a jamais été élevé depuis 20 ans.
02:22 Alors, ce n'est pas le pire de notre histoire, il faut toujours relativiser.
02:25 L'histoire est longue et nous vivons des moments courts,
02:28 mais disons que depuis 20 ans, il n'y a jamais eu autant de meurtres,
02:31 de tentatives de meurtres, de violences physiques contre les personnes.
02:36 Et je mets de côté la révélation des violences à caractère sexuel,
02:40 les agressions intimes, etc., qui est un vrai sujet, mais qui va par ailleurs.
02:45 Là, il y a un enjeu et vous voyez d'ailleurs dans les enlèvements,
02:47 les règlements de comptes entre criminels,
02:50 des niveaux de contrôle territorial, de violence, d'agressivité,
02:54 de règlements par une loi alternative, par une police alternative,
02:59 par une police concurrentielle à la police républicaine,
03:01 qui est la police des criminels, des caïds, etc.
03:04 C'est un vrai sujet.
03:05 Et du coup, ça légitime, entre guillemets, l'usage de la violence,
03:08 puisque la règle du jeu voulue par l'État,
03:12 et qui a été bien comprise après les Gilets jaunes,
03:14 et on entend d'ailleurs les manifestants en disant
03:16 "on avait fait des manifestations pacifiques
03:18 pendant quelques semaines, quelques mois sur la réforme des retraites,
03:21 ça n'a rien donné, les Gilets jaunes ont fait des manifestations violentes,
03:25 ils ont obtenu X milliards, on va faire pareil".
03:28 Et donc, c'est un indicateur de réplique, de copie,
03:31 par rapport à un système où l'État dit
03:33 "je ne réagis qu'en fonction du rapport de force".
03:36 L'État donne une règle qui est celle du rapport de force,
03:38 où la négociation tranquille,
03:40 ce qui est le cas dans les pays sociodémocrates du Nord...
03:43 - Mais vous sous-entendez Alain Bauer que quand Emmanuel Macron dit
03:46 "mardi j'assume l'impopularité de ma réforme" quelque part,
03:49 c'est lui qui donne le feu vert au casseur, que l'on voit...
03:52 - Non, il ne donne pas le feu vert au casseur,
03:53 il dit "je ne discuterai pas dans la paix et le calme".
03:57 Puisqu'il y a eu la paix et le calme,
03:58 ou quasiment la paix et le calme dans la plupart des manifestations,
04:00 et que ça ne sert à rien,
04:02 eh bien il y a deux éléments optionnels,
04:04 le premier c'est "bon, ça ne va pas marcher, je m'arrête,
04:07 ça n'est pas l'histoire de France",
04:08 le deuxième c'est "je continue et j'augmente le niveau de pression",
04:11 puisque visiblement c'est le seul message que l'État me dit
04:14 qu'il veut t'entendre.
04:15 - Mais vous vous entendez ?
04:17 - Si vous avez entendu l'intervention du président de la République à 13h,
04:21 c'était une fin de non-recevoir,
04:22 qui suivait une fin de non-recevoir,
04:24 en disant "je ne recevrai même pas les organisations syndicales
04:26 qui me demandent de venir discuter avec moi".
04:28 Il n'y a pas un pays démocratique dans le monde
04:31 où avant une manifestation ou un mouvement social,
04:34 vous n'essayez pas la dernière option qui est celle de la négociation.
04:37 Et d'ailleurs à juste titre,
04:38 le président de la PU qui avait fait ça avec Vladimir Poutine,
04:40 quand il dit "je vais discuter jusqu'au dernier moment,
04:43 même dans les pires conditions, parce que je veux trouver la paix",
04:45 la paix à l'extérieur, ça vaut autant la paix à l'intérieur.
04:47 - Donc il y a une erreur politique fondamentale,
04:49 vous pensez peut-être Emmanuel Macron.
04:51 - Je ne suis pas commentateur politique,
04:52 je dis simplement que sur la question de la violence,
04:54 l'État a fixé l'arrêt, quel rapport de force ?
04:56 Le rapport de force a lieu.
04:57 - Mais sur la lecture de la crise,
04:58 Gérald Darmanin circonscrit aujourd'hui la violence
05:00 à quelques centaines, quelques milliers de casseurs d'extrême gauche,
05:05 qui, je le cite, voudraient tuer des policiers.
05:08 Est-ce qu'il fait une erreur d'analyse
05:09 ou est-ce que sciemment il déconnecte la grande masse des manifestants
05:13 de cette avant-garde, si je puis dire,
05:16 pour parler comme un léniniste, de l'avant-garde de la colère sociale ?
05:20 - Mais un mouvement social, ça accouche toujours d'une génération politisée
05:25 et d'une avant-garde révolutionnaire.
05:27 Partout, ce n'est pas seulement d'extrême gauche ou d'extrême droite.
