• l’année dernière
Marc Ferracci, député et vice-président du groupe Renaissance, et Olivier Besancenot, porte-parole du NPA sont les invités de Questions politiques avec Thomas Snégaroff, Carine Bécard, Françoise Fressoz et Nathalie Saint-Cricq.

Retrouvez Questions Politiques tous les dimanches à midi sur France Inter et sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/questions-politiques

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Transcription
00:00 (Générique)
00:08 Bonjour, bonjour et bienvenue dans "Questions politiques".
00:10 Le rendez-vous politique du dimanche midi sur France Inter, à la radio, France Info,
00:14 à la télévision, en partenariat avec le journal "Le Monde".
00:17 Avec aujourd'hui une émission particulière à deux jours,
00:19 de la grande manifestation contre la réforme des retraites
00:21 et peut-être d'un blocage durable du pays.
00:24 Ce midi, on va poser une question à deux invités.
00:27 Cette question la voici. Faut-il bloquer le pays pour se faire entendre du gouvernement ?
00:31 Et nous allons donc la poser successivement à Marc Ferracci, député Renaissance,
00:35 vice-président du groupe à l'Assemblée Nationale,
00:37 l'un des plus proches d'Emmanuel Macron qu'il connaît depuis plus de 20 ans.
00:40 Puis cette question, nous la poserons ensuite à Olivier Besancenot,
00:43 l'un des visages de la contestation sociale et politique en France,
00:47 candidat à la présidentielle en 2002 et en 2007,
00:49 aujourd'hui porte-parole du nouveau parti anticapitaliste.
00:52 *Question politique. Thomas Négaroff sur France Inter*
00:59 Mais en attendant notre premier invité, le tour de table désormais traditionnel.
01:04 Bonjour Nathalie Saint-Clicq de France Télévisions.
01:06 Bonjour Thomas Négaroff. Bonjour à tous. Bonjour mesdames.
01:09 Voilà, un peu plus enthousiaste mais quand même.
01:11 Bonjour Françoise Fresseaus du journal "Le Monde".
01:14 Bonjour à tous.
01:15 Et bonjour Karine Bécard de la rédaction de France Inter.
01:18 Salut tout le monde.
01:19 Salut à vous, à toi j'allais dire.
01:21 On commence avec vous Françoise,
01:23 sur la fin de vie et la convention qui rend ces conclusions.
01:27 Oui, alors ce qui a retenu mon attention,
01:29 c'est tout le débat démocratique autour de la convention citoyenne sur la fin de vie.
01:34 180 citoyens ont été convoqués pour émettre un avis sur une question éminemment complexe.
01:40 Des votes sont intervenus avant même la fin de la convention,
01:43 au terme desquels une majorité de participants s'est prénoncée
01:45 pour que soit rendu possible le suicide assisté
01:48 et une plus faible majorité pour que soit rendu possible l'euthanasie.
01:52 Mais à peine ces votes ont-ils été émis que des protestations se sont élevées.
01:56 Beaucoup ne se sont pas reconnus dans ces votes,
01:59 beaucoup ont dit qu'il y avait eu des débats beaucoup plus complexes
02:02 qui n'avaient pas été rendus compte.
02:03 D'autres ont dit que la question des soins palliatifs n'avait pas été bien étudiée.
02:08 Et ce qui est intéressant, c'est qu'au fond,
02:10 on avait eu le même type de débat au moment de la convention citoyenne sur le climat.
02:14 Au début, les citoyens sont absolument enchantés.
02:17 Ils sont très fiers, très heureux de participer à l'élaboration d'une décision
02:21 qui va, au fond, concerner toute la population.
02:24 Et puis plus les travaux avancent et plus un malaise s'installe
02:28 parce qu'on a l'impression que le comité de gouvernance a pris trop de pouvoir
02:31 ou que les experts se sont fait trop pressants.
02:34 En fait, cette grenille est assez normale.
02:36 En démocratie, vous avez une majorité et une minorité
02:38 qui n'est pas forcément toujours contente.
02:40 Vous avez des lobbies aussi qui exercent des pressions,
02:42 des influenceurs qui tentent de faire valoir leur cause
02:45 et cela renvoie, au fond, à une question fondamentale qui nous concerne tous.
02:49 Jusqu'à quel point le citoyen qui dépose son bulletin de vote dans l'urne
02:53 est-il vraiment libre de sa décision ?
02:55 Je vous laisse la réponse.
02:57 Merci. Merci pour la question, en tout cas.
03:00 Autre question, celle de la popularité d'Emmanuel Macron.
03:02 Je vais dire, moi je ne réponds pas à cette question.
03:04 Non, une autre question, Karine, avec un indicateur
03:06 qu'on évoquait beaucoup, qu'on évoque un peu moins,
03:09 la popularité de l'exécutif.
03:11 Exactement. À une époque pas si lointaine,
03:13 les chiffres de la cote de popularité des deux têtes de l'exécutif
03:16 étaient abondamment publiés d'abord et commentés.
03:19 Or, depuis le second quinquennat d'Emmanuel Macron,
03:22 depuis septembre dernier, en réalité,
03:24 depuis qu'il est question, matin, midi et soir,
03:27 de sondage sur l'acceptation, ou plutôt sur le refus,
03:29 de la réforme des retraites,
03:31 la cote de popularité du président et de sa première ministre
03:34 passe littéralement sous les radars.
03:36 Elle a pratiquement disparu, on n'en parle quasiment plus.
03:38 Donc, reprenons les choses en main.
03:40 Institut Ipsos, dernière livraison, qui date de mercredi,
03:44 pour le mois de février, le président Macron perd 6 points,
03:47 32% d'opinion favorable.
03:49 Seulement 64% des Français assurent qu'ils ne lui font plus confiance.
03:54 C'est 32% d'opinion favorable, évidemment c'est faible,
03:57 c'est son plus bas niveau depuis 3 ans, depuis 2020,
04:01 même s'il était descendu beaucoup plus bas,
04:03 souvenons-nous, au moment de la crise des Gilets jaunes.
04:05 Fin décembre 2018, Emmanuel Macron ne dépassait plus les 20% d'opinion favorable.
04:09 Bref, aujourd'hui, que se passe-t-il ?
04:11 Deux choses.
04:12 Emmanuel Macron d'abord paie cash, tout simplement sa volonté
04:15 de reporter l'âge légal de départ à la retraite, de 62 à 64 ans.
04:19 Auprès des Français, ça ne passe pas, ils n'en veulent pas.
04:22 Mais c'est pas tout, il paie cash aussi les errances d'une communication
04:26 absolument ratée, et depuis le début, sur le sujet.
04:29 Encore cette semaine, le gouvernement ne sait plus comment se dépatouiller
04:32 de ces mensonges à rallonge sur sa retraite minimale à 1200 euros.
04:37 Elisabeth Borne à Matignon, qui a chuté à 27% dans les sondages,
04:41 n'imprime plus rien auprès de l'opinion.
04:43 En réalité, c'est guermu à l'Elysée.
04:45 Macron est à nouveau tout seul pour décider,
04:47 et tout seul pour communiquer son spin doctor.
04:50 Depuis septembre, Frédéric Michel, qui est passé chez Tony Blair,
04:54 qui est passé par Rupert Murdoch aussi,
04:56 qui devait révolutionner la communication, n'a visiblement pas su innover.
05:00 Résultat, les sondages sont en berne,
05:02 la réforme des retraites est on ne peut plus contester,
05:05 et lui, Frédéric Michel, de plus en plus mis de côté,
05:08 a deux doigts même d'être désavoué.
05:10 Merci, Karine. Et avec vous, Nathalie,
05:13 communication toujours, erratique,
05:15 communication qui part dans tous les sens,
05:17 mais pas seulement du côté des élus.
05:19 Pas seulement erratique, mais en plus excessive,
05:21 et quelquefois délirante.
05:22 Les excès de verbeaux donnent l'impression
05:24 qu'il y a une espèce de perte de sens commun chez tout le monde.
05:26 Je vais vous donner un petit florilege ce matin.
05:29 Court interview de Patrick Blaise, CFDT Routes,
05:32 qui dit "le paquet de pâtes en rayon mardi matin
05:35 ne sera peut-être pas là jeudi".
05:37 Comme s'il y avait effectivement une espèce de révolution française
05:39 qui allait arriver, qu'on allait vivre une espèce de blocus.
05:42 Je reprends la fameuse phrase d'Emmanuel Lépine,
05:45 qui lui est de la CGT chimie,
05:47 il veut mettre à genoux l'économie française.
05:49 Si chacun a vu la tête de Philippe Martinez,
05:51 qui a tout d'un coup appris par les journalistes ce genre de phrase,
05:54 et celle de Frédéric Souillaud,
05:56 vous avez compris qu'ils étaient complètement débordés.
05:58 Et puis du côté du gouvernement, on assiste aussi à des choses un peu délirantes.
06:00 Je reprends juste la déclaration d'Olivier Véran,
06:03 à la suite du Conseil des ministres,
06:04 qui dit que si on retirait la réforme,
06:06 on prendrait le risque d'une catastrophe écologique,
06:08 agricole ou sanitaire.
06:10 Donc s'il n'y a pas la réforme, c'est le déluge.
06:12 On aura compris.
06:13 Je rajoute peut-être ce matin une communication
06:15 que personnellement j'ai trouvée un peu maladroite.
06:16 Celle d'Olivier Dussopt, qui dit que la réforme est de gauche.
06:20 Je ne suis pas sûre que ce soit d'abord vrai,
06:22 et en plus je ne suis pas sûre que ce soit un argument convaincant.
06:24 Donc on va demander quelque chose entre tout ce qu'on va entendre d'ici mardi,
06:27 qui est bloqué, à l'arrêt, semaine noire,
06:29 semaine de tous les dangers, bordélisée, à genoux, zad.
06:32 On voudrait juste que la violence des mots ne se retrace pas dans les rues.
06:35 Ça serait bien pour tout le monde et ça serait un signe de civilisation.
06:38 Dernier point, il y a une tribune ce matin des nobles anciens présidents de l'Assemblée,
06:42 Jean-Louis Debray, Bernard Acoyer, François de Rugy,
06:45 qui disent "Calmez-vous, c'était pour un moment important".
06:48 C'est les anciens présidents de l'Assemblée.
06:49 C'était mieux avant aussi.
06:50 C'était mieux avant.
06:51 Quand ils étaient au pouvoir.
06:52 C'est quelque chose qu'on dit en général quand ils étaient au pouvoir.
06:54 Mais je pense qu'on devrait garder un peu de tenue, tout ça, quand même.
06:56 Eh bien de la tenue, on va en avoir.
06:57 On espère, en tout cas, avec nos deux invités.
06:59 Le premier nous rejoint, Marc Ferracci, est l'invité de "Questions politiques".
07:02 Bonjour Marc Ferracci.
07:12 Bonjour.
07:13 Député Renaissance, vice-président du groupe à l'Assemblée nationale,
07:16 je vous présente comme un des plus anciens camarades d'Emmanuel Macron,
07:19 que vous avez connu à la fin des années 90.
07:21 Donc ça ne nous et vous rajeunit pas.
