FRANÇAFRIQUE _ LA FOLLE RUMEUR SUR MARINE LE PEN ET LE SÉNÉGAL
Au Sénégal, une folle rumeur a enflé. Un ancien premier ministre, Cheikh Hadjibou Soumaré, a accusé Marine Le Pen d’avoir reçu 12 millions d’euros de dons de la part du président sénégalais Macky Sall. Cet argent aurait été remis en liquide à l’occasion de la visite de Marine Le Pen au Sénégal en janvier dernier. Suite à ses accusations, Cheikh Hadjibou Soumaré a été inculpé et placé sous contrôle judiciaire. Mais au-delà de ces accusations difficiles à vérifier, le doute demeure. D’autant que le parti de Marine Le Pen n’hésite pas à recourir à des financements troubles pour renflouer ses caisses. Ce fut notamment le cas en 2017, où un homme d’affaires sulfureux du nom de Laurent Foucher sauva le parti d’extrême-droite de la faillite après la campagne présidentielle Mais le Rassemblement national n’est de loin pas la seule formation politique à se financer avec de l’argent pas très propre. Dans sa nouvelle carte blanche, notre journaliste Thomas Dietrich revient sur les scandales de financement occulte qui ont émaillé la vie politique française ces dernières années. Sarkozy en Libye, Macron en Algérie, gauche et droite confondues au Gabon ou au Congo… la classe politique française serait-elle corrompue par les dictatures africains ? Nos campagnes présidentielles seraient-elles abondées par des millions d’argent sale venus de l’autre côté de la Méditerranée ? Quoi qu’il en soit, les scandales sont nombreux et rarement élucidés par la justice.
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00:00 Il y a quand même quelque chose d'assez marrant, c'est que Marine Le Pen a voulu se faire rembourser le déplacement en jet privé de la capitale de Jamenage,
00:07 qu'est Amjarras, par la commission des comptes de campagne, qui coûtait quand même 18 000 euros.
00:10 Alors la commission des comptes de campagne, que des fois on peut critiquer, mais là, elle a quand même dit, il faut mettre le haut là, c'est quand même pas très normal.
00:16 Mais c'est vrai que finalement, elle a été mêlée à pas mal de scandales financiers, qui fait qu'on peut s'interroger sur la visite qu'elle a eue au Sénégal.
00:23 [Générique]
00:29 — Bonjour Thomas. — Salut Lisa.
00:31 — Alors Thomas, tu es venu nous parler d'une rumeur qui enfle, qui enfle au Sénégal et qui concerne Marine Le Pen.
00:37 — Alors c'est une visite qui était un peu passée sous les radars. Donc on était... En mi-janvier, on était à quelques jours de la première manifestation
00:44 contre la réforme des retraites. Il y avait des millions de Français qui se préparaient à descendre dans les rues. Et Marine Le Pen,
00:50 qui se fait la grande défendresse et la grande chevalier pour défendre les pauvres, avait décidé de ne pas être présente,
00:57 puisqu'elle était partie pour une visite de 3 jours au Sénégal. Aucun média, à part Le Point, n'avait été informé.
01:03 Et Marine Le Pen, pourtant, elle est là-bas. Elle a rencontré les militaires français qui sont sur place,
01:09 puisqu'il y a 350 militaires français qui sont présents dans le cadre d'une des 4 bases permanentes françaises en Afrique.
01:15 Elle a visité aussi des exploitations agricoles tenues par des Français. Et cette visite avait été organisée.
01:20 Ça a été révélé ensuite par Le Monde à l'instigation d'un de ses conseillers, du principal conseiller afrique, qui s'appelle Philippe Bonne,
01:26 qui est un personnage un peu trouble, comme on le rencontre en France-Afrique, un peu mi-barbouze, mi-homme d'affaires,
01:31 qui était le monsieur afrique d'Airbus, qui a beaucoup fait l'entremetteur entre elfes et des rébellions, notamment en Angola,
01:38 et qui était ami avec les enfants de Kadhafi. Donc ce monsieur Philippe Bonne, qui a été directeur d'Air Sénégal,
01:44 a organisé le voyage de Marine Le Pen là-bas, au pays de la Terre Anga. Et Marine Le Pen n'est pas venue avec quelconque méchanceté ou animosité.
