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Transcription
00:00 Bonjour Gauthier, on va parler avec vous des coulisses de ce jeu diplomatique mondial.
00:05 Depuis quelques jours, Européens et Américains tentent de convaincre les Chinois de ne pas se mettre du côté des Russes.
00:11 On a envie de dire que c'est de bonne guerre.
00:12 Oui, mais c'est cohérent avec ce qui vient d'être dit.
00:16 Il s'agit d'isoler la Russie.
00:18 Mais isoler un pays, ça n'est pas forcément le faire de manière automatique ou par recommandation.
00:24 C'est de comprendre les arguments.
00:26 Et ce qu'essayent de bâtir certains Européens, et ce dont l'administration américaine a été plus ou moins convaincue,
00:34 c'est de dire au fond aux Chinois, aux Indiens, aux Brésiliens,
00:38 Oui, parce qu'il ne va pas que la Chine.
00:39 Voilà, on est dans les BRICS, entre autres, à d'autres pays asiatiques, de leur dire
00:43 "Mais quel intérêt auriez-vous à soutenir la Russie alors que le commerce mondial est déjà chamboulé par cette affaire ?"
00:51 Vous voyez justement les Chinois qui sont déjà dans une passe économique difficile.
00:55 S'ils voient leurs exportations réduites à nouveau, ça n'est pas bon.
01:00 Ça n'est pas bon pour la Chine.
01:01 Donc il s'agit de convaincre les Indiens aussi.
01:05 Quand je dis les Brésiliens, vous vous souvenez de ce que Lula a dit ?
01:08 C'était invraisemblable.
01:09 Lula a dit "Zelensky est bien sympathique, c'est un comédien de talent, mais il faut qu'il retourne dans sa loge."
01:14 De la part de quelqu'un comme Lula, qui sait ce que c'est que de lutter contre l'impérialisme,
01:19 puisque sa vie a été aussi en partie de lutter contre l'impérialisme américain.
01:23 Bref, il vieillit mal.
01:25 Mais parenthèse fermée.
01:26 Mais là-dessus, il y a moyen de convaincre un certain nombre de pays justement,
01:30 du fait que le soutien à Moscou ne serait que finalement mortifère pour eux tous.
01:37 Arguments économiques, mais pas seulement.
01:39 Alors, pas seulement.
01:40 Mais c'est vrai que l'économie est frappante dans la mesure où elle permet de dire
01:45 "Au fond, nous avons aussi des accords économiques, les Etats-Unis et la Chine, mais on les purgera plus tard."
01:52 En quelque sorte, réduisons d'abord la Russie à sa simple expression,
01:56 et ensuite, on pourra presque revenir à notre antagonisme habituel.
02:01 Ça veut dire aussi qu'il y a une forme d'alliance avec...
02:04 Comme on l'a fait dans la Deuxième Guerre mondiale, l'Occident s'est allié à Staline,
02:09 sachant ce que Staline valait.
02:10 Il avait eu les purges, on savait ce qu'il valait.
02:12 Mais c'était une manière de dire "remettons à plus tard des désaccords".
02:15 Et effectivement, ça n'a pas manqué d'être le cas.
02:17 Alors, on va maintenant écouter une déclaration de Vladimir Poutine.
02:20 C'était ce matin.
02:21 Le président russe qui brandit une nouvelle fois la menace nucléaire.
02:24 C'est une habitude à chaque fois qu'une séquence militaire ou diplomatique, en tout cas, lui est défavorable.
02:29 On va l'écouter.
02:30 Comme auparavant, nous accorderons une attention accrue au renforcement de la triade nucléaire.
02:38 Cette année, les premiers lanceurs de systèmes de missiles Sarmat seront utilisés sur le champ de bataille.
02:43 Nous poursuivrons la production des systèmes hypersoniques à lancement aérien Kinzhal
02:48 et commencerons les livraisons massives de missiles hypersoniques à lancement maritime Zircon.
02:53 Gauthier, qu'est-ce qu'il faut comprendre de cette nouvelle prise de parole ?
03:01 Bon, il ne faut jamais la prendre à la légère.
03:04 D'abord parce que Vladimir Poutine est en difficulté
03:07 et qu'au fond, on ne sait pas très bien s'il est capable d'aller au pire parce qu'il est en difficulté.
03:13 Ou bien il faut le mettre en difficulté pour qu'il n'aille pas au pire,
03:16 c'est-à-dire que quand il sentira qu'il est acculé, que se passera-t-il ?
03:20 Donc cette question reste ouverte et du coup, il ne faut pas prendre à la légère ce que dit Poutine.
03:24 Maintenant, le recours au nucléaire, enfin le recours à l'idée, à mentionner le nucléaire...
03:30 C'est de la dissuasion finalement.
03:31 Alors oui, c'est une forme de dissuasion, sauf que dans la dissuasion, vous ne dites rien, justement.
03:36 Vous ne dites pas vos intentions.
03:38 Vous ne dites pas "je vais peut-être l'employer ou je ne vais pas l'employer".
03:41 Là, ce qui est important, c'est que d'une part, à chaque fois qu'il parle du nucléaire,
03:44 c'est parce qu'il y a des déconvenues et qu'on s'aperçoit des limites du matériel conventionnel terrestre.
03:50 Et donc c'est pour ça qu'il vante ces missiles, comme le Satan-2, le Sarmat,
03:54 qui est effectivement un missile très puissant, mais qui semble-t-il a des ratés,
03:58 lorsque l'on en fait le test.
04:00 Et puis il y a une deuxième chose qui est inquiétante et qu'il ne faut pas oublier,
04:03 c'est que la doctrine de l'emploi du nucléaire russe, elle a deux facettes.
04:07 La première facette, c'est de dire "nous ne tirerons jamais, nous n'appuierons jamais sur le bouton en premier".
04:12 Donc c'est une frappe de réponse, la dissuasion fonctionne.
04:14 - De la défensive.
04:15 - De la défensive.
04:16 Mais il y a un autre aspect, et qui apparaît parfois dans les textes russes, mais pas toujours,
04:21 c'est de dire au fond, il peut y avoir une frappe de désescalade.
04:23 Ça veut dire quoi, la frappe de désescalade ?
04:25 Ça veut dire "nous frappons les premiers pour que derrière, ça recule".
04:28 - Une frappe préventive.
04:29 - Oui, mais avec quoi ? Avec quel type de nucléaire ?
04:32 Est-ce que c'est un nucléaire propre ?
04:33 Enfin, propre, non, il n'y a pas de nucléaire propre.
04:35 Mais est-ce que c'est local ? Est-ce que c'est tactique ?
04:38 Là, on ne sait pas, et c'est pour ça qu'il faut le prendre au sérieux,
04:40 même si, d'une certaine manière, c'est l'aveu d'une faiblesse au niveau conventionnel, ça c'est évident.
04:45 - Et l'emploi tactique d'armes nucléaires, il en parle depuis plusieurs mois, Vladislav Veselovitch.
04:48 - Tout à fait, tout à fait.
04:49 - Merci pour votre analyse, Gauthier Semidi, dans Paris.

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