07:24 Ce matin, Olivier Dussopt et Nathalie Emparellé évoquent une réforme de gauche
07:28 en parlant de la réforme des retraites.
07:30 Alors, c'est sûr que c'est une réforme.
07:32 Mais quand on a tous les partis de gauche et tous les syndicats,
07:35 y compris les réformistes, contre soi,
07:37 est-ce que c'est certes une réforme,
07:39 mais est-ce que c'est parce que la gauche ne l'a pas compris ?
07:41 Écoutez, c'est une réforme qui vise à préserver notre système de retraite par répartition,
07:44 qui est un acquis très cher au cœur de la gauche.
07:47 Il faut quand même le rappeler.
07:49 - Ce n'est pas qu'un acquis de gauche.
07:51 - Après guerre, ce sont quand même des moments politiques de gauche
07:54 qui ont porté ce projet auquel nous sommes très attachés.
07:57 Je pense que dans cette réforme,
07:59 il y a à la fois cette ambition de conserver notre système par répartition
08:03 qui est un socle de la solidarité nationale,
08:05 qui est un socle de la cohésion sociale.
08:07 Puis il y a aussi un argument qui n'a pas toujours été utilisé,
08:10 mais auquel moi je suis assez attaché,
08:12 qui est que cette réforme,
08:14 en repoussant l'âge légal de départ à la retraite,
08:16 va contribuer à maintenir les seigneurs en emploi plus longtemps,
08:18 va contribuer à augmenter le nombre de personnes qui travaillent.
08:21 - On ne peut pas voir tout ça, en fait, on n'en sait rien.
08:23 - Ce sont des efforts, si, ça on le sait,
08:25 ce sont des efforts que l'on demande aux Français, c'est très clair,
08:28 il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt au moment d'expliquer cela.
08:31 Mais ce sont aussi des efforts qui vont permettre de nous projeter dans l'avenir,
08:35 parce que ça permettra de financer le système de retraite,
08:37 les cotisations en retraite iront financer les pensions,
08:40 mais ça permettra aussi de créer des richesses
08:42 qui financeront des investissements dans la transition écologique,
08:45 dans l'énergie, dans l'industrie,
08:47 et de ça on a besoin collectivement,
08:49 et je pense que la notion d'investissement public,
08:51 c'est aussi une notion qui peut se rattacher à une tradition politique de gauche.
08:54 - Donc je repose ma question, la gauche n'a rien compris.
08:56 - Non, la gauche est dans son rôle,
08:58 il y a une réforme qui n'est pas populaire,
09:00 il y a des oppositions qui sont tout à fait dans leur rôle,
09:04 j'ai presque envie de dire que c'est de bonne guerre.
09:06 - Mais vous dites réforme de gauche, vous, ou pas ?
09:08 - Je dis qu'il y a une réforme qui vise à préserver des acquis,
09:12 et encore une fois des acquis qui sont chers au cœur de la gauche,
09:15 il y a aussi une réforme, pardonnez-moi de le mentionner,
09:18 qui produit des améliorations dans notre système de retraite.
09:21 Alors après on peut en discuter, on peut se poser la question,
09:24 mais la dernière réforme des retraites qui a repoussé l'âge légal,
09:27 c'est la réforme WERTH en 2010,
09:29 elle a généré à peu près 35 milliards d'euros d'économies,
09:32 et elle s'est accompagnée de 1,5 milliard de dépenses
09:35 pour améliorer notre système avec des droits nouveaux.
09:37 La réforme que nous faisons,
09:39 elle va en 2030 générer 18 milliards d'euros d'économies,
09:42 et un tiers de ces économies, équivalent d'à peu près 6 milliards,
09:45 va être consacrée à des mesures d'accompagnement.
09:47 - Ça peut encore augmenter d'ailleurs.
09:49 - Donc évidemment on peut discuter sur la pertinence des choix qui ont été faits,
09:54 sur la pertinence des mesures d'amélioration,
09:56 la pension minimale, la pénibilité,
09:57 je serais heureux qu'on puisse en discuter,
09:59 parce que parfois on écoute des choses assez inexactes sur le sujet,
10:03 mais la réalité c'est qu'il y a un équilibre dans cette réforme,
10:05 il y a un équilibre entre les efforts qui sont demandés
10:07 et les améliorations qui sont apportées.
10:10 - Il y a quand même cette coupure avec Laurent Berger,
10:13 on se souvient quand même qu'Emmanuel Macron vient du camp de gauche,
10:16 et là on voit une coupure avec la gauche réformiste,
10:19 qui semble irrémédiable.
10:21 Est-ce que vous la regrettez,
10:22 et est-ce que vous pensez que ça peut s'arranger,
10:24 ou qu'on est vraiment maintenant sur quelque chose de définitif ?
10:28 - Moi je pense que jamais rien n'est irrémédiable et n'est définitif.
10:32 - Y compris cette réforme ?
10:35 - Écoutez, on verra les traces que laisseront cette réforme,
10:39 mais il y a au-delà de cette réforme un certain nombre de sujets,
10:43 très concrets pour les Français,
10:45 dont nous allons devoir discuter dans les prochaines semaines
10:48 et les prochains mois avec les partenaires sociaux.
10:50 Je vous donne juste un exemple,
10:51 un exemple qui est d'ailleurs cher au cœur de Laurent Berger et de la CFDT.
10:54 Nous allons introduire dans le projet de loi sur l'emploi
10:56 qui va intervenir avant l'été,
10:58 un projet de compte épargne-temps universel,
11:01 de compte épargne-temps qui concernera tous les salariés.
11:03 Aujourd'hui seulement 15% des salariés à peu près
11:05 sont concernés par un compte épargne-temps qui vous permet d'épargner,
11:08 pour ensuite pouvoir partir en congé,
11:09 pour faire face à un accident de la vie
11:11 ou pour partir plutôt à la retraite.
11:13 Ce projet, il est dans le programme du Président de la République,
11:16 nous le portons, nous allons le mettre en œuvre
11:18 et j'espère que nous allons le mettre en œuvre
11:20 en discutant de manière étroite avec les partenaires sociaux.
11:22 Donc je pense qu'il y a des moments dans lesquels nous allons nous projeter
11:29 qui permettront de rétablir ce lien et de rétablir ce dialogue,
11:32 en tout cas pour ma part je l'espère.
11:33 - Vous appuyez à quoi le fait que les Français ne bougent pas tellement
11:36 par rapport à leur défiance vis-à-vis de ce projet de loi ?
11:39 Alors il y a quelque chose qui est stable, c'est qu'ils pensent que ça va passer,
11:42 une espèce de fatalisme.
11:43 Est-ce que c'est parce qu'au début on a expliqué des choses qui étaient incompréhensibles
11:47 sur les femmes, sur la justice, sur les 1200 euros ?
11:50 Pourquoi on en est arrivé à un stade où les syndicats disent que c'est une arnaque,
11:54 que vous les avez embrouillées, que vous avez embrouillé les Français ?
11:57 C'était un manque de communication, c'était volontaire,
11:59 qu'est-ce qui s'est passé ?
12:01 En un mois et demi on a l'impression que ça a été vendu n'importe comment.
12:06 - Il faut avoir l'humilité de reconnaître qu'il y a eu du flottement.
12:09 - C'est le terme ?
12:10 - De la communication autour de cette réforme.
12:12 Maintenant dire que c'est une arnaque, je suis désolé.
12:14 - C'est pas moi qui l'ai dit, je dis que les syndicats...
12:16 - Je sais bien, je sais bien, mais dire que c'est une arnaque c'est faux.
12:18 Je ne vais pas répéter les chiffres que j'ai évoqués,
12:20 mais vous évoquez la question de la pension minimale à 1200 euros.
12:23 La pension minimale à 1200 euros c'est 1 800 000 personnes qui sont déretraitées
12:27 à l'heure actuelle qui vont bénéficier en moyenne de 600 euros de plus par an sur leur pension.
12:33 - D'accord, donc ça va de 70 à 100 par mois.
12:36 - Oui, c'est 200 000 retraités futurs chaque année,
12:39 c'est-à-dire à peu près un quart des retraités qui liquident leur retraite chaque année,
12:42 qui vont bénéficier d'environ 400 euros de plus par mois.
12:45 - Vous avez le souvenir comme moi de l'idée que le 1200 était une sorte de retraite minimum.
12:49 - Tout à fait, c'est là qu'il y a eu flottement.
12:51 - Et 10 000, 20 000, 40 000 à qui ?
12:52 - Si on va sur ce sujet, pourquoi il y a eu flottement ?
12:54 Parce que dans le programme du président de la République, si vous le relisez...
12:57 - C'était 5 millions.
12:58 - Il est bien...
12:59 - C'était 5 millions de bénéficiaires.
13:00 - Mais il est écrit, c'est surtout ça qui me semble important,
13:02 que les 1200 euros, les 85% du SMIC concernent les gens qui ont eu une carrière complète au niveau du SMIC.
13:08 Et ça, c'est vrai, ça n'a pas toujours été répété par tous ceux qui ont eu à s'exprimer...
13:13 - Il y a eu que le début de la phrase qui était sympathique.
13:14 - À s'exprimer, évidemment.
13:15 Et de ce point de vue, je pense que la majorité présidentielle, pour ma part,
13:18 je pense avoir toujours été claire sur le sujet et avoir déclamé la phrase dans tout son détail.
13:25 Mais la réalité, c'est qu'il y a eu du flottement sur ce sujet.
13:28 Maintenant, quand j'entendais parler, je suis désolé, Madame Becker, tout à l'heure,
13:32 de mensonges autour de ces sujets-là, quand on ment, c'est qu'on ment de manière délibérée.
13:36 Quand on ment, c'est que, quelque part, on a envie de dissimuler la réalité.
13:40 - Je n'ai pas dit mensonge, je ne crois pas.
13:41 - En tout cas, j'ai entendu ce terme de mensonge.
13:44 Je pense qu'il n'y a pas cette volonté-là, absolument pas.
13:48 Je pense qu'il y a un système de retraite qui est déjà très complexe.
13:51 Et je vous donne un autre exemple très concret pour les gens, le sujet des carrières longues.
13:55 On nous fait le reproche, aujourd'hui, de demander à certaines générations
14:00 de travailler 44 ans alors que la durée de cotisation sera à 43 ans.
14:04 Quelle est la réalité de notre système aujourd'hui ?
14:06 Aujourd'hui, à l'heure où je vous parle, la durée de cotisation en Aukis, c'est 42 ans.
14:10 Il y a des gens qui travaillent 43 ans, il y a des gens qui travaillent 44 ans,
14:13 il y a des gens qui travaillent 45 ans.
14:15 180 000 personnes partent à la retraite aujourd'hui, sur les 800 000 retraités,
14:20 avec plus de trimestres que nécessaire.
14:22 C'est la réalité de notre système.
14:23 Nous allons améliorer ce système.
14:25 Nous n'allons pas résoudre toutes les imperfections, mais il faut quand même le dire.
14:29 Et j'en termine sur la communication, ce que je regrette,
14:32 et ce que nous n'avons pas bien fait, c'est aussi de montrer
14:34 ce que sont les imperfections du système actuel,
14:36 pour, en miroir, montrer ce que sont les améliorations de la réforme.