01:53 C'est-à-dire qu'elle a vraiment passé la brosse à reluire au Sénégal, mais aussi au président sénégalais, Maki Sall. On peut écouter un petit extrait.
02:01 – Il place de l'Afrique au Conseil de sécurité de l'ONU, en siège permanent.
02:06 – Oui, je plaide pour cela depuis longtemps, depuis plusieurs années, parce que je considère qu'il est aujourd'hui totalement anormal
02:15 que le continent africain ne soit pas représenté au Conseil de sécurité des Nations Unies.
02:21 Et qu'en y étant, par définition, son poids serait beaucoup plus important auprès d'autres institutions internationales, y compris financières.
02:30 Ce que je sais, c'est que le président Maki Sall est attaché à la souveraineté du Sénégal.
02:35 Donc entre souverainistes, on ne peut, après tout, que trouver des points de convergence.
02:41 Je souhaite que la France soit souveraine dans ses décisions, sa souveraineté politique,
02:46 mais également énergétique, alimentaire, là où aujourd'hui mon pays est en train de perdre une partie de sa souveraineté.
02:53 Lui-même, je crois, plaide depuis longtemps pour la souveraineté alimentaire du Sénégal, sa souveraineté énergétique.
03:01 Et donc, je pense que quelque part, nous avons, en tout cas lors de ce rendez-vous, parlé la même langue.
03:06 – Quel toupet quand même, non ?
03:08 – Oui, c'est assez incroyable. C'est en décalage avec toutes les phrases qu'elle a pu sortir,
03:12 ou toutes les positions qu'elle a pu sortir vis-à-vis de l'Afrique, notamment très anti-immigrés.
03:15 On passe les saillies racistes de son père, Jean-Marie Le Pen,
03:18 qui a quand même fait les beaux jours du Front national pendant des décennies.
03:22 Alors, ils ont effectivement l'air de très bien s'entendre avec le président Maki Sall, qu'elle a rencontré.
03:27 C'est assez impressionnant, parce qu'en fait, Maki Sall, ce n'est pas un perdre-eau de l'année,
03:32 ce n'est pas un chevalier blanc non plus, c'est quand même un président...
03:34 Alors, le Sénégal a une longue tradition démocratique, et c'est vrai que quand Maki Sall est arrivé au pouvoir en 2012,
03:40 il y a eu une sorte d'espoir, mais espoir déçu,
03:42 puisqu'il y a eu une véritable dérive autoritaire par la suite.
03:46 Maki Sall, vraiment, a décidé de garder le pouvoir pour lui.
03:49 Il y a eu une répression, notamment en 2021, il y a eu des manifestations qui ont éclaté,
03:54 des manifestations spontanées qui ont éclaté au Sénégal,
03:56 où les gens sont descendus dans la rue pour protester contre l'arrestation du principal opposant,
04:01 Ousmane Songon, dans une affaire de viol,
04:02 que ses partisans disent être une sorte d'instrumentalisation,
04:05 une sorte de l'offert pour faire taire cet opposant-là.
04:07 Et les forces de l'ordre sénégalaise avaient tiré sur la population,
04:10 faisant 14 morts, et justice n'a jamais été rendue.
04:14 Et ça continue encore aujourd'hui, avec des arrestations de journalistes, d'opposants,
04:18 l'interdiction des rassemblements, la criminalisation des activités politiques d'opposition
04:23 qu'on fait passer pour du terrorisme.
04:25 Et par-dessus le marché, Maki Sall veut se représenter pour un troisième mandat.
04:28 Il y a des petits soucis d'ordre constitutionnel,
04:29 mais il veut se présenter à la présidentielle en 2024,
04:32 alors qu'il avait promis de ne pas le faire.
04:34 Et le tout avec le soutien de la France, puisque la France est vraiment alliée,
04:40 en tout cas Emmanuel Macron est très allié avec Maki Sall,
04:42 et le soutien bec et ongle n'a jamais dit mot sur le rétrécissement de l'état de droit au Sénégal.
04:48 Mais bon, tout ça ne dérange absolument pas Marine Le Pen,
04:51 qui est tombée dans les bras de Maki Sall.