05:31 Moi, je ne sais pas identifier les auteurs d'eux,
05:33 quand je lis le journal, visiblement,
05:35 ils sont un peu différents de l'image qu'on en donne,
05:37 mais il y a toujours eu une tradition en France
05:40 de mouvements anarchistes, révolutionnaires, engagés,
05:43 mais il est en train de recruter avec des ultra-jaunes, des black blocs,
05:47 et qui, eux, n'étaient pas tous issus de l'extrême gauche, loin de là.
05:50 - Alors, venons-en à votre livre, Alain Bauer,
05:52 "Au commencement était la guerre",
05:54 alors, votre livre ne parle pas de la guerre sociale,
05:56 il parle plutôt de la guerre entre les Etats.
05:59 Dès les premières pages, vous entendez dissiper le mirage
06:03 dans lequel, dites-vous, nous vivons,
06:04 celui de la paix comme état de nature.
06:06 Je vous cite, "De fait, l'humanité semble condamnée
06:09 à vivre à perpétuité entre conflits et intermèdes pacifiques".
06:13 Alors là, les parenthèses, vous s'entendez que ce ne sont pas les guerres,
06:16 que ce sont en fait les périodes de paix.
06:17 On est dans un entre-deux-guerres, pensez-vous, actuellement ?
06:20 - Oui, je l'ai écrit, c'est un entre-deux-guerres.
06:22 On a cru, en 1989, après la chute du mur de Berlin,
06:25 que nous allions vivre la paix éternelle, universelle,
06:28 une quête de paix que nous avions régulièrement en 14-18,
06:31 on a vu ce que ça a donné en 39-45,
06:34 nous avons eu des tas d'épisodes,
06:35 et nous avons cru à cette paix, nous l'avons fantasmé,
06:37 nous avons imaginé la globalisation heureuse
06:40 pour Bisounours, Gambadan, dans la Lusère,
06:42 nous il n'y aurait plus ni amis ni ennemis,
06:43 mais juste des fournisseurs et des clients,
06:46 une sorte de giga-Erasmus,
06:47 où on irait visiter les gens, de tourisme social
06:51 et de désindustrialisation, de perte de souveraineté,
06:53 car la souveraineté n'avait plus de sens,
06:55 l'identité n'avait plus de sens,
06:57 rien n'avait de sens, en fait, puisque nous étions là pour consommer.
07:00 Et puis, les autres, ils ont une histoire, des racines, une identité,
07:04 nous on a éliminé les frontières, les nations,
07:06 en partie les États, la foi,
07:09 et on a construit que ça allait être le phénomène généralisé,
07:12 nous avons exporté une culture de la globalisation heureuse,
07:16 et qui est une globalisation piteuse,
07:18 puisqu'en fait, elle se traduit par, en matière de Covid, rien,
07:22 en matière militaire, une armée qui est échantillonnaire,
07:26 expéditionnaire, qui a un peu de tout et beaucoup de rien,
07:29 un dispositif d'état-tique qui est en train de mourir sur pied,
07:33 j'entends beaucoup parler de l'État profond,
07:35 mais l'État profond, il est comateux,
07:36 la France, c'est un pays où l'État a créé la nation,
07:39 c'est le seul État-nation que je connaisse.
07:41 Donc, la réalité de tout cela,
07:43 c'est qu'à un moment donné, nous avons projeté une illusion
07:46 et que nous avons tout fait pour croire que c'était la réalité.
07:48 - Mais est-ce qu'on en est sorti de cette illusion ?
07:50 Est-ce que c'est l'effet ?
07:51 - Vladimir Poutine nous a beaucoup aidé à un réveil brutal et douloureux,
07:55 mais entre-temps, il y a eu des guerres en Tchétchénie,
07:58 en Yougoslavie, au Kosovo,
08:01 il y a des conflits en Irlande, aux dernières nouvelles,
08:03 la situation en Catalogne est relativement sable.
08:05 - Oui, mais au Pays-Basque, il y a quelques oasis bleues
08:08 dans un océan de points rouges.
08:10 - Oui, des oasis de moins en moins bleues,
08:11 de moins en moins stables,
08:13 en matière de démographie,
08:15 comme en matière de statut politique.
08:17 Je veux dire, les États-Unis sont désormais une démocratie instable.
08:21 C'est eux qui le disent eux-mêmes.
08:23 - Et on entendait qu'à l'Élysée, dans le journal de 8h,
08:25 à l'Élysée, on se demande si la France n'est pas prochaine sur la liste.
08:28 - Le prochain pays après le Brésil et les États-Unis.
08:30 - Oui, bien sûr, et c'est un vrai enjeu.
08:32 Donc, la lucidité, ça permet d'anticiper la guerre.