14:40 Ce qui a aussi ajouté un peu à la complexité et à notre compréhension,
14:43 à nous, journalistes, mais aussi peut-être à l'opinion publique,
14:46 c'est l'évolution de votre famille politique sur cette question-là.
14:49 J'aimerais qu'on vous écoute le 11 mars 2017.
14:51 Vous êtes à l'époque encore économiste,
14:53 vous êtes dans la machine de la campagne d'Emmanuel Macron,
14:56 et vous dites tout le mal que vous pensez de la réforme
14:59 qu'aujourd'hui vous défendez avec beaucoup de conviction.
15:01 On vous écoute, c'était sur France Inter, donc on n'arrête pas l'écho.
15:03 Donc le 11 mars 2017.
15:04 Mais vous avez beaucoup d'incertitudes dans le système parpoint, si vous voulez.
15:09 Mais moi j'ai envie de vous dire que vous avez beaucoup d'incertitudes
15:11 dans notre système actuel.
15:13 Pourquoi ? Parce qu'on fait des réformes de retraite quasiment tous les 10 ans.
15:16 Ça veut dire que quelqu'un qui aujourd'hui a 30 ans,
15:19 il n'est absolument pas certain que l'âge de départ à la retraite
15:22 ne va pas reculer parce que l'équilibre financier du régime de retraite
15:25 aura été bousculé par les évolutions démographiques.
15:28 Donc qu'est-ce qui se passe finalement en France ?
15:30 Cette incertitude, on la gère avec des réformes
15:32 qui d'ailleurs mettent souvent la France en ébullition.
15:34 On la gère de manière conflictuelle,
15:36 et on la gère dans une forme d'opacité.
15:39 Alors l'opacité, la France en ébullition...
15:42 Je suis très heureux que vous me posiez cette question de pourquoi on a changé.
15:46 En gros, vous disiez à l'époque que une réforme telle qu'elle ressemble aujourd'hui,
15:51 elle serait opaque, elle mettrait la France en ébullition,
15:53 elle créait de la conflictualité. Vous aviez raison en 2017.
15:56 C'est notre système de retraite qui est opaque
15:58 et qui empêche les gens de se projeter dans combien ils vont avoir
16:00 et à quel moment ils vont pouvoir partir.
16:01 C'était ça le sens de mon propos.
16:02 Mais je suis content que vous me passiez cet extrait
16:04 qui me rappelle la campagne de 2017,
16:07 parce que les choses ont changé.
16:08 Et je veux dire que les choses ont changé à deux titres.
16:10 D'abord, quand on a mis en place ce projet de système universel de retraite,
16:15 sur lequel je dis au passage, je pense qu'il faut qu'on continue à réfléchir.
16:18 J'ai d'ailleurs déposé un amendement qui a été adopté à l'Assemblée nationale là-dessus.
16:21 Mais quand on a fait ce projet, les prévisions du Conseil d'orientation des retraites,
16:25 dont je suis par ailleurs membre,
16:26 disaient qu'il n'y avait pas de problème de financement de notre système de retraite.
16:29 Aujourd'hui, il y a un problème de financement.
16:30 Dans les 25 prochaines années,
16:32 on va avoir des déficits qui vont s'accumuler,
16:34 5, 10, 15, jusqu'à 25 milliards d'euros par an.
16:37 Ça, c'est le premier point et la première différence.
16:38 Et la deuxième différence, je suis obligé de le rappeler,
16:40 c'est qu'on a quand même des crises qui sont passées par là.
16:43 Le Covid a creusé la dette publique.
16:46 Le Covid a, par le quoi qu'il en coûte,
16:50 généré des dépenses qui aujourd'hui doivent être assumées
16:53 avec une dette qui est très élevée, beaucoup plus élevée qu'avant.
16:55 Et à un moment ou à un autre,
16:57 on doit avoir une vision globale de notre stratégie.
16:59 Notre stratégie, elle doit être de créer de l'emploi,
17:01 de créer des richesses,
17:03 pour nous redonner des marges de manœuvre,
17:05 et c'est l'argument que j'évoquais tout à l'heure,
17:07 afin d'être collectivement plus fort, plus souverain.
17:10 Est-ce que la réforme, c'est aussi un gage donné à Bruxelles
17:13 pour dire au fond, on est dans une Europe
17:15 et on veut aussi avoir une mutualisation des dettes,
17:19 mais il faut que ça n'y soit pas ?
17:20 Absolument pas.
17:21 Et je vais vous dire avec un exemple très concret
17:23 pourquoi ça n'est pas vrai.
17:24 Dans mes fonctions précédentes, avant d'être député,
17:26 j'étais conseiller du Premier ministre Jean Castex
17:28 et je m'occupais en particulier du plan de relance.
17:30 Plan de relance, France relance, 100 milliards d'euros dépensés,
17:33 dont 40 milliards d'euros viennent de l'Europe.
17:35 Et on a eu cette critique,
17:37 vous faites la réforme de retraite
17:39 pour bénéficier des 40 milliards d'euros de l'Europe.
17:41 Je le dis avec la plus grande fermeté,
17:43 la plus grande clarté,
17:44 rien dans ce qui nous est demandé par l'Europe
17:47 ne nous impose de faire quelque réforme que ce soit.
17:50 Ça figure dans les documents, mais d'abord...
17:53 Ah oui, vous êtes d'accord, ça figure dans les documents.
17:55 Ça figure dans les documents,
17:56 mais ça figure dans les documents,
17:58 mais de manière très concrète,
18:00 l'argent a commencé d'être reçu par la France
18:02 alors que nous n'avons pas fait la réforme des retraites.
18:04 Et si d'aventure nous ne faisions pas cette réforme,
18:06 nous n'aurions aucunement à rendre cet argent.
18:08 Donc ça, c'est une... Je suis désolé,
18:10 c'est une contre-vérité.
18:11 Il n'y a absolument rien dans les règles européennes
18:14 qui nous impose, pour recevoir l'argent de l'Europe,
18:16 de faire cette réforme de la retraite.
18:17 - Marc Ferracci, ce matin dans le JDD,
18:19 Philippe Martinez de la CGT dit
18:21 "on va accélérer à partir d'après demain".
18:23 Est-ce que ça vous inquiète, cette accélération ?
18:25 Qu'est-ce que vous en pensez ?
18:26 Est-ce que vous pensez, comme Gabriel Attal,
18:28 que c'est un mouvement qui va bloquer les Français
18:30 plutôt que la France ?
18:32 - C'est évidemment préoccupant pour les Français.
18:35 - Les manifestants ne sont pas des Français ?
18:37 Les grévistes ne sont pas des Français ?
18:39 - Attendez...
18:40 Les manifestations et les grèves
18:42 sont l'expression de droits qui sont protégés
18:44 par notre Constitution.
18:45 Vous ne me trouverez jamais en train de critiquer
18:47 par principe ces droits-là.
18:48 - C'est étrange de dire "ça bloque les Français"
18:49 alors que ce sont les Français qui font les mêmes.
18:51 - Quand on dit que ça bloque les Français,
18:52 c'est qu'il y a des conséquences potentielles
18:54 pour les citoyens français.
18:55 Et j'attire quand même l'attention sur le fait
18:57 que les gens qui vont être pénalisés au premier chef,
19:00 ce ne sont pas les cols blancs qui peuvent télétravailler,
19:03 qui n'ont pas besoin de prendre leur voiture
19:06 pour se rendre pour emmener leurs enfants à l'école
19:08 parce qu'ils vivent dans des métropoles
19:09 ou quoi que ce soit.
19:10 Ce sont probablement les Français les plus modestes.
19:14 Donc, moi, je souhaite que les mobilisations
19:16 se passent bien au regard de l'ordre public.
19:18 Et jusqu'à présent, ça a été irréprochable,
19:20 il faut le dire et le reconnaître d'ailleurs
19:21 aux organisations syndicales qui ont organisé les cortèges,
19:23 également aux forces de l'ordre.
19:25 Mais je souhaite que dans cette logique de blocage,
19:29 on sache garder la mesure.
19:31 Et quand j'entends, vous l'évoquiez tout à l'heure
19:32 dans vos éditos, l'idée de mettre l'économie à genoux,
19:35 là, on bascule dans une forme d'irresponsabilité
19:37 à laquelle on ne peut pas souscrire.
19:38 - Qui va avoir le dernier mot à votre avis ?
19:40 Est-ce que c'est la rue ou est-ce que c'est le Parlement ?
19:42 - Est-ce que le gouvernement a la capacité quand même
19:44 à revenir sur cette réforme,
19:46 si effectivement il y a 2 millions de personnes dans la rue
19:48 demain pour prolonger la question de la France ?
19:50 - Ecoutez, ça, moi, je ne suis pas au gouvernement.
19:52 Ce que je dis, ce que je constate,
19:54 c'est que le point dur de cette réforme,
19:56 c'est-à-dire le recul de l'âge légal,
19:58 revenir dessus, ça impliquerait vider purement et simplement
20:01 la réforme de sa substance.
20:03 Moi, je ne vais pas revenir sur les arguments que j'évoquais,
20:05 je dis qu'il faut faire cette réforme pour préserver notre système
20:08 et pour se projeter dans l'avenir.
20:09 Ça me paraît très important.
20:10 Donc ça me semble difficilement envisageable,
20:12 je le dis, je n'ai pas de boule de cristal,
20:14 difficilement envisageable de revenir sur cette mesure d'âge.
20:17 Maintenant, les aménagements à la réforme, ils continuent,
20:19 ils sont discutés au Sénat.
20:21 Les améliorations sont prises en compte
20:23 et je pense que c'est la bonne manière de répondre
20:26 et pour répondre à François Sfrescoz,
20:29 je pense qu'à un moment ou un autre,
20:31 la légitimité démocratique, la légitimité du Parlement,
20:34 à la fois celle du Sénat et de l'Assemblée nationale,
20:36 doit prévaloir sur les mobilisations,
20:40 ce qui ne signifie pas qu'on n'écoute pas les mobilisations
20:43 et on les a écoutées, on les a écoutées en faisant évoluer le texte.
20:46 Un bon par exemple ? Un exemple ?
20:48 Écoutez, on a, durant le débat parlementaire,
20:51 par exemple étendu sur les carrières longues,
20:53 le bénéfice du dispositif aux gens jusqu'à 21 ans.
20:56 Ça c'est un exemple précis.
20:57 C'est la mobilisation de la droite ?
20:59 Mais je pense que c'est les deux.
21:01 C'est un contexte. Je pense que c'est les deux.
21:04 C'est plutôt la droite parlementaire, j'ai l'impression.
21:08 Vous êtes tout à fait libre de le penser.
21:10 Moi je pense, et je le dis, parce que,
21:12 avec mes collègues députés, vous savez,
21:14 tous les week-ends, on fait des bilans
21:16 sur les boucles d'échange
21:18 pour savoir ce que sont les remontées du terrain.
21:20 Et quand il y a a fortiori des journées de mobilisation,
21:23 eh bien on fait des bilans très précis
21:25 sur la mobilisation dans les villes moyennes, par exemple,
21:27 dont on sait qu'elle est forte.
21:29 Et on en tire des conclusions.