04:53 Alors Maki Sall, jusqu'au bout, n'avait pas voulu que cette rencontre soit rendue publique.
04:58 Elle a été gardée secrète.
04:59 Maki Sall a refusé qu'il y ait une photo prise de la rencontre entre lui et Marine Le Pen.
05:04 Il a refusé de faire une conférence de presse par la suite.
05:07 Donc évidemment, on s'est demandé, mais qu'est-ce que va finalement faire Marine Le Pen ?
05:12 Est-ce qu'il n'y aurait pas autre chose derrière cette rencontre ?
05:14 Il y a un ancien Premier ministre sénégalais qui a accusé Marine Le Pen
05:18 d'avoir bénéficié d'un don du président Maki Sall, justement, de 12 millions d'euros.
05:24 Alors c'est assez intéressant, puisque ce monsieur a publié une lettre.
05:28 C'est quelqu'un qui s'appelle Cher Adjibu Soumare,
05:30 qui a été ancien Premier ministre de 2007 à 2009 et qui est un technocrate assez respecté.
05:34 Ce n'est pas quelqu'un qui parle à tort et à travers.
05:38 C'est quelqu'un qui a été président de la Commission monétaire de l'Union des États d'Afrique de l'Ouest.
05:43 Et donc, effectivement, dans cette lettre, alors il ne cite pas Marine Le Pen,
05:46 mais tout le monde comprend que c'est elle.
05:47 Il accuse Marine Le Pen d'avoir reçu un don.
05:50 En tout cas, oui, il accuse Marine Le Pen d'avoir reçu un don de 12 millions d'euros de la part de Maki Sall.
05:55 Et Cher Soumare l'a payé très cher, puisqu'il a été arrêté par les forces de l'ordre sénégalaise.
06:00 Il a été placé sous contrôle judiciaire et accusé de diffusion de fausses nouvelles.
06:06 Alors, sur le fond, l'information, pour l'instant, n'est pas vérifiée.
06:09 Peut-être que ce serait intéressant d'enquêter.
06:10 D'ailleurs, en France, on n'en parle absolument pas.
06:13 Alors ça fait les gros titres de la presse sénégalaise.
06:15 Mais quand même, tout ça reste à vérifier.
06:18 Quant au connais, les bizarreries financières du Front national et du Rassemblement national,
06:23 aujourd'hui, on peut se demander s'il n'y a pas Anguissou.
06:26 Oui, parce que ce n'est pas du tout la première fois que le parti de Marine Le Pen rend flou
06:29 ses caisses avec de l'argent pas tout à fait propre, on va dire.
06:32 Alors moi, je crois que la peste brune, ça commode bien du continent noir.
06:36 Malgré toutes les saillies racistes et le fait de ne pas vouloir désimmigrer, ça va,
06:40 il n'y a pas de problème. Quand c'est de l'argent, ça peut venir.
06:42 On se souvient qu'à l'époque, le père Jean-Marie Le Pen avait touché de l'argent du président gabonais
06:47 Omar Bongo, qui était un peu le pied de la France-Afrique,
06:49 qui distribuait à toute la classe politique française.
06:52 Jean-Marie Le Pen s'est même rendu en 2016 à l'investiture de Théodore Obianguema,
06:56 qui est l'inamovible dictateur de la Guinée équatoriale depuis 1979 et qui est richissime,
07:01 d'ailleurs, dont le fils a été inculpé dans l'affaire des biens mal acquis en France.
07:06 Et le Front national a toujours eu plus ou moins des problèmes financiers.
07:10 On se souvient des fameux prêts russes qui ont été contractés pour renflouer les caisses du parti
07:15 qui était au bord de la faillite. Et Marine Le Pen, elle n'en est pas à son coup d'essai en Afrique.
07:20 Elle s'est déjà rendue en 2017, c'était en pleine campagne présidentielle, au Tchad.
07:24 Et c'est vrai que le but de son voyage pose question.
07:27 Officiellement, c'était pour aller rencontrer les militaires français.
07:30 Mais en réalité, elle est allée rencontrer le président tchadien Idriss Déby,
07:34 dictateur de longue date allié à la France qui aujourd'hui est décédé.