08:35 Moi, je ne suis pas pour nous préparer à la guerre,
08:36 je suis pour essayer de sauver la paix.
08:38 Et "ci vis pacem para bellum" n'est pas une formule
08:41 qui a été inventée par hasard.
08:43 Ce n'est pas parce qu'on vient en disant
08:44 "l'accord de Pou nous sommes pacifiques"
08:47 que moi, je suis pacifique, mais pas pacifiste.
08:49 Et je considère que le meilleur moyen de sauver la paix,
08:51 justement, c'est d'avoir la lucidité,
08:53 de se rendre compte de ce qui se passe autour de nous
08:54 et de ne pas considérer que ça n'existe pas.
08:56 - Mais à vous lire, Alain Bauer,
08:59 la paix apparaît presque comme un poison,
09:01 le poison du désarmement sur tous les plans,
09:04 militaires, mais aussi psychologiques, mais aussi civiques.
09:08 Vous avez l'air presque heureux, finalement,
09:11 de ce retour de la guerre,
09:12 comme si ça allait nous sortir d'une certaine torpeur.
09:15 Est-ce que vous ne craignez pas quand même
09:16 qu'on vous accuse à un moment de bellicisme,
09:18 de souhaiter la guerre au nom du sursaut ?
09:20 - Moi, je souhaite la paix, justement,
09:21 mais chaque fois que j'ai expliqué
09:22 que la criminalité et la violence existaient,
09:24 on m'expliquait que ça n'existait pas avant d'expliquer.
09:26 Ça, il y a un processus dans le déni,
09:29 le négationnisme de gauche n'est pas mieux
09:30 que le négationnisme de droite.
09:31 C'est aussi mortifère et délétère.
09:34 La réalité, c'est qu'on ne peut pas expliquer,
09:35 un, que ce n'est pas vrai,
09:36 deux, que ce n'est pas grave,
09:37 et trois, que ce n'est pas de ma faute.
09:38 Ça ne marche jamais.
09:39 Il y a un problème d'aveuglement, d'incapacité.
09:42 Moi, je dis, écoutez, la guerre,
09:44 elle est en face de nous, elle est là.
09:46 Vladimir Poutine l'a décidé, personne d'autre,
09:48 mais il n'est pas le seul.
09:49 Et donc, face à cela, il y a deux options.
09:51 On se couche ou on se lève.
09:53 Moi, je suis plutôt pour avoir une génération de résistants
09:56 que simplement une génération de spectateurs
09:58 attendant que ça arrive.
09:59 Et je crois justement à ces générations.
10:00 Quand on voit les centaines de jeunes
10:03 qui sont venus s'inscrire, notamment chez moi,
10:05 pour se préparer à lutter contre le terrorisme
10:08 avec un très grand nombre de jeunes filles,
10:10 d'ailleurs, à l'époque, qui étaient des surprises,
10:12 je me dis qu'il y a une génération de résistants dans ce pays
10:14 et que c'est une génération de jeunes résistants
10:16 et que c'est plutôt une bonne nouvelle.
10:17 Qu'ils le fassent pour l'environnement,
10:18 pour des raisons sociales ou par pur patriotisme,
10:21 je crois à la capacité de la mobilisation.
10:24 Cet ouvrage, il est plus fait pour mobiliser les gens
10:26 que pour les terroriser.
10:28 Et comme je le dis, je suis pacifique,
10:30 mais je ne suis pas pacifiste.
10:31 Je ne crois pas aux héros bêlants, sacrificiels,
10:34 venant expliquer qu'ils allaient mourir sous les bottes des autres.
10:36 Tous ceux qui ont cru à la paix,
10:38 notamment dans l'entre-deux-guerres,
10:40 ont bien été obligés de choisir leur camp.
10:42 Il se trouve que la plupart des pacifistes
10:44 ne sont pas devenus résistants.
10:45 - Alors, il y a une révélation aussi dans votre livre,
10:47 Alain Bauer, sans défleurer à l'excès,
10:50 à propos de l'URSS, et ça éclaire pas mal notre actualité.
10:53 Vous affirmez qu'en 1989, l'Occident a en fait tout fait
10:57 pour tenter de sauver l'Union soviétique en décomposition.
11:01 Et finalement, ça n'a pas fonctionné.
11:02 - Non, pendant dix ans, ils ont essayé désespérément.
11:04 Alors, ce n'est pas moi qui l'affirme,
11:05 ce sont les archives diplomatiques déclassifiées.
11:08 - Mais à rebours de tout ce qu'on dit sur la volonté américaine
11:10 d'abattre l'URSS.
11:11 - Ce qui est formidable, c'est que la plupart des gens
11:13 ont une opinion sur le sujet.
11:15 Moi, je n'en ai pas.
11:16 Ce livre, il est fait pour que les gens se fassent leur propre opinion.