21:30 On en tire des conclusions pour nos échanges,
21:32 on en tire des conclusions pour le débat parlementaire.
21:34 Donc certes, c'était une demande des républicains d'aller vers cela,
21:37 mais dire que le contexte et les remontées du terrain,
21:41 de ce que vivent et de ce que disent nos concitoyens,
21:43 n'a pas été pris en compte, je crois que c'est inexact.
21:45 Justement, vous dites qu'il y a une ouverture éventuelle encore,
21:48 parce que les discussions ne sont pas terminées au Sénat,
21:50 c'est ce que dit Olivier Dussopt également,
21:52 jusqu'à quel point, notamment pour les femmes,
21:54 avec l'idée de la surcote, jusqu'à quel point
21:56 on peut augmenter leur revenu ou leur pension,
22:00 ou faire un effort, sans que la réforme
22:02 qui était censée nous rapporter de l'argent
22:04 ne serve plus à rien.
22:05 Vous avez parlé tout à l'heure d'un certain nombre de milliards,
22:07 vous avez dit un tiers pour faire des progrès,
22:09 il nous en restera deux tiers, contrairement à la période verte,
22:12 jusqu'où on peut aller.
22:13 Pour l'instant, on en espérait 17 milliards, c'est ça ?
22:16 17, presque 18.
22:18 Mettons 18, alors 18 en 2030,
22:20 jusqu'où on va pour que ça nous serve à quelque chose, en gros ?
22:23 Écoutez, déjà, moi je me félicite
22:26 que le Sénat cherche à améliorer le texte sur cet aspect-là.
22:30 Sur les femmes ?
22:31 La possibilité pour les femmes au-delà de 63 ans
22:33 de bénéficier d'une surcote, quand elles ont eu
22:35 des trimestres de maternité.
22:37 Je trouve que c'est plutôt une piste intéressante,
22:40 et donc j'espère qu'elle sera discutée jusqu'au bout au Sénat.
22:42 Ensuite, sur l'équilibre global,
22:44 jusqu'où on peut "lâcher".
22:46 Un moment ou un autre,
22:49 je pense qu'il faut être conscient
22:51 que ces équilibres, en 2030,
22:54 Olivier Dussopt l'a dit d'ailleurs,
22:57 ne sont pas des équilibres à 300 ou 400 millions d'euros près.
23:00 Je le dis avec toute l'humilité
23:04 de celui qui a traité les dépenses publiques,
23:08 et qui sait que les prévisions sont toujours un petit peu délicates.
23:11 Mais il faut que...
23:13 Et vous tablez sur le cadre de l'essence de chômage.
23:15 Il faut, il faut, tout à fait,
23:17 qu'on ait en tête collectivement cette idée d'équilibre.
23:20 Parce que vous le dites, et vous avez tout à fait raison,
23:22 les hypothèses qui nous amènent à l'équilibre en 2030
23:24 sont des hypothèses qui sont favorables
23:27 au regard du taux de chômage.
23:28 Optimistes au regard du taux de chômage,
23:30 on table sur 4,5 points.
23:32 Moi, je suis convaincu, et c'est aussi pour ça
23:34 que je me suis engagé en politique,
23:36 que cette réforme doit s'inscrire dans une stratégie plus globale,
23:39 qui est la stratégie du plein emploi.
23:41 La stratégie du plein emploi, c'est la réforme du lycée professionnel,
23:44 c'est la réforme de l'assurance chômage,
23:46 c'est les réformes que nous avons faites depuis 2017 avec l'apprentissage.
23:48 Nous avons battu un record sur les contrats d'apprentissage,
23:51 837 000 contrats signés l'année dernière,
23:53 une augmentation dans tous les secteurs
23:55 et à tous les niveaux de qualification,
23:57 et on sait que ça va améliorer le taux d'insertion des jeunes.
23:59 C'est dans cette stratégie globale que se situent les équilibres.
24:02 - Est-ce que ce 50% de lâché par rapport aux économies initiales,
24:06 est-ce qu'on peut se permettre,
24:07 par exemple sur la surcote, il était question de 5%,
24:09 on en est plutôt à 2,5% en se disant que ça serait moins onéreux ?
24:12 - Moi je ne vais pas faire des pisceries.
24:14 - Non mais on ne va pas faire des pisceries.
24:15 Je vous dis juste jusqu'à quel symbolique c'est valable,
24:18 le raisonnement qui est...
24:19 ça sera toujours, même si le 2030 est déficitaire.
24:22 - Moi je souhaite que l'on puisse dire aux Français,
24:26 les yeux dans les yeux, qu'en 2030,
24:28 le système sera à l'équilibre ou proche de l'équilibre.
24:32 - Proche. - Proche de l'équilibre.
24:33 Et encore une fois, les prévisions en matière de finances publiques,
24:36 on le sait, elles sont parfois révisées d'une année sur l'autre,
24:38 à hauteur de 10, 15, 50, 100 millions.
24:41 - Et d'ailleurs c'est pour ça que Marc Ferrati, en 2017, disait
24:43 "C'est un problème parce que tous les 10 ans,
24:45 on va devoir faire des nouvelles réformes,
24:46 on pousse l'âge et les gens ne savent même pas quand les skippers rentrent".
24:48 - Ça c'est un autre sujet qui était soulevé à ce moment-là.
24:51 C'est que les hypothèses sur lesquelles sont faites les chiffrages
24:54 en matière de finances des retraites, elles évoluent.
24:56 Les hypothèses de productivité, les hypothèses de taux de chômage.
24:59 Et c'est aussi ça qui rend le sujet difficile.
25:02 - Sans compter la question climatique qui va quand même s'imposer.
25:06 - C'est vrai, vous avez raison.
25:07 Mais moi c'est la raison pour laquelle j'ai souhaité déposer cet amendement,
25:10 qui est une demande de rapport au gouvernement,
25:12 sur "continuons à réfléchir sur un système plus universel,
25:16 une convergence des différents régimes".
25:18 Parce que je suis convaincu que notre système de retraite,
25:20 même après cette réforme, et j'espère qu'il sera préservé grâce à cette réforme,
25:24 reste un système complexe, dans lequel les gens,
25:27 forcément 42 régimes, ont du mal à se situer.
25:30 Et je pense que pour des raisons de transparence, mais aussi d'équité,
25:33 nous devons collectivement poursuivre cette réflexion.
25:36 - Pourquoi vous l'avez abandonnée ?
25:37 Vous allez me dire qu'il y avait le Covid,
25:38 mais en quoi le Covid vous a fait abandonner cette réforme ?
25:41 - Oui, moi je pense...
25:42 - C'est pas très clair effectivement ça.
25:43 - C'était juste, c'était probablement plus juste à ce moment-là.
25:45 - Et que vous vous défendiez avec beaucoup de vémence.
25:47 - Je pense que, si on est lucide sur ce qui s'est passé en 2019-2020,
25:52 je pense que le fait, au fond, de mener presque deux réformes en une,
25:55 c'est-à-dire une réforme de nature systémique,
25:57 et une réforme qui introduisait une mesure d'âge,
26:01 a pu générer de la confusion.
26:03 Aujourd'hui nous faisons une réforme qui est une réforme qui réclame des efforts,
26:06 qui est une réforme qu'on appelle traditionnellement une réforme paramétrique,
26:08 même si j'aime pas trop ce terme-là.
26:10 - C'est pour avoir de l'argent quoi, c'est pas pour faire des films officiels.
26:13 - Oui, oui, on l'assume, on l'assume.
26:14 On veut équilibrer notre système par répartition.
26:16 Est-ce que ça signifie qu'on doit abandonner l'ambition
26:20 de simplifier, pour plus d'équité et plus de transparence,
26:24 notre système de retraite,
26:25 et que les gens sachent précisément ce à quoi ils auront droit
26:28 en fonction de leur date de départ à la retraite ?
26:31 Moi je pense que la réflexion doit se poursuivre.
26:33 - Marc Ferracci, dernière question avant d'accueillir notre nouvelle invitée.
26:36 Je me projette à nouveau sur mardi.
26:37 C'est quoi la stratégie du groupe parlementaire, du gouvernement ?
26:40 C'est de faire le doron d'ici mardi,
26:42 en espérant que le mouvement se tasse par la suite ?
26:44 Est-ce que c'est ça ce que vous avez en tête ?
26:46 - Non, vous savez, moi je suis enseignant de formation,
26:49 et la stratégie du doron, la stratégie de la bouche cousue,
26:52 ça n'a jamais été ma stratégie.
26:53 Je pense qu'il faut qu'on continue à essayer de convaincre.
26:56 On sait qu'on n'arrivera pas à convaincre tous les Français,
26:58 on sait que ce n'est pas une réforme populaire,
26:59 il n'y a pas une seule réforme des retraites qui repousse l'âge légal
27:03 ou qui augmente la durée de cotisation qui était populaire.
27:06 Mais moi je pense que cette idée du doron,
27:09 ça n'est pas notre état d'esprit, ça n'est pas le mien en tout cas.
27:11 Moi je continuerai à les expliquer, à les débattre,
27:14 parfois de manière un peu vive, sur les plateaux ou à l'Assemblée,
27:18 pour convaincre que derrière cette réforme,
27:21 il y a notre modèle social qui est en jeu,
27:23 et il y a aussi notre capacité à nous projeter dans l'avenir.
27:26 - Vous continuez j'imagine à beaucoup dialoguer et échanger avec Emmanuel Macron,
27:29 quel est son état d'esprit sur cette réforme et sur l'opposition à cette réforme ?
27:32 - Écoutez, il est à l'écoute et il est déterminé, c'est les deux éléments.
27:36 Il est à l'écoute et ça c'est vu,
27:37 puisque le projet a quand même beaucoup évolué depuis le début.
27:40 Souvenez-vous, durant son programme,
27:42 durant sa campagne présidentielle,
27:44 on était sur 65 ans, et pas particulièrement de mesures d'accompagnement,
27:49 même si on souhaitait prendre en compte la pénibilité, les carrières longues.
27:52 Depuis, on est à 64 ans, on a introduit toutes ces mesures,
27:56 - Ça c'est Eric Ciotti et Maudo Rotailleau qui revendiquent la paternité.
27:59 - Non, je ne suis pas tout à fait d'accord.
28:00 Si vous prenez, je vous donne un simple exemple,
28:02 la pension munale appliquée à tous les retraités,
28:04 c'était quand même une mesure dont le Président de la République,
28:07 durant sa campagne, avait évoqué qu'elle serait mise en oeuvre.
28:11 - Merci beaucoup Marc Ferratti d'avoir passé un bout de votre dimanche midi,
28:14 en notre compagnie.
28:17 France Inter.
28:19 Questions politiques.
28:23 Thomas Négaroff.
28:25 - Et s'installe notre deuxième invité, Olivier Besancenot. Bonjour.
28:30 - Bonjour.
28:31 - Porte-parole du nouveau parti anticapitaliste.
28:33 Vous venez de croiser Marc Ferratti en vous installant.
28:35 - On n'a pas eu le temps de négocier.
28:37 - Est-ce que vous vivez sur la même planète, ou en tout cas dans le même pays que lui ?
28:41 - Oui, ça oui. On n'a pas le même point de vue, radicalement opposés.