07:38 Elle a quand même pris un avion depuis la capitale, N'Djaména,
07:40 pour aller dans le village natal du président tchadien à 1000 kilomètres.
07:44 Et franchement, c'est pas Las Vegas là-bas. On regarde un petit extrait.
07:48 "Venu officiellement à la rencontre des soldats de la force Barkhane,
07:52 Marine Le Pen a fait le déplacement d'Amdiaras
07:55 dans le chef lieu de la région de l'Enedi Est pour rencontrer le chef de l'État, Idriss Déby Hitno.
08:02 Les échanges ont duré une heure."
08:04 "Nous avons envisagé de nous revoir.
08:08 Je souhaite que ce soit dans le cadre d'une visite officielle
08:12 où peut-être j'inviterai le président Déby à l'Élysée."
08:17 Oui, elle aura été très honorée d'inviter le président Déby à l'Élysée.
08:20 Bon, il est mort entre temps, mais son fils a pris le pouvoir.
08:22 Et puis, bon, elle ne désespère pas d'arriver au pouvoir en 2027
08:26 et d'inviter tous les dictateurs sur le perron de l'Élysée.
08:30 Il y a quand même quelque chose d'assez marrant,
08:31 c'est que Marine Le Pen a voulu se faire rembourser le déplacement en jet privé
08:36 de la capitale N'Djaména jusqu'à Amdiaras par la commission des comptes de campagne,
08:39 qui coûtait quand même 18 000 euros.
08:40 Alors, la commission des comptes de campagne, que des fois on peut critiquer,
08:43 mais là, elle a quand même dit, il faut mettre le haut là.
08:44 C'est quand même pas très normal.
08:47 Mais c'est vrai que finalement, elle a été mêlée à pas mal de scandales financiers,
08:50 qui fait qu'on peut s'interroger sur la visite qu'elle a eue au Sénégal.
08:53 – Puis il y avait aussi ce prêt étrange qui avait sauvé Marine Le Pen en 2017
08:57 et sur lequel toi, tu avais enquêté.
08:59 – Oui, j'ai bossé là-dessus.
09:02 En fait, le Front National était au bord de la faillite,
09:05 puisqu'il lui fallait 8 millions d'euros pour équilibrer les comptes de campagne
09:10 et pour que ces comptes de campagne de la présidentielle de 2007
09:13 ne soient pas retoqués par la commission des comptes de campagne.
09:16 Et donc que le remboursement intervienne.
09:17 Et si le remboursement n'intervenait pas, le parti allait faire complètement faillite.
09:21 Et c'est vrai que la FN s'est mise en quête d'argent
09:25 et a trouvé un prêt assez étrange de 8 millions d'euros d'un homme d'affaires français,
09:30 qui s'appelle Laurent Fouché, qui est très, très lié à la France-Afrique,
09:32 qui a fait des affaires très louches en Centrafrique, à l'île Maurice, en Angola,
09:36 et j'en passe, c'est des meilleurs.
09:38 Et cet argent-là est arrivé miraculeusement sur les comptes du Front National.
09:42 Il a permis de se sauver pour quelque contrepartie, je ne sais pas.
09:45 Mais ce qui est quand même assez étonnant, on va dire,
09:48 c'est qu'il n'y a pas eu d'enquête sur ça.
09:50 Normalement, il y a un organisme qui s'appelle Tracfins, qui est lié à Bercy,
09:54 qui contrôle à partir de 20 000 euros, si vous recevez un virement bizarre d'un paradis fiscal,
09:58 on met un peu l'eau là.
09:59 Là, tout d'un coup, il y a 8 millions d'euros qui sont arrivés des Émirats Arabes Unis,
10:06 mais sans doute plus loin de l'île Maurice,
10:07 de quelqu'un qui était recherché internationalement,
10:09 ce Laurent Fouché, avec des procédures pénales partout pour des histoires d'escroquerie et tout ça.
10:13 L'argent est rentré. Il y a une enquête qui a été lancée,
10:17 mais elle n'a jamais vraiment rien donné.
10:19 Ça pose quand même des petites questions.
10:21 Il n'y a pas que l'extrême droite qui est accusée de prendre de l'argent sale en Afrique, si je ne me trompe pas ?