11:18 C'est pour ça qu'il y a des citations longues.
11:20 Vous verrez probablement celles de Solzhenitsyn à Harvard,
11:23 vous verrez les deux citations assez longues de Vladimir Poutine.
11:27 Je rappelle par exemple que Poutine,
11:29 après le fameux discours de Munich, dont tout le monde parle,
11:31 personne ne se rappelle, 2007, que l'année suivante,
11:34 à Bucarest, il est invité au sommet de l'OTAN
11:37 et qu'il fait de longues déclarations.
11:38 Comment sauver la relation entre l'OTAN et la Russie ?
11:42 Quels sont les moyens de résoudre ?
11:43 Pendant 20 ans, Vladimir Poutine a été l'homme de l'Ouest à Moscou,
11:47 pas l'homme de la résurrection.
11:48 C'était Primakov et Elsine qui étaient les hommes de la confrontation avec l'Europe.
11:54 Et ceci à cause du Kosovo.
11:56 - Et vous dites en fait, en substance,
11:57 on n'a pas voulu tendre la main à Vladimir Poutine
11:59 parce qu'on n'a pas voulu voir que derrière lui,
12:01 il y avait la menace de la guerre à Lumbower ?
12:03 - Non, on a voulu tendre la main à Vladimir Poutine.
12:05 Simplement, à un moment ou à un autre,
12:07 l'Occident a considéré qu'on ne pouvait plus sauver l'URSS
12:10 et qu'elle était défaite d'un point de vue économique, financier,
12:13 qu'on n'allait plus s'en sortir et qu'il fallait passer à autre chose.
12:15 C'est le moment où soudainement, 10 ans après la chute du mur,
12:19 l'OTAN commence à s'élargir à l'Est,
12:22 alors que ça n'était pas effectivement prévu comme cela.
12:24 Il n'y a jamais eu de promesse de ne pas élargir.
12:26 Il y a eu une tentative désespérée.
12:28 François Mitterrand va voir Gorbatchev en disant
12:30 "on va dissoudre l'OTAN, on va dissoudre le pacte de Varsovie,
12:32 on va créer un grand truc formidable".
12:34 Poutine dit "mais moi, l'Union Européenne, ça m'arrange".
12:36 L'OTAN, non l'Union Européenne, oui, trouvons une solution en quittant ce sujet.
12:41 Et il y a un architecte du chaos dans cette affaire,
12:43 un formidable géopoliticien qui est Zbigniew Brzezinski,
12:46 qui explique qu'il faut décoller l'Ukraine et la Russie
12:49 car ensemble c'est un empire séparé, ce ne sont que des États,
12:52 et qu'il ne peut y avoir qu'un seul empire, les États-Unis,
12:54 mais qui en même temps dit "attention, le jour où on est seul,
12:58 il va y avoir une compétition multipolaire
13:00 et en fait nous assistons à la renaissance des empires".
13:03 Ottomans, qu'on appelle Turcs, Perses, qu'on appelle Iraniens, et tous les autres.
13:06 - On va finir quand même sur une note d'optimisme, Alain Bauer.
13:10 Pour conclure, je vous cite, vous dites "en Ukraine,
13:12 les régimes autoritaires se sont découverts moins efficaces qu'ils ne le pensaient,
13:15 mais les régimes démocratiques moins faibles aussi qu'ils ne le craignaient".
13:18 - Oui, c'est la bonne nouvelle, c'est la nouvelle de cette capacité
13:21 de passer de la résilience à la résistance, à cette génération
13:25 qui est capable de renverser la table et de faire en sorte justement
13:28 que les pouvoirs autoritaires ne gagnent pas.
13:30 On a la démocratie de sa démographie,
13:32 c'est un enjeu pour nous aussi de régler cette question-là,
13:35 mais on a aussi la capacité à faire passer un message
13:39 qui est qu'en tout état de cause, la démocratie, c'est quand même le pire des systèmes,
13:42 à l'exception de tous les autres.
13:43 Winston Churchill, comme toujours, avait raison.
13:45 - Au commencement était la guerre, votre nouveau livre chez Fayard, Alain Bauer.
13:48 Merci d'être venu nous en parler ce matin sur Europe 1.
13:51 La démocratie française peut être aussi minée de l'intérieur,
13:54 c'est votre Vendredi Thématique.
13:56 Est-ce que la faute en revient à Emmanuel Macron ?
13:58 Est-ce que la faute en revient aux institutions ?
14:01 La cinquième était la bout de souffle, c'est votre Vendredi Thématique.
14:03 On va en parler dans un quart d'heure avec deux invités.
14:06 Nous serons avec l'historien parlementaire Jean Garrigue
14:09 et la constitutionnaliste Anne Le Vade.
14:11 Vos signatures en Europe 1, Catherine Ney, Eugénie Bastier, dans un instant.

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