28:45 C'est la confrontation qui s'annonce la semaine prochaine.
28:48 On est dans la même société, on est dans le même monde,
28:51 on défend absolument pas les mêmes intérêts.
28:53 Et là, on est engagés dans une bataille sociale et politique
28:57 que seul le gouvernement, en réalité seul Emmanuel Macron,
28:59 a décidé quand il a fait ses voeux au mois de décembre.
29:02 Et maintenant, il y aura un vainqueur, il y aura un perdant.
29:04 On est dans cette situation-là.
29:06 Une fois de plus, c'est pas la rue, c'est pas le mouvement social,
29:08 c'est pas la gauche sociale et politique qui ont décidé
29:10 ni de ce calendrier, ni de cette échéance, ni sur ce sujet-là.
29:14 Mais par contre, on prend nos responsabilités.
29:16 - On va y revenir, mais vous dites un vainqueur et un perdant.
29:18 Il ne peut pas y avoir que des vainqueurs ou que des perdants
29:21 après un mouvement social de ce type-là ?
29:23 - Il faut qu'il y en ait un à genoux, un autre debout.
29:25 - Alors ça, c'est deux questions différentes, mais je vous vois déjà arriver sur la deuxième.
29:27 J'y répondrais aussi.
29:28 Mais d'abord, sur la première, oui, je pense que la situation politique
29:32 sera absolument pas la même de manière très générale,
29:34 selon qui gagne ou qui perd.
29:36 Et là, quand je le dis, c'est pas moi qui le dis en premier.
29:38 Je pense que c'est Emmanuel Macron qui le dit en premier.
29:40 Je pense qu'une des grandes raisons, enfin je suis pas dans sa tête,
29:43 je n'ai pas cette prétention-là, mais je pense qu'il y a beaucoup d'idéologie
29:46 dans sa conception d'établir une démonstration au début du quinquennat
29:49 pour dire que lui, il a réussi là où d'autres n'ont pas fait.
29:52 Parce que bon, là, je ne suis pas dans le secret des dieux non plus,
29:54 mais ce n'est pas une mesure qui était particulièrement réclamée
29:58 en tous les cas dans l'urgence par le Medef, par les organisations patronales,
30:00 qui sont pour, soit, mais je ne suis pas sûr qu'elles étaient persuadées
30:03 qu'il fallait le faire là, maintenant.
30:04 Il y a la volonté, ça c'est un vieux rêve libéral,
30:06 de faire la démonstration qu'on a été capable de faire plier la rue.
30:09 - Mais la rue peut gagner ou pas ?
30:11 - Ah oui, oui, sinon...
30:13 - Avant de parler de la rue...
30:15 - Je fais partie de ceux et celles qui dépensent beaucoup d'énergie pour que ça arrive.
30:18 - Quand on voit ce qui se passe à l'Assemblée, quand on voit ce qui se passe au Sénat,
30:20 la rue peut encore l'emporter ou pas ?
30:22 - Alors ça, j'y suis pas. L'Assemblée et au Sénat, ça je suis pas.
30:24 - Oui, mais vous regardez comment est-ce qu'il s'y passe.
30:26 - De toute façon, on n'a pas trop le choix,
30:27 vu la couverture politique et médiatique qui en est faite.
30:29 Il y a des choses qui s'y passent, il y en a qui relaient le combat
30:31 et qui le relaient courageusement, ce n'est pas le souci.
30:34 Moi, je fais partie de ceux qui pensent depuis le départ que de toute façon, ça n'allait pas se jouer là.
30:38 De toute façon, on était perdant d'avance, dans le sens où...
30:41 Bon, là, on va arriver à cette espèce de vrai faux suspense
30:43 où il y aura enfin un accord entre les macronistes et les républicains.
30:47 C'était quand même un peu cousu de fil blanc,
30:49 mais quand bien même ça n'aurait pas été le cas, de toute façon, on aurait perdu,
30:51 puisqu'on nous aurait sorti...
30:52 Alors là, ce n'est pas le 49-3, c'est le 47-1, je ne sais pas quoi.
30:55 Il y a des astuces institutionnelles qui permettaient de toute façon de dire
30:58 que dans ce cadre-là, on serait perdant.
31:00 Donc, il y a aussi une autre tradition politique dans ce pays, que je revendique,
31:04 qui est une vie politique, sociale, extra-parlementaire
31:08 et qui fait que certains gouvernements se sont cassés les gens...
31:10 Alors, justement, à partir de LFI, vous vous approuvez tout à fait ce qui s'est passé à l'Assemblée.
31:14 Vous étiez derrière cette stratégie de Mélenchon de dire "on fait de l'obstruction".
31:18 Non, la stratégie, je ne me suis pas prononcé dessus pour la simple et bonne raison que je n'y suis pas.
31:22 Donc, je comprends les arguments des uns et des autres.
31:24 Et puis surtout, mon seul... Enfin, c'est très lointain, ce que je dis.
31:28 Donc, c'est très facile. Je ne suis pas dans le broie parlementaire.
31:31 Donc, c'est très facile. Mais quitte à ce qu'il y ait des désaccords,
31:34 et il peut y en avoir, des désaccords tactiques importants, il peut y en avoir,
31:37 autant les régler, comment dire, pas face caméra, se rencontrer, rien n'empêche de le faire.
31:41 Parce que tout ce qui contribue à mettre ça sur la place publique, ça a tendance à nous affaiblir.
31:45 C'est vrai au sein de la gauche politique, c'est vrai entre gauche syndicale et gauche politique.
31:49 Je fais partie de ceux aussi qui pensent qu'à priori, ce ne serait pas honteux de se rencontrer pour discuter,
31:55 quitte à discuter, y compris des sujets qui...
31:57 - Il y a quelque chose aussi, puisque vous avez venu venir avec mes gros sabots tout à l'heure, mes énormes sabots.
32:01 - Ils sont encore là.
32:02 - Est-ce qu'il n'y a pas aussi une divergence, par exemple, au sein de la CGT ?
32:04 Quand Philippe Martinez a appris la déclaration d'Emmanuel Lépine, qui lui, est CGT chimie,
32:09 sur la fameuse déclaration, disons, on va mettre l'économie française à genoux,
32:13 il a fait... Bon. Est-ce que c'était... Au nom du contre-productif, est-ce que vous comprenez, Emmanuel Lépine,
32:20 est-ce que vous considérez que c'est quelque chose qui est mauvais pour vous, d'avoir de tels slogans,
32:24 ou est-ce que vous dites "Bah oui, c'est la logique" ?
32:26 - Non, moi, je comprends. Je comprends et je crois qu'il va falloir que tout le monde...
32:28 - Mais à genoux ? L'économie française, c'est pas vous, c'est d'autres gens, c'est un...
32:32 - Non, justement, c'est nous.
32:33 - Bah alors, vous voulez vous mettre à genoux ?
32:35 - Je m'étonne qu'on s'en étonne, parce que tout le restant du temps, c'est la population qui est à genoux,
32:40 à cause de l'ordre économique tel qu'il fonctionne, selon les dictades du profit immédiat, de la rentabilité.
32:45 Quand, par exemple, on a Camailleux, on a Gap, on a une série de fermetures d'usines, par exemple, à Cidèle, en ce moment,
32:51 à Lisieux, ceux qu'ont interpellé, par exemple, au Salon de l'Agriculture, on pourra prendre BNP, 900 suppressions d'emplois,
32:56 10 milliards de bénéfices. Là, c'est la population qui paye. Personne ne s'en émeut.
33:00 - Mais le chômage baisse quand même à côté.
33:01 - Pardon ?
33:02 - Le chômage baisse à côté.
33:03 - Oui, avec 600 000 radiers de pôle emploi, évidemment, en un an, ça aide. On pourrait dire ça aussi comme ça.
33:08 Moi, je maintiens qu'à ce moment-là, on nous met à genoux.
33:10 Bah, je dis que l'ordre économique est là pour satisfaire l'humanité, voilà, c'est dans ce sens-là que ça devrait se passer,
33:17 précisément parce que l'économie n'est pas extérieure. C'est nous tous et nous toutes qui la fabriquons, cette économie,
33:22 avec notre force de travail manuelle, intellectuelle. Voilà, on n'en voit qu'un tout petit bout en termes de retour,
33:26 et surtout, on en voit d'une volonté politique qui, en général, nous met à genoux.
33:30 Donc, il va falloir s'habituer à ce que dans une séquence sociale qui ne fait que commencer, du point de vue de la conflictualité,
33:36 à cet auteur-là, comme on ne l'a pas connu depuis très longtemps,
33:38 est-ce qu'il y a un certain nombre de propos qui décoiffent un petit peu par rapport à ce qu'on entend habituellement ?
33:42 Eh bah, moi, ça, pour moi, ça me fait du bien.
33:45 Le mouvement social, comment vous l'analysez ? Comment vous analysez ce mouvement par rapport au précédent sur les retraites ?
33:50 Est-ce qu'il y a des particularités ? Qu'est-ce qui vous fait ?
33:53 Oui, alors, moi, ce qui me...
33:54 Pardonnez-moi, je rappelle aussi que vous avez souvent raconté à quel point c'était douloureux,
33:59 même personnellement, l'échec de 2010, lorsque vous aviez échoué, malgré de très, très nombreuses manifestations,
34:04 à faire reculer le gouvernement qui avait, à l'époque, c'était la réforme Wörth,
34:08 prolongé l'âge de départ du travail, enfin, repoussé l'âge de la retraite de 60 à 62 ans.
34:13 Si vous avez pris un exemple, vous auriez pu en prendre d'autres, parce que des défaites, j'en ai connues, celle de 2003.
34:17 Moi, je suis rentré à la poste, c'était la retraite à 60 ans, les 37 à 8 ans et demi.
34:20 Là, mon horizon professionnel pour toute une génération a clairement changé.
34:23 Donc, des défaites, on en a connues.
34:24 Ce qui a changé par rapport à 2010, de mémoire, mais il faudrait vérifier, c'est qu'on a eu, je crois, 13 ou 14...
34:29 14.
34:30 14, ben voilà, 14 journées de grandes manifestations, entre 500 et 1,5 million de personnes.
34:34 Sur un temps très long.
34:35 Mais sur un temps super long.
34:36 Là, on décide de changer de stratégie, c'est-à-dire plutôt que d'étaler ça dans un temps long, où on sait qu'on perd à chaque fois,
34:41 c'est tenter de frapper vite et fort dans le but de gagner par une grève générale reconductible.
34:46 Alors, moi, les seules choses que je...
34:48 Après, il n'y a pas un mouvement social qui se ressemble, ça, d'expérience, je le sais.
34:51 Celui-là, alors.
34:52 Mais les trucs, un peu, pour nous, qu'on n'avait pas les fois précédentes, qui manquaient,
34:56 c'est des choses qui se passent en région.
34:58 Très important, des actions très régulières, un enracinement profond.
35:02 Ça, ça rappelle un peu 1995, pour ceux qui s'en souviennent, contre la contre-réforme du plan Juppé.
35:07 Ce qui se passe aussi dans le privé, parce qu'il se passe des choses aussi dans le privé.