10:25 Ah non, c'est une vraie tradition.
10:26 De toute façon, la politique est l'art d'obtenir de l'argent des riches,
10:29 disait Jules Michel, le grand écrivain.
10:31 Et alors on adore aller prendre de l'argent des riches en Afrique.
10:34 Et tant pis, finalement, si cet argent-là est volé à la population qui meurt de faim.
10:39 C'est la fameuse République des malettes.
10:40 Ça veut dire que pendant, il y a eu un système qui a été instauré à partir des années 60,
10:44 quand on a décolonisé les pays d'Afrique francophone,
10:47 on a maintenu une certaine forme de tutelle.
10:49 Et effectivement, des potentats africains donnaient de l'argent qui permettait,
10:53 soit de financer la vie politique ou de financer des campagnes présidentielles françaises.
10:58 C'est vraiment ce qui explique peut-être le mieux, ce qui symbolise le mieux la France-Afrique.
11:02 Et c'est vrai que personne n'en parlait beaucoup.
11:06 D'ailleurs, on se souvient que Robert Boulin, qui était ministre du travail de Valéry Giscard d'Estaing,
11:11 qui était suicidé à la fin des années 70 dans 50 centimètres d'eau en région parisienne,
11:17 avait, l'enquête plus tard l'a révélée, ou en tout cas l'a soupçonné,
11:21 voulait révéler des choses sur justement le financement occulte de la vie politique française,
11:24 notamment du RPR par ELF, la grande compagnie qui exploite de l'pétrole,
11:29 qui exploite du pétrole en Afrique, notamment en Afrique centrale.
11:32 Et donc effectivement, ça a continué.
11:33 Ça a continué pendant des années.
11:35 Et on se souvient qu'il y a quelques années, un monsieur qui traîne dans pas mal de réseaux,
11:39 un avocat qui s'appelle Robert Bourji, qui est très proche des présidents africains,
11:43 au point qu'il appelait Omar Bongo, le président gabonais, papa,
11:46 avait mis les pieds dans le plat et fait des révélations fracassantes.
11:49 On écoute.
11:50 Lorsque vous révélez tout cela, vous en prenez directement Jacques Chirac et à Dominique de Villepin,
11:54 notamment, de façon très dure.
11:58 Vous prenez des risques personnels très importants.
12:00 Vous pouvez, c'est peut-être infraction pénale,
12:03 vous avez assisté à des détournements de fonds publics,
12:05 à des campagnes, des financements illégaux de campagne.
12:07 Pourquoi faites-vous ça ?
12:09 Je le fais.
12:11 J'ai mesuré les risques, mais je faisais, madame Elkrief,
12:15 ce que ma conscience me demandait de faire.
12:17 Cela faisait un bout de temps que ma conscience était parodée.
12:22 Et quand je vois le débat politique, je vous en ai parlé,
12:26 j'ai dit qu'il était temps de faire certaines révélations
12:32 sur le côté obscur de la France-Afrique et des relations franco-africaines.
12:37 Et je n'avais parlé jusque-là que de ce que j'avais fait,
12:44 c'est-à-dire les dons en espèces de chers états au président Chirac,
12:49 et avant qu'il ne soit président, à M. Chirac, maire de Paris,
12:53 et ensuite, lorsqu'il est devenu président,
12:56 à M. Chirac, président de la République, et à M. de Villepin.
13:00 Cela entre 1995 et 2002.
13:03 Robert Bourgi, tout personnage peu recommandable qu'il soit,
13:06 révélait quand même un secret de positionnel,
13:08 notamment que tous les présidents français se sont plus ou moins financés en Afrique.
13:11 On se souvient des fameux Diamante Bocassat, Valère Giscard d'Estaing.
13:15 Mais c'est vrai qu'il y a quand même une distorsion entre ces présidents
13:19 qui n'hésitaient pas à se faire financer les campagnes électorales
13:21 et ce qu'ils disaient, par exemple, des Africains.
13:22 Il faut quand même se rendre compte, ce n'est pas si vieux,
13:24 mais Chirac disait un truc en 2004 à propos des Africains.
13:27 Il disait, je cite, mais c'est d'un racisme incroyable,
13:30 "Ils sont joyeux parce que les Africains sont joyeux par nature.
13:33 Ils sont enthousiastes, ils ont le sourire, ils applaudissent,
13:36 ils sont contents, ils voient qu'il y a un monsieur qui passe,
13:38 cela leur permet d'être sur le bord de la route, ils sont contents."
13:41 Voilà, et ça ne l'empêchait visiblement pas d'aller prendre de l'argent
13:43 qui appartenait au peuple africain.
13:45 Alors, Robert Bourgi s'était télécommandé,
13:47 puisqu'effectivement, il s'en prenait à Jacques Chirac et à Dominique de Villepin.
13:51 Et de qui ? Les proches Robert Bourgi, même encore maintenant, de Nicolas Sarkozy.
13:54 Et Jacques Chirac et Dominique de Villepin étaient les ennemis jurés de Nicolas Sarkozy.
13:59 D'ailleurs, Robert Bourgi, dans la même interview, avait dit,
14:01 "Non, non, mais vous savez, la France afrique, c'est fini.
14:03 Nicolas Sarkozy est quelqu'un de tout à fait propre,
14:06 il n'y a pas de problème." Ce qui s'est révélé pas tout à fait vrai.
14:08 – Oui, ce n'était pas vraiment fini avec Nicolas Sarkozy,
14:10 puisqu'il y a eu l'affaire du financement libyen de sa campagne de 2017,
14:14 un financement occulte dont Sarkozy se défend.
14:16 On peut regarder une petite vidéo.
14:18 – Avez-vous, oui ou non, reçu de l'argent liquide de Libye
14:23 pour financer votre campagne de 2007, comme l'a affirmé l'intermédiaire Zia Taki-Eddin ?
14:28 Alors, pas seulement dans les médias, mais à la justice française hier aussi.
14:32 – Quelle indignité ! Nous sommes sur le service public.
14:37 – Vous en avez parlé vous-même hier soir.
14:39 – Vous n'avez pas honte de donner écho à un homme qui a fait de la prison,
14:44 qui a été condamné à innombrables reprises pour diffamation et qui est un monteur.
14:49 Ce n'est pas l'idée, voyez-vous, que je me fais du service public.
14:52 – C'est une honte.
14:54 – Ben oui, c'est quand même assez inquiétant.
14:56 Il a un certain talent d'acteur, on ne va pas lui enlever ça.
14:59 Mais c'est vrai qu'il y a eu des enquêtes depuis des années.
15:01 Il y a eu une enquête judiciaire, mais il y a eu beaucoup d'enquêtes journalistiques
15:03 qui ont effectivement montré que très probablement, Nicolas Sarkozy
15:08 a financé sa campagne présidentielle de 2007 avec de l'argent qui venait de Muammar Qadhafi,
15:13 qui avait été donné par le guide libyen et que peut-être ensuite, d'ailleurs,
15:16 il aurait voulu se débarrasser d'un témoin gênant.
15:19 Et c'est vraiment allé très loin puisqu'il y a eu beaucoup de cadavres dans le placard.
15:23 Aujourd'hui, effectivement, il y a eu des mises en examen, notamment de Nicolas Sarkozy.
15:26 On attend un procès, mais cette affaire n'est absolument pas finie.
15:30 Moi, je me souviens que c'est quelque chose que moi, j'ai vu, dont moi, j'ai été témoin.
15:36 Il y a le bras droit de Muammar Qadhafi qui s'appelle Beshir Salah,
15:39 qui était le grand argentin de Muammar Qadhafi.
15:41 Et d'ailleurs, quand Qadhafi est tombé, Nicolas Sarkozy a fait évacuer vers la France.
15:45 Et quand les juges sont intéressés à ce monsieur Beshir Salah,
15:49 Nicolas Sarkozy a tout fait pour l'envoyer vers le Niger,
15:52 là où il serait à l'abri de la justice.
15:54 Et en 2017, Macron se rend en visite au Niger.
15:59 Et Beshir Salah cherche absolument à rencontrer Emmanuel Macron.
16:02 Il est très inquiet. Il veut lui faire des révélations.