35:10 Et puis, ce qui se passe aussi, je ne dis pas que c'est le raz-de-marée, mais potentiellement dans la jeunesse.
35:14 Ces trois trucs-là, qu'on voyait en termes d'ambiance, ça fait partie des éléments.
35:17 Alors maintenant, une fois que j'ai dit ça, c'est comme vous dire, on a des ingrédients de recettes, mais le plat, il n'est pas encore fait.
35:23 Mais pour que ça dure, il faut quand même que les salariés ne soient pas trop pénalisés financièrement.
35:27 Comment vous allez tenir ?
35:28 Ce n'est pas forcément que ça dure. Ce n'est pas un objectif. La durée, c'est que...
35:31 Oui, mais ne serait-ce que cinq jours, ça coûte très cher.
35:33 Et si jeudi soir ?
35:34 Ça ne m'a pas échappé non plus. C'est pour ça qu'il y a des caisses de grève.
35:36 Tous ceux qui nous regardent, qui nous écoutent, je ne sais pas comment le dire.
35:39 Si vous ne pouvez pas, d'une manière ou d'une autre, rentrer dans la grève reconductible,
35:44 pour des raisons, parce que vous n'êtes pas dans le secteur concerné ou peu importe,
35:46 eh bien, il y a des caisses de grève. Et les caisses de grève, ça va compter.
35:49 Mais il y a déjà de l'argent dans les caisses de grève, là, ou pas ?
35:51 Il y a déjà de l'argent dans les caisses de grève. Il y en a par gare, il y en a par syndicat qui sont organisées.
35:55 Donc, ça, ce n'est pas les sollicitations qui vous manquez.
35:58 Mais après, si vous voulez, ça dépendra aussi de l'issue d'un conflit.
36:01 Parce que quand un conflit gagne, en général, il gagne sur beaucoup de choses, y compris sur cet aspect...
36:04 À quoi vous verrez que vous avez gagné ? Si par hasard, jeudi soir...
36:06 Pardon.
36:07 Si par hasard, je retraite. Si jeudi soir, il y a eu mardi, si c'est reconductible, mercredi.
36:11 Et si, au cours du temps, ça s'effiloche un peu ?
36:13 C'est-à-dire que la dernière grève, il y avait moins de 10 % dans les fonctionnaires qui étaient en grève.
36:19 Comment ça se décidera ? Quoi, première question.
36:21 Et deuxième, est-ce que si c'est voté ou si c'est adopté à terme, vous dites "Ça n'a pas marché, on rentre chez nous" ?
36:28 Non, alors je peux répondre tout de suite sur la deuxième. Ça, ça ne m'impressionne pas, puisque j'ai déjà un peu répondu tout à l'heure.
36:31 C'est prévu depuis le départ. Et ce ne serait pas la première fois qu'une mesure, même votée, soit...
36:36 Ah, vous parlez du CPE.
36:37 Un contrat de première embauche...
36:38 Il n'y a pas eu 50 cas comme ça...
36:40 Permettez que j'en cite au moins un. Je dis simplement que ça a existé. Je ne dis pas que ça arrive à chaque fois.
36:45 Expliquez aux auditeurs, ça a été voté, mais ça n'a pas été promulgué par la suite, parce que Jacques Chirac a reculé.
36:51 C'est ça. En 2006, avec une mobilisation, il y avait à la fois des mouvements de grève et puis une mobilisation de la jeunesse,
36:57 pour répondre à vos premières parties de la question. Mais je ne peux pas répondre à ça.
37:00 Moi, je n'ai pas la science infuse. Et puis, vous savez, dans des séquences comme celle-là, en une journée, il se passe ce qui se passe habituellement en une semaine.
37:07 Il y a des rebondissements, il y a des points de vue qui ne sont pas les mêmes. Donc moi, je ne vais pas faire le malin.
37:13 Ça va se passer au jour le jour et sous la décision de ceux et celles qui sont dans ces manifestations, de ceux et celles qui sont dans ces grèves.
37:20 Avec la question de la démocratie au centre, j'y tiens parce que ça se décide aussi dans des assemblées de grévistes.
37:25 C'est-à-dire, il ne faut pas voir les choses que par le haut, même si...
37:27 Par la base ?
37:28 Oui, aussi par la base, parce que ça compte et c'est un point extraordinairement important.
37:32 Et puis, par ceux et celles qui peuvent nous rejoindre auxquels on n'est pas habitués, parce qu'il y a de ça aussi.
37:37 Les manifestations jusqu'à présent, elles ont été extrêmement importantes aussi pour ça.
37:40 C'est participer, c'est redonner de la confiance à ceux qui se disaient "je ne suis pas d'accord".
37:44 "Bon, mais est-ce que ça vaut vraiment le coup ?"
37:46 Et qui se disent "bon, finalement, j'en vois qui y vont".
37:48 Par exemple, ça, je l'ai oublié tout à l'heure, dans les manifestations, on appelle ça les primo-manifestants maintenant.
37:54 Mais ceux et celles pour qui c'était la première manif ou le genre de première manif, ça aussi, c'était flagrant.
37:59 Donc, vous voyez, il y a ces éléments-là. Donc ça, ça sera au jour le jour.
38:03 Et est-ce que vous y voyez une continuité avec un grand mouvement social que vous n'avez pas évoqué, les Gilets jaunes ?
38:08 Est-ce qu'on est dans ce même temps historique pour vous ?
38:11 On est dans la continuité, c'est-à-dire dans le sens où il y a les Gilets jaunes qui sont passés par là et ça se sent même dans les manifestations.
38:18 Et d'ailleurs, il y a des Gilets jaunes qui sont présents dans les manifestations.
38:21 À l'exception de la présence de Gilets jaunes, en quoi ça se sent ? En quoi vous faites un lien entre les manifs ?
38:25 J'allais y venir, c'est-à-dire avec le côté un peu global, c'est-à-dire contrairement à ce qu'on...
38:29 Les villes moyennes, c'est ça ?
38:30 Un peu global.
38:31 Alors, il y a ça, par exemple, mais global au niveau des revendications. C'est-à-dire que ça, on n'en a pas parlé depuis le départ.
38:35 Mais là, on parle évidemment de la mesure à laquelle on est confronté, c'est-à-dire la question des retraites.
38:39 Mais on ne parle pas que de ça dans les manifestations. Il n'y a pas que des slogans sur ces questions-là.
38:42 Il y a des slogans sur les services publics qui sont en train d'être délabrés, qui cherchent à survivre,
38:46 notamment dans les écoles et les hôpitaux. C'est quand même un vrai degré de richesse de la société dans laquelle on vit.
38:50 Pour moi, on parle beaucoup de salaire. Beaucoup, beaucoup, beaucoup de salaire.
38:54 Justement, est-ce que ce n'est pas un sujet, ça ? C'est au fond... Est-ce que la réforme des retraites ne va pas passer ?
39:00 Parce que ce n'est pas le sujet primordial. En fait, c'est ce que vous êtes en train de dire. Est-ce qu'on sent beaucoup dans les manifestants ?
39:05 Je n'ai pas dit tout à fait ça.
39:06 Non, mais c'est-à-dire que...
39:07 Je n'ai pas dit qu'elle passerait.
39:09 Services publics, salaire. C'est ça, les deux préoccupations ?
39:12 Non, justement, non. Parce que, par exemple, si on augmentait les salaires, ce que le gouvernement refuse de faire,
39:17 alors là, un taux d'imagination extraordinaire.
39:19 Ce n'est pas le gouvernement qui décide, c'est les entreprises.
39:21 Non, pardon, excusez-moi. Le gouvernement a un pouvoir de responsabilité sur, d'abord, le salaire SMIC, en l'occurrence.
39:27 Deuxièmement, un pouvoir politique qui dépasse l'appel à la responsabilité.
39:32 Je crois que c'est M. Attal qui l'a encore fait sur les marges de distribution, vous savez.
39:35 Non, ce n'est pas la responsabilité, c'est l'appel à faire des efforts sur les marges.
39:38 C'est marrant parce que dès qu'il parle aux grands et aux puissants, c'est toujours appel à faire des efforts.
39:43 Pour nous, c'est la loi et c'est sans appel.
39:45 Ça a marché chez Carrefour.
39:46 Donc, le pouvoir politique a un pouvoir énorme sur la question des salaires.
39:50 Et on pourrait, pour répondre à votre question, imaginer, je ne sais pas, une séquence un peu folle,
39:53 que, sorti de la crise sanitaire et de la crise économique, on ne parle quasiment que de l'inflation,
39:58 du fait, par exemple, d'envisager comme mesure l'indexation des salaires sur les prix et d'augmenter les salaires.
40:04 Or, ce n'est pas ça la préoccupation du gouvernement.
40:06 Et ça, dans les motifs de mécontentement, par exemple, dans ce que je peux imaginer d'un peu global aussi, il y a ça.
40:11 C'est-à-dire l'idée, mais écoutez, il y a 10 500 autres sujets d'urgence sociale à traiter de nos jours.
40:17 Et vous nous pondez le fait d'avoir deux ans supplémentaires par tous les moyens, imposés à tous et toutes.
40:23 Puisque même quand on parle, par exemple, des...
40:25 L'argument de Marc Ferrachi, qui était avant et qui disait, en fait, on le fait pour la retraite par répartition,
40:31 mais on le fait aussi pour augmenter les capacités de production, financer tout ce qui est rénovation des services publics.
40:38 Ça, vous n'entendez pas ça. Ce n'est pas du tout...
40:41 Non, mais je ne suis pas le seul. Franchement, je ne sais pas ce que vous voulez dire.
40:43 Oui, oui, oui. Non, mais pourquoi vous ne l'entendez pas ? Parce que pour vous, c'est pipo.
40:47 Mais écoutez, il n'y a pas... Je pourrais vous...
40:50 Là, il me faudrait une émission entière pour vous donner tous les exemples d'opportunités pour aller prendre de l'argent pour les services publics.
40:57 Mais là, il y a eu 16 milliards de l'immobilial.
40:59 Les profits, les dividendes...
41:00 Allez-y, on est des besoins sociaux.
41:01 Pour la SNCF, disons qu'il y a quand même des choses.
41:03 Les profits, les dividendes, les fortunes, la répartition des richesses. Quand vous avez tous ces éléments-là...
41:09 On a clairement un gouvernement qui refuse de prendre...
41:12 Oui, mais ça s'est fait sous la gauche et les patrons sont partis ailleurs.
41:15 Bon, enfin, écoutez, les patrons sous la gauche et sous la gauche à laquelle vous pensez sur ces 25 dernières années,
41:19 je pense que globalement, ils sont sortis et pas trop mal, et pas trop mal.
41:23 Sauf que là, c'est flagrant. C'est flagrant.
41:25 Je pense que même le gouvernement, dans sa communication, c'est un peu embêtant d'avoir des chiffres qui tombent.
41:29 Par ailleurs, l'autre élément qui change par rapport aux fois précédentes, c'est qu'habituellement, vous avez un rapport du corps qui tombe,
41:35 qui est à peu près sans équivoque et que vous dit le mot magique "déficit abyssal".
41:39 Et là, ça casse les têtes de tout le monde.