16:05 D'ailleurs, il envoie même une lettre, c'est assez cocasse, à Mathieu Gallet,
16:08 qui est le président de Radio France,
16:09 en croyant que Mathieu Gallet est l'amant d'Emmanuel Macron, ce qui est complètement faux.
16:13 Et Beshir Salah cherche, cherche, cherche, parce qu'on m'a raconté cette histoire,
16:17 à rencontrer Emmanuel Macron. La rencontre ne se fait pas.
16:22 Mais quelques semaines plus tard, Beshir Salah est victime d'une tentative d'assassinat en Afrique du Sud.
16:27 Il est sauvé in extremis. Donc est-ce qu'on aurait voulu faire un témoin gênant ?
16:29 Parce que lui a bien sûr les secrets sur le financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.
16:35 En tout cas, voilà, c'est quelque chose qu'on espère vraiment qu'il y aura un procès,
16:39 que toute la lumière sera faite sur cette pardon de la République.
16:43 – Ces soupçons de financement illégal de campagne n'ont pas épargné Emmanuel Macron,
16:47 non plus réputé de se réprocher de Nicolas Sarkozy.
16:50 On peut regarder un petit extrait du documentaire "Dof Investigation",
16:53 "Nos camarades indépendants", consacré au possible financement de la campagne 2017
16:56 d'Emmanuel Macron par des oligarques algériens.
16:59 [Musique]
17:01 Selon une source algérienne proche des services de renseignement,
17:05 le président du forum des chefs d'entreprises algériens
17:07 aurait effectivement incité ses collègues à financer le candidat Macron.
17:12 [Bip]
17:14 Il ne sait pas qu'il est enregistré.
17:16 – En 2017, ils ont organisé la visite de Macron à la jail, c'était le patronat,
17:22 à la tête du patronat c'était Haddad,
17:24 et les gens du patronat, ils ont tous mis la main à la poche
17:28 pour le financement de l'autre, tous, sans exception.
17:31 Celui qui dit non, il aura des problèmes, d'accord ?
17:37 Donc Haddad, c'était le... qui fait la colette, d'accord ?
17:44 [Bip]
17:44 – Alors pour l'instant, il n'y a pas d'enquête qui est ouverte sur cette question-là,
17:48 même s'il y a de très très nombreux témoignages qui tentent à prouver
17:51 qu'Emmanuel Macron, qu'il y avait des difficultés à trouver des prêts bancaires,
17:54 puisque c'était vraiment très compliqué.
17:55 On sait que pour être remboursé par l'État, il faut atteindre 5% des voix,
18:00 et c'était à l'époque où François Fillon était encore désigné comme grand favori,
18:03 il n'y avait pas encore eu cette affaire qui avait été révélée
18:05 par le canard hachéné d'assistant parlementaire,
18:07 et bien Emmanuel Macron avait du mal à trouver des prêts,
18:09 donc peut-être a-t-il eu recours à certains réseaux opaques,
18:13 c'est vrai que dans cette affaire on retrouve notamment Alexandre Joury,
18:16 qui était prince occulte de la République,
18:18 qui lui aussi est mis en examen dans le financement de la campagne
18:21 de Nicolas Sarkozy par Muammar Gaddafi, et qui intervient dans ce dossier
18:25 qui étrangement, effectivement, malgré ses mises en examen,
18:27 a été remis en liberté conditionnelle, a pu quitter le territoire français.
18:31 Et on retrouve aussi Alexandre Benalla, qui effectivement a été
18:36 a missus dominicus, très actif d'Emmanuel Macron pendant la campagne,
18:39 il a fait de bien étranges voyages qui effectivement n'ont peut-être
18:44 pas grand-chose à voir avec le tourisme, on a parlé de l'Algérie,
18:47 on a parlé de l'île Maurice qui est un paradis fiscal,
18:48 on a parlé de la République démocratique du Congo,
18:51 on peut parler aussi du Tchad, et peut-être que ces voyages
18:54 et ce qu'il a fait expliquent le lien entre la France et le Tchad.