41:41 Moi, je me souviens sur bien des... Là, ce n'est pas le cas, parce que je veux bien qu'on fasse des numéros,
41:44 mais même dans les projections du corps, du Conseil d'orientation des retraites, ce n'est pas vrai que c'est déficitaire à chaque fois.
41:50 Il y a une des conventions sur deux...
41:52 Il y a un peu de "à boire" et "à manger" pour parler vulgairement dans le rapport du corps.
41:54 Oui, mais puisqu'on en parle, je vais vous parler de ce qu'il y a à manger et pas qu'à boire.
41:57 C'est-à-dire que, par exemple, sur une des deux conventions, il y a trois scénarios sur quatre où ça revient à l'équilibre.
42:02 Et que par ailleurs, c'est dans la page 2, donc il ne faut pas aller chercher dans la 300e page,
42:07 à la page 2, on nous explique que, quelle que soit l'évolution démographique de la population,
42:11 la part du PIB consacrée aux retraites ne bougera pas, elle diminuera même.
42:15 Donc, ça veut dire que les moyens existent.
42:17 Donc, en l'occurrence, vous avez un gouvernement qui fonctionne en triple, quadruple appel,
42:21 qui nous dit "un jour c'est pour ci, un jour c'est pour..."
42:23 Puis à la fin, on n'y comprend plus rien, si ce n'est qu'on a un gouvernement qui refuse de répartir les richesses
42:27 dans un sens un petit peu plus égalitaire, sans parler même de faire de l'anticapitalisme,
42:31 et où tout le monde sera perdant.
42:32 Le dernier exemple en date, c'est évidemment les femmes, la question des femmes,
42:36 qui sont d'abord les grandes perdantes par rapport aux inégalités salariales,
42:39 qui vont prendre plus de proportions avec 40% d'écart entre les hommes et les femmes au moment des pensions de retraite,
42:46 raison pour laquelle le 8 mars est une journée extrêmement importante,
42:48 et même quand on aborde du point de vue des trimestres de bonification par enfant,
42:53 qu'on avait, notamment 8 mois dans le privé, 8 trimestres dans le privé,
42:56 et bien ça vous permettait avant d'obtenir une retraite à taux plein plus rapidement que les autres,
43:01 on va dire ça comme ça à 62 ans, maintenant l'obligation ce sera 64 ans,
43:05 quelles que soient les négociations en cours entre les républicains.
43:08 C'est-à-dire que c'est une obsession de nous faire partir à 64 ans,
43:11 et je crois que derrière ça, il y a un vrai choix de société sur lequel j'aimerais qu'on revienne et qu'on se concentre,
43:15 parce que celui-là en effet, il n'est pas que le propre de ce gouvernement,
43:19 c'est 20 ans de politique libérale Obama, l'espérance de vie en bonne santé depuis la naissance,
43:25 j'insiste, elle est de 64-65 ans et ce n'est pas vrai qu'elle augmente, elle est stable.
43:30 64 ou 65 ans c'est très exactement la date à travers laquelle les gouvernements successifs voudraient qu'on parte.
43:35 Donc la question c'est est-ce que oui ou non on peut jouir d'une retraite en bonne santé,
43:40 c'est-à-dire sans incapacité, est-ce qu'on peut ou non bénéficier de cette séquence un peu de la vie un peu particulière,
43:48 comme nos anciens ont cherché à le faire en se battant pour ça.
43:51 Olivier Besancenot, il y a eu un débat récemment sur la question de la valeur travail.
43:55 Je ne vous ai pas, je crois, entendu sur ce sujet-là.
43:58 Est-ce que vous pensez que la valeur travail est une valeur de gauche ou une valeur de droite ?
44:02 Et ce qu'elle a à voir avec le débat actuel selon vous ?
44:05 Écoutez, même dans ce registre, c'est un bon marxiste en fait, et Marx analysait la contradiction du travail,
44:09 c'est-à-dire à la fois source d'aliénation, et dans le rapport marchand de la société capitaliste,
44:14 il pensait que c'était une source d'aliénation, mais un point essentiel de s'émanciper par le travail
44:19 dans une organisation sociale qui chercherait à satisfaire les besoins sociaux pour tous et pour toutes,
44:23 et qui impliquerait, disait Marx dès l'écriture du Capital, c'est dire que comme quoi ce n'est pas tout à fait nouveau,
44:29 que le règne de la liberté commençait là où le temps de travail commençait à diminuer.
44:32 Et ça, j'y vois un grand, grand, grand élément d'actualité.
44:35 Parce que nous dire finalement qu'on travaille, on n'en finit pas de vieillir,
44:40 donc finalement c'est logique de travailler de plus en plus longtemps,
44:42 on oublie de dire une chose, c'est que l'espérance de vie, si elle augmente,
44:45 et c'est tant mieux si elle augmente de manière générale,
44:47 c'est aussi parce qu'on, historiquement, aussi, parce qu'on travaille de moins en moins,
44:51 et que les générations qui nous ont précédées se sont battues pour qu'il y ait une réduction du temps de travail.
44:56 C'est grâce aussi, pas seulement, je ne veux pas être caricatural,
44:59 c'est aussi grâce à la réduction du temps de travail que l'espérance de vie historiquement a augmenté.
45:03 - Et au progrès de la médecine aussi. - Et bien sûr, et au progrès sanitaire.
45:06 - Oui, bien sûr. - Mais je prends cet exemple-là.
45:08 - Est-ce que l'objectif du plein emploi, vous pouvez y adhérer ?
45:11 - Le droit à l'emploi pour tous et toutes, bien sûr, moi je n'y renonce absolument pas.
45:14 D'ailleurs, il y aurait bien des discussions à avoir sur ce que signifient, par exemple,
45:17 les annonces qui nous sont faites, vous savez, il y a beaucoup de gens aujourd'hui qui réfléchissent,
45:21 qui s'inquiètent de l'intelligence artificielle, du numérique,
45:24 avec ces études qui nous prononcent des espèces d'arguments d'autorité,
45:28 qu'il y a un emploi sur deux qui vont être supprimés et remplacés
45:31 par le numérique ou l'intelligence artificielle d'ici deux décennies.
45:34 Mais soit le type de conclusion de ce rapport, c'est soit on renonce à l'emploi pour tous et toutes,
45:38 soit c'est un économiste marxiste critique qui nous a quitté il n'y a pas longtemps,
45:42 qui s'appelait Michel Husson, qui a insisté sur cette question-là, qui disait
45:45 soit ça pourrait être une excellente nouvelle, en se disant, finalement, grâce aux machines,
45:48 aux ordinateurs, on pourrait travailler deux fois moins.
45:51 C'est-à-dire qu'on pourrait se partager le temps de travail entre tous et toutes,
45:54 partager les emplois entre tous et toutes.
45:56 Et dans le tous et toutes, j'insiste sur le tout, parce que, par exemple,
46:00 chez certains partisans du revenu universel, c'est un peu un angle mort.
46:03 Le droit à l'emploi pour les femmes, c'est-à-dire l'emploi aliéné,
46:08 c'est une source d'aliénation, mais là c'est un exemple concret,
46:10 le droit à l'emploi pour toutes les femmes, c'est aussi un point important en termes d'émancipation.
46:14 Et moi, j'y renonce pas. Donc je suis pour le partage du temps de travail.
46:17 – Je voulais poser une question sur les jeunes.
46:19 Jusque-là, les manifestations se sont bien passées, il n'y a pas eu de problème,
46:21 il y a eu des services d'ordre très sérieux qui ont encadré tout le monde.
46:24 Jean-Luc Mélenchon a lancé un appel aux jeunes à se mobiliser jusqu'aux lycéens.
46:28 Est-ce que vous pensez que c'est d'une certaine manière un petit peu irresponsable ?
46:32 Parce qu'on sait très bien que les jeunes sont forcément plus en risque,
46:36 parce que pour être probablement plus maximaliste,
46:38 et où est-ce que vous trouvez que c'est totalement normal ?
46:40 – De toute façon, il y aura des lycéens.
46:42 – Non mais de toute façon, spécialement…
46:44 – Avec ou sans l'avis de Jean-Luc Mélenchon, de toute façon, il y aura des lycéens, je vous le dis.
46:47 Il y aura des mobilisations dans les lycées, dans les universités, et c'est logique.
46:50 – Vous en souhaitez ?
46:51 – Oui, bien sûr, moi j'en suis solidaire.
46:53 Mais je veux dire, je ne veux pas m'autoriser, mais c'est vrai de manière générale.
46:57 De toute façon, et par bonheur, la contestation elle est tellement globale,
47:01 aujourd'hui tellement importante, qu'il n'y a pas besoin d'appel de qui que ce soit pour que ça se fasse.
47:05 En revanche, d'être solidaire, d'appuyer, et de discuter d'une tactique et d'une stratégie pour qu'on gagne,
47:09 ça oui bien sûr, mais évidemment qu'il y aura des jeunes…
47:11 – Parce que les gouvernements ont peur des jeunes en général, ont peur d'une bavure…
47:14 – Oui, mais ils ont peur des trucs qui s'agrègent, qui font une espèce de sauce
47:19 qui commence à se sentir mauvaise pour les gouvernements.
47:21 – Les jeunes leur font peur spécialement parce que c'est très bien.
47:23 Le moindre problème avec un jeune…
47:25 – Sans rentrer dans le dramatique, je pense que dans…
47:28 après pareil, je ne veux pas être dans leur tête, mais je sais qu'un gouvernement qui voit par exemple
47:31 que les lycées, les universités sont occupés, que ça commence à faire des files d'attente
47:35 devant les stations essence, puis qu'il n'y a plus de transport en commun…
47:38 – Qu'il n'y a plus de pattes dans les magasins.
47:39 – Vous savez, l'ambiance n'est plus tout à fait la même.
47:41 Donc même ceux qui parlent très fort, qui disent qu'ils sont déterminés,
47:44 il y a un moment, il y a des coups de téléphone qui leur disent
47:46 "écoutez le pouvoir économique, je vous rappelle aussi à l'ordre qu'il va falloir trouver une solution".
47:50 Même un mot qui ne serait pas sorcier, dire "écoutez, bon ben voilà, sans se renier complètement,
47:56 les conditions ne sont pas réunies pour faire passer cette mesure dans ce contexte-là".
47:59 – "S'en renier complètement", il enlève la mesure d'âge, il n'y a plus de référence.
48:03 – C'est quand même "se renier complètement".
48:04 – "S'en renier complètement".
48:05 – Ah vous croyez que j'étais un peu malin, c'est ça.
48:06 – Justement Olivier Besancenot, sur le climat, on a depuis le début des manifestations
48:11 qui sont plutôt "bon enfant", bien tenues par les services d'ordre des syndicats,
48:15 et puis pas tellement de colère.
48:16 On vous entend, à vous écouter là, vous dites "il faut passer l'étape supérieure, l'étape suivante",
48:21 vous dites "bloquer les lycées".
48:23 – Le nombre.
48:24 – Le nombre, oui, mais même aussi sur la tonalité même des manifestants,
48:27 est-ce que ça veut dire que vous attendez plus de colère dans la rue aujourd'hui ?
48:30 – Non mais la colère elle est là, ceux qui la voient pas…
48:32 – Plus visible peut-être.