18:58 Et puis il y a beaucoup de zones d'ombre qui se posent sur la campagne présidentielle
19:02 de 2017, c'est vrai que par exemple dans les financements un peu étranges
19:07 algériens d'Emmanuel Macron et ce financement de Laurent Fouché
19:10 qui prête 8 millions d'euros à Marine Le Pen, on retrouve un peu
19:13 les mêmes personnes, par exemple quelqu'un comme Laurent Ambadia
19:15 qui aujourd'hui est le numéro 2 de Veolia, qui est considéré comme un très proche
19:18 d'Emmanuel Macron, mais qui est aussi considéré comme un très proche
19:21 de Laurent Fouché, le mécène miraculeux de Marine Le Pen,
19:24 et Laurent Ambadia a de grandes attaches à l'île Maurice.
19:27 Donc moi j'ai beaucoup travaillé sur ça, pas sur la question algérienne,
19:31 mais sur celle du financement du Rassemblement national,
19:34 je m'interroge quand même sur le fait que peut-être à un moment ou à un autre
19:37 on ait laissé sauver le Rassemblement national qui finalement permet
19:41 à Emmanuel Macron, en tout cas a permis à Emmanuel Macron
19:43 de rempronter deux présidentielles.
19:45 Ce qui est incroyable c'est que les enquêtes judiciaires
19:47 sur les financements occultes de campagne ne débouchent quasiment jamais
19:50 sur des condamnations de justice.
19:51 Sur la question libyenne on est 15 ans après les faits,
19:55 il y a une affaire qui est quand même assez symptomatique,
19:57 c'est l'affaire du financement de la campagne présidentielle
19:59 d'Edouard Balladur en 1995, en fait,
20:02 qui on a miraculeusement comblé 10 millions de francs de trous
20:07 grâce, c'est en tout cas ce qui a été conclu par la Cour de la justice de la République,
20:12 à des rétro-commissions sur des contrats de vente de frégates
20:17 avec l'Arabie saoudite et de vente de sous-marins avec le Pakistan.
20:21 Et en plus ce qui est grave c'est que la suspension de ces commissions
20:25 dans le cadre notamment de la vente des sous-marins au Pakistan
20:28 a fait en sorte qu'il y ait des représailles de la part des services secrets pakistanais
20:32 et en 2002 à Karachi il y a eu un attentat qui a fait 11 morts
20:36 parmi des employés de la direction des chantiers navals.
20:40 Donc il y a eu des implications bien concrètes et ces financements-là
20:43 ont créé des drames et des crimes et il y a des gens qui ont du sang sur les mains.
20:47 Et qu'est-ce qui s'est passé ?
20:48 Pendant des années on n'a absolument rien fait,
20:51 il y a eu un procès qui s'est tenu en 2021,
20:53 2021, il faut se rendre compte, 26 ans après les faits,
20:56 Edouard Balladur avait 91 ans, on a relaxé Edouard Balladur,
21:01 on a condamné François Léotard qui était son ministre de la Défense
21:04 à deux ans de prison avec sursis,
21:06 ce qui pose des questions sur la Cour de justice de la République
21:09 qui est quand même très clémente avec ses pairs
21:11 puisqu'elle est censée juger les crimes pénaux des ministres en exercice
21:17 et elle est composée non pas de magistrats professionnels
21:19 mais principalement de députés et de sénateurs
21:21 et seulement de trois magistrats professionnels.
21:23 Et puis au-delà de ça, comment ne pas comprendre
21:27 le ressentiment qu'il peut avoir contre la France,
21:31 en tout cas contre la politique française en Afrique
21:33 quand on s'abaisse à de pareilles pratiques,
21:35 quand finalement on a volé l'argent d'une population
21:38 qui végète dans la misère et on l'a donné pour financer des campagnes françaises,
21:42 comment ne pas comprendre qu'il y a une partie de la jeunesse africaine,
21:45 des populations africaines qui n'en peuvent plus de cette France,
21:47 qui a décidé de leur prendre tout et de ne rien leur laisser
21:51 pour financer les mesures les plus sombres de la République.
21:54 Merci beaucoup Thomas de toujours nous relever
21:57 et nous apporter ces grands scandales qui passent toujours plutôt crème on va dire.
22:00 Merci.
22:01 Merci.
22:02 Merci.
22:03 Merci.
22:04 Merci.
22:05 Merci.
22:06 Merci.
22:07 Merci.
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22:10 Merci d'avoir regardé cette vidéo !