48:34 – Je sais pas, mais la colère elle est là, il n'y a qu'Emmanuel Macron.
48:36 – Non mais attendez, il y a une contradiction, parce qu'il y a une colère qui est très forte,
48:38 70% des gens sont contre, et activement contre,
48:41 il y en a 68% qui disent "oui mais de toute façon, au final, ce texte passera".
48:45 Donc comment on règle, comment vous réglez ce paradoxe ?
48:49 – Excusez-moi, c'est une autre question, moi je vais bien répondre de deux,
48:52 mais c'est pas la même chose.
48:53 Sur la colère, je voulais revenir un peu là-dessus,
48:55 c'est qu'Emmanuel Macron, dans ses nombreux déplacements, dans cette séquence,
48:58 nous explique où finalement, "je sens que de l'inquiétude, pas de colère",
49:01 mais il est où pour savoir qu'il n'y a pas de colère ?
49:03 Alors c'est autre chose de donner un sens particulier à cette colère,
49:06 qui s'exprime d'ailleurs, c'est pas tant les services d'ordre qui font leur boulot,
49:08 même s'il y en a, et qui sont présents, c'est d'abord parce qu'il y a du nombre,
49:12 il y a de la joie, il y a de la festivité, enfin vraiment, il y a des gens qui ont…
49:15 – Donc il y a de la joie ?
49:16 – Oui, bien sûr, il y a de la joie.
49:18 – C'est pas la colère, la colère c'est quand vous faites tout péter…
49:21 – Mais excusez-moi, mais vous trompez, vous trompez,
49:23 la colère ça peut aussi prendre cette forme-là, voilà.
49:25 La colère c'est aussi des morts d'ordre qui sont patentes pour le gouvernement,
49:28 et je suis sûr que ça va être pisté au laser dans les jours qui viennent,
49:31 en disant "mais est-ce que ce ne serait pas un peu violent,
49:33 et est-ce que la violence symbolique, il y en aura, et ce sera légitime".
49:36 – Est-ce que c'est bien quand vous dites "la violence symbolique", vous dites "il y en aura" ?
49:39 – Non mais c'est comme ça, c'est-à-dire avec ou sans moi il y en aura.
49:42 – Vous avez dit "il y aura de la violence" et ça sera légitime,
49:44 est-ce que vous pouvez expliquer ce que ça veut dire ?
49:46 – Non, je parlais de violence symbolique, puisque le débat a lieu régulièrement,
49:48 on est venu sortir un ballon de foot, une pancarte,
49:51 oh, bon, c'est pas un sujet, il faut être un peu sérieux,
49:54 par rapport au degré d'urgence dans lequel des millions de personnes se retrouvent,
49:57 c'est pas sérieux, et le gouvernement pour l'instant il s'en sort bien.
50:00 Moi mon objectif c'est qu'il y ait du nombre, de la massivité,
50:02 parce que je sais qu'il n'y a que comme ça qu'on gagne.
50:04 Et pour répondre du coup à votre autre question, c'est-à-dire le sentiment qui existe,
50:08 moi je l'ai jamais nié depuis le départ, de résignation potentielle,
50:11 qui était un des paris du gouvernement, c'est-à-dire de jouer sur le contexte économique,
50:15 en disant "bon, comme il y a le coût de la vie, les prix, les salaires, etc.,
50:18 ça va prendre tout le monde à la gorge", je crois que c'est peut-être,
50:21 moi je ne raconte pas d'histoire, je dis que pour l'instant c'est ça
50:23 qui est en train de basculer dans notre camp.
50:25 Maintenant ça va se jouer au jour le jour, et cette bataille en effet on en a conscience.
50:29 - Alors vous dites "ça va se jouer au jour le jour", mais au début d'émission vous disiez
50:32 "ça serait quand même pas plus mal qu'on se réunisse".
50:35 Est-ce que vous imaginez une rencontre entre les syndicalistes, entre vous, entre les politiques,
50:42 qui doit et qui doit conduire ce mouvement ?
50:45 En fait, est-ce que ce sont les syndicats ?
50:47 - A conduire c'est les grévistes et les manifestants, c'est la base, pour moi ça c'est clair.
50:50 Maintenant, est-ce qu'il faudra ce type de rencontre ? Oui.
50:52 Est-ce que ça dépend de moi ? Non.
50:55 Parce que cette suggestion on l'a déjà effectuée, ça arrive localement,
50:58 par exemple j'ai participé à un meeting unitaire à Toulouse,
51:00 où était présente la gauche politique et syndicale.
51:02 Donc il y a des endroits où ça s'effectue.
51:04 Je vois pas pourquoi on le fait pas au niveau national.
51:06 C'est-à-dire que ça n'augure en rien de l'autonomie du mouvement social.
51:09 - Mais ça veut pas dire qu'LFI par exemple a essayé de concircuter un peu la CGT ?
51:13 Quand on voit les réponses de Philippe Martinez du genre "qui nous laisse gérer, c'est à nous les syndicats de le faire, pas à lui",
51:19 est-ce que ça veut pas dire qu'il y a quand même un problème dans le front commun politique-syndicat
51:23 que vous appelez de vos voeux ?
51:25 - Raison de plus pour en discuter.
51:26 Qu'est-ce que je voulais que je vous dise d'autre pour en discuter en direct plutôt que de le faire par médias ?
51:31 - Mais là c'est les syndicats qui veulent pas.
51:32 - C'est aussi écrit dans l'histoire syndicale, la déconnexion, l'indépendance du syndicat par rapport au Parti politique.
51:37 Vous dites ça, ça c'est fini aujourd'hui, il faut travailler ensemble.
51:39 - Non, non, rien à voir. Par contre j'ai pas la même lecture de la charte d'Amiens.
51:41 La charte d'Amiens, 1906, qui revendique l'autonomie du mouvement syndical par rapport au mouvement politique,
51:48 mais dans une perspective révolutionnaire.
51:50 Parce qu'à l'époque c'est le syndicalisme qui pensait qu'il était l'outil d'émancipation et de transformation révolutionnaire de la société.
51:55 Donc cette conception de l'autonomie, elle était éminemment politique à l'époque.
51:59 - Mais là vous dites à Martinez et à Berger "ouvrez-vous un peu, ça fait deux mois que..."
52:03 - Non mais moi j'ai de la légitimité, je pourrais leur dire "ouvrez-vous un peu".
52:06 Je dis simplement à part de suggérer l'idée qu'on se rencontre et que moi j'en serais volontiers parti prenant de quitte à ce qu'on se dise les vérités
52:12 parce qu'on n'est pas d'accord sur tout.
52:13 Mais une fois de plus c'est pas grave.
52:14 Mais c'est vrai pour la gauche politique.
52:15 Qu'on soit pas d'accord sur tout c'est pas la fin du monde.
52:18 - Mais est-ce que c'est pas le problème de Mélenchon qui pourrait accaparer le mouvement en fait ?
52:21 C'est de ça dont on a envie de se prémunir et la CFDT et la CGT.
52:24 - Oui mais si chacun cherche à savoir qui est à l'ERN du mouvement on va pas y arriver.
52:28 Quand il y a un mouvement de cette envergure-là, il faut comprendre qu'il y a des choses qui débordent
52:32 et c'est tant mieux d'être débordé parce que ça veut dire qu'il y a enfin quelque chose qui se passe
52:36 et que par ailleurs dans ces situations-là il faut savoir discuter des désaccords,
52:41 politiquement, quitte à même à se dire des vérités qui fâchent.
52:44 C'est pas un problème.
52:45 - Est-ce que c'est cette division syndicale voire même politique qui vous inquiète le plus pour la suite du mouvement ?
52:49 - Non, écoutez, non.
52:50 Pour l'instant je suis quand même fort de ma longue expérience.
52:54 - Ça c'est vrai, oui.
52:55 - Je voudrais quand même vous dire que c'est la première fois que j'entends à ce niveau-là une unité qui tient sur des bases comme ça.
53:00 Parce que entendre certains secteurs de la gauche politique ou de la gauche syndicale dire
53:04 "il faut tout bloquer, ça va aller plus loin, on va vous faire une grève qui va durer 10 jours, 15 jours, on va bloquer..."
53:09 Moi de mémoire j'ai jamais entendu ça.
53:10 - Vous savez que la CFDT a muté profondément ?
53:13 Ou Laurent Berger a eu...
53:15 - Je suis pas spécialiste de la CFDT.
53:17 - Vous connaissez.
53:18 - Non mais de loin.
53:19 - Vous connaissez quand même.
53:20 - Je crois qu'il y a quelque chose, visiblement, moi j'avais pas suivi ça de suffisamment près,
53:23 probablement qu'il s'est passé aussi dans le congrès de la CFDT qui a eu lieu en novembre je crois.
53:28 - Où il y a eu un mandat.
53:29 - Où il y a eu un mandat.
53:30 - Que l'augmentation du nombre d'annuités et l'aurore de l'âge légal ne soit pas,
53:34 ne soit pas qu'il n'y ait aucune position favorable de la CFDT.
53:37 Donc il accepte son mandat ?
53:39 - Absolument, comme donc, visiblement, une pression de la base qui doit correspondre à une pression qui s'exerce dans la société.
53:44 Et moi dans les cortèges de la CFDT que je vois passer dans les manifestations,
53:47 je vois des militants, des militantes qui viennent discuter d'égal à égal et c'est super chouette.
53:52 Je souhaite qu'une chose, c'est que personne ne tremble quand il faudra prendre les décisions que ça continue.
53:58 - Comme quoi par exemple ? Quelle décision vous imaginez ?
54:00 - À découvrir un moment le jour...
54:02 - Votre objectif c'est enlever la réforme ou faire partir Macron ?
54:07 - Là l'objectif c'est que la réforme on la prenne et qu'on la mette à la poubelle.
54:12 Voilà, s'il y a une crise politique qui se greffe à ça, ce ne sera pas de ma faute, ce sera de la sienne.
54:17 Il a voulu faire un exemple politique, donc il joue son va-tout politique.
54:21 Donc la crise politique elle est déjà en grande partie présente.
54:24 Et oui, en effet, après tout est ouvert, tout est ouvert.
54:27 Parce que vouloir jouer les durs comme ça jusqu'au bout, comme le fait le pouvoir en place,
54:30 il faut avoir les épaules pour le faire, il ne suffit pas.
54:33 Vous nous renvoyez à nos responsabilités, ce qui est tout à fait légitime.
54:37 Il ne suffit pas de dire "pour être", il faut montrer qu'on a des bataillons supplémentaires
54:40 et qu'on peut établir un rapport de force qui sera plus fort que celui du gouvernement.
54:44 On essaye de prendre nos responsabilités dans ce cadre-là.
54:46 Mais c'est vrai aussi pour eux, en haut.
54:48 C'est bien beau de parler, mais il faut nous prouver que vous êtes plus fort.
54:51 Si ce n'est pas le cas, ça peut mal se finir.
54:53 Et à vouloir expliquer que tout son mandat se joue là maintenant,
54:57 peut-être que son mandat sera plus court que prévu en effet.
55:00 - Merci Olivier Pesanso d'être passé par chez nous.
55:02 En ce dimanche midi, Question Politique revient la semaine prochaine à midi dimanche